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28/04/2022 | FRANCE | N°21/02790

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 28 avril 2022, 21/02790


ARRET







[X] [O]





C/



S.A.S.U. STORES ATHENA



























































copie exécutoire

le 28 avril 2022

à

Me Guyot,

Me Chalon

CB/MR/SF



COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE



ARRET DU 28 AVRIL 2022



***************

**********************************************

N° RG 21/02790 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IDS2



JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE SOISSONS DU 06 MAI 2021 (référence dossier N° RG )



PARTIES EN CAUSE :



APPELANTE



Madame [V] [X] [O]

née le 13 Avril 1962 à [Localité 4] (portugal)

de nationalité Portugaise

[Adresse 2]

[Adresse...

ARRET

[X] [O]

C/

S.A.S.U. STORES ATHENA

copie exécutoire

le 28 avril 2022

à

Me Guyot,

Me Chalon

CB/MR/SF

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 28 AVRIL 2022

*************************************************************

N° RG 21/02790 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IDS2

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE SOISSONS DU 06 MAI 2021 (référence dossier N° RG )

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Madame [V] [X] [O]

née le 13 Avril 1962 à [Localité 4] (portugal)

de nationalité Portugaise

[Adresse 2]

[Adresse 2]

concluant par Me Aurélie GUYOT, avocat au barreau D'AMIENS

ET :

INTIMEE

S.A.S.U. STORES ATHENA agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège :

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Me Jehan BASILIEN de la SCP BASILIEN BODIN ASSOCIES, avocat au barreau D'AMIENS, postulant

concluant par Me Gérald CHALON de la SCP SCP ACG & ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS

DEBATS :

A l'audience publique du 24 février 2022, devant Madame Corinne BOULOGNE, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l'affaire a été appelée.

Madame Corinne BOULOGNE indique que l'arrêt sera prononcé le 28 avril 2022 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Malika RABHI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Corinne BOULOGNE en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Corinne BOULOGNE, présidente de chambre,

Mme Fabienne BIDEAULT, conseillère,

Mme Marie VANHAECKE-NORET, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 28 avril 2022, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Corinne BOULOGNE, Présidente de Chambre et Mme Malika RABHI, Greffière.

*

* *

DECISION :

EXPOSE DU LITIGE

Mme [X] [O] a été embauchée le 14 mars 1991 en contrat à durée déterminée par la société Stores Athena, en qualité de couturière.

Le contrat a été prolongé pour une nouvelle période de six mois le 14 septembre 1991.

Le contrat s'est ensuite poursuivi en contrat à durée indéterminée à compter du 14 mars 1992, sans contrat écrit entre les parties.

La convention collective applicable est celle des entreprises du négoce de l'ameublement.

La société emploie sept salariés.

Le 11 juillet 2018 la CPAM de [Localité 3] a reconnu le caractère professionnel de la maladie déclarée par Mme [X] [O], à savoir un syndrome du canal carpien droit du tableau 57 des maladies professionnelles.

Mme [X] [O] a été en arrêt de travail à compter du 18 novembre 2017 pour un syndrome du canal carpien bilatéral jusqu'au 29 janvier 2019.

Elle a repris le travail le 30 janvier 2019 à temps complet et a déclaré à la caisse de sécurité sociale une rechute de maladie professionnelle qui a été refusée le 2 mai 2019.

Le 25 novembre 2019, le médecin du travail a déclaré la salariée inapte à son poste de couturière selon avis d'inaptitude, et après étude de poste effectuée le 21 mars 2019.

Il a fait référence à l'étude de poste réalisée le 21 mars 2019, et a précisé que :

« Les capacités physiques restantes permettent d'exercer une activité excluant tout geste en force ou répété exercé avec la main droite. Est apte à suivre une formation en vue d'un reclassement professionnel ».

Par courrier en date du 13 décembre 2019, Mme [O] a été convoquée à un entretien préalable fixé le 26 décembre 2019.

Par courrier en date du 31 décembre 2019, la salariée a été licenciée pour inaptitude médicale définitive .

Par requête du 2 juillet 2020, Mme [O] a saisi le conseil des prud'hommes de Soissons, qui par jugement du 6 mai 2021, a :

- jugé irrecevable la demande nouvelle formée par Mme [X] [O] en cours d'instance et relative au paiement de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de reclassement,

- débouté Mme [O] de l'ensemble de ses demandes,

- condamné Mme [O] à payer à la société Stores Athena la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que chaque partie conservait la charge de ses propres dépens.

Ce jugement a été notifié le 10 mai 2021 à Mme [X] [O] qui en a relevé appel le 27 mai 2021.

La société Stores Athena a constitué avocat le 26 août 2021.

Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 8 février 2022, Mme [X] [O] prie la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondé en son appel,

- débouter la société Stores Athena de toutes ses demandes, fins, moyens et conclusions,

- infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions :

- jugé irrecevable la demande nouvelle formée par Mme [O] en cours d'instance et relative au paiement de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de reclassement,

- débouté Mme [O] de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée à payer à la

SASU Stores Athena la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- déclarer recevable sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de reclassement,

- condamner la SASU Stores Athena à lui payer les sommes suivantes, avec intérêt au taux légal à compter de la convocation en bureau de conciliation et d'orientation, soit à compter du 7 juillet 2020 :

- 196,88 euros brut à titre de rappel de salaire des 1er et 2 janvier 2020,

- 19,68 euros brut de congés payés sur rappel de salaire,

- 651,13 euros brut à titre d'indemnité complémentaire de congés payés,

- 4 265,72 euros brut à titre d'indemnité spéciale de préavis,

- 18 627,43 euros à titre de complément d'indemnité spéciale de licenciement,

- 5 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de reclassement,

- prononcer la capitalisation des intérêts à compter de ladite convocation pour ceux qui seront dus depuis plus d'une année,

- condamner la société Stores Athena en tous les dépens de première instance et d'appel et ce sous le bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 26 novembre 2021, la société Stores Athena prie la cour de :

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes dans toutes ses dispositions,

- juger irrecevable la demande nouvelle formée par Mme [X] [O] en cours d'instance et relative au paiement de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de reclassement par la société Stores Athena,

- débouter Mme [X] [O] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- condamner Mme [X] [O] à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 février 2022 et l'affaire fixée à l'audience de plaidoirie du 24 février 2022.

MOTIFS

Sur la recevabilité de la demande d'indemnisation pour non-respect de l'obligation de reclassement

Mme [X] [O] sollicite l'octroi de dommages et intérêts en réparation du préjudice né du non-respect de l'obligation de reclassement par l'employeur considérant que cette demande est additionnelle comme se rattachant par un lien suffisant aux prétentions originelles devant les premiers juges, telles que l'exige l'article 70 du code de procédure civile.

Elle expose qu'il existe un lien suffisant entre la demande salariale initiale et la demande indemnitaire formée ensuite.

La société Stores Athena soulève l'irrecevabilité de cette demande soutenant que les demandes formées devant le conseil des prud'hommes étaient de nature salariales et non indemnitaires ; qu'il n'y a pas de lien suffisant entre la demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice né du non-respect de l'obligation de reclassement et celles initiales de rappel de salaires pouvant justifier une demande additionnelle.

Sur ce

L'article L1454-1-1 du code du travail tel qu'issu de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, art. 258 dispose « qu'en cas d'échec de conciliation, le bureau de conciliation et d'orientation peut, par simple mesure d'administration judiciaire:

1° Si le litige porte sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, renvoyer les parties, avec leur accord, devant le bureau de jugement dans sa composition restreinte mentionnée à l'article L. 1423-13. La formation restreinte doit statuer dans un délai de trois mois ;

2° Renvoyer les parties, si elles le demandent ou si la nature du litige le justifie devant le bureau de jugement mentionné à l'article L. 1423-12 présidé par le juge mentionné à l'article L. 1454-2. L'article L. 1454-4 n'est pas applicable.

A défaut, l'affaire est renvoyée devant le bureau de jugement mentionné à l'article L 1423-12.

La formation saisie connaît de l'ensemble des demandes des parties, y compris les demandes additionnelles ou reconventionnelles. »

L'article 70 du code de procédure civile dispose que « les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

Toutefois, la demande en compensation est recevable même en l'absence d'un lien, sauf au juge à la disjoindre si elle risque de retarder à l'excès le jugement sur le tout. »

Mme [X] [O] avait formé la demande indemnitaire pour non-respect de l'obligation de reclassement devant le conseil des prud'hommes dans des conclusions soutenues oralement à l'audience mais pas dans sa requête initiale.

Toutefois la demande devant le conseil des prud'hommes était recevable puisqu'il s'agissait d'une demande additionnelle telle que prévue à l'article L 1454-1-1 du code du travail.

En outre la procédure devant le conseil des prud'hommes étant orale, que la salariée pouvait modifier ses demandes jusqu'à l'audience.

Le jugement est infirmé en ce qu'il a dit irrecevable la demande en dommages et intérêts de Mme [X] [O] en réparation du préjudice né du non-respect de l'obligation de reclassement par l'employeur était irrecevable comme étant nouvelle.

Sur l'origine de l'inaptitude

Mme [X] [O] affirme que l'inaptitude est d'origine professionnelle, fait valoir que l'employeur a refusé de considérer que l'inaptitude était en lien avec la maladie professionnelle prise en charge par la CPAM invoquant le refus par celle-ci de reconnaître la rechute de la maladie du canal carpien.

Elle argue que si l'avis d'inaptitude ne mentionne pas que l'inaptitude est d'origine professionnelle, il précise toutefois que les capacités restantes permettent d'exercer une activité excluant tout geste en force ou répété exercé avec la main droite ; que le siège de la maladie prise en charge est justement la main droite, ce que l'employeur ne pouvait ignorer.

Elle rapporte que le pôle social du tribunal judiciaire de Laon a reconnu un taux d'incapacité de 9% suite à la maladie professionnelle, que le médecin du travail a aussi indiqué que l'inaptitude était en partie d'origine professionnelle.

La société Stores Athena s'oppose à cette demande répliquant que l'inaptitude n'a pas été déclarée d'origine professionnelle par le médecin qui a rendu l'avis précisant que la maladie du canal carpien a été déclarée consolidée le 28 décembre 2018 si bien que le bénéfice des dispositions relatives aux risques professionnels a cessé à cette date, le médecin du travail l'autorisait même à reprendre son emploi de couturière avec la seule réserve de limiter les gestes répétés avec force avec la main droite.

Elle affirme que le métier de couturière n'est pas un métier de force, qu'elle ne travaillait pas sur des tissus lourds, que les photos produites ne sont pas exploitables et ne concerne que le pouce et pas le canal carpien.

Elle ajoute que le certificat médical postérieur établi par le médecin du travail sur l'origine partiellement professionnelle est sans incidence car l'avis d'inaptitude ne mentionnait pas le lien alors qu'à aucun moment des échanges avec le médecin du travail, ce lien avait été évoqué.

Elle ajoute que la rechute a été refusée par la Cpam et les certificats médicaux à compter de mars 2019 sont relatifs à une maladie ordinaire, qu'ils sont la conséquence d'une maladie différente de la maladie professionnelle alors qu'elle a respecté les préconisations de la médecine du travail en affectant la salariée sur un poste ne présentant pas de risque de mouvements prohibés par le médecin du travail.

Enfin la société fait valoir que si la salariée contestait l'avis d'inaptitude elle devait suivre la voie de l'article L 4224-7 du code du travail en saisissant le conseil des prud'hommes dans les 15 jours de la notification de l'avis d'inaptitude.

Sur ce

Il appartient à la cour de déterminer si l'inaptitude est d'origine professionnelle.

Les règles protectrices des victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle lors du licenciement.

C'est au jour de la notification du licenciement que s'apprécie la connaissance ou non par l'employeur de l'origine professionnelle de l'accident ou de la maladie dont le salarié est victime.

Pour qu'un salarié licencié pour inaptitude physique, puisse prétendre bénéficier du régime protecteur, tel que prévu aux articles L 1226-10 et suivants du code du travail, encore faut-il que soit établi le lien de causalité entre l'accident du travail ou la maladie professionnelle dont il a été victime et l'inaptitude physique dont il est désormais atteint.

En cas de litige, les juges du fond apprécient souverainement la réalité du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie et de la connaissance ou non par l'employeur de ce caractère, en fonction des circonstances propres à chaque espèce et des éléments de preuve qui leur sont soumis.

La circonstance que le salarié ait été au moment du licenciement déclaré consolidé de son accident du travail par la caisse primaire d'assurance maladie et pris en charge par les organismes sociaux au titre de la maladie n'est pas de nature à faire perdre au salarié le bénéfice de la législation protectrices des accidentés du travail. (Cass soc 12 octobre 2011 n°10- 24025)

Ainsi, les règles protectrices sus-visées ne s'appliquent qu'à la double condition que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins en partie pour origine l'accident ou la maladie professionnelle et que l'employeur a eu effectivement connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement étant précisé que c'est au salarié qu'il appartient d'établir cette connaissance, laquelle peut résulter des circonstances de fait.

L'activité professionnelle de couturière de la salariée consiste à coudre des tentures, couvre-lits et des stores constitués de tissus lourds et épais et non de confection vestimentaire ce qui nécessite une certaine force.

La cour observe que l'avis d'inaptitude ne précisait pas si elle était d'origine professionnelle.

Toutefois la salariée produit aux débats un certificat du docteur [C], médecin du travail daté du 23 juillet 2020 au terme duquel il indique que l'avis d'inaptitude rendu le 25 novembre 2019 à l'issue de la visite de reprise du travail résultait en partie d'une pathologie reconnue maladie professionnelle.

Le 11 juillet 2018 la maladie déclarée par Mme [X] [O] a été prise en charge par la Cpam au titre des risques professionnels. L'employeur était informé de cette prise en charge.

La cour observe que la pathologie prise en charge au titre de la maladie professionnelle a le même siège que celle interférente dont la Cpam a refusé la prise en charge.

Il apparait également que même de nouveau placée en arrêt de travail pour rechute de cette maladie professionnelle à compter du 25 mars 2019, information portée à la connaissance de l'employeur, quand bien même la sécurité sociale a refusé la prise en charge de cette rechute au titre des risques professionnels, Mme a été constamment en arrêt de travail jusqu'au constat de l'inaptitude en raison de son état de santé dont l'employeur était informé depuis le 18 novembre 2017, date de la déclaration de maladie professionnelle.

Il en résulte qu'au moment du licenciement prononcé pour inaptitude l'employeur ne pouvait ignorer que la pathologie de la main droite qui a fondé l'inaptitude avait au moins pour partie une origine professionnelle.

La maladie professionnelle prise en charge a entraîné la reconnaissance d'une IPP de 9 % est un syndrome du canal carpien de la main droite chez une droitière.

C'est donc en vain que l'employeur soutient que l'avis d'inaptitude a été rendu après consolidation de la maladie professionnelle et que la CPAM a refusé de considérer comme une rechute les arrêts de travail postérieurs au 25 mars 2019, conséquence d'une autre maladie, dès lors que le médecin de travail précise dans son certificat que l'inaptitude résultait en partie d'une pathologie reconnue maladie professionnelle.

Dès lors, la cour, par infirmation du jugement, dit que l'inaptitude de Mme [X] [O] est d'origine professionnelle.

Sur les demandes liées à l'exécution du contrat de travail

Sur la demande de solde de salaires et de congés payés afférents

Mme [X] [O] sollicite le paiement de solde de deux jours (1er et 2 janvier 2020) et des congés payés afférents exposant que la lettre de licenciement lui est parvenue le 3 janvier 2020 et qu'elle n'a perçu les salaires que jusqu'au 31 décembre 2019. Elle argue que l'employeur est tenu de lui verser le salaire correspondant à l'emploi précédemment occupé à l'issue du délai d'un mois suivant l'examen médical de reprise du travail et que le salaire est dû jusqu'à la présentation de la lettre de licenciement.

La société stores Athena s'oppose à cette demande soutenant que la date d'effectivité du licenciement est non la date de la présentation du courrier recommandé de licenciement mais celle de l'envoi de la lettre.

Sur ce

En application de l'article L1226-11 du code du travail lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dés l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.

Ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail. »

L'examen médical date du 25 novembre 2019, à compter du 25 décembre 2019, le salaire de la salariée devait être versé.

Si la date de la rupture du contrat de travail est celle de l'envoi du courrier recommandé de la lettre de licenciement, l'employeur est tenu au paiement du salaire jusqu'a à la date de la présentation de cette lettre.

Aussi, par infirmation du jugement, la cour condamne l'employeur a versé à Mme [X] [O] les deux jours de salaires manquants soit les 1er et 2 janvier 2020 outre les congés payés y afférents.

Sur la demande de solde de congés payés

Mme [X] [O] sollicite le paiement des congés payés repris sur la dernière fiche de paie soutenant qu'il subsistait 51 jours mais que seuls 44 lui ont été payés ; que l'employeur argue d'une erreur comptable qu'il n'établit pas.

La société stores Athena s'oppose à cette demande soutenant prouver l'erreur comptable qu'elle invoque.

Sur ce

La fiche de paie décembre 2019 indique que la salariée a acquis 51 jours de congés payés et que 44 lui ont été payés.

La société produit aux débats l'attestation de son comptable qui indique que le solde de congés payés renseigné sur la dernière fiche de paie de décembre 2019 indique qu'il était dû 44 jours et non 51 jours comme repris par erreur.

La cour observe que le comptable ne donne pas d'explication sur l'origine de l'erreur de comptabilisation du nombre de jours de congés dus à la salariée. Il n'est pas plus fourni d'explication sur les modalités de calcul ayant abouti à 51 jours puis à 44 jours.

Les fiches de paie pour la période antérieure ne sont pas produites ce qui ne permet pas de reprendre le détail de l'acquisition des jours de congés payés chaque mois.

A regard de ces éléments, la cour par infirmation du jugement fait droit à la demande en paiement des 7 jours de congés payés sollicités par la salariée.

Sur l'indemnité spéciale de préavis

Mme [X] [O] sollicite le paiement d'une indemnité spéciale de préavis en application de l'article L 1226-14 du code du travail.

La société stores Athena s'y oppose considérant que l'inaptitude n'est pas d'origine professionnelle.

Sur ce

En application de l'article L1226-14 du code du travail, le salarié illégitimement licencié pour cause d'inaptitude physique d'origine professionnelle a droit d'une part à une indemnité compensatrice d'un montant égal à l'indemnité de préavis prévue à l'article L.1234-5, d'autre part, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, à une indemnité spéciale de licenciement égale au double de l'indemnité prévue par l'article L.1234-9.

La cour ayant précédemment jugé que l'inaptitude était d'origine professionnelle, la salariée est légitime à prétendre au versement d'une indemnité spéciale de préavis en application de l'article L 1226-14 du code du travail.

Non spécifiquement contestée en son quantum, la cour, par infirmation du jugement, condamne la société Athena à verser à Mme [X] [O] la somme qu'elle sollicite à ce titre.

Indemnité spéciale de licenciement

Mme [X] [O] sollicite que lui soit versé une indemnité spéciale de licenciement arguant que l'inaptitude physique avait une origine professionnelle.

L'employeur s'y oppose considérant que l'inaptitude n'est pas d'origine professionnelle.

Sur ce

La cour ayant précédemment jugé que l'inaptitude était d'origine professionnelle, la salariée est légitime à prétendre au versement d'une indemnité spéciale de préavis en application de l'article L 1226-14 du code du travail.

Non spécifiquement contestée en son quantum, la cour, par infirmation du jugement, condamne la société Athena à verser à Mme [X] [O] la somme qu'elle sollicite à ce titre.

Sur la demande d'indemnisation pour non-respect de l'obligation de reclassement

Mme [X] [O] rapporte que l'employeur ne lui a pas proposé de poste adapté aux capacités restantes, les recherches ayant porté essentiellement sur des emplois aux fonctions complétement différentes.

Elle ajoute que l'employeur n'a pas recherché de poste dans les autres sociétés du groupe, qu'il aurait ou lui proposer une formation complémentaire pour lui permettre à un poste plus qualifié.

La société rétorque que la salariée ne dispose que d'une formation de couturière et qu'au jour de l'inaptitude ses services ne pouvaient lui proposer un poste pour la reclasser ni dans l'entreprise ni dans le groupe ; qu'elle ne pouvait au regard des commandes créer un nouvel emploi afin de garder la salariée au sein des effectifs.

Sur ce

L'article L. 1226-10 du code du travail dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose : « Lorsque le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité économique et social, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

La cour rappelle qu'il appartient à l'employeur, qui peut tenir compte de la position prise par le salarié déclaré inapte, de justifier qu'il n'a pu, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail, le reclasser dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, effectuée au sein de l'entreprise et des entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent entre elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie du personnel et que l'appréciation du caractère sérieux de la recherche de reclassement relève du pouvoir souverain des juges du fond.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce. »

En l'espèce, le médecin du travail a rendu un avis d'inaptitude le 25 novembre 2019 précisant « les capacités physiques restantes permettent d'exercer une activité excluant tout geste en force ou répété exercé avec la main droite.

Est apte à suivre une formation en vue d'un reclassement professionnel. »

La société stores Athena est une petite structure employant 7 personnes selon la mention indiquée sur l'attestation destinée à Pôle Emploi.

L'employeur a produit le compte rendu d'une réunion organisée par l'employeur afin de rechercher un poste pour reclasser Mme [X] [O]. Il y est indiqué que la salariée ne pouvant continuer son métier de couturière au sein de l'entreprise et ne disposant pas de compétence autre lui permettant de travailler en qualité de secrétaire ou comptable ou dans le domaine de la communication, aucune permutation d'emploi n'était possible.

D'autre part l'employeur y a conclu qu'aucun aménagement de poste n'était possible, ce qui avait déjà été constaté par le médecin du travail lors de l'étude de poste du 21 mars 2019.

L'employeur ajoute au rapport avoir recherché en vain au sein de groupe qui est constitué de deux SCI un poste adapté.

Cependant l'employeur n'étaye pas cet élément, il ne produit pas le registre du personnel travaillant dans l'entreprise permettant à la cour de vérifier l'absence de poste disponible adapté aux capacités restantes de la salariée.

Dans ces conditions, la cour par infirmation du jugement dit que l'employeur n'a pas satisfait à l'obligation de reclassement qui pesait sur lui.

La cour observe que la salariée ne tire aucune conséquence sur la légitimité du licenciement prononcé pour inaptitude

Au regard de l'ancienneté de Mme [X] [O], embauchée en 1991, de son âge au moment du la rupture du contrat de travail et au fait que bien qu'elle avait des capacités restantes qui auraient permis le reclassement, l'employeur n'a pas respecté son obligation, la cour fixe le montant de son indemnisation à la somme de 5000 euros.

Sur les intérêts

Mme [X] [O] sollicite de la cour qu'elle ordonne la capitalisation des intérêts à compter de la convocation.

Sur ce

Il y a lieu d'ordonner que les sommes auxquelles est condamnée la société porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation s'agissant de créances salariales (rappel de salaire, congés payés, indemnité compensatrice de préavis, indemnité de préavis) avec capitalisation des intérêts.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement est infirmé sur les dépens et sur la condamnation de la salariée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société stores Athena succombant est déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et en dernier ressort,

- Dit recevable la demande de Mme [X] [O] au titre du non-respect de l'obligation de reclassement

- Déboute Mme [X] [O] de sa demande au titre du non-respect de l'obligation de reclassement

Infime le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Saint Quentin le 6 mai 2021 en toutes ses dispositions

Statuant à nouveau

- Condamne la SASU Stores Athena à payer à Mme [V] [X] [O] les sommes suivantes, avec intérêt au taux légal à compter de la convocation en bureau de conciliation et d'orientation, soit à compter du 2 juillet 2020 :

- 196,88 euros brut à titre de rappel de salaire des 1er et 2 janvier 2020,

- 19,68 euros brut de congés payés sur rappel de salaire,

- 651,13 euros brut à titre de solde de congés payés

- 4 265,72 euros brut à titre d'indemnité spéciale de préavis,

- 18 627,43 euros à titre de complément d'indemnité spéciale de licenciement,

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de reclassement

- Ordonne la capitalisation des intérêts à compter de la convocation devant le bureau de conciliation pour ceux qui seront dus depuis plus d'une année

- Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires

- Condamne la société Stores Athena aux dépens de première instance et d'appel et ce sous le bénéfice de l'aide juridictionnelle.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 21/02790
Date de la décision : 28/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-28;21.02790 ?
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