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28/04/2022 | FRANCE | N°21/02299

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 28 avril 2022, 21/02299


ARRET







S.A.S. EXPLOITATIONS FORESTIERES BARILLET





C/



[R]



























































copie exécutoire

le 28 avril 2022

à

Me Duplan,

Me Dadi

CB/MR/SF



COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE



ARRET DU 28 AVRIL 2022



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************************************************************

N° RG 21/02299 - N° Portalis DBV4-V-B7F-ICVS



JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEAUVAIS DU 23 MARS 2021 (référence dossier N° RG 19/00234)



PARTIES EN CAUSE :



APPELANTE



S.A.S. EXPLOITATIONS FORESTIERES BARILLET agissant poursuites et diligences de son représenta...

ARRET

S.A.S. EXPLOITATIONS FORESTIERES BARILLET

C/

[R]

copie exécutoire

le 28 avril 2022

à

Me Duplan,

Me Dadi

CB/MR/SF

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 28 AVRIL 2022

*************************************************************

N° RG 21/02299 - N° Portalis DBV4-V-B7F-ICVS

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEAUVAIS DU 23 MARS 2021 (référence dossier N° RG 19/00234)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A.S. EXPLOITATIONS FORESTIERES BARILLET agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège :

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Jérôme LE ROY de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocat au barreau d'AMIENS substituée par Me Hélène CAMIER de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocat au barreau d'AMIENS, postulant

concluant par Me Stéphane DUPLAN, avocat au barreau D'ORLEANS

ET :

INTIME

Monsieur [K] [E]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

concluant par Me Ghislain DADI de la SELAS DADI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

DEBATS :

A l'audience publique du 24 février 2022, devant Madame Corinne BOULOGNE, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l'affaire a été appelée.

Madame Corinne BOULOGNE indique que l'arrêt sera prononcé le 28 avril 2022 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Malika RABHI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Corinne BOULOGNE en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Corinne BOULOGNE, présidente de chambre,

Mme Fabienne BIDEAULT, conseillère,

Mme Marie VANHAECKE-NORET, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 28 avril 2022, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Corinne BOULOGNE, Présidente de Chambre et Mme Malika RABHI, Greffière.

*

* *

DECISION :

Vu le jugement en date du 23 mars 2021 par lequel le conseil de prud'hommes de Beauvais, statuant dans le litige opposant M. [K] [E] à son ancien employeur, la société Exploitations Forestières Barillet exerçant sous l'enseigne commerciale Menuiseries 60, a dit le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse, a écarté le montant maximum d'indemnisation prévu à l'article L 1235-3 du code du travail en raison de son inconventionnalité conformément aux dispositions de la Charte Sociale Européenne ainsi que de la Convention 158 de l'OIT, a condamné l'employeur à verser au salarié diverses sommes à titre de d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (40 000 euros), d'indemnité de procédure (1 000 euros), a ordonné l'exécution provisoire dans la limite de 6 000 euros net, a débouté les parties des autres demandes, a ordonné à l'employeur de rembourser à Pôle Emploi le montant des indemnités chômage perçues par le salarié dans la limite de 6 mois de prestations et a condamné l'employeur aux entiers dépens ;

Vu l'appel interjeté par voie électronique le 28 avril 2021 par la société Exploitations Forestières Barillet à l'encontre de cette décision qui lui a été notifiée le 14 avril précédent ;

Vu la constitution d'avocat de M. [E], intimé, effectuée par voie électronique le 4 novembre 2021 ;

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 19 janvier 2022 par lesquelles l'employeur appelant, soutenant que les griefs reprochés au salarié sont matériellement établis, lui sont imputables et justifiaient le prononcé du licenciement, contestant toute violation des droits de la défense tel qu'allégué par le salarié, contestant avoir méconnu le principe 'à travail égal salaire égal', contestant tout manquement à l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail et à l'obligation de sécurité, sollicite la confirmation du jugement entrepris, sauf en ce qu'il a dit dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement, en ce qu'il a écarté les dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail dans leurs versions applicables à l'espèce, en ce qu'il l'a condamné au paiement de la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts, de la somme de 1 000 euros à titre d'indemnité de procédure, en ce qu'il lui a ordonné de rembourser à Pôle Emploi les prestations perçues par le salarié, demande à la cour de statuer à nouveau de ces chefs, de débouter le salarié de l'intégralité de ses demandes et, à titre subsidiaire, de limiter les rappels de salaires, sollicitant en tout état de cause la condamnation de M. [E] au paiement d'une indemnité de procédure (3 500 euros) ainsi qu'aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 novembre 2021 aux termes desquelles le salarié intimé, réfutant les moyens et l'argumentation de la partie appelante, invoquant une discrimination salariale, soutenant que ses droits de la défense ont été violés, contestant la matérialité des faits invoqués au soutien du licenciement, estimant que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité ainsi qu'à son obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail, sollicite pour sa part, à titre principal, l'infirmation de la décision déférée, demande à la cour de juger son licenciement nul et, subsidiairement dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'écarter l'application des dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail et de condamner son ancien employeur à lui payer les sommes reprises au dispositif de ses écritures devant lui être allouées à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (40 000 euros), de dommages et intérêts pour manquement à l'exécution de bonne foi du contrat de travail (1 000 euros), de rappel de salaires (12 361,32 euros) et congés payés afférents (1 236,13 euros), de dommages et intérêts pour rupture d'égalité (1 000 euros), de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat (5 000 euros), d'indemnité de procédure (3 500 euros), d'ordonner la remise des documents de fin de contrat sous astreinte, de condamner l'employeur aux entiers dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 9 février 2022 renvoyant l'affaire pour être plaidée à l'audience du 24 février 2022 ;

Vu les conclusions transmises le 19 janvier 2022 par l'appelant et le 9 novembre 2021 par l'intimé auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d'appel ;

SUR CE, LA COUR

La société Exploitations Forestières Barillet est une société du groupe Barillet spécialisée dans le commerce du bois et de ses dérivés.

Elle a racheté en 2014 la société Menuiseries 60 et compte à ce jour 8 établissements.

Elle emploie plus de 11 salariés et applique la convention collective du négoce de matériaux de construction.

M. [E], né le 4 mai 1986, a été embauché par la société Menuiseries 60 en qualité de menuisier poseur aux termes d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 3 septembre 2001.

Suite au rachat de la société Menuiseries 60 par la société Exploitations Forestières Barillet, le contrat de travail du salarié a été transféré en application de l'article L 1224-1 du code du travail.

Les parties ont régularisé un nouveau contrat de travail à durée indéterminée le 30 mars 2014 à effet au 1er janvier 2014, M. [E] occupant les fonctions de menuisier poseur, catégorie employé, niveau 1, coefficient 150 de la convention collective.

Par courrier en date du 15 novembre 2016, l'employeur a notifié au salarié un avertissement motivé par un comportement inadapté, une absence de respect des consignes et horaires de travail.

M. [E] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 26 juin 2019 par lettre du 14 juin précédent, puis licencié pour cause réelle et sérieuse par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 15 juillet 2019 motivée comme suit:

' Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 14 juin 2019, nous vous avons régulièrement convoqué le 26 juin 2019 à 16 heures 30 à la société Menuiseries 60 située [Adresse 4], à un entretien préalable à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement et auquel vous vous êtes présenté assistée de Monsieur [C] [U], salarié de l'entreprise.

En effet, nous avons à déplorer les faits suivants qui ne sont pas compatibles avec la bonne exécution de notre relation contractuelle:

- Vous ne respectez pas les consignes de travail qui vous sont données:

- Le 6 juin 2019, notre client [H] s'est plaint car, en ne respectant pas les règles élémentaires de précaution, vous avez endommagé une marquise en posant une porte. Vous avez nié votre responsabilité jusqu'à ce que le client vous présente la preuve de votre responsabilité dans ce dommage.

- Le 12 juin 2019, vous deviez intervenir sur le chantier Championnet. Des rendez-vous avaient été pris avec les résidents, un planning avait été établi et remis. Il y a avait notamment deux interventions l'après-midi. Or, contrairement aux instructions qui vous ont été données, vous avez quitté le chantier à 13h00 sans avoir réalisé les derniers rendez-vous. Le responsable de site a tenté de vous joindre entre 12h00 et 13h30 sans succès.

- Le 19 juin 2019 matin, vous avez quitté le site avec le véhicule de société pour intervenir sur le chantier JLM accompagné d'un stagiaire. Cependant et sans nous en informer, vous ne vous êtes pas rendu sur le chantier. Les autres entreprises attendaient notre arrivée pour accéder au chantier. Elles n'ont pas pu faire leur intervention du fait de votre absence.

- Le 21 juin 2019, Madame [B] s'est plainte qu'elle devait constamment être derrière vous pour que les finitions soient réalisées complètement.

- Régulièrement, vous faites preuve d'insubordination, notamment en vous opposant et en remettant en cause les directives de l'employeur verbalement ou par SMS dans des termes inappropriés, comme, à titre d'exemple, les suivants:

A l'attention du directeur de site:

*'[Y] tu devrais mieux parler à tes poseurs et ne pas rentrer trop dans le jeu à [P] on sais tous comment il est' ;

* 'Aujourd'hui on sais aussi que tu as besoin de lui car tu ne connais pas grand-chose' ;

* 'Lui est la encore 2 ans...' ;

* 'Moi personnellement je m'en fou je ne pense pas finir ma carrière chez barillet...' ;

* 'Bonjour [Y] tu peux me mettre 20 convocations si tu veux moi je connais mon boulot' ;

* 'Je sais vendre je sais posé et je sais prendre des cotes et correctement !!!' ;

* 'Mais je ne serais jamais ton esclave si ça de plaît pas fait ton travail'.

A l'attention du directeur adjoint de site :

* ' Arrête un peu de monté le bourrichon à tout le monde prend ta retraite si t'arrive pas a supporté la pression de tes chantier rcpi' ;

* ' Si [S] est pas là aujourd'hui ba c'est de ta faute à nous faire porté tes fenêtres de 150kgs à 2" ;

* ' après si tu est dans les choux faut embaucher à la menuiserie 60" ;

* ' Je te le dit en face car moi je parle pas derrière tu est vraiment un sans couilles et un vicieux'.

- Vous ne faites pas attention aux accessoires et matériel et perdez régulièrement ces derniers, dont notamment les suivants :

- Le 7 juin 2019 vous avez perdu un cylindre de porte d'entrée.

- Le 18 juin 2019, vous avez laissé un carton complet de poignées sur le chantier.

- Le 20 juin 2019, vous avez oublié la clé sur la porte d'entrée du logement d'un client, ce qui a permis à des voleurs de prendre possession dans la nuit de tout le parquet que le parqueteur devait poser.

Ceci est récurrent puisque vous avez, entre autres, laissé deux disqueuses sur les chantiers à un mois d'intervalle en fin d'année 2018.

- De plus, malgré nos remarques vous continuez d'arriver régulièrement sur votre lieu de travail entre 8h10 et 8h15 au lieu de 8h00 et avant même de commence le travail vous prenez une pause-café et ne partez pas avant 8h30 vers les chantiers, malgré de nombreux rappels à l'ordre verbaux. Nous vous avons portant déjà alerté sur la nécessité de respecter les horaires, notamment lors de la prise de poste, ce dont vous n'avez pas voulu tenir compte.

Nous vous rappelons que votre contrat de travail établi un lien de subordination, et que vous êtes tenu de respecter et d'appliquer les consignes de travail qui vous sont données par vos supérieurs hiérarchiques. Nous ne pouvons pas accepter un tel comportement et une telle attitude qui met en cause le bon fonctionnement de la société et surtout les conséquences qu'il entraîne sur l'entreprise: pertes financières et mauvais image de l'entreprise.

Lors de votre entretien, vous avez reconnu l'ensemble des faits reprochés mais vous considérez votre attitude comme normale et n'avez pas apporté d'éléments permettant d'expliquer votre comportement et modifier notre appréciation des faits.

Nous considérons ainsi que ces faits constituent une violation de vos obligations dans le cadre de l'exercice de vos fonctions rendant impossible le maintien de votre contrat de travail et causant un préjudice certain à la société. Dès lors, nous avons décidé de vous licencier pour cause réelle et sérieuse.

Votre préavis d'une durée de 2 mois débutera à la date de présentation du présent courrier. Nous entendons vous dispenser de sa réalisation, votre rémunération vous étant intégralement payée aux échéances habituelles. (...)'

Contestant la licéité et subsidiairement la légitimité de son licenciement et estimant ne pas avoir été rempli de ses droits au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail, M. [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Beauvais, qui, statuant par jugement du 23 mars 2021, dont appel, s'est prononcé comme indiqué précédemment.

Sur l'exécution du contrat de travail :

Sur la demande de rappel de salaire pour violation par l'employeur du principe ' à travail égal salaire égal'

M. [E] soutient qu'il aurait dû percevoir une rémunération identique à celles des autres menuisiers poseurs de la société. Il indique qu'il perçoit un salaire mensuel fixe de 1783,51 euros brut alors que son collègue, M. [U] perçoit la somme de 2 084,55 euros brut par mois précisant que ce dernier est menuiser poseur depuis le 17 février 2003 alors que lui même exerce depuis le 3 septembre 2001.

Il affirme que l'employeur a méconnu le principe 'à travail égal salaire égal' et sollicite sa condamnation au paiement de la somme de 10 837,44 euros brut augmentée des congés payés afférents correspondant, sur une période de 3 années, à la différence entre la somme due et la somme perçue ainsi qu'à la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

Sur ce ;

Selon le principe d'égalité de traitement, l'employeur doit assurer l'égalité de traitement des salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale.

L'égalité de traitement et l'égalité salariale supposent que les salariés soient placés dans une situation comparable au regard de leur formation, soit un ensemble de connaissances professionnelles consacrées par un diplôme ou un titre ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise.

Cependant une inégalité de traitement peut être admise si l'employeur établit qu'elle repose sur des éléments objectifs et non discriminatoires.

En application de l'article 1353 du code civil, dans sa version applicable, s'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe d'égalité de traitement de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser cette inégalité, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence, ces éléments étant contrôlés par le juge.

En l'espèce, il y a lieu de constater que l'employeur ne conteste pas la présentation d'éléments de fait par le salarié susceptibles de caractériser une inégalité de traitement et ne remet pas en cause l'authenticité des allégations de M. [E] selon lesquelles il perçoit une rémunération moindre que celle perçue par un collègue.

Le salarié présente ainsi des éléments susceptibles de caractériser une inégalité de traitement.

En réponse, l'employeur indique que MM [E] et [U], tous deux menuisiers poseurs au sein de l'entreprise ont acquis une ancienneté de 17 et 16 ans. Il affirme qu'ils ont toujours perçu une rémunération équivalente à savoir 1 783,51 euros brut pour M. [E] et 1 784,55 euros brut pour M. [U].

Il soutient cependant qu'à compter de 2018, M. [U] a évolué dans ses fonctions en ce qu'il a acquis le statut d'agent de maîtrise, est devenu responsable du SAV et spécialiste de la domotique.

Il verse aux débats des éléments aux fins d'établir le changement de fonctions de M. [U] suite à la réalisation d'un stage chez Somfy.

Ces éléments ne sont pas spécifiquement contestés par M. [E].

L'employeur établit en conséquence que cette inégalité de traitement repose sur des éléments objectifs et non discriminatoires.

Par confirmation du jugement entrepris, M. [E] sera débouté de sa demande.

Sur la demande de dommages et intérêts pour violation par l'employeur de son obligation de sécurité de résultat

M. [E] soutient que l'employeur n'a pas respecté son obligation de sécurité en ce qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour garantir la sécurité des salariés notamment sur les chantiers.

Il verse aux débats des photographies aux fins d'établir l'absence de barrières sur les échafaudages.

L'employeur conclut au débouté de la demande et, par conséquence, à la confirmation du jugement entrepris de ce chef.

Il observe que les photographies produites par le salarié, seules pièces versées aux débats, ne donnent aucune indication sur le chantier, sur sa date, précisant que rien ne démontre que ce chantier concernerait la société Exploitations Forestières Barillet et que M. [E] aurait été concerné par ce chantier.

L'employeur conteste tout manquement à l'obligation de sécurité considérant en outre que l'obligation de sécurité est une obligation de moyen et non de résultat.

Sur ce ;

L'article L 4121-1 du code du travail dispose que l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

L'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, doit en assurer l'effectivité.

En l'espèce, il ne ressort pas des pièces produites que l'employeur ait manqué à son obligation de sécurité.

Les photographies versées aux débats par le salarié ne sont ni datées ni circonstanciées. Il n'est pas fait mention du chantier concerné, les salariés photographiés ne sont pas identifiés par M. [E].

En conséquence, par confirmation du jugement entrepris, le salarié doit être débouté de sa demande.

Sur la rupture du contrat de travail

A titre principal, M. [E] demande à la cour de prononcer la nullité de son licenciement pour violation des droits de la défense.

Il soutient avoir été convoqué à un entretien préalable par courrier du 14 juin 2019 alors que la lettre de licenciement évoque des griefs relatifs aux 18, 19, 20 et 21 juin 2019, de sorte qu'il n'a pas eu la possibilité de se défendre utilement et de s'expliquer sur les griefs allégués relatifs aux faits postérieurs à la date de convocation à l'entretien préalable. Il affirme en outre ne pas avoir eu accès à son dossier personnel.

A titre subsidiaire, il conteste la matérialité des faits invoqués au soutien du congédiement et demande à la cour de juger dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé.

Sur la nullité du licenciement

L'article L 1232-2 du code du travail dispose que l'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable.

La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation.

L'article R 1232-1 du même code prévoit que la lettre de convocation à l'entretien préalable indique l'objet de l'entretien.

Il s'évince de ces textes qu'aucune disposition n'impose d'indiquer dans la lettre de convocation à l'entretien préalable le motif de la sanction envisagée.

L'énonciation de l'objet de l'entretien dans la lettre de convocation adressée au salarié par l'employeur qui veut procéder au licenciement et la tenue d'un entretien préalable au cours duquel le salarié, qui a la faculté d'être assisté, peut se défendre contre les griefs formulés par l'employeur, satisfont à l'exigence de loyauté et du respect des droits du salarié.

En outre, si l'employeur est tenu d'indiquer au salarié le ou les motifs de la décision envisagée et de recueillir ses explications, l'entretien préalable au licenciement n'a pas pour objet de procéder à une enquête. Dès lors le respect des droits de la défense n'impose pas que le salarié ait accès au dossier avant l'entretien préalable. Le principe du droit à un procès équitable ne s'applique pas au stade non juridictionnel de l'entretien préalable.

En l'espèce, le salarié a été convoqué par courrier du 14 juin 2019 à un entretien préalable au licenciement qui s'est tenu le 26 juin 2019 soit postérieurement aux faits reprochés en date des 18, 19, 20 et 21 juin 2019.

M. [E] qui a eu l'occasion de s'exprimer sue ces faits lors de l'entretien préalable, qui ne démontre pas l'existence d'un quelconque refus de l'employeur, ne peut en conséquence légitimement soutenir que ses droits de défense ont été violés.

Par confirmation du jugement entrepris, le salarié doit être débouté de sa demande de prononcé de la nullité de son licenciement.

Sur la légitimité du licenciement

Pour satisfaire à l'exigence de motivation posée par l'article L.1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement doit comporter l'énoncé de faits précis et contrôlables.

Les faits invoqués comme constitutifs d'une cause réelle et sérieuse de licenciement doivent non seulement être objectivement établis mais encore imputables au salarié, à titre personnel et à raison des fonctions qui lui sont confiées par son contrat individuel de travail.

Il résulte de l'article L.1235-1 du code du travail que la charge de la preuve de la cause réelle et sérieuse de licenciement n'incombe spécialement à aucune des parties. Toutefois, le doute devant bénéficier au salarié avec pour conséquence de priver le licenciement de cause réelle et sérieuse, l'employeur supporte, sinon la charge, du moins le risque de la preuve.

A titre liminaire, il convient de constater que le salarié a été licencié pour cause réelle et sérieuse et non pour faute grave comme évoqué par M. [E] au sein de ses écritures ( page 8).

En l'espèce, la société Exploitations Forestières Barillet verse aux débats l'attestation établie par Mme [N], cliente de l'entreprise, qui indique que lors de la pose de 2 portes et d'une fenêtre à son domicile le 6 juin 2019 par [K] [E], ce dernier a heurté la marquise et endommagé celle-ci.

Si M. [E] indique qu'il a pu endommager la marquise, il précise que cette faute ne peut lui être reprochée dans la 'mesure où il était seul sur le chantier pour accrocher la porte d'entrée'.

L'employeur justifie du fait que le poids de la porte était de 35 kilogrammes et qu'elle pouvait être installée par un ouvrier seul.

M. [E] ne verse aux débats aucun élément tendant à établir la nécessité de la présence de plusieurs salariés pour effectuer cette opération.

En conséquence, la cour juge le grief établi.

Concernant les griefs de perte de matériel en date des 7, 18 et 20 juin 2019, il y a lieu de constater que l'employeur n'établit ni l'existence de la perte d'un barillet le 7 juin 2019 ni l'oubli d'une clé sur la porte d'entrée d'un client le 20 juin 2019, M. [E] indiquant ne pas avoir été en possession du barillet et contestant toute responsabilité le 20 juin.

En revanche, la société verse l'attestation de M. [T], responsable adjoint de l'établissement Menuiseries 60 qui indique que sur le chantier de [Localité 2] il a constaté la présence d'un carton complet de quincaillerie.

L'employeur établit par la production du relevé de géolocalisation du véhicule du salarié que ce dernier a quitté un chantier le 12 juin 2019 à 13 heures alors qu'il devait encore honorer des rendez-vous avec des résidents au cours de l'après midi.

M. [Z], architecte, atteste s'être rendu sur le chantier le 12 juin 2019 vers 13h30 et n'avoir vu aucun salarié de l'entreprise en dépit des interventions programmées.

Si le salarié soutient avoir sonné aux portes de l'immeuble sans réponse et reproche aux clients leur défaillance, il ne verse aux débats aucun élément en ce sens.

En conséquence, la cour juge le grief établi.

M. [E] ne conteste pas spécifiquement ne pas s'être rendu sur le chantier JLM le 19 juin 2019 tel que prévu mais indique qu'il a déféré à une convocation de l'inspection du travail.

Force est de constater que le salarié ne justifie pas de l'existence de cette convocation et ne verse aux débats aucun élément de nature à corroborer ses allégations, étant précisé qu'il n'est pas contesté par le salarié qu'il était accompagné d'un stagiaire de l'entreprise.

La cour juge en conséquence ce manquement établi.

La société Exploitations Forestières Barillet verse aux débats des copies d'une partie des SMS cités au sein de la lettre de licenciement.

M. [E] ne conteste pas être l'auteur de ces messages mais indique qu'il ne lui a jamais été fait reproche d'insubordination au cours des 17 années de relation de travail.

La lecture de ces messages adressés au directeur de site ou à son adjoint caractérisent une insubordination.

En outre, l'employeur établit qu'un avertissement a préalablement été notifié au salarié, avertissement motivé en partie par 'un ton et une gestuelle menaçante'.

La cour juge en conséquence ce manquement établi.

Il ressort des pièces produites par l'employeur et plus spécifiquement des tableaux établis par M. [O], directeur d'établissement, que M. [E] embauchait régulièrement après 8 heures le matin.

Si le salarié conteste la matérialité de ce grief en affirmant qu'il arrivait à 8 heures le matin au dépôt pour charger le camion, il ne verse aux débats aucune pièce tendant à corroborer ses allégations et de nature à contester les pièces produites par l'employeur.

La cour juge en conséquence ce manquement établi.

Au vu de l'accumulation des manquements, de leur caractère répété, la cour juge le licenciement de M. [E] justifié par une cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris est en conséquence infirmé de ce chef.

Le salarié doit par conséquent être débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement illégitime.

Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de bonne foi du contrat de travail

M. [E] demande la condamnation de son ancien employeur au paiement de la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts au motif qu'il a mis fin à son contrat de travail de façon totalement déloyale dès lors qu'il lui reprochait des griefs totalement infondés.

Sur ce ;

En application de l'article L 1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

La bonne foi se présumant, la charge de la preuve de l'exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur incombe au salarié.

En l'espèce, il a été précédemment jugé que le licenciement était légitime.

Le salarié n'invoque pas de moyen relatif à l'exécution de mauvaise fois par l'employeur du contrat de travail.

En conséquence, par confirmation du jugement entrepris, il doit être débouté de sa demande.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de l'employeur les frais non compris dans les dépens qu'il a pu exposer.

Il convient en l'espèce de condamner le salarié, succombant dans la présente instance, à lui verser la somme de 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'ensemble de la procédure.

Le jugement entrepris qui a condamné l'employeur au paiement d'une indemnité de procédure est infirmé de ce chef.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de M. [E] les frais irrépétibles exposés par lui.

Il y a également lieu de condamner M. [E] aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Beauvais du 23 mars 2021 sauf en ce qu'il a jugé le licenciement de M. [E] dépourvu de cause réelle et sérieuse, en ce qu'il a condamné l'employeur au paiement de dommages et intérêts, au paiement d'une indemnité de procédure ainsi qu'aux dépens ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant:

Dit le licenciement de M. [K] [E] justifié par une cause réelle et sérieuse ;

Déboute M. [K] [E] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement illégitime ;

Condamne M. [K] [E] à verser à la société Exploitations Forestières Barillet la somme de 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour l'ensemble de la procédure ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne M. [K] [E] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 21/02299
Date de la décision : 28/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-28;21.02299 ?
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