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26/04/2022 | FRANCE | N°19/05483

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 26 avril 2022, 19/05483


ARRET

N° 172





S.A. LEROY MERLIN FRANCE





C/



CPAM DE NANTES







RD





COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 26 AVRIL 2022



*************************************************************



N° RG 19/05483 - N° Portalis DBV4-V-B7D-HNFU



JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE - POLE SOCIAL - DE LILLE EN DATE DU 31 mai 2019



ARRET de la COUR d'APPEL d'AMIENS EN DATE DU 05 MAR

S 2021 : réouverture des débats



PARTIES EN CAUSE :





APPELANTE





S.A. LEROY MERLIN FRANCE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

Rue Chanzy

59260 LEZENNES





Représe...

ARRET

N° 172

S.A. LEROY MERLIN FRANCE

C/

CPAM DE NANTES

RD

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 26 AVRIL 2022

*************************************************************

N° RG 19/05483 - N° Portalis DBV4-V-B7D-HNFU

JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE - POLE SOCIAL - DE LILLE EN DATE DU 31 mai 2019

ARRET de la COUR d'APPEL d'AMIENS EN DATE DU 05 MARS 2021 : réouverture des débats

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A. LEROY MERLIN FRANCE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

Rue Chanzy

59260 LEZENNES

Représentée et plaidant Me Emilie WILBERT, avocat au barreau de PARIS, substituant Me Bruno LASSERI de la SELEURL LL Avocats, avocat au barreau de PARIS

ET :

INTIME

CPAM DE NANTES agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

9 rue Gaëtan Rondeau

44958 NANTES CEDEX 9

Représentée et plaidant par Anne-Sophie BRUDER, dûment mandatée

DEBATS :

A l'audience publique du 14 Décembre 2021 devant Monsieur Renaud DELOFFRE, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 15 mars 2022.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

M. [W] [R]

Le délibéré de la décision initialement prévu au 15 mars 2022 a été prorogé au 26 avril 2022.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Monsieur [V] [X] en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Mme Elisabeth WABLE, Président,

Mme Graziella HAUDUIN, Président,

et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 26 Avril 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Elisabeth WABLE, Président a signé la minute avec Mme Audrey VANHUSE, Greffier.

*

* *

DECISION

Par décision du 29 juin 2017, la caisse primaire d'assurance maladie de Loire Atlantique a reconnu à Monsieur [J] [O] à la suite de son accident du travail un taux d'incapacité permanente partielle de 16 % à la date de consolidation de son état de santé le 5 janvier 2017.

Par requête reçue au tribunal du contentieux de l'incapacité de Lille le 29 mai 2017, la société LEROY MERLIN, employeur de l'assuré, a contesté cette décision.

Par courrier reçu au tribunal du contentieux de l'incapacité le 19 juin 2017, la CPAM de Loire Atlantique a fait parvenir le rapport d'évaluation du médecin conseil sous pli fermé à destination du médecin consultant et du médecin mandaté par l'employeur.

Par jugement du 29 mars 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lille a déclaré la prise en charge de l'accident du travail par la CPAM de Loire Atlantique opposable à la société LEROY MERLIN, employeur de l'assuré.

Le dossier de la procédure devant le Tribunal du contentieux de l'incapacité a été transmis au Pôle Social du Tribunal de Grande Instance de Lille.

A l'audience du 30 avril 2019, la société LEROY MERLIN, représentée par son avocat et en présence du Docteur [K], médecin mandaté par celle-ci, maintient sa demande.

A titre principal, elle demande que la décision de la caisse lui soit déclarée inopposable en l'absence des pièces de la CPAM.

A titre subsidiaire, elle sollicite que le taux médical de Monsieur [J] [O] soit évalué à 5 % et que le coefficient professionnel soit minoré au regard de l'âge auquel l'intéressé a été licencié pour inaptitude.

Elle expose qu'il est décrit deux événements ayant conduit aux lésions, que les séquelles fonctionnelles doivent être relativisées compte tenu de l'absence de traitement médicamenteux révélant une symptomatologie douloureuse et de l'existence d'une mobilité quasiment normale en passif.

La caisse primaire d'assurance maladie de Loire Atlantique, bien que régulièrement convoquée, n'a pas comparu.

Le Tribunal, insuffisamment informé, sur la base des dispositions de l'article R 143-13 du Code de la Sécurité Sociale, avant dire droit, tous droits et moyens étant réservés, a décide de demander une consultation au Docteur [T] avec pour mission d'examiner les pièces du dossier et de donner son avis sur la pertinence du taux retenu par la Caisse à la date de consolidation.

Il est procédé sur le champ à cette mesure d'investigation et le médecin expose son avis dans les termes ci-après :

'Lors d'un effort important, Monsieur [J] [O] a présenté une douleur aiguë de l'épaule droite avec une impotence fonctionnelle. Cette symptomatologie a été rapportée à une atteinte du muscle sus scapulaire justifiant un traitement chirurgical.

Du point de vue séquellaire, outre des algies, il existe une douleur modérée pour l'ensemble des mouvements de 1'épaule.

Un taux d'incapacité de 8% s 'avère justifié.'

Par jugement du 31 mai 2019 le Tribunal a décidé ce qui suit :

Statuant par décision réputée contradictoire et en premier ressort,

Vu les articles 1.142-2, I, 434-1, L 434-2 et R 434-32 du code de la sécurité sociale,

DÉCLARE le recours recevable,

DIT n'y avoir lieu à déclarer la décision de la CPAM de Loire Atlantique inopposable à la Société I.EROY MERLIN, employeur de Monsieur [J] [O],

FIXE à 12 % le taux d'incapacité permanente de Monsieur [J] [O] salarié de la société LEROY MERLIN, à la date de consolidation le 5 janvier 2017,

LAISSE les dépens à la charge de la Caisse primaire d'assurance maladie de Loire Atlantique,

DIT qu'en application de l'article R. 142-10-7 du code de la sécurité sociale le jugement sera notifié à chacune des parties et dans les formes et délais de l'article R.143-14 du môme code,

RAPPELLE que cette décision est susceptible d'appel dans les conditions fixées par les articles 528 et suivants du code de procédure civile et des décrets du 4 septembre 2018 et 29 octobre 2018,

Au soutien de cette décision, le Tribunal a retenu ce qui suit :

Sur l'inopposabilité:

L'article R.143-8 du code de la sécurité sociale, texte en vigueur lors du recours et applicable à l'espèce; impose à la caisse, au début de l'instance, de transmettre les documents médicaux au secrétariat du tribunal ainsi qu'au requérant ou, le cas échéant, au médecin désigné

par celui-ci. .

En outre, les articles L.I43-10, 8.143-32 et suivants du même code régissent la communication du rapport d'évaluation des séquelles par le médecin conseil lorsque la juridiction a désigné un médecin expert ou un médecin consultant.

Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que le rapport d'évaluation d'incapacité permanente est détenu par le service du contrôle médical ainsi que les autres pièces médicales présentées par le salarié victime.

Ces dispositions ont pour objet de permettre l'instauration d'un débat contradictoire entre les parties.

En l'espèce, la caisse primaire d'assurance maladie a transmis les éléments du dossier de Monsieur [J] [O] au secrétariat du tribunal par courrier en date du 19 juin 2017 sous pli fermé. Ces éléments ont été transmis par courrier au médecin mandaté par l'employeur et ce dernier en a été informé par courrier du 8 février 2019.

Le médecin mandaté parla société LEROY MERLIN a été en mesure de rendre un avis lors de l'audience.

Aussi, le principe de la contradiction a été respecté par les parties et il n'y a lieu à déclarer la décision de la caisse inopposable à l'employeur.

Sur le fond:

En application de l'article L434-2 du code de la sécurité sociale, le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle compte tenu du barème indicatif d'invalidité.

Dans la mesure où le rapport du médecin consultant apparaît clair, précis, complet et dépourvu d'ambiguïté, il convient donc d'entériner cet avis.

Au regard de l'âge du salarié lors de son licenciement pour inaptitude, le coefficient professionnel sera minoré à 4 %.

Dans ces conditions, le taux d'incapacité permanente partielle de Monsieur [J] [O] sera fixé à 12%.

Sur les dépens:

En raison de la gratuité de la procédure au jour de l'introduction de la présente instance, qui faisait reposer les dépenses de contentieux sur les organismes sociaux, il y a lieu de laisser les dépens de l'instance a la CPAM de Loire Atlantique.

Notifié à la société LEROY MERLIN le 12 juin 2019, ce jugement a fait l'objet d'un appel de cette dernière par courrier expédié à une date indéterminée et reçu le 10 juillet 2019.

Le magistrat chargé de l'instruction de l'affaire a, par ordonnance du 4 février 2020, confié une mesure de consultation sur pièces au Docteur [I] dont le rapport en date du 7 avril 2020 s'établit comme suit :

RAPPORT A LA SUITE DE LA DESIGNATION D'UN MEDECIN CONSULTANT

EN MATIERE DE CONTENTIEUX TECHNIQUE MEDICAL

MEDECIN CONSULTANT : Dr [N] [I]

N° de dossier : 19/05483

Nom, prénom de la personne concernée : [O] [J]

Date de naissance ou âge : 57 ans

Activité à la date impartie : cariste manutentionnaire nacelles

Décision de la CPAM: IPP 16%

Décision du TGI : 12%

Appel formé par : la CPAM

AVIS DU MÉDECIN CONSULTANT

désigné dans le cadre des dispositions

visées aux articles R. 142-16 et suivants du Code de la sécurité sociale

AT du 14.08.2015 : sensation de "brulure " à l'épaule droite lors d'un effort.

Certificat médical initial: non transmis

Enumération exhaustive des documents iconographiques ou certificats médicaux:

- 14.08.2015 - déclaration d'accident du travail : "Mr [O] aidait un collègue, [B]

Rius à porter une porte d'entrée. Il a senti une brulure dans l'épaule droite...Mr [O]

s'est fait mal à l'épaule droite lors d'une chute dans l'escalier (chez lui) une semaine auparavant (cf arrêt maladie) ".

05.01.2017 - avis d'aptitude par le médecin du travail : "serait apte à un poste sans manutention de charges lourdes ni travail en force des épaules, serait apte à un poste de cariste moins de 3 à 4 h par jour ou un poste sur écran. "

Etat antérieur : néant

Consolidation le 05.01.2017Taux d'IPP : 16% (dont 5% de taux

professionnel)

Séquelles décrites par le Médecin conseil : rapport non transmis

TGI du 31.05.2019 Taux d'IPP : 12% (dont 4% comme taux professionnel)

Conclusions du médecin expert : " Lors d'un effort important, Monsieur [J] [O] a présenté une douleur aiguë de l'épaule droite avec une impotence fonctionnelle. Cette symptomatologie a été rapportée à une atteinte du muscle sus scapulaire justifiant un traitement chirurgical. Du point de vue séquellaire, outre des algies, il existe une douleur modérée pour l'ensemble des mouvements de l'épaule. Un taux d'incapacité de 8% s'avère justifié. "

DISCUSSION :

Monsieur [O] [J] a été victime d'un accident de travail le 14.08.2015 responsable d'une douleur de l'épaule droite avec impotence fonctionnelle sur un traumatisme récent (une semaine) ayant nécessité un arrêt maladie. Une atteinte du sus scapulaire a été mise en évidence et un traitement chirurgical a été réalisé. A la date de consolidation du 05.01.2017 il est noté une douleur modérée pour l'ensemble des mouvements de l'épaule. Un taux médical d'IPP de 11% est retenu par le médecin conseil, taux ramené à 8% par le TGI après avis du médecin expert. L'analyse des différents documents transmis permet de retenir à la date de consolidation du 05.01.2017 de l'accident du travail du 14.08.2015 des séquelles de type douleur persistante pour l'ensemble des mouvements de l'épaule droite sur un état antérieur.

Pour telles séquelles, dans le respect des critères du guide barème, le taux d'IPP médical ne peut être supérieur à 8%.

CONCLUSION :

À la date du 05.01.2017, le taux d'incapacité permanente partielle était de 8 %.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 8 décembre 2020 à laquelle a seule comparu par avocat la société LEROY MERLIN FRANCE.

Par conclusions visées par le greffe le 8 décembre 2020 et soutenues oralement par avocat, la société LEROY MERLIN FRANCE demande à la Cour de :

Infirmer le jugement déféré.

Constater qu'elle fait siennes les conclusions de son médecin-conseil fixant à 7 % le taux d'IPP.

Constater que la caisse ne permet pas à la Cour de connaître la part exacte du taux socioprofessionnel en rapport avec l'accident du 14 août 2015, qu'il ne peut être fait application d'un coefficient majorant le taux d'IPP compte tenu de l'âge de l'assuré au moment du licenciement, qu'il n'existe aucun élément permettant de fixer un taux socio-professionnel à hauteur de 5 %, que l'incidence professionnelle est déjà comprise dans le taux d'IPP défini par l'article L.434-2 du Code de la sécurité sociale, que la caisse primaire ne rapporte pas à son égard la preuve du bien fondé de sa décision d'attribuer un taux d'IPP de 16 % dont 5 % au titre d'un taux socio-professionnel à la suite de son accident déclaré.

Déclarer inopposable à l'égard de la société LEROY MERLIN FRANCE le taux socio-professionnel de 5 % fixé par la caisse.

Ramener à 7 % le taux d'IPP tout confondu en indemnisation des séquelles constatées à la suite du sinistre déclaré par Monsieur [O].

Elle fait valoir que le rapport d'évaluation des séquelles ne fait état d'aucune répercussion professionnelle, que l'avis du médecin du travail n'a pas été recueilli, qu'il n'est justifié par la caisse d'aucune perte de revenus du salarié, que les restrictions médicales de Monsieur [O] ne concernent ni les déplacements ni les postes avec station debout ou assise prolongée, qu'eu égard à l'âge du salarié au moment de son licenciement le coefficient professionnel est excessif et devra être minoré, que si la Cour ne lui déclare pas inopposable ce taux elle demande à la Cour d'ordonner une mesure d'expertise sur pièces.

Par arrêt du 5 mars 2021, la Cour a constaté que la caisse n'avait pas été régulièrement convoquée, aucun accusé de réception par elle de la convocation ne figurant au dossier, qu'il ne lui était donc pas possible de statuer et elle a en conséquence décidé ce qui suit :

Ordonne la réouverture des débats à l'audience du 14 décembre 2021 à 13h30. .

Dit que la notification du présent arrêt vaudra convocation des parties à l'audience de réouverture des débats.

Réserve les dépens.

A l'audience du 14 décembre 2021, la société LEROY MERLIN a soutenu par avocat les demandes et moyens résultant de son courrier à la Cour du 13 décembre 2021 reçu par la Cour le 14 décembre 2021 et par lequel elle lui demande de confirmer le taux médical de 8% conformément au jugement et à l'avis du Docteur [I] et de ramener le taux socio-professionnel de 5% à 1% s'agissant d'un accessoire du taux médical qui a été diminué de 11 à 8 %.

Elle fait valoir que l'assuré était âgé de 57 ans au moment de la date de la consolidation de son état de santé, qu'il était proche de la retraite et que c'est pour cette raison que le Tribunal avait diminué le taux socioprofessionnel de 5 à 4%.

La caisse primaire d'assurance maladie de Loire-Atlantique a soutenu par sa représentante les demandes et moyens résultant de son courrier du 15 juillet 2020 reçu par la Cour le 3 août 2020 et aux termes duquel elle sollicite la fixation du taux médical litigieux à 8% et la fixation du taux socioprofessionnel litigieux à 5%, compte tenu du licenciement du salarié pour inaptitude et de son inscription à Pôle emploi.

MOTIFS DE L'ARRET.

SUR LES DISPOSITIONS DU JUGEMENT DEFERE DISANT LE RECOURS RECEVABLE ET DISANT N'Y AVOIR LIEU DE DECLARER LA DECISION DE FIXATION DU TAUX LITIGIEUSE INOPPOSABLE A LA SOCIETE LEROY MERLIN

Attendu en premier lieu que si en matière de procédure orale, le juge reste saisi des demandes et des moyens invoqués dans des écritures régulièrement déposées et doit y statuer lorsqu'il n'y est pas expressément renoncé ( en ce qui concerne les moyens Soc., 18 décembre 1991, pourvoi n° 90-60.535, 90-60.534, 91-60.002, Bulletin 1991 V N° 599 ,Soc. 30 mai 2000, Bull. V, n°210, en ce qui concerne les demandes Soc.13 janvier 2009 Bull. 2009, V, n° 6) et si en l'espèce la société LEROY MERLIN avait par ses écritures visées par le greffe le 8 décembre 2020 sollicité l'inopposabilité à son égard du taux socioprofessionnel de 5 % fixé par la caisse, il résulte clairement desdites écritures que cette société n'a pas entendu maintenir la demande d'inopposabilité de ce taux qu'elle avait présenté en première instance mais qu'elle n'entend contester le taux que sur le fond puisqu'elle sollicite, dans les conclusions en question, la fixation à 7 % du taux global d'incapacité permanente de la victime ce dont il résulte que la référence qui y est faite à l'inopposabilité du taux socio-professionnel ne procède que d'un abus de langage dont il faut comprendre que le taux socioprofessionnel ne doit pas dépasser 5 %.

Attendu qu'il convient dans ces conditions de constater que si la société LEROY MERLIN n'a pas renoncé à sa demande d'infirmation du jugement déféré résultant de ses précédentes écritures, il n'est soutenu par elle aucun moyen de contestation des dispositions du jugement déféré la déboutant de sa demande d'inopposabilité de la décision litigieuse ce dont il résulte qu'il convient de confirmer le jugement déféré de ce chef.

Que ce chef n'étant pas contesté, il convient également de confirmer le jugement en ses dispositions déclarant le recours recevable .

SUR LES PRETENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES AU TITRE DU TAUX SOCIOPROFESSIONNEL DEVANT ETRE RECONNU A LA VICTIME.

Attendu que la fixation du taux médical de la victime à 8% ne fait pas partie des termes du litige puisqu'elle est sollicitée par les deux parties et est au surplus conforme aux conclusions des deux consultants désignés respectivement par le Tribunal et par la Cour.

Qu'il convient en conséquence de fixer le taux médical litigieux à 8%.

Considérant qu'aux termes de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, 'le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle compte tenu du barème indicatif d'invalidité' ;

Considérant qu'il résulte de ce texte qu'il convient d'indemniser au titre de ses dispositions toute modification préjudiciable dans la situation professionnelle de la victime au regard notamment de ses aptitudes et de sa qualification professionnelle (en ce sens 2e Civ., 24 juin 2021, pourvoi n° 20-10.714) et que la répercussion des séquelles médicales sur la carrière professionnelle de la victime doit donner lieu à une majoration du taux d'incapacité résultant de ces dernières (2e Civ., 13 février 2014, pourvoi n° 13-12.373).

Que cette répercussion peut être constituée par la plus grande difficulté pour le salarié à exercer sa profession (Cass. soc., 15 juin 1983, n° 83-12.268 retenant qu'une incapacité permanente partielle peut être reconnue dès lors que la profession manuelle de la victime lui rend sensible la minime mais objective séquelle dont elle reste atteinte à la suite de l'accident ; également Cass. soc., 28 avr. 1986, pourvoi n 84-16.859 Bull. civ. 1986, V, n° 185 qui approuve les juges du fond d'avoir accordé un coefficient socio-professionnel à un salarié amené à effectuer de fréquents efforts subissant une gène professionnelle liée à un angor, même sans perte de salaire), par le fait d'avoir été licencié et de n'avoir retrouvé que des emplois d'une qualification inférieure (Cass. soc., 21 juin 1990, n° 88-13.605), d'avoir subi à la suite de l'interdiction de la conduite des poids-lourds consécutive à l'accident de la perte de la rémunération complémentaire afférente à son activité secondaire de chauffeur ( Soc., 17 mai 1982, pourvoi n° 80-16.358, Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre sociale n° 315), de subir des répercussions sur une activité professionnelle secondaire même si l'accident est survenu dans l'activité principale ( Soc., 26 mars 1984, pourvoi n° 82-16.503, Bulletin 1984 V N° 121 ), d'avoir été classé à la suite de l'accident travailleur handicapé de catégorie B, subi une importante perte de salaire et avoir été contraint de suivre un stage de réorientation professionnelle ( 2e Civ., 13 février 2014, pourvoi n° 13-12.373).

Attendu qu'en l'espèce il résulte du courrier du 1er mars 2017de la société LEROY MERLIN au salarié que ce dernier a été déclaré inapte à son poste d'employé logistique par le médecin du travail le 5 janvier 2017 de manière définitive, qu'il serait apte à un poste sans manutention de charges lourdes ni travail en force des épaules et serait apte à un poste de cariste moins de 3 à 4 heures par jour ou un poste sur écran, que le médecin du travail lui a confirmé qu'il ne pouvait réaliser des tâches de manutention lourde comme le stockage et déstockage de produits et le chargement de véhicules et elle en conclut qu'en l'absence de reclassement elle est contrainte de le licencier pour inaptitude professionnelle.

Que la fiche d'inaptitude du 5 janvier 2017, conforme aux indications de l'employeur sauf en ce qui concerne le poste occupé par le salarié qui y est indiqué comme étant un poste de cariste manutentionnaire nacelles, est également produite aux débats par la caisse ainsi qu'un justificatif d'inscription du salarié à Pôle emploi.

Attendu qu'il résulte de ces éléments que Monsieur [O] a subi du fait de l'accident du travail une modification préjudiciable dans sa situation professionnelle puisque ce dernier lui a fait perdre l'emploi qu'il occupait chez la société LEROY MERLIN et qu'il l'a mis dans l'incapacité physique d'effectuer des travaux nécessitant le travail en force des épaules et la manutention de charges lourdes et notamment des travaux de stockage et déstockage de produits et de chargement de véhicules ainsi que son métier de cariste plus de 3 ou 4 heures par jour.

Que cette modification préjudiciable dans la situation professionnelle de l'intéressé limitant sensiblement les activités auxquelles un travailleur manuel peut se livrer et donc ses perspectives de retrouver un emploi, déjà limitées compte tenu de son âge, justifie qu'il lui soit reconnu en plus de son taux d'incapacité médicale de 8 % un taux socioprofessionnel de 5 %.

Qu'il convient en conséquence, réformant le jugement déféré de ce chef, de fixer dans les rapports entre la caisse et l'employeur le taux d'incapacité de Monsieur [O] à 13 % en ce compris un taux socioprofessionnel de 5 %.

Attendu que l'article R144-10 du code de la sécurité sociale disposant que la procédure est gratuite et sans frais en matière de sécurité sociale a été abrogé par l'article 11 du décret n°2018-928 du 29 octobre 2018 à partir du 1er janvier 2019 ;

Qu'il s'ensuit que cet article R144-10 reste applicable aux procédures en matière de sécurité sociale en cours jusqu'à la date du 31 décembre 2018 et qu'à partir du 1er janvier 2019 s'y appliquent les dispositions des articles 695 à 698 du code de procédure civile relatives à la charge des dépens ;

Attendu que la présente procédure a été engagée par requête reçue par le greffe du Tribunal du contentieux de l'incapacité le 29 mai 2017.

Attendu que les parties succombant toutes deux en leurs prétentions, il convient de réformer le jugement en ses dispositions condamnant la caisse primaire aux dépens et de dire que chacune des parties conservera la charge des dépens de première instance qu'elle a exposés postérieurement au 31 décembre 2018 et de ses dépens d'appel.

Attendu que l'article L.142-11 du Code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable résultant de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 et entré en vigueur le 1er janvier 2019 prévoit que les frais résultant des consultations et expertises ordonnées par les juridictions compétentes en application des articles L. 141-1 et L.141-2 ainsi que dans le cadre des contentieux mentionnées au 5° et 6 ° de l'article L.142-2 sont pris en charge par l'organisme mentionné à l'article L.221-1 à savoir la caisse nationale de l'assurance maladie.

Qu'il s'ensuit que les frais des consultations et expertises confiée au médecins-experts successifs par le Pôle Social puis par la Cour n'entrent pas dans les dépens mais doivent être pris en charge par la caisse nationale de l'assurance maladie.

PAR CES MOTIFS.

La Cour, statuant par arrêt contradictoire rendu en audience publique par sa mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré en ses dispositions déclarant le recours de la société LEROY MERLIN recevable et disant n'y avoir lieu de déclarer la décision litigieuse inopposable à la société LEROY MERLIN, employeur de Monsieur [O].

Le réforme pour le surplus de ses dispositions.

Et statuant à nouveau du chef des prétentions ayant donné lieu aux dispositions infirmées et ajoutant au jugement,

Fixe à 13% en ce compris un taux socio-professionnel de 5% le taux d'incapacité permanente partielle litigieux.

Dit que chacune des parties conservera la charge des dépens qu'elle a exposé postérieurement au 31 décembre 2018 en ce compris ceux d'appel.

Dit que les frais des consultations et expertises confiée au médecins-experts successifs par le Pôle Social puis par la Cour n'entrent pas dans les dépens mais doivent être pris en charge par la caisse nationale de l'assurance maladie.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 19/05483
Date de la décision : 26/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-26;19.05483 ?
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