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25/04/2022 | FRANCE | N°20/00823

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 25 avril 2022, 20/00823


ARRET

N° 162





CPAM DE L'ARTOIS





C/



[D]







EW





COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 25 AVRIL 2022



*************************************************************



N° RG 20/00823 - N° Portalis DBV4-V-B7E-HUXG



JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'ARRAS (Pôle Social) EN DATE DU 09 décembre 2019





PARTIES EN CAUSE :





APPELANT





La CPAM DE L'ARTOIS, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

11 boulevard du Président Allende

CS 90014

62014 ARRAS CEDEX







Représentée et plaidant par Mme Stéphanie PELMARD dûment m...

ARRET

N° 162

CPAM DE L'ARTOIS

C/

[D]

EW

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 25 AVRIL 2022

*************************************************************

N° RG 20/00823 - N° Portalis DBV4-V-B7E-HUXG

JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D'ARRAS (Pôle Social) EN DATE DU 09 décembre 2019

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

La CPAM DE L'ARTOIS, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

11 boulevard du Président Allende

CS 90014

62014 ARRAS CEDEX

Représentée et plaidant par Mme Stéphanie PELMARD dûment mandatée

ET :

INTIMEE

Madame [Y] [D]

185 rue Cyprien Quinet

62220 CARVIN

Représentée et plaidant par Me Sonia HOUZE, avocat au barreau d'AMIENS

DEBATS :

A l'audience publique du 17 Janvier 2022 devant Mme Elisabeth WABLE, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 04 Avril 2022.

Le délibéré de la décision initialement prévu au 04 Avril 2022 a été prorogé au 25 Avril 2022.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme [G] [S]

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme [H] [O] en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Mme Elisabeth WABLE, Président,

Mme Graziella HAUDUIN, Président,

et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 25 Avril 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Elisabeth WABLE, Président a signé la minute avec Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.

*

* *

DECISION

Vu le jugement rendu le 9 décembre 2019, par lequel le pôle social du tribunal de grande instance d'Arras, statuant dans le litige opposant la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois (la caisse) à Mme [Y] [D], a :

- dit que les lésions de Mme [Y] [D] constatées médicalement le 3 octobre 2014, à savoir les vertiges, sont en lien avec l'accident du travail survenu le 14 juin 2014,

- dit que l'état de Mme [Y] [D] n'est pas consolidé à la date du rapport, le 3 décembre 2018,

- débouté la caisse de sa demande d'expertise,

- condamné la caisse aux dépens.

Vu la notification du jugement le 20 janvier 2020 à la CPAM de l'Artois et l'appel relevé par celle-ci le 20 février 2020,

Vu les conclusions visées le 17 mai 2021, soutenues oralement à l'audience du 17 janvier 2022 et par lesquelles la caisse demande à la cour de :

- la déclarer bien fondée en son appel et la recevoir dans ses fins, moyens et conclusions,

- infirmer le jugement,

- débouter Mme [Y] [D] de ses fins, moyens et conclusions,

- constater la nécessité d'organiser une nouvelle expertise.

Vu les conclusions visées et soutenues oralement à l'audience du 17 janvier 2022, par lesquelles Mme [Y] [D] demande à la cour de confirmer l'intégralité du jugement et de condamner la caisse à lui payer la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties s'agissant de la présentation plus complète de leurs demandes et des moyens qui les fondent. 

SUR CE LA COUR

Le 23 juin 2014, la société Adhrena a transmis à la CPAM de l'Artois une déclaration d'accident du travail pour des faits survenus le 14 juin 2014 à 18h00, concernant Mme [Y] [D], salariée en qualité d'animatrice commerciale, rédigée en ces termes : « en voulant replacer des parfums sur l'étagère la + haute, celle-ci + les produits sont tombés sur la tête de la victime ».

Le siège lésionnel précisé dans la déclaration est « traumatisme crânien et rachis-cervical, maux de tête+perte d'audition et odorat + mal ds tte la colonne vertébrale ».

A cette déclaration était joint un certificat médical initial établi par le service des urgences du CHRU de Lille le 14 juin 2014 mentionnant des contusions frontales et dorsales ainsi qu'un traumatisme crânien sans perte de connaissance.

Le 16 juin 2014, le médecin traitant de l'assurée a également établi un certificat médical initial au titre de cet accident, mentionnant « traumatisme crânien, céphalées et anosmie » et prescrivant un arrêt de travail jusqu'au 21 juin 2014.

La CPAM de l'Artois a pris en charge cet accident au titre de la législation professionnelle et l'état de Mme [D] a été déclaré consolidé par le médecin conseil à la date du 14 octobre 2014.

Le 6 octobre 2014, Mme [D] a transmis à la caisse primaire un certificat médical de prolongation du 3 octobre 2014 faisant état d'une nouvelle lésion, à savoir des vertiges.

Par deux décisions du 13 octobre 2014 la caisse, suivant en cela les avis de son médecin conseil, a informé l'assurée de son refus de prendre en charge la lésion nouvelle au titre de l'accident du travail et de la fixation de la date de consolidation des lésions initiales, au 14 octobre 2014.

Contestant ces décisions, l'assurée a sollicité la mise en 'uvre d'une expertise médicale technique au terme de laquelle l'expert a conclu qu'à la date du 14 octobre 2014, l'état de santé de Mme [D] était consolidé et que les vertiges décrits dans le certificat médical du 3octobre 2014 n'étaient pas imputables à l'accident du 14 juin 2014.

Par courrier en date du 28 janvier 2015, la CPAM a notifié à Mme [D] un refus de prise en charge de la lésion nouvelle.

Contestant ces décisions, l'assurée a saisi la commission de recours amiable, puis la juridiction de la sécurité sociale.

Par jugement dont appel, la juridiction de première instance entérinant les conclusions du médecin expert qu'elle avait nommé avant dire droit, a accueilli la demande Mme [D] visant à la reconnaissance du caractère professionnel de la lésion nouvelle et a rejeté la demande de nouvelle expertise formée par la caisse primaire.

La caisse conclut à l'infirmation du jugement et à ce que la cour constate que d'une part, la lésion nouvelle du 3 octobre 2014 n'est pas rattachable à l'accident du travail de Mme [D] et que d'autre part, ses lésions étaient bien consolidées à la date de l'expertise.

Elle fait valoir qu'une nouvelle expertise est nécessaire,, qu'eu égard aux deux notes de son service médical, il existe une difficulté d'ordre médical, que trois des médecins consultés ont en effet estimé que les vertiges n'étaient pas en lien avec l'accident du 14 juin 2014 et que la consolidation des lésions pouvait être fixée au 22 janvier 2015.

Mme [D] conclut à la confirmation du jugement et demande que soient entérinées les conclusions du docteur [X].

***

- sur le caractère professionnel de la lésion nouvelle et la date de consolidation:

En application des articles L411-1, L431-1 et L 433-1 du code de la sécurité sociale, la présomption d'imputabilité s'applique aux lésions initiales, à leurs complications, à l'état pathologique antérieur aggravé par l'accident du travail ou la maladie professionnelle, pendant toute la période d'incapacité, précédant la guérison complète ou la consolidation, et postérieurement aux soins destinés à prévenir une aggravation et plus généralement, à toutes les conséquences directes de l'accident du travail ou la maladie professionnelle.

Ainsi, les lésions nouvelles apparues antérieurement à la guérison ou à la consolidation bénéficient de la présomption d'imputabilité dès lors qu'elles sont rattachables à l'accident. Si la nouvelle lésion est médicalement rattachable à l'accident, il appartient à la caisse, dans ses rapports avec l'assuré, de détruire cette présomption en établissant l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ou bien d'une pathologie évoluant pour son propre compte.

En l'espèce, il est indiqué dans le certificat médical initial du 14 juin 2014 que Mme [D] souffrait de contusions frontales et bilatérales ainsi que d'un traumatisme crânien sans perte de connaissance consécutivement à l'accident du travail dont elle a été victime le même jour. Le certificat médical du 16 juin 2014 faisait état, en sus de la lésion initiale d'un « traumatisme crânien », de céphalées et d'une anosmie.

Dans le certificat médical du 3 octobre 2014, il est toujours fait mention de la lésion initiale, soit le traumatisme crânien, mais également de vertiges, dont la qualification de lésion nouvelle imputable à l'accident du travail est en litige.

La cour constate qu'à la date d'apparition de cette lésion, Mme [D] n'avait pas encore été déclarée ni guérie, ni consolidée. En effet, le médecin conseil de la caisse avait fixé la date de consolidation au 14 octobre 2014, soit une date postérieure au constat médical de la lésion nouvelle le 3 octobre 2014.

Par ailleurs, la cour relève qu'il existe un lien certain entre la lésion initiale, soit le traumatisme crânien, et la lésion nouvelle, à savoir des vertiges.

L'apparition, même tardive, de vertiges après un traumatisme crânien permet de retenir l'imputabilité de la lésion nouvelle à l'accident , celle-ci étant en cohérence avec la déclaration d'accident qui mentionnait :« maux de tête+perte audition et odorat+mal ds tte la colonne vertébrale ».

En outre, aux termes de son rapport d'expertise établi après un examen clinique de l'assurée et examen d'un nombre important de documents médicaux, le docteur [X], qui s'est interrogé sur les différentes causes possibles, a finalement affirmé sans ambiguïté que les vertiges étaient apparus à compter de l'accident et a conclu à un lien de causalité direct entre la survenue des vertiges et le traumatisme crânien et cervical du 14 juin 2014.

La caisse primaire ne verse aucun élément de nature à contredire utilement l'avis du docteur [X] et à combattre la présomption d'imputabilité de la lésion nouvelle à l'accident du travail.

En effet, dans sa note établie le 11 mars 2019, le docteur [R], médecin conseil, se contente d'affirmer, sans qu'aucun élément objectif ne soit produit à ce titre, que le traumatisme dont a souffert l'assuré est bénin et qu'il existait un état antérieur cervical et ORL. Il ajoute qu'eu égard aux interrogations de l'expert dans ses conclusions quant à la cause des vertiges, le constat d'un lien causal direct entre la lésion nouvelle et l'accident est arbitraire. Sans autre élement, cette note ne saurait renverser la présomption d'imputabilité.

De même, dans la note qu'il a établie le 13 février 2020, le docteur [R] se contente d'observer que l'expert n'a pas analysé le long délai d'apparition des vertiges, sans toutefois justifier que ce seul fait serait susceptible de renverser la présomption d'imputabilité de la lésion nouvelle à l'accident.

De l'ensemble de ces éléments, il ressort que l'existence d'une cause totalement étrangère ou d'une pathologie évoluant pour son propre compte à l'origine de cette lésion nouvelle n'est pas démontrée.

La lésion nouvelle mentionnée dans le certificat médical du 3 octobre 2014 est ainsi d'origine professionnelle, le jugement étant confirmé sur ce point.

S'agissant de la date de consolidation, la caisse ne produit pas d'élément au soutien de sa demande, la cour constatant qu'à la date du rapport d'expertise, soit le 3 décembre 2018, le docteur [X] indiquait que l'assurée souffrait toujours de vertiges.

Le jugement déféré sera par voie de conséquence également confirmé en ce qu'il a dit que l'état de Mme [Y] [D] n'etait pas consolidé à la date du rapport, le 3 décembre 2018, sans nécessité d'ordonner une nouvelle expertise.

- sur la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Mme [Y] [D] l'ensemble des frais irrépétibles exposés en appel.

La caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois sera condamnée à lui verser la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

- sur les dépens

Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois sera condamnée aux entiers dépens de l'instance.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,

CONFIRME en toutes ses dispositions la décision déférée,

Y AJOUTANT,

DEBOUTEla CPAM de l'Artois de ses demandes contraires au présent arrêt,

CONDAMNE la caisse d'assurance maladie de l'Artois à verser à Mme [Y] [D] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la caisse d'assurance maladie de l'Artois aux entiers dépens de l'instance.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 20/00823
Date de la décision : 25/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-25;20.00823 ?
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