ARRET No
X... Y...
C /
Z... LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD
SCH. / BG.
COUR D'APPEL D'AMIENS
1ère chambre- 2ème section
ARRET DU 29 MAI 2008
RG : 07 / 01002
APPEL D'UN JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LAON du 16 janvier 2007
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTS
Monsieur Noël X... né le 31 Décembre 1924 à GERCY (AISNE) ...02140 VERVINS
Madame Anne-Marie Y... épouse X... née le 07 Novembre 1922 à HARY (02140) ...02140 VERVINS
Représentés par la SCP LE ROY, avoué à la Cour et plaidant par Me Jean-François MONVOISIN, avocat au barreau de REIMS
ET :
INTIMES
Maître Yann Z... ...02300 CHAUNY
LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD ...72030 LE MANS CEDEX 9
Représentées par Me Jacques CAUSSAIN, avoué à la Cour et plaidant par Me DERBISE, avocat au barreau d'AMIENS
DEBATS :
A l'audience publique du 18 Mars 2008, devant :
Mme SCHOENDOERFFER, Président, entendue en son rapport, M. FLORENTIN et Mme SIX, Conseillers,
qui en ont délibéré conformément à la Loi, le Président a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mai 2008
GREFFIER : Mme LEROY
PRONONCE PUBLIQUEMENT :
Le 29 Mai 2008 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; Mme SCHOENDOERFFER, Président, a signé la minute avec M. DROUVIN, Greffier.
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DECISION :
La cour statue sur l'appel interjeté par les époux Noël X... et Anne-Marie Y... d'un jugement rendu, le 16 janvier 2007, par le tribunal de grande instance de Laon, dans un litige les opposant à Yann Z..., notaire, et à la société LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES.
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Par acte authentique reçu le 30 décembre 1988 par Yann Z..., notaire à Vervins (Aisne), Noël X... et Anne-Marie Y... épouse X... ont cédé aux consorts E...les éléments de l'exploitation agricole qu'ils mettaient en valeur à Nampcelles La Cour et sur les communes de Braye en Thiérache et Thenailles moyennant la somme de 297 275, 59 euros, soit :
l'ensemble du matériel.............. 60 979, 61 euros le cheptel.................................. 76 224, 51 euros les stocks.................................. 49 850, 83 euros les améliorations du fonds........ 85 828, 80 euros les façons culturales.................. 6 097, 96 euros les piquets et clôtures................ 18 293, 88 euros
Sur ce prix, 14 4826, 57 euros ont été payés comptant, le solde devait être réglé le 15 février 1989.
Ce solde n'a pas été réglé à sa date et, le 4 juillet 1989, les époux X... ont fait délivrer aux consorts E...un commandement de payer auquel ceux-ci ont fait opposition. Après une procédure pénale qui s'est achevée par un arrêt de la Cour de Cassation du 17 janvier 1996 rejetant le pourvoi formé contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens déclarant irrecevable l'action civile des consorts E..., la cour d'appel d'Amiens, statuant sur l'appel d'un jugement du tribunal de grande instance de Laon, a, notamment, par arrêt du 29 février 2000 prononcé la nullité de la cession des améliorations du fonds et dit qu'en conséquence, les consorts E...n'étaient pas redevables de la somme de 563 000 francs (85 828, 80 euros).
Par acte d'huissier du 6 décembre 2005, les époux Noël X... et Anne-Marie Y... ont fait assigner Yann Z... et la société LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES afin de condamnation au paiement de la somme de 85 828, 80 euros qu'ils ont été contraints de rembourser à leurs cessionnaires outre une somme de 28 577, 22 euros représentant les frais et honoraires qu'ils ont dû régler pour faire face aux diverses procédures et une somme de 45 734, 71 euros en réparation de leur préjudice.
Par jugement rendu le 16 janvier 2007 le tribunal de grande instance de Laon a :
- déclaré Noël X... et Anne-Marie Y... épouse X... mal fondés en leur demande et les en a déboutés,
- condamné Noël X... et Anne-Marie Y... épouse X... à payer à Yann Z... et à la société LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné les époux X... aux dépens.
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Noël X... et Anne-Marie Y... épouse X... ont interjeté appel de cette décision le 28 février 2007.
Par leurs dernières conclusions signifiées le 18 septembre 2007, ils demandent à la cour d'infirmer le jugement et de :
- déclarer Yann Z... responsable du préjudice subi par eux, découlant du manquement à ses obligations de conseil dans la rédaction de l'acte authentique du 31 décembre 1998 (sic),
en conséquence-condamner solidairement Yann Z... et la société LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES à leur payer les sommes de :
85 828, 80 euros, montant des améliorations du fonds, 15 244, 90 euros représentant le préjudice consécutif à la privation de cette somme depuis le 31 décembre 1988, 28 577, 22 euros représentant l'intégralité des frais et honoraires réglés à leur conseil dans les diverses procédures consécutives à cet acte, 45 734, 71 euros en réparation, notamment, du préjudice moral résultant du fait d'avoir subi et supporter de nombreuses procédures pendant treize ans,
- condamner solidairement Yann Z... et la société LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES à leur payer une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens de première instance et d'appel.
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Par leurs dernières conclusions signifiées le 18 juin 2007, Yann Z... et la société LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES demandent à la cour de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- débouter les époux X... de toutes leurs demandes,
- les condamner in solidum au paiement de la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les entiers frais et dépens de première instance et d'appel.
CECI EXPOSE, LA COUR,
Attendu que les époux X... font valoir que le notaire Yann Z... était tenu en tant que rédacteur d'un acte d'éclairer les parties sur sa portée et ses conséquences et de prendre toutes dispositions utiles pour en assurer l'efficacité, eu égard aux buts poursuivis ; qu'il importe peu que ce notaire ait rappelé les dispositions de l'article L411. 69 et L411. 74 du Code rural qu'il lui appartenait de ne pas recevoir un acte contraire à la loi et de ne pas insérer dans un acte authentique une clause dont il connaissait l'irrégularité et l'absence d'efficacité ; qu'il restait tenu de son devoir de conseil quelle que soit la compétence de ses clients ; qu'en outre les activités extra professionnelles de Noël X... ne lui donnaient aucune compétence particulière en matière de baux et qu'il était évident pour lui que les améliorations culturales que le notaire avait portées dans l'acte authentique ne pouvaient encourir d'interdiction ;
Attendu que Yann Z... et la société LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES font valoir que Yann Z... a rappelé au cours des rendez-vous préparatoires et, plus particulièrement, le jour de la signature de l'acte les textes en vigueur, en particulier, les articles L411. 69 et L411. 74 du Code rural ainsi qu'en atteste le notaire Christian F...présent lors du rendez-vous de signature ; que les époux X... avaient une parfaite connaissance des dispositions du code rural et ont choisi de mettre à la charge de leurs cessionnaires les améliorations culturales parce que la situation financière de la bailleresse ne lui permettait pas de faire face au paiement des sommes dues à ce titre ; que les cédants avaient une parfaite connaissance de la portée de l'acte juridique par lequel ils s'engageaient ;
Attendu, ceci exposé, que le notaire Christian F..., présent lors de la signature de l'acte du 30 décembre 1988 a établi une attestation en date du 12 mai 2006 dans laquelle il indique : « Lors de la signature de l'acte du 30 décembre 1988 entre Monsieur et Madame X... et les consorts E..., il a été expliqué par Maître Z... à toutes les parties présentes le risque encouru concernant la non justification éventuelle de la valeur des biens cédés et que ce dernier a donné lecture et explications des articles L411. 69 et L411. 74 du Code rural.
Lors de ces explications, les acquéreurs ont même demandé une interruption de séance. » ;
Attendu qu'aux termes de l'article L411. 69 du Code rural, le preneur qui a, par son travail ou par ses investissements, apporté des améliorations au fonds loué a droit, à l'expiration du bail, à une indemnité due par le bailleur, quelle que soit la cause qui a mis fin au bail ;
Attendu que l'article L411. 74 dudit code dispose, notamment, que sera puni d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 30 000 euros ou de l'une de ces deux peines seulement, tout bailleur, tout preneur sortant ou tout intermédiaire qui aura, directement ou indirectement, à l'occasion d'un changement d'exploitant, soit obtenu ou tenté d'obtenir une remise d'argent ou de valeurs non justifiée, soit imposé ou tenté d'imposer la reprise de biens mobiliers à un prix ne correspondant pas à la valeur vénale de ceux-ci ; que les sommes indûment perçues sont sujettes à répétition ; qu'en cas de reprise de biens mobiliers à un prix ne correspondant pas à la valeur vénale de ceux-ci, l'action en répétition peut être exercée dès lors que la somme versée a excédé ladite valeur vénale de plus de 10 % ;
Attendu que, par ailleurs, ainsi que l'a relevé le tribunal, les époux X... dans l'instance qui les a opposés aux consorts E...avaient expliqué que la bailleresse, leur parente, n'était pas en mesure de faire face au paiement des améliorations culturales qui leur étaient dues, de sorte que vendeurs et acheteurs s'étaient mis d'accord, pour en mettre le paiement à la charge du preneur entrant et avaient tenté de se prévaloir des dispositions de l'article L411. 76 aux termes desquelles, lorsque l'indemnité due au preneur sortant a été fixée par le juge et payée par le bailleur celui-ci peut demander soit une majoration du prix du bail, soit le remboursement par le preneur entrant des sommes ainsi versées ;
Attendu qu'il ressort encore d'un document versé aux débats par les intimés (pièce 3 du bordereau de communication de pièces) que Noël X... a lui-même négocié avec un autre de ses bailleurs la cession du bail à son successeur ; l'acte sous seing privé signé à cette occasion stipulant d'abord l'absence d'indemnités de part et d'autre, puis mentionnant ensuite que l'accord était donné sous réserve du paiement de la somme de 150 000 francs ;
Qu'il n'est en outre pas contesté que Noël X... exerçait des fonctions de membre du conseil d'administration du CREDIT AGRICOLE ;
Attendu qu'il résulte suffisamment de l'ensemble de ces circonstances que l'acte authentique du 30 décembre 1988 a été signé en toute connaissance de cause par les époux X..., et que le notaire Z... n'a nullement manqué à son devoir de conseil et a attiré l'attention des parties sur les risques pris par elles, et ce, suffisamment, pour que les acquéreurs éprouvent le besoin de demander une suspension de la séance ;
Attendu que dans ces circonstances, seul un tiers à l'acte pourrait rechercher la responsabilité du notaire pour n'avoir pas refusé d'instrumenter ; qu'il n'en va pas de même des parties à l'acte, parfaitement informées de leurs droits, et qui se sont donc engagées en toute connaissance de cause et, s'agissant des cédants, en particulier, du fait de la possibilité d'une action en répétition des sommes indûment perçues ;
Attendu qu'il convient, en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les époux X... de toutes leurs demandes et les a condamnés aux dépens ;
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Attendu qu'eu égard aux circonstances de l'affaire, il n'y a pas lieu de prononcer de condamnation sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; que le jugement sera infirmé sur ce seul point ;
PAR CES MOTIFS,
Statuant par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a condamné les époux X... à payer à Yann Z..., notaire, et à la société LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance ;
Réformant sur ce point, statuant à nouveau et ajoutant, Dit n'y avoir lieu à prononcer de condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne in solidum Noël X... et Anne-Marie Y... épouse X... aux entiers dépens d'appel, dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,