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22/05/2008 | FRANCE | N°06/03329

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Ct0073, 22 mai 2008, 06/03329


ARRET
No

STE SOCAF

C /

SA. SAGEC

Me X...

SA. MONTE PASCHI BANQUE

CREDIT LYONNAIS

M. M. / JA

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ECONOMIQUE

ARRET DU 22 MAI 2008

RG : 06 / 03329

JUGEMENT DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE SENLIS EN DATE DU 10 janvier 2002

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

STE SOCAF
Sté de caution mutuelle des professions immobilières et foncières
26 Avenue de Suffren
75015 PARIS
" agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légau

x domiciliés en cette qualité audit siège ".

Comparante concluante par Me CAUSSAIN, avoué à la Cour et plaidant par Me SCHROEDER collaborateur de Me MONTER...

ARRET
No

STE SOCAF

C /

SA. SAGEC

Me X...

SA. MONTE PASCHI BANQUE

CREDIT LYONNAIS

M. M. / JA

COUR D'APPEL D'AMIENS

CHAMBRE ECONOMIQUE

ARRET DU 22 MAI 2008

RG : 06 / 03329

JUGEMENT DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE SENLIS EN DATE DU 10 janvier 2002

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

STE SOCAF
Sté de caution mutuelle des professions immobilières et foncières
26 Avenue de Suffren
75015 PARIS
" agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ".

Comparante concluante par Me CAUSSAIN, avoué à la Cour et plaidant par Me SCHROEDER collaborateur de Me MONTERAN, avocats au barreau de PARIS.

ET :

INTIMES

SA. SAGEC
28 Avenue des Semailles
13770 VENELLES
" prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ".

Comparante concluante par la SCP LEMAL ET E GUYOT, avoués à la Cour et plaidant par Me GENEIX de l'ASSOCIATION MASSOT-PARRINELLO, avocats au barreau de PARIS.

Maître X... Jean-Pierre
Mandataire judiciaire
...
60300 SENLIS
" pris en sa qualité de liquidateur de la STE T C E ".

Comparant concluant par la SCP TETELIN MARGUET ET DE SURIREY, avoués à la Cour et plaidant par Me BONINO, avocat au barreau de SENLIS.

SA. MONTE PASCHI BANQUE
96 Avenue Raymond Poincaré
75762 PARIS
" prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ".

Comparante concluante par la SCP SELOSSE BOUVET ET ANDRE, avoués à la Cour et ayant pour avocat Me BOULANGER du barreau de PARIS

SA. CREDIT LYONNAIS
19 Bd des Italiens
75002 PARIS
" agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ".

Intervenant volontaire suivant conclusions constitutives en date du 30 mars 2007.

Comparante concluante par la SCP MILLON ET PLATEAU, avoués à la Cour et plaidant par Me GILLET, avocat au barreau de SENLIS.

DEBATS :

A l'audience publique du 28 février 2008 devant :

M. Brieuc de MORDANT de MASSIAC, Président de Chambre, entendu en son rapport,

M. BOUGON et Mme BELLADINA, Conseillers,

qui en ont délibéré conformément à la loi, le Président a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 22 mai 2008.

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme DEBEVE

PRONONCE PUBLIQUEMENT :

Le 22 MAI 2008 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Nouveau code de procédure civile ; M. Brieuc de MORDANT de MASSIAC, Président a signé la minute avec Mme DEBEVE, Greffier.

PROCEDURE DEVANT LA COUR

Par acte en date du 25 janvier 2002, la société SOCAF a interjeté appel du jugement du tribunal de commerce de Senlis du 10 janvier 2002 qui a déclaré la société SOCAF irrecevable en son opposition et la société SAGEC irrecevable en son intervention volontaire et a condamné ces deux sociétés à payer 6. 000 euros à Me X... liquidateur judiciaire de la société TCE.

Par arrêt avant dire droit du 11 décembre 2003, la cour d'appel d'Amiens a déclaré que l'appel formé par la société SOCAF contre le jugement du 10 janvier 2002 était recevable, a dit que l'opposition formée contre l'ordonnance du 30 septembre 1999 était recevable, et a invité les parties à s'expliquer sur la validité de la transaction autorisée par la dite ordonnance (opportunité, équilibre, limitation à une seule partie).

Me X... s'est pourvu en cassation contre cet arrêt.

Par arrêt du 25 avril 2004, l'affaire a été radiée du rôle faute de diligences (les parties étant en attente de l'issue du pourvoi) et par arrêt du 24 mai 2005 la cour d'appel a sursis à statuer en attendant l'issue du pourvoi.

La cour de cassation ayant déclaré le pourvoi de Me X... irrecevable (arrêt du 16 mai 2006), l'instance a repris son cours et les parties ont déféré à l'ADD du 11 décembre 2003.

La société SOFAC a conclu (conclusions du 3 avril 2007).

Me X..., intimé, a conclu (conclusions des 16 janvier 2007, 18 juillet 2007).

La banque MONTE PASCHI, intimée, a conclu (conclusions du 2 avril 2007).

La société SAGEC, intimée, a conclu (conclusions du 26 mars 2007).

La banque CREDIT LYONNAIS, intervenant volontaire, a conclu (conclusions du 30 mars 2007, 26 juin 2007).
Après clôture de la mise en état, l'affaire a été fixée au 28 février 2008 pour plaidoirie (O. C du 11 décembre 2007).

Les parties et leurs conseils ont été régulièrement avisés pour cette date, dans les formes et délais prévus par la loi.

Le jour dit, la cause et les parties ont été appelées en audience publique.

Après avoir entendu les avoués et avocats des parties en leurs demandes fins et conclusions, la cour a mis l'affaire en délibéré et indiqué aux parties que l'arrêt serait rendu et mis à disposition au greffe le 22 mai 2008.

Après en avoir délibéré conformément à la loi, la cour a rendu la présente décision à la date indiquée.

DECISION

Faits, procédures, demandes en appel

La société TCE a eu, de 1990 à 1996, une activité de marchand de biens. Elle avait pour dirigeants ou animateurs les nommés Y... et Z.... Elle a été mise en liquidation judiciaire le 25 janvier 1996 et six sociétés filiales ou apparentées de la société TCE ont également été mises en liquidation judiciaire dans les mois qui ont suivi. Le passif vérifié du groupe s'est établi, à la date du 31 juillet 1997, à 24. 006. 157, 06 francs.

Les différents dirigeants de droit ou de fait de ces sociétés ont été poursuivis et pénalement condamnés pour différentes infractions (banqueroutes, escroqueries etc..) et notamment pour, faux, usage de faux, escroqueries à l'égard de la banque SOCAF et du CREDIT LYONNAIS.

Par acte du 25 janvier 1998, le liquidateur judiciaire de la société TCE a assigné le CREDIT LYONNAIS (banque de la TCE), la SOCAF (caution bancaire de TCE), la banque MONTE PASCHI (chargé du compte séquestre), devant le tribunal de commerce de Senlis, en vue d'obtenir leur condamnation solidaire, sur le fondement de l'article 1382 CC, à lui payer 34. 000. 000 francs de dommages intérêts, en faisant grief à ces sociétés d'avoir abusivement soutenu l'activité de TCE ou de ne pas avoir exercé de contrôle sur l'activité de celle-ci, et, en suite de son assignation, la société SOCAF a appelé en garantie la société SAGEC (expert comptable de TCE).

Il est à noter ici que, par jugement du 18 février 2005, le tribunal de commerce de Senlis a sursis à statuer sur les mérites de cette demande, en attendant l'issue des différentes procédures parallèles qui se trouvaient pendantes devant la cour d'appel.

Il existait en effet (et existe toujours) plusieurs procédures pendantes devant la cour d'appel car, alors que l'instance née de l'assignation du 25 janvier 1998 était en cours, le liquidateur judiciaire de la société TCE a sollicité, par requête du 9 septembre 1999, l'autorisation de conclure une transaction avec la banque MONTE PASCHI (versement de 1. 500. 000 francs contre l'abandon des poursuites).

De fait, par ordonnance du 30 septembre 1999, le juge commissaire (Mr VERNET) a donné l'autorisation requise, aux motifs « que l'issue de la procédure risquait d'être longue et incertaine, que le débiteur Mr Y... était d'accord et que la transaction était conforme à l'intérêt des créanciers », et, par jugement du même jour (30 septembre 1999), le tribunal présidé par le même magistrat (Mr VERNET) a homologué la dite transaction.

En suite de ces deux décisions, en sa qualité de contrôleur, la société SOCAF a reçu le 24 mars 2000, en guise de notification, un pli de 10 feuilles contenant :

1o) Les trois pages de l'acte d'huissier indiquant que « l'huissier procédait, à la demande de Me X..., à la signification de la décision rendue sur requête, afin d'autorisation de transiger, par le juge commissaire le 30 septembre 1999 » et que « la société SOCAF pouvait faire appel de cette décision dans le délai d'un mois à compter de la date indiquée en tête du présent acte (24 mars 2000) »

2o) Les première et dernière pages de la grosse d'un jugement du tribunal de commerce, en date du 30 septembre 1999 comportant la formule exécutoire (mais non les pages intermédiaires contenant les motifs) ;

3o) Les quatre pages de la requête « afin d'autorisation de transiger » présentée par Me X... au juge commissaire le 9 septembre 1999 ;

4o) L'ordonnance du juge commissaire du 30 septembre 1999 autorisant la transaction et prescrivant la notification de la décision par LRAR à la banque MONTE PASCHI.

Le 20 avril 2000, la société SOCAF a formé, tout à la fois, appel de la décision en ce qu'elle pouvait être un jugement et opposition de la décision en ce qu'elle pouvait être une ordonnance.

Par arrêt du 15 mars 2001, la cour d'appel d'Amiens a jugé irrecevable l'appel formé contre le jugement (au motif que le demandeur ne faisait pas clairement apparaître s'il critiquait le jugement ou l'ordonnance) et, par arrêt du 24 mars 2004, la cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la SOCAF contre le dit arrêt.

Par jugement du 10 janvier 2002, le tribunal de commerce de Senlis a déclaré l'opposition à l'ordonnance irrecevable, au motif que, si la signification était effectivement irrégulière, privant celle-ci de toute portée juridique, il n'en demeurait pas moins que le recours formé par la SOCAF s'analysait, en réalité, non comme un recours formé contre l'ordonnance du 30 septembre 1999, mais comme un recours dirigé contre le jugement du 30 septembre 1999, alors que ce dernier était devenu définitif.

Par voie de conséquence, le tribunal a déclaré l'intervention de la SAGEC également irrecevable.

La société SOCAF a interjeté appel de cette décision le 25 janvier 2002.

Par arrêt avant dire droit du 11 décembre 2003, la cour d'appel d'Amiens a relevé qu'il ressortait des pièces de la procédure que la SOCAF avait entendu former opposition à l'ordonnance du 30 septembre 1999 ; que la signification de cette décision faite le 24 mars 2000 dans des conditions gravement irrégulières n'avait pu faire courir aucun délai, de sorte que l'opposition, même faite le 20 avril 2000, était recevable et qu'il en résultait que l'appel était lui-même recevable.

La cour en a conclu qu'il y avait lieu d'examiner les mérites de l'opposition et que, dès lors que celle-ci n'avait été expressément motivée que par les risques liés à la longueur de la procédure, sans prise en considération, en apparence, du bien fondé, de l'équilibre et de l'équité de la transaction, il y avait lieu d'inviter les parties à s'expliquer sur ces différents points.

Me X... s'est pourvu contre cet arrêt en soutenant que la cour d'appel, faisant application des dispositions des articles L 623-4 CC et 125 NCPC, aurait dû déclarer irrecevable l'appel de la SOCAF, dès lors que ce dernier était formé contre un jugement non susceptible d'appel (pour avoir statué sur un recours formé contre une ordonnance rendue par le juge commissaire dans les limites de ses attributions).

Mais par arrêt du 16 mai 2006, la cour de cassation a déclaré que le dit pourvoi était irrecevable dès lors que l'arrêt était un ADD qui, sauf excès de pouvoir, n'était susceptible de pourvoi qu'avec l'arrêt sur le fond et qu'en l'espèce la cour d'appel d'Amiens n'avait commis aucun excès de pouvoir en déclarant l'appel recevable, car l'appel de la SOCAF était effectivement recevable dès lors que le jugement avait fait une inexacte application des dispositions de l'article 25 du décret du 27 décembre 1985 relatives aux formes et délais des recours formés contre les ordonnances du juge commissaire.

La cour de cassation ayant déclaré le pourvoi de Me X... irrecevable, l'instance a repris son cours et les parties ont déféré à l'ADD du 11 décembre 2003 et se sont expliquées « sur la transaction ».

Devant la cour de céans,

- La société SOFAC demande à la cour, vu les articles 158 de la loi du 25 janvier 1985 et 54 du code de procédure civile, de la déclarer recevable et bien fondée en son opposition, de dire que l'ordonnance qualifiée « de jugement » est nulle et non avenue, ou à tout le moins de constater que Me X... ne justifie pas du bien fondé de la transaction et de ce fait réformer l'ordonnance et de dire n'y avoir lieu à homologation de la transaction, de condamner Me X... à lui payer 3. 000 euros au titre de l'article 700 CPC.

Elle expose que dans le cadre de la loi du 2 janvier 1970, elle a cautionné l'activité de la société TCE, de 1990 à 1996, à hauteur de 10. 000. 000 francs, c'est-à-dire qu'elle a garanti la représentation des fonds remis à celle-ci dans le cadre de ses transactions immobilières à hauteur de ce plafond ; qu'à la suite de la liquidation judiciaire, le passif de TCE s'est établi à 24. 006. 157, 06 francs, dont 15. 887. 588, 34 francs au titre des remises de fonds et sur lesquels elle a réglé (aux personnes victimes des agissements de cette société) la somme de 9. 717. 275, 97 francs ; qu'ainsi que l'a reconnu la juridiction correctionnelle (CA Amiens, 22 janvier 2002), elle n'a nullement failli à ses obligations de contrôle, mais a été victime des agissements frauduleux des dirigeants de la société TCE qui se sont ingéniés à tromper tous les contrôles ; que les prétentions de Me X... à obtenir sa condamnation solidaire avec le CREDIT LYONNAIS (banque de TCE) et la banque MONTE PASCHI (chargée du compte séquestre) sont donc dépourvues de fondement ; qu'à raison même de la solidarité demandée, la transaction proposée par Me X... à l'une seule des trois banques poursuivies n'avait pas de justification ; qu'en violation des règles, en vue de l'homologation de la transaction, le tribunal (présidé par le juge commissaire) avait été saisi le jour même du prononcé de l'ordonnance, donc avant que celle-ci ne soit notifiée et ne soit devenue définitive.

- Maître X..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société TCE demande à la cour de constater que, par arrêt du 15 mars 2001, la cour d'appel a déjà statué sur les mérites de l'opposition à ordonnance formée par la SOCAF, pour la déclarer irrecevable, de sorte que cette société ne saurait exercer, une nouvelle fois, une voie de recours contre la même décision.

Au fond, il soutient que la transaction passée avec la banque MONTE PASCHI est justifiée (car la procédure avec celle-ci risque de s'avérer longue et aléatoire), équilibrée (car il y a eu des concessions réciproques : versement d'une somme d'argent, contre abandon des poursuites).

Il ajoute que cette transaction ne romprait pas l'équilibre entre les trois parties poursuivies, car il n'avait appartenu qu'au deux autres de solliciter également une transaction.

- La banque MONTE PASCHI demande à la cour de confirmer le jugement du 10 janvier 2002 entrepris et de débouter la SOCAF et la SAGEC de leurs demandes, de les condamner à lui payer 3. 000 euros au titre de l'article 700 CPC.

Elle expose que sa responsabilité était recherchée dans des proportions moindres que celles des deux autres banques et qu'il était donc normal que Me X... songe à transiger avec elle, à hauteur de 1. 500. 000 francs, alors au demeurant qu'elle a acceptait de renoncer à sa créance de 309. 804 francs et à une inscription hypothécaire prise sur un immeuble du dirigeant Y....

- La banque CREDIT LYONNAIS demande à la cour de la recevoir en son intervention, d'infirmer la décision entreprise, de dire qu'il n'y a lieu a autoriser la transaction.

Elle expose qu'elle a été assignée, au même titre que les banques MONTE PASHI et SOCAF et solidairement avec celles-ci, au paiement d'une somme de 34. 000. 000 francs et qu'elle a donc intérêt à intervenir dans une procédure de transaction accordée clandestinement à l'une d'entre elle qui, si elle devait prospérer, la conduirait à supporter une plus grande part dans d'éventuelles condamnations ; qu'elle a du reste été indûment assignée par Me X..., ce dernier trouvant là l'occasion de paralyser l'action qu'elle-même a mis en œ uvre contre la société TCE en paiement d'un solde de compte courant (2. 668. 000 francs) ; que Me X... ne justifie pas des raisons qui l'ont conduit à accorder une telle transaction.

- La société SAGEC, au visa de l'article 124 du décret du 27 décembre 1985, demande à la cour de déclarer la transaction, autorisée par ordonnance du juge commissaire en date du 30 septembre 1999, nulle et non avenue et de condamner Me X... à lui payer 5. 000 euros au titre de l'article 700 CPC.

Elle expose qu'en violation des dispositions du texte susvisé, l'ordonnance autorisant la transaction et le jugement d'homologation de celle-ci ont été rendus le même jour et que ces deux décisions sont donc nulles et non avenues ; qu'en toutes hypothèses, Me X... ne s'explique pas sur la pertinence, l'équilibre et l'équité de la transaction qu'il a proposée à la seule banque MONTE PASCHI et sur la contradiction évidente qui existe entre l'assignation de trois banques au paiement solidaire de 34. 000. 000 francs et une transaction, clandestine, accordée à une seule partie à hauteur de 1. 500. 000 francs.

En cet état,

Sur la recevabilité de l'appel

Par jugement du 10 janvier 2002, le tribunal de commerce de Senlis a déclaré l'opposition à l'ordonnance irrecevable, aux motifs que, si la signification était effectivement irrégulière, privant celle-ci de toute portée juridique, il n'en demeurait pas moins que le recours formé par la SOCAF s'analysait, en réalité, non comme un recours formé contre l'ordonnance du 30 septembre 1999, mais comme un recours dirigé contre le jugement du 30 septembre 1999, alors que ce dernier était devenu définitif.

Par arrêt ADD du 11 décembre 2003, la cour de céans a infirmé le dit jugement aux motifs qu'il ressortait des pièces de la procédure que la SOCAF avait entendu, le 20 avril 2000, former opposition à l'ordonnance du 30 septembre 1999 ; que la signification de cette décision faite le 24 mars 2000 dans des conditions gravement irrégulières (notamment une fausse indication sur les forme et délai de recours) n'avait pu faire courir aucun délai, de sorte que l'opposition, même faite le 20 avril 2000, était recevable et qu'il en résultait que l'appel était lui-même recevable.

Toutefois, Me X... remet, à nouveau en débat, aujourd'hui, la recevabilité de l'appel de la SOCAF : il demande à la cour de constater que, par arrêt du 15 mars 2001, la cour d'appel a déjà statué sur les mérites de l'opposition à ordonnance formée par la SOCAF, pour la déclarer irrecevable, de sorte que cette société ne saurait exercer, une nouvelle fois, une voie de recours contre la même décision.

Sur ces différents points, la cour fera observer à Me X...

- que la question de la recevabilité de l'appel formé contre le jugement du 10 janvier 2002 a déjà été tranchée par l'ADD du 11 décembre 2003 ;

- qu'au demeurant, les errements suivis par la SOCAF (appel et opposition) et par la suite par les juridictions de première instance et d'appel, lui sont directement et exclusivement imputables ; qu'en effet, si le liquidateur peut transiger avec l'autorisation du juge commissaire et, lorsque la transaction est d'une valeur qui excède la compétence en dernier ressort du tribunal, avec l'accord du tribunal, il n'en demeure pas moins que l'ordonnance du juge commissaire et le jugement d'homologation ne peuvent intervenir le même jour (dès lors que l'ordonnance doit être au préalable notifiée au débiteur et aux contrôleurs par application de l'article 151-2 du décret du 27 décembre 1985 et que le débiteur doit être régulièrement convoqué devant le tribunal par application de l'article 124 du même texte) alors qu'en l'espèce Me X... a fait rendre l'ordonnance et le jugement le même jour ; qu'enfin, c'est lui qui a fait signifier un acte bâtard dans sa forme (mélange de jugement et d'ordonnance) et dans son contenu (l'indication que seul l'appel était possible dans un délai d'un mois) et que c'est lui qui, par des conclusions fallacieuses, a embrouillé les juridictions du 1er et du second degré ;

- qu'il ressort clairement aujourd'hui des différents actes de la procédure que le 20 avril 2000, la société SOCAF a formé, tout à la fois, appel de la décision qui lui avait été notifiée, en ce qu'elle pouvait être un jugement, et opposition à la décision en ce qu'elle pouvait être une ordonnance ;

que l'arrêt du 15 mars 2001 a déclaré l'appel irrecevable et que l'arrêt du 11 décembre 2003 a, en revanche, déclaré l'opposition recevable.

La cour écartera donc les conclusions contraires de Me X....

Sur le bien fondé de l'appel de la SOCAF

La SOCAF a reçu, en sa qualité de contrôleur, notification de l'ordonnance autorisant la transaction (ce point est affirmé par Me X... dans ses conclusions de première instance).

La SOCAF a fait opposition à cette ordonnance en soutenant que cette transaction n'était ni justifiée ni équilibrée et Me X... soutient exactement le contraire.

En cet état, la cour observe 1o) que cette transaction s'inscrit dans le cadre des poursuites que Me X... a engagé, le 25 janvier 1998, contre le CREDIT LYONNAIS (banque de la TCE), la SOCAF (caution bancaire de TCE), la banque MONTE PASCHI (chargé du compte séquestre), en vue d'obtenir leur condamnation solidaire, sur le fondement de l'article 1382 CC, à lui payer 34. 000. 000 francs de dommages intérêts, en faisant grief à ces sociétés d'avoir abusivement soutenu l'activité de TCE ou de ne pas avoir exercé de contrôle sur l'activité de celle-ci ; que 2o) Me X... n'a transigé qu'avec la banque MONTE PASCHI et ce à l'insu des deux autres banques ; 3o) que, pour expliquer cette façon de faire, l'intéressé soutient que la transaction passée est justifiée (car la procédure risque de s'avérer longue et aléatoire), équilibrée (car il y a eu des concessions réciproques, à savoir le versement d'une somme de 1. 500. 000 francs contre l'abandon des poursuites).

La cour observe que l'argument selon lequel « la transaction aurait été justifiée par le caractère aléatoire de la procédure » n'est pas réellement pertinent.

En effet, si l'issue de la procédure est lointaine et aléatoire avec la banque MONTE PASCHI, il en va tout autant des procédures suivies à l'encontre du CREDIT LYONNAIS et de la SOCAF.

L'issue de la procédure est d'ailleurs d'autant plus aléatoire que Me X... demande une somme de 34. 000. 000 francs sans commune mesure avec le montant du passif connu et vérifié au moment de la date d'assignation (24. 006. 157, 06 francs) et invoque un fondement délictuel qui ne tient pas nécessairement compte de ce qui a réellement été jugé au niveau pénal.

La note encore que l'argument selon lequel « la transaction est équilibrée » n'est guère plus pertinent.

En effet, l'exigence du versement par la banque MONTE PASCHI d'une somme de 1. 500. 000 francs est manifestement déséquilibrée au regard des fautes qu'il reproche à cette banque dans son assignation du 25 janvier 1998 et du montant des dommages intérêts qu'il a réclamé à cette banque (34. 000. 000 francs).

En outre, cette transaction, proposée à une seule des trois parties poursuivies, est en contradiction avec les termes de la dite assignation qui demande la condamnation « solidaire » des trois parties au paiement de la dite somme.

Au regard de l'intérêt des créanciers et de la moralité de la procédure, de deux choses l'une :

- ou les prétentions de Me X..., telles que formulées par lui dans son acte d'assignation, sont fondées et rien ne justifie alors une transaction aussi modeste à une seule des trois parties plutôt qu'une solution d'ensemble,

- ou elles ne le sont pas et il n'y a pas lieu alors de prêter la main à ce qui peut paraître une man œ uvre discutable visant à contraindre les banques, en les divisant, à accepter le paiement de sommes qu'elles ne doivent pas.

La cour en conclut que les observations et contestations de la SOCAF, auxquelles se sont associées le CREDIT LYONNAIS et la SAGEC, sont fondées et qu'il y a lieu à mettre à néant l'ordonnance entreprise et de rejeter le projet de transaction de Me X....

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La partie perdante devant, aux termes de l'article 696 CPC, être condamnée aux dépens, la cour condamnera Me X... ès qualités, qui succombe, à supporter les dépens de première instance et d'appel.

La partie perdante devant, en outre, aux termes de l'article 700 du même code, être condamnée à payer à l'autre partie, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, une somme arbitrée par le juge, tenant compte de l'équité et de la situation économique de la partie condamnée, la cour condamnera Me X..., ès qualités, à payer à la SOCAF la somme de 2. 500 euros, au CREDIT LYONNAIS la somme de 2. 500 euros, à la SAGEC la somme de 2. 500 euros, tous frais de première instance et d'appel confondus.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Vu l'arrêt avant dire droit de la cour de céans, en date du 11 décembre 2003, qui a déclaré que l'appel formé par la société SOCAF contre le jugement du 10 janvier 2002 était recevable, dit que l'opposition formée contre l'ordonnance du 30 septembre 1999 était recevable, et invité les parties à s'expliquer sur la validité de la transaction autorisée par la dite ordonnance ;

Vu les interventions volontaires du CREDIT LYONNAIS et de la SAGEC ;

Déclare ces interventions recevables ;

Au fond,

Déclare l'appel de la société SOCAF bien fondé,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Déclare recevable et bien fondée l'opposition formée, par la société SOCAF, à l'encontre de l'ordonnance du juge commissaire, en date du 30 septembre 1999, autorisant Me X... ès qualités de liquidateur judiciaire de la société TCE à transiger avec la banque MONTE PASCHI ;

Met à néant la dite ordonnance et statuant à nouveau,

Rejette la demande de transaction présentée par Me X..., ès qualités, en faveur de la banque MONTE PASCHI ;

Condamne Me X... aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP LEMAL ET GUYOT, de la SCP MILLON ET PLATEAU, de Me CAUSSAIN, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

Condamne Me X... à payer à la SOCAF la somme de 2. 500 euros, au CREDIT LYONNAIS la somme de 2. 500 euros, à la SAGEC la somme de 2. 500 euros, tous frais de première instance et d'appel confondus, au titre de l'article 700 CPC,

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Ct0073
Numéro d'arrêt : 06/03329
Date de la décision : 22/05/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Senlis, 10 janvier 2002


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.amiens;arret;2008-05-22;06.03329 ?
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