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15/05/2008 | FRANCE | N°06/04899

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Ct0339, 15 mai 2008, 06/04899


ARRET
No

X...
Y...

C /

Z...
A...

DAM. / BG.

COUR D'APPEL D'AMIENS

1ère chambre- 1ère section

ARRET DU 15 MAI 2008

RG : 06 / 04899

APPEL D'UN JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D ‘ AMIENS du 06 décembre 2006

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS

Monsieur Pierre, Jean, Lucien X...
...
46700 DURAVEL

Madame Emilie Y...
...
46700 DURAVEL

Représentés par la SCP MILLON-PLATEAU, avoués à la Cour et plaidant par Me BOURRE, avocat au barreau d'AMIENS

ET :



INTIMES

Monsieur Patrick Z...
...
80480 SALEUX

Madame Madeleine A... épouse Z...
...
80480 SALEUX

Représentés par la SCP TETELIN MARGUET ET DE SURIREY, avou...

ARRET
No

X...
Y...

C /

Z...
A...

DAM. / BG.

COUR D'APPEL D'AMIENS

1ère chambre- 1ère section

ARRET DU 15 MAI 2008

RG : 06 / 04899

APPEL D'UN JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D ‘ AMIENS du 06 décembre 2006

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS

Monsieur Pierre, Jean, Lucien X...
...
46700 DURAVEL

Madame Emilie Y...
...
46700 DURAVEL

Représentés par la SCP MILLON-PLATEAU, avoués à la Cour et plaidant par Me BOURRE, avocat au barreau d'AMIENS

ET :

INTIMES

Monsieur Patrick Z...
...
80480 SALEUX

Madame Madeleine A... épouse Z...
...
80480 SALEUX

Représentés par la SCP TETELIN MARGUET ET DE SURIREY, avoués à la Cour et plaidant par Me CHARTRELLE substituant la SCP FRISON DECRAMER GUEROULT, avocats au barreau d'AMIENS

DEBATS :

A l'audience publique du 13 Mars 2008, devant :

M. GRANDPIERRE, Président, entendu en son rapport,
Mme CORBEL et M. DAMULOT, Conseillers,

qui en ont délibéré conformément à la Loi, le Président a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 15 Mai 2008.

GREFFIER : Mme AZAMA

PRONONCE PUBLIQUEMENT :

Le 15 Mai 2008 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; M. GRANDPIERRE, Président, a signé la minute avec M. DROUVIN, Greffier.

*
* *

DECISION :

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte notarié du 6 septembre 2002, Monsieur X... et Madame Y... ont vendu aux époux Z... un pavillon Phenix situé à Saleux (Somme),..., moyennant un prix de 109 763 euros. Ayant constaté divers désordres qui affectaient notamment une véranda, les acquéreurs ont sollicité du juge des référés du tribunal de grande instance d'Amiens, et obtenu, par ordonnance du 22 janvier 2003, l'organisation d'une expertise finalement confiée à Monsieur B... qui a déposé son rapport le 30 août 2005.

Au vu de ce document, les époux Z... ont, par exploit du 19 octobre 2005, fait assigner les vendeurs devant le tribunal de grande instance d'Amiens, afin de les voir condamnés, sur le fondement de l'article 1641 du Code civil, à leur payer une somme de 29 089, 15 euros au titre des travaux de réfection de la véranda, outre 3 000 euros de dommages et intérêts pour trouble de jouissance.

Par jugement du 6 décembre 2006, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal a condamné Monsieur X... et Madame Y... à payer aux époux Z... 29 089, 15 euros au titre des travaux de réfection de la véranda, 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance et 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Selon déclaration reçue au greffe de la Cour le 19 décembre 2006, Monsieur X... et Madame Y... ont interjeté appel de ce jugement.

Ils demandent à la juridiction de céans de dire les époux Z... irrecevables en leurs prétentions ou, en tout cas, de les en débouter ; subsidiairement, de réduire les indemnités allouées " dans de notables proportions " ; et, accessoirement, de condamner les intimés à leur verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les appelants rappellent qu'aux termes d'une clause stipulée dans l'acte de vente, ils ne sont pas tenus de garantir les vices cachés. Ils soutiennent qu'elle ne saurait être écartée au motif qu'ils seraient de mauvaise foi, alors qu'ils n'ont rien caché lors de la vente, réalisée par l'intermédiaire d'un professionnel de l'immobilier et après que les époux Z... aient, à plusieurs reprises, visité le pavillon ; que rien ne dissimulait l'état de la véranda, dont les acquéreurs ont pu se convaincre eux-mêmes, et qui ne présentait alors aucun désordre ; que les acquéreurs sont de toute façon forclos, leurs demandes ayant été présentées plus de dix ans après l'achèvement de la véranda ; et qu'ils ne démontrent pas être dans l'impossibilité d'utiliser la véranda.

Les époux Z... concluent à la confirmation du jugement tout en demandant une somme de 2 000 euros supplémentaires au titre du préjudice de jouissance.

Accessoirement, ils sollicitent une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et la condamnation des appelants aux dépens en ce, compris les frais d'exécution de la décision de première instance.

A la forclusion opposée par Monsieur X... et Madame Y..., ils objectent que conformément à l'article 1648 du Code civil, l'assignation en référé-expertise est intervenue dans les deux ans de la découverte du vice, dont la gravité et le caractère évolutif ont, de surcroît, été mis en évidence par l'expertise elle-même.

Ils contestent également le caractère apparent des fissures, en faisant valoir qu'elles se trouvaient, lors de leurs visites, soigneusement cachées par des stores et des rideaux, et ajoutent que les vendeurs ne les ont jamais informés de ce que l'immeuble avait fait l'objet d'un sinistre décennal lié à des tassements, et qui avait donné lieu à indemnisation par l'assureur. Ils en concluent que les vendeurs connaissaient les vices affectant le bien vendu, et qu'en conséquence, la clause de non-garantie stipulée dans l'acte de vente doit être écartée.

Quant au préjudice, ils exposent que la structure de la véranda s'est tellement déformée qu'elle n'est plus étanche à l'eau ni à l'air, que la dalle sur laquelle elle repose plonge de manière excessive, et que selon l'expert judiciaire, ces désordres ne peuvent que s'aggraver. Ils en concluent que l'ouvrage actuel est inutilisable, et doit être remplacé.

DISCUSSION

Sur la forclusion

Les époux Z... ne fondent pas leur action sur l'article 1792 du Code civil, mais sur les articles 1641 et suivants du Code civil : le moyen tiré de ce qu'ils agissent plus de dix ans après l'achèvement de la véranda n'est donc pas pertinent, et la seule forclusion envisageable est celle prévue à l'article 1648 dudit code. Ce texte dispose, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance no 2005-136 du 17 février 2005, qui l'a modifié mais qui n'est applicable qu'aux contrats conclus après son entrée en vigueur : " L'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un bref délai, suivant la nature des vices rédhibitoires, et l'usage du lieu où la vente a été faite ".

Il était déjà admis, à cette époque, que le délai pour agir avait pour point de départ la découverte du vice par l'acheteur.

En l'espèce, il ne peut être valablement reproché aux époux Z... de n'avoir pas agi à bref délai alors que la vente a été conclue le 6 septembre 2002, que dès le 3 janvier 2003, les acquéreurs ont fait assigner les vendeurs en référé afin de voir ordonner une expertise sur les désordres, que le rapport d'expertise judiciaire n'a été déposé que le 30 août 2005, et que l'assignation au fond est intervenue le 19 octobre suivant.

Sur la clause de non-garantie

L'article 1643 du Code civil dispose que le vendeur " est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie " ; il en résulte que le vendeur qui connaissait l'existence de vices avant la vente ou, au plus tard, au moment de la conclusion du contrat, ne peut pas utilement se prévaloir de la clause de non-garantie stipulée dans l'acte de vente.

Il convient donc de rechercher si, en l'espèce, les vendeurs connaissaient les vices qui font l'objet du litige, en prenant soin de distinguer les désordres affectant le pavillon lui-même, de ceux affectant la véranda qui, seuls, donnent lieu à demandes de la part des époux Z... et procèdent de causes différentes des précédents.

L'expert judiciaire, dont le rapport n'est pas contesté, souligne que " les désordres de la véranda sont indépendants de ceux constatés sur le bâtiment principal " ; ceux affectant le pavillon sont dus à une insuffisance des fondations ainsi qu'à un défaut d'exécution des micro-pieux destinés à arrêter les tassements constatés, et ont été pris en charge de la garantie décennale, tandis que les désordres affectant la véranda proviennent de la dalle qui la supporte, et que Monsieur B... qualifie d'" inadaptée au remblai de faible portance sur lequel elle repose ". Or, l'expert indique dans son rapport que cette dalle a été réalisée par Monsieur X..., ce que ce dernier ne conteste pas.

En sa qualité de fabricant, Monsieur X... doit être assimilé à un vendeur connaissant les vices de la chose, sans qu'il importe, à cet égard, qu'il ne soit pas un professionnel de l'immobilier ou de la construction. Quant à Madame Y..., elle ne pouvait ignorer que la véranda était affectée d'un vice, puisqu'une dame C... atteste qu'elle l'a sollicitée à plusieurs reprises pour l'aider à en refermer les fenêtres.

Les appelants sont donc mal fondés à opposer aux époux Z... la clause de non-garantie stipulée dans l'acte du 6 septembre 2002.

Sur le caractère apparent ou caché du vice

Il est contradictoire de la part des appelants d'invoquer dans leurs conclusions l'article 1642 du Code civil, tout en soutenant que " lors de la vente, la véranda ne comportait aucun désordre ". De plus, s'il n'est effectivement pas démontré que l'état de cette véranda était dissimulé par des stores ou par des rideaux, comme l'affirment les acquéreurs, il n'en demeure pas moins que ces derniers ne pouvaient pas avoir connaissance, avant la vente, du vice lui-même, à savoir l'inadaptation de la dalle au remblai sur lequel elle repose, et de son caractère évolutif. De plus, la déformation des châssis de la véranda n'était pas telle qu'elle ne pouvait échapper à un acheteur normalement diligent, comme le prouve l'une des photographies versées aux débats.

Enfin, les appelants ne justifient pas avoir informé les intimés de ce problème, et pour cause, puisqu'ils soutiennent qu'il n'existait pas lors de la vente.

Sur le caractère rédhibitoire du vice

Monsieur B... indique dans un pré-rapport avoir constaté un écartement de la véranda par rapport à la façade, ainsi qu'un décollement des façades latérales de la véranda par rapport au pavillon, entraînant une déformation des châssis coulissants, qui ne peuvent être manoeuvrés. Il confirme dans son rapport définitif que le basculement de la dalle supportant la véranda entraîne la déformation de celle-ci et le gauchissement des ouvertures.

Il est donc établi que le vice rend la véranda impropre à l'usage auquel on la destine, d'autant que l'expert judiciaire préconise le remplacement de cette construction et la réfection complète de la dalle qui la supporte.

Sur les dommages et intérêts alloués au titre du préjudice matériel

Monsieur B... a estimé le coût des travaux de réfection précités à 29 089, 15 euros, en soulignant que ce montant correspond à la mise en oeuvre de matériaux " plus performants " que ceux mis en oeuvre par Monsieur X... en 1992.

Les appelants ne produisent aucun élément qui contredirait cette évaluation : il n'y a donc pas lieu de réduire le montant des dommages et intérêts alloués par le Tribunal au titre du préjudice matériel.

Sur les dommages et intérêts alloués au titre du préjudice de jouissance

Les époux Z... ne produisent aucun élément nouveau qui justifierait une réévaluation de l'indemnité par le Tribunal au titre du préjudice de jouissance, laquelle constitue une indemnité suffisante.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Monsieur X... et Madame Y..., qui succombent sur l'essentiel du litige, seront condamnés aux entiers dépens d'appel, conformément au principe posé par l'article 696 du Code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu d'inclure dans cette condamnation les frais d'exécution du jugement déféré, qui se trouvent nécessairement inclus dans la condamnation aux dépens prononcée par le Tribunal, en vertu de l'article 695 dudit code.

Par ailleurs, il serait inéquitable de laisser à la charge des époux Z... l'intégralité des frais qu'ils ont dû exposer en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens : aussi les appelants seront-ils condamnés à leur payer de ce chef 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, et en dernier ressort,

Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement déféré ;

Y ajoutant,

Condamne Monsieur X... et Madame Y... à payer aux époux Z... 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Dit n'y avoir lieu de condamner les appelants aux frais d'exécution du jugement dont appel, ceux-ci se trouvant inclus dans la condamnation aux dépens prononcée par le Tribunal ;

Condamne Monsieur X... et Madame Y... aux entiers dépens d'appel, avec application au profit de la S. C. P. Tetelin-Marguet et de Surirey du droit de recouvrement direct prévu à l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Ct0339
Numéro d'arrêt : 06/04899
Date de la décision : 15/05/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance d'Amiens, 06 décembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.amiens;arret;2008-05-15;06.04899 ?
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