ARRET No
X...
C /
S. A. S. ONLINE LA SOCIETE COSAL SYNDICAT DES AVOCATS LIBRES
SCH. / JL
COUR D'APPEL D'AMIENS
1ère chambre- 2ème section
ARRET DU 24 AVRIL 2008
RG : 07 / 00008 et RG : 07 / 03478, affaires jointes par le présent arrêt
APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES REFERES DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SENLIS du 22 décembre 2006
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT
Monsieur Roland X...... 75002 PARIS
Représenté par la SCP MILLON- PLATEAU, avoués à la Cour qui dépose son dossier.
ET :
INTIMEES
S. A. S. ONLINE... 75008 PARIS
Représentée par la SCP JACQUES LEMAL ET AURELIE GUYOT, avoués à la Cour et ayant pour avocat Me Yves COURSIN, du barreau de PARIS
LA SOCIETE COSAL SYNDICAT DES AVOCATS LIBRES Siège social... 75014 PARIS
Représentée par Me Jacques CAUSSAIN, avoué à la Cour et plaidant par Me Elisabeth Z..., avocat au barreau de PARIS
DEBATS :
A l'audience publique du 05 Février 2008, devant :
Mme SCHOENDOERFFER, Président, entendue en son rapport, M. FLORENTIN et Mme SIX, Conseillers,
qui en ont délibéré conformément à la Loi, le Président a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 24 Avril 2008
GREFFIER : Mme PILVOIX
PRONONCE :
Le 24 Avril 2008 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; Mme SCHOENDOERFFER, Président, a signé la minute avec M. DROUVIN, Greffier.
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DECISION :
La cour statue sur les appels interjetés par Roland X..., d'une ordonnance de référé rendue, le 22 décembre 2006, par le président du tribunal de grande instance de d'instance de SENLIS, dans un litige l'opposant au SYNDICAT DES AVOCATS LIBRES « COSAL » et à la société ONLINE.
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Le SYNDICAT DES AVOCATS LIBRE COSAL a été constitué le 2 juin 2004 et enregistré le 8 juin 2004 à la mairie de Paris. Ce syndicat a déposé le 10 février 2000 à l'INPI la marque figurative « *COSAL » sur fond bleu, dans les classes 16, 35, 41 et 42. Il exploite un site Internet accessible par le nom de domaine www.cosal.net.
Roland X..., avocat au barreau de Paris, adhérant au COSAL, s'est porté candidat aux élections ordinales de novembre 2006 avec le soutien du syndicat. Une dissension est intervenue peu de temps avant les élections entre ce candidat et le président du syndicat. À la suite de cette dissension Roland X... a enregistré les noms de domaine cosal.fr et cosal-barreau-de-Paris.com. Il a en outre exploité deux sites Internet accessibles par ces noms de domaine.
Le syndicat des avocats libres COSAL s'est fait autoriser le 11 septembre 2006 à faire assigner pour le 18 décembre 2006 à 14 heures, Roland X... en son nom personnel et en sa qualité de directeur de publication des deux sites ainsi que la société ONLINE, hébergeur des deux sites afin de faire cesser cette exploitation sous astreinte.
Par ordonnance rendue le 22 décembre 2006, le président du tribunal de grande instance d'instance de Senlis, a :
au principal, renvoyé les parties à se pourvoir au fond et, immédiatement, provisoirement :- rejeté les exceptions d'irrecevabilité,- donné acte au COSAL de ce qu'il renonce à sa demande de condamnation à l'encontre de la société ONLINE dès lors que celle- ci s'est engagée à exécuter la décision,
- ordonné la fermeture des deux sites Internet accessibles par les noms de domaine cosal.fr et cosal-barreau-de-Paris.com dans un délai de 24 heures suivant la signification de sa décision,
- ordonné le transfert du nom de domaine cosal- barreau- de- Paris. com au profit du COSAL dans le même délai,
- ordonné à la société ONLINE d'effectuer dans le même délai auprès de l'AFNIC les formalités de transfert du nom de domaine cosal. fr au profit du COSAL,
- fait interdiction à Roland X..., directement ou par l'intermédiaire de toute personne physique ou morale, d'ouvrir un nouveau site comportant la dénomination COSAL, sous astreinte de 2000 € par infractions,
- ordonné à Roland X... de cesser d'exploiter la dénomination COSAL sous astreinte de 2000 € par infraction, se réservant la liquidation éventuelle de cette astreinte,
- condamné Roland X... à payer au syndicat COSAL un euro à titre de dommages- intérêts sous astreinte de 2000 € par infraction, se réservant la liquidation éventuelle de cette astreinte,
- condamné Roland X... à payer au syndicat COSAL un euro à titre de dommages- intérêts, outre 2000 € sur le fondement de l'articles 700 du nouveau Code de procédure civile,
- condamné Roland X... aux dépens.
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Roland X... a interjeté appel de cette décision le 2 janvier 2007 à l'encontre du SYNDICAT DES AVOCATS LIBRES COSAL et le 22 août 2007 à nouveau à l'encontre de ce même syndicat et à l'encontre de la société ONLINE. Le premier de ces appels a été enregistré au rôle général de la cour sous le numéro 07 / 08 et le second sous le numéro 07 / 3418.
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Par ses dernières écritures signifiées le 23 novembre 2007, Roland X... demande à la cour, au visa des articles L. 716-6 du nouveau code de la propriété intellectuelle (sic) et 810 du nouveau code de procédure civile, de :
- annuler l'ordonnance de référé de la présidente du tribunal de grande instance de Senlis dans toutes ses dispositions,
à titre subsidiaire,- dire que les demandes formulées au nom du SYNDICAT COSAL sont irrecevables,
- condamner COSAL à lui payer la somme de 5 000 € au titre de l'articles 700 du nouveau code de procédure civile,
- condamner COSAL aux entiers dépens de première instance et d'appel.
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LE SYNDICAT DES AVOCATS LIBRES COSAL, par ses dernières conclusions signifiées le 31 août 2007, au visa de l'article 809 du nouveau code de procédure civile, demande à la cour de
confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance prononcée le 22 décembre 2006,
- condamner Roland X... à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les entiers dépens.
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La société ONLINE par ses dernières écritures signifiées le 29 novembre 2007, demande à la cour de :
- lui donner acte qu'elle ne maîtrise pas les décisions relatives au sort des noms de domaines concernés,
- lui donner acte de ce qu'elle est en mesure de :
maintenir ou mettre un terme à la fermeture des deux sites Internet susceptibles d'être accessibles par les noms de domaine cosal. fr et cosal- barreau- de- Paris. com, dans les 48 heures à compter de la signification de l'arrêt,
maintenir le nom de domaine cosal- barreau- de- Paris. com dans son état actuel ou le transférer, dans les 48 heures à compter de la signification de l'arrêt et de la transmission des coordonnées administratives et techniques du nouveau titulaire, si celui- ci existe toujours lors de la décision à intervenir,
maintenir le nom de domaine cosal. fr dans son état actuel ou effectuer les formalités dans les 48 heures à compter de la signification de l'arrêt, en vue de son transfert auprès l'AFNIC, (association française pour le nommage Internet en coopération), si celui- ci existe toujours lors de la décision à intervenir,
- condamner la partie tenue aux dépens ou à défaut la partie perdante, à savoir : soit Roland X... soit COSAL, SYNDICAT DES AVOCATS LIBRES,
à lui payer la somme de 2000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les entiers dépens.
CECI EXPOSE, LA COUR
Attendu que les appels interjetés les 2 janvier 2007 et 22 août 2007 par Roland X..., inscrits au rôle général de la cour sous les numéros 07 / 08 et 07 / 3418, sont relatifs à la même décision qu'il convient donc d'en ordonner la jonction ;
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Attendu que Roland X... fait valoir que l'action de COSAL. était irrecevable faute par lui d'avoir préalablement saisi le tribunal d'une action en contrefaçon, que contrairement à ce qui a été jugé, le juge des référés ne pouvait examiner la demande sur le fondement des articles 808 et 809 du nouveau code de procédure civile, l'article 810 de ce même code disposant que la procédure de référé résultant des articles 808 et 809 s'étend à toutes les matières où il n'existe pas de procédure particulière de référé ; qu'en matière de marques les dispositions de l'article L. 716-6 du code de la propriété intellectuelle excluent le recours au référé droit commun ;
Qu'à titre subsidiaire, il soutient que le procès- verbal du 4 décembre 2006, versé aux débats est un faux qui ne fait même pas mention des membres du bureau présents à la réunion, de même que le procès- verbal de la réunion du bureau qui se serait tenue le 8 décembre 2006 et argue de ce que Maud B... et Élisabeth Z... qui représentaient le syndicat COSAL lors de l'audience de référé n'avaient pas été désignées par l'assemblée générale pour agir en justice au nom du syndicat et ce d'autant plus que la représentation par avocat en référé n'est pas obligatoire ; qu'il soutient encore que l'action tendant à empêcher un avocat de s'exprimer est contraire à l'objet même du syndicat ; que le président du syndicat n'a pas été autorisé à engager l'action conformément à l'article 5 des statuts que dès lors l'action est irrecevable ;
Qu'il soutient encore que la marque COSAL encourt la nullité dès lors que le syndicat n'est ni commerçant ni fabricant et que sa marque ne peut être qu'une marque collective de certification ; qu'enfin la marque ne confère des droits que pour les produits et services qu'elle désigne ;
Attendu que le SYNDICAT DES AVOCATS LIBRES COSAL rappelle qu'il a déposé sa marque « * COSAL » pour les classes de produits 16, 35, 41 et 42, le 10 février 2006 et qu'il exploite un site Internet adresse www. cosal. net ; que par ses sites cosal. fr et cosal- barreau- de- Paris. com, Roland X... porte atteinte à sa marque et fait croire aux visiteurs de son site qu'il est membre du bureau du COSAL et s'exprime au nom du syndicat alors qu'il n'en est même plus membre aujourd'hui ;
Attendu, ceci exposé, que l'assignation délivrée à Roland X... par le SYNDICAT DES AVOCATS LIBRES COSAL, l'a été au nom syndicat agissant par son président Vincent Y... ;
Qu'aux termes de l'article 56 des statuts de COSAL, sur décision du bureau, le syndicat peut ester en justice dans le respect de son objet social devant toutes les juridictions françaises ou internationales, notamment étatiques, arbitrales ou ordinales ; qu'il est représenté par son président en exercice ;
Attendu que le fait que ce président ait pu se présenter en personne à l'audience du juge des référés ne lui interdisait nullement de demander à deux avocats de représenter le syndicat devant ce juge, peu important que ces avocats aient été ou non désignés par le bureau ;
Attendu que COSAL verse aux débats les procès- verbaux des réunions de son bureau des 4 décembre 2006 et 8 décembre 2006 autorisant le président de ce syndicat à agir en justice à l'encontre de Roland X... afin de faire « respecter les attributs de la marque COSAL lui appartenant et de voir ordonner judiciairement la fermeture du site pirate ouvert au nom de Roland X... à l'adresse www. cosal. fr et www. cosal- barreau- de- Paris. com » ;
Attendu que rien ne permet de dire que ces procès- verbaux seraient des faux ;
Qu'en l'absence de toute indication sur le nom des membres du bureau Roland X... ne rapporte pas la preuve que la majorité nécessaire n'aurait pas été acquise pour ce vote, étant observé que les pièces produites par lui sont relatives à la démission d'un membre du bureau intervenue un an auparavant ;
Attendu que si aux termes des dispositions de l'article 810 du code de procédure civile les pouvoirs du président du tribunal de grande instance prévus aux articles 808 et 809 du même code s'étendent à toutes les matières où il n'existe pas de procédure particulière de référé, la procédure de l'article L. 716-6 du code de la propriété intellectuelle ne constitue pas une procédure particulière de référé, étant observé que le président de la juridiction saisie d'une action en contrefaçon statue, non pas comme juge des référés, mais en la forme des référés et porte en outre une appréciation sur le fond de l'affaire puisqu'il doit constater que l'action au fond apparaît sérieuse ; que malgré l'existence de cette action de l'article L. 716-6 du code de la propriété intellectuelle, l'action en référé de droit commun peut être exercée pour mettre fin à un trouble manifestement illicite ou prévenir un dommage imminent ;
Que dès lors l'action introduite devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Senlis, d'ailleurs saisi tant sur le fondement de l'article L. 716-6 du code de la propriété intellectuelle que sur celui des articles 808 et 809 du code de procédure civile était recevable sur ce dernier fondement sans qu'il soit nécessaire qu'une action ait été introduite préalablement en contrefaçon étant encore relevé que le syndicat agissait tant au titre de la protection de sa marque qu'à celle de sa dénomination ;
Attendu que la circonstance qu'aux termes de ses statuts déposés en 2004, le syndicat des avocats libres COSAL a pour objet, notamment, la défense des intérêts matériels et moraux, collectifs et individuels des avocats, la défense de la liberté des avocats et à ce titre l'abolition des Ordres des Avocats sous leur forme actuelle, la défense des avocats dans la liberté mise en cause par quelque pouvoir que ce soit, le resserrement des liens entre avocats et la promotion de la solidarité, ne lui interdit nullement d'agir en justice pour défendre ses droits contre toute usurpation ou risque de confusion, serait- ce contre un avocat ;
Attendu que l'ordonnance dont appel sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a dit l'action recevable ;
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Attendu qu'il n'appartient pas au juge des référés de juger de la validité d'une marque ;
Qu'il peut seulement constater l'existence d'un trouble manifestement illicite ;
Attendu que l'enregistrement de la marque confère à son titulaire un droit de propriété sur cette marque pour les produits et services qu'il a désignés ; qu'en l'espèce le syndicat COSAL a déposé la marque pour : Les Produits de l'imprimerie ; matériel d'instruction ou d'enseignement (à l'exception des appareils) ; affiches ; albums ; cartes ; livres ; journaux ; prospectus ; brochures ; Publicité ; publication de textes publicitaire ; publicité radiophonique et télévisée ; Reproduction de documents. Gestion de fichiers informatiques. Éducation ; enseignement ; Organisation de séminaires, colloques, conférences, recherche de documentation juridique et technique recherche judiciaire prêt, et mise à disposition (prêt location) de documentation juridique et technique publication de livres, prêt de livres, dans les classes de produits 16, 35, 41 et 42 ;
Que dès lors, l'enregistrement des noms de domaine www. cosal. fr et www. cosal- barreau- de- Paris. com ne constitue pas un trouble manifestement illicite au regard du droit des marques étant observé que les sites correspondant ont pour objet la communication et l'information, services de la classe 38 et non pas les produits des classes 16, 35, 41 et 42 sus énumérés ;
Attendu qu'en revanche, la création de ces sites qui traitent pour l'un de la candidature de Roland X... au conseil de l'ordre et pour l'autre qui renvoie au site de ce dernier ainsi que cela ressort du procès- verbal de constat établi par Pierre-J. A..., huissier de justice, et de la pièce no 20 du bordereau de communication de pièces du syndicat, entraîne un risque de confusion avec ce syndicat dénommé depuis sa création COSAL et qui exploite lui- même un site www. cosal. net, enregistré dès avant le mois d'octobre 2006, alors que Roland X... ne prétend à aucun droit sur la dénomination COSAL et a fortiori ne justifie pas d'un tel droit ;
Que ce risque de confusion caractérise un trouble manifestement illicite ; qu'il convient donc de confirmer purement et simplement l'ordonnance entreprise ;
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Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge du SYNDICAT DES AVOCATS LIBRES COSAL les frais irrépétibles de l'instance en appel qui lui sera alloué à ce titre une indemnité supplémentaire de 1500 €
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Attendu que les " donner actes " demandés par la société ONLINE sont sans valeur juridique et n'ont pas lieu d'être donnés ;
Attendu qu'il serait également inéquitable de laisser à la charge de la société ONLINE et les frais irrépétibles de l'instance en appel qu'il lui sera alloué à ce titre une somme de 1 500 € ;
PAR CES MOTIFS,
Statuant par arrêt contradictoire,
Ordonne la jonction des affaires enrôlées au rôle général de la cour sous les numéros à 07 / 08 et 07 / 3418
Confirme l'ordonnance entreprise ;
Y ajoutant,
Dit les demandes de " donner acte " de la société ONLINE sans objet ;
Condamne Roland X... à payer au SYNDICAT DES AVOCATS LIBRES COSAL, au titre de l'instance en appel, la somme supplémentaire de MILLE CINQ CENTS EUROS (1 500 €) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne Roland X... à payer à la société ONLINE la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1 500 €) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne Roland X... aux entiers dépens d'appel, dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,