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06/03/2008 | FRANCE | N°04/04223

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Ct0038, 06 mars 2008, 04/04223


ARRET
No

SA LEASECOM

C /

X...
SA LA COMPAGNIE AXA FRANCE IARD

GRA. / BG.

COUR D'APPEL D'AMIENS

1ère chambre- 1ère section

ARRET DU 06 MARS 2008

RG : 04 / 04223

APPEL D'UN JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BEAUVAIS du 26 août 2004

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

SA LEASECOM
38 Avenue Hoche
75008 PARIS

Représentée par la SCP MILLON- PLATEAU, avoués à la Cour et plaidant par Me Philippe BRUNSWICK, avocat au barreau de PARIS

ET :

INTIMES

Monsi

eur Jean X...
...
60000 SAINT MARTIN LE NOEUD

Représenté par la SCP TETELIN MARGUET ET DE SURIREY, avoués à la Cour et plaidant par Me MASSOT, avocat au barrea...

ARRET
No

SA LEASECOM

C /

X...
SA LA COMPAGNIE AXA FRANCE IARD

GRA. / BG.

COUR D'APPEL D'AMIENS

1ère chambre- 1ère section

ARRET DU 06 MARS 2008

RG : 04 / 04223

APPEL D'UN JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BEAUVAIS du 26 août 2004

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

SA LEASECOM
38 Avenue Hoche
75008 PARIS

Représentée par la SCP MILLON- PLATEAU, avoués à la Cour et plaidant par Me Philippe BRUNSWICK, avocat au barreau de PARIS

ET :

INTIMES

Monsieur Jean X...
...
60000 SAINT MARTIN LE NOEUD

Représenté par la SCP TETELIN MARGUET ET DE SURIREY, avoués à la Cour et plaidant par Me MASSOT, avocat au barreau de PARIS

SA LA COMPAGNIE AXA FRANCE IARD
26 rue Drouot
75009 PARIS

Représentée par Me Jacques CAUSSAIN, avoué à la Cour et plaidant par Me LEEMAN, avocat au barreau de BEAUVAIS

DEBATS :

A l'audience publique du 10 Janvier 2008, devant :

M. GRANDPIERRE, Président, entendu en son rapport,
Mme CORBEL et M. DAMULOT, Conseillers,

qui en ont délibéré conformément à la Loi, le Président a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 06 Mars 2008.

GREFFIER : M. DROUVIN

PRONONCE PUBLIQUEMENT :

Le 06 Mars 2008 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile ; M. GRANDPIERRE, Président, a signé la minute avec M. DROUVIN, Greffier.

*
* *

DECISION :

Statuant sur l'appel interjeté par la société Leasecom, anciennement dénommée Locaplus puis Locabail, contre le jugement rendu le 26 août 2004 par le Tribunal de grande instance de Beauvais qui l'a déclarée irrecevable en ses demandes dirigées contre Jean X..., commissaire aux comptes de la société Erom, et la société AXA France, son assureur, et tendant au payement d'une somme de 38. 713. 581, 60 euros en réparation du préjudice subi à la suite de la déconfiture de ladite société et à raison des fautes commises par son commissaire aux comptes, ensemble l'a condamnée à payer à Jean X... et à la société AXA France, chacun la somme de 1. 500 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Considérant que la société Leasecom, qui poursuit l'infirmation du jugement, demande que Jean X... soit condamné à lui payer la somme de 30. 370. 424, 43 euros à titre de dommages et intérêts, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 février 2000, et qu'il soit pris acte que la société AXA France garantit Jean X... ;

Qu'à ces fins et après avoir exposé qu'elle est spécialisée dans la location à long terme de matériels et d'équipements professionnels, qu'en 1992, elle a conclu avec la société Erom divers accords de collaboration, que, par jugement rendu le 6 mars 1995, le tribunal de commerce de Senlis a placé la société Erom en redressement judiciaire, qu'elle a déclaré sa créance et que les dirigeants de cette société, auteurs d'agissements frauduleux, ont été poursuivis et condamnés pénalement, la société Leasecom soutient que Jean X..., commissaire aux comptes, a commis des fautes en ne s'apercevant pas que les comptes ne donnaient pas une image fidèle de la situation patrimoniale et financière de la société et que ces manquements sont à l'origine du préjudice qu'elle a subi dès lors qu'elle n'aurait pas poursuivi ses relations contractuelles si elle avait su que les comptes certifiés dissimulaient, en réalité, une situation gravement obérée ;

Que, d'abord et pour critiquer le jugement frappé d'appel, l'appelante souligne qu'elle agit, non pas contre la société Erom, mais contre le commissaire aux comptes, qui est un tiers, et qu'elle invoque un préjudice direct qui lui est propre de sorte que son action est recevable comme ne se heurtant pas à la prohibition des actions individuelles ;

Considérant que, sur ce point, Jean X..., qui conclut à la confirmation du jugement, fait valoir qu'il lui est reproché d'avoir certifié les comptes qui ne faisaient pas apparaître la situation réelle de la société Erom et d'avoir, ainsi, permis à cette société de poursuivre ses activités de sorte que tous les créanciers se trouvent dans une situation identique et que, partant, la société Leasecom, qui ne démontre pas l'existence d'un préjudice propre, n'est pas fondée à se prévaloir d'un intérêt personnel ;

Considérant que la société AXA France conclut pareillement à la confirmation du jugement en se référant à l'argumentation développée par Jean X... sur l'irrecevabilité de l'action engagée par la société Leasecom ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 621- 39 du Code de commerce, « sans préjudice des droits reconnus au contrôleur, le représentant des créanciers désigné par le tribunal a seul qualité pour agir au nom et dans l'intérêt des créanciers... », que « les sommes recouvrées à la suite des actions du représentant des créanciers entrent dans le patrimoine du débiteur » et qu'elles « sont affectées, en cas de continuation de l'entreprise, selon les modalités prévues pour l'apurement du passif » ; qu'en vertu de l'article L. 621- 68 du même code, cette qualité pour agir est attribuée au commissaire à l'exécution du plan de cession ; qu'il s'infère de ces textes que seuls le représentant des créanciers et le commissaire à l'exécution du plan ont qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers ;

Considérant que l'arrêt des poursuites n'a lieu que contre le débiteur et que la prohibition cesse de s'appliquer lorsque l'action est engagée contre un tiers en vertu d'un droit propre ;

Que, si un ou plusieurs créanciers sont autorisés, malgré la règle de l'arrêt des poursuites individuelles, à agir en responsabilité délictuelle ou quasi- délictuelle contre un tiers en vue d'obtenir la réparation d'un préjudice, encore faut- il qu'ils démontrent l'existence d'une faute spécifique commise par ce tiers et un préjudice direct, personnel et distinct de celui des autres créanciers ;

Considérant qu'en l'espèce, la société Leasecom fait grief à Jean X... d'avoir, en sa qualité de commissaire aux comptes, certifié les comptes de la société Erom sans procéder à un examen approfondi de la situation patrimoniale, financière et comptable de la société et, partant, de n'avoir pas décelé, en temps utile, les agissements frauduleux de ses dirigeants ;

Qu'à cet égard, la société Leasecom expose elle- même, en page 20 de ses dernières conclusions, que « si les détournements réalisés par les dirigeants d'Erom et rendus possibles par la carence du commissaire aux comptes n'avaient pas existé, elle n'aurait, pour l'essentiel, jamais été créancière d'Erom », que « si le commissaire aux comptes avait accompli sa mission de façon non fautive, elle n'aurait jamais été en relation contractuelle avec Erom » et qu'en « tous cas, elle n'aurait pas subi un préjudice résultant du détournement, par les dirigeants de celle- ci, des ses matériels et loyers » ; qu'elle ajoute encore que « les détournements qu'elle a subis... résultent de la prolongation anormale de la vie de la société Erom, prolongation pendant laquelle ses dirigeants ont accompli les agissements directement préjudiciables... dont elle demande réparation tant auxdits dirigeants qu'au commissaire aux comptes fautifs » ;

Que, contrairement à ce qu'en déduit la société Leasecom, une telle situation n'est aucunement caractéristique de fautes ou de manquements qui lui auraient occasionné un préjudice direct, personnel et distinct de celui des autres créanciers de la société Erom ;

Que, comme l'ont exactement relevé les premiers juges, la certification de comptes inexacts a déterminé l'ensemble des cocontractants de la société Erom à poursuivre leurs relations d'affaires avec cette société dans la croyance de sa solvabilité et sa bonne situation financière ; que le préjudice subi par les créanciers de la société Erom est donc collectif alors surtout que, d'une part, il n'est aucunement démontré, ni même allégué, que les comptes certifiés par Jean X... auraient été sciemment fournis à la société Leasecom pour l'inciter à engager ou maintenir ses relations contractuelles, et que, d'autre part, elle n'opère aucune distinction entre le dommage qu'elle prétend subir à raison de la faute imputée à Jean X... et le préjudice consécutif à l'insuffisance d'actif ;

Qu'en réalité, les manquements imputés à Jean X..., à supposer qu'ils soient avérés, n'ont pu avoir comme conséquence que de retarder la découverte des malversations commises par les dirigeants de la société Erom, d'aggraver le passif de la société et de compromettre le payement de l'ensemble des créanciers ;

Considérant qu'il suit de ce qui précède que la société Leasecom, qui ne démontre pas que Jean X... aurait commis une faute caractérisée à son égard, ne justifie pas d'un intérêt personnel, direct et distinct de celui de l'ensemble des créanciers de la société Erom de nature à lui permettre d'exercer une action individuelle ;

Qu'il convient, en conséquence, de confirmer, le jugement frappé d'appel ;

Et considérant que chacune des parties sollicite une indemnité en invoquant les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; que, succombant en ses prétentions et supportant les dépens, la société Leasecom sera déboutée de sa réclamation ; qu'en revanche, elle sera condamnée à payer à Jean X... et à la société AXA France les frais qui, non compris dans les dépens d'appel, seront arrêtés à 15. 000 euros pour Jean X... et à 8. 000 euros pour la société AXA France ;

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 26 août 2004 par le Tribunal de grande instance de Beauvais au profit de Jean X... et de la société AXA France ;

Déboute la société Leasecom de sa demande d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et la condamne, par application de ce texte, à verser à Jean X... la somme de 15. 000 euros et à la société AXA France la somme de 8. 000 euros ;

Condamne la société Leasecom aux dépens d'appel qui seront recouvrés par la S. C. P. Tételin- Marguet et de Surirey, avoué de Jean X..., et par Maître Caussain, avoué de la société AXA France, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Ct0038
Numéro d'arrêt : 04/04223
Date de la décision : 06/03/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Beauvais, 26 août 2004


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.amiens;arret;2008-03-06;04.04223 ?
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