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20/11/2007 | FRANCE | N°06/01970

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Ct0081, 20 novembre 2007, 06/01970


ARRET No

X... et autres
C /
Y... Z... CGEA D'AMIENS

jpa / pc
COUR D'APPEL D'AMIENS
5ème chambre sociale cabinet A
PRUD'HOMMES
ARRET DU 20 NOVEMBRE 2007
******************************************************************** RG : 06 / 01970 (jonction par arrêt en date du 05. 06. 2007 avec le numéro 06 / 02025 appel et contredit)

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES d'ABBEVILLE (REFERENCE DOSSIER No RG 05 / 00174) en date du 04 mai 2006
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTS
RG : 06 / 01970 et 06 / 02025
APPEL ET CONTREDIT, JUGEMENT DU CONS

EIL DE PRUD'HOMMES D'ABBEVILLE (REFERENCE DOSSIER No RG 05 / 00174) en date du 04 mai 2006
PARTIES E...

ARRET No

X... et autres
C /
Y... Z... CGEA D'AMIENS

jpa / pc
COUR D'APPEL D'AMIENS
5ème chambre sociale cabinet A
PRUD'HOMMES
ARRET DU 20 NOVEMBRE 2007
******************************************************************** RG : 06 / 01970 (jonction par arrêt en date du 05. 06. 2007 avec le numéro 06 / 02025 appel et contredit)

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES d'ABBEVILLE (REFERENCE DOSSIER No RG 05 / 00174) en date du 04 mai 2006
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTS
RG : 06 / 01970 et 06 / 02025
APPEL ET CONTREDIT, JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES D'ABBEVILLE (REFERENCE DOSSIER No RG 05 / 00174) en date du 04 mai 2006
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTS ET DEMANDEURS AU CONTREDIT
Monsieur Oulaïd X... né le 10 Décembre 1948 à ALGERIE, de nationalité Algérienne ...80132 VAUCHELLES LES QUESNOY

PARTIES ASSISTEES, REPRESENTEES, CONCLUANT ET PLAIDANT par Me Fiodor RILOV, avocat au barreau de PARIS et Me Carlo SANTULLI, avocat au barreau de PARIS
ET :
INTIMES ET DEFENDEURS AU CONTREDIT :
Monsieur Jörg Y..., ès qualités de liquidateur de la société VDN-VEREINIGTE DEUTSCHE NICKEL WERKE A. G ...

NON COMPARANT, REPRESENTE concluant et plaidant par Me Christophe NEVOUET, avocat au barreau de PARIS

Monsieur Nicolas Z... ès qualités de liquidateur de lasociété ABELIA DECORS ... 80100 ABBEVILLE

NON COMPARANT REPRESENTE concluant et plaidant par Me FRANTZEN substituant Me Thomas BUFFIN, avocat au barreau de LILLE

PARTIE INTERVENANTE ET DEFENDRESSE AU CONTREDIT :
LE CENTRE DE GESTION ET D'ETUDES AGS (CGEA) d'AMIENS ayant siège à AMIENS 80094,2, Rue de l'Etoile, délégation régionale AGS du Nord d'Est unité déconcentrée de L'UNEDIC association déclarée agissant poursuites et diligences de son président en qualité de gestionnaire de L'AGS en application de l'article L. 143-11-4 du Code du travail.

NON COMPARANT REPRESENTE concluant et plaidant par Me BOUQUET de la SCP LECLERCQ CARON BOUQUET CHIVOT, avocats au barreau D'AMIENS

DEBATS :
A l'audience publique du 13 Septembre 2007, devant M. AARON, Conseiller faisant fonctions de Président de Chambre, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du nouveau Code de procédure civile et sans opposition des parties, ont été entendus :
-M. AARON en son rapport,-les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives.

M. AARON a avisé les parties que l'arrêt sera prononcé le 20 Novembre 2007 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile,
GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme CAMBIEN
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
M. AARON en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, cabinet A de la Cour composée en outre de : Mmes BESSE et HAUDUIN, Conseillers qui en a délibéré conformément à la Loi

ARRET : CONTRADICTOIRE
PRONONCE :
Le 20 Novembre 2007, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme HAUDUIN, Conseiller, désignéE par ordonnance de M. le Premier Président pour remplacer le Président empêché et Mme CAMBIEN, Greffier présente lors du prononcé.
* * *

DECISION :
Le 20 novembre 2007, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme HAUDUIN, Conseiller, désignée par ordonnance de M. le Premier Président pour remplacer le Président empêché et Mme CAMBIEN, Greffier présente lors du prononcé.
* * *

DECISION :
Vu le jugement en date du 4 mai 2006 par lequel le conseil de prud'hommes d'Abbeville statuant dans le litige opposant Monsieur Oulaïd X... et 102 autres salariés à la Selarl Bernard et Nicolas Z... ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS ABELIA DECORS, à Monsieur Jöhg Y... ès qualités de liquidateur de la société Vereinigte Deutche Nickel-Werk AG (VDN), en présence de l'AGS-CGEA d'Amiens, s'est pour l'essentiel déclaré incompétent pour connaître du litige concernant la société VDN et a débouté les salariés de l'ensemble de leurs demandes afférentes au licenciement collectif pour motif économique dont ils ont été l'objet dans le cadre de la liquidation judiciaire de leur employeur, la société ABELIA DECORS ;
Vu le contredit de compétence et l'appel respectivement formés le 16 mai 2006 et le 10 mai 2006 par les salariés à l'encontre de cette décision ;
Vu la fixation de l'affaire à l'audience du 16 novembre 2006 et son renvoi contradictoire à l'audience du 12 avril 2007 ;
Vu les conclusions et observations orales des parties à l'audience des débats du 12 avril 2007 ;
Vu l'arrêt avant dire droit en date du 5 juin 2007 par lequel le cours de céans a ordonné la jonction des procédures d'appel et de contredit et ordonné la réouverture des débats afin que les parties présentent leurs moyens et observations contradictoires, au regard des dispositions combinées des articles L. 321-4-1 et L. 321 – 9 du code du travail dans leur rédaction applicable à la date des licenciements, quant à la possibilité offerte, d'une part à un salarié ayant adhéré à une convention ASFNE lui garantissant une indemnisation jusqu'au jour de sa retraite, et d'autre part à un salarié protégé ou à un représentant du personnel dont le licenciement a été autorisé par l'inspecteur du travail, de se prévaloir, à l'appui d'une demande de dommages et intérêts et dans l'hypothèse où la nullité du plan de sauvegarde de l'emploi et des licenciements ne serait pas encourue, de l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement consécutif au non respect par l'employeur de son obligation de reclassement ;
Vu les conclusions et observations orales des parties à l'audience du 13 septembre 2007 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions, moyens et observations présentés en demande et en défense suite à la réouverture des débats sur les moyens relevés d'office par la cour ;
Vu les conclusions récapitulatives enregistrées au greffe les 7 août et 11 septembre 2007, soutenues oralement à l'audience, aux termes desquelles les salariés demandeurs, réfutant les moyens d'irrecevabilité de l'appel et du contredit ainsi que l'exception d'incompétence soulevés par le liquidateur de la société VEREINIGTE DEUTCHE NICKEL-WERKE AG (V. D. N), dénonçant l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi leur ouvrant droit à indemnisation au titre de la nullité ou de l'absence de cause réelle et sérieuse de leurs licenciements, faisant valoir que la qualité de salariés protégés ou l'adhésion à une convention ASFNE ou à une convention de reclassement personnalisé de certains d'entre eux ne peuvent avoir pour effet de leur interdire de tirer les conséquences légales attachées à l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi et d'obtenir l'indemnisation de leur préjudice, sollicitent l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, la condamnation in solidum des sociétés ABELIA DECORS et V. D. N. représentées par leurs liquidateurs à leur payer, à hauteur des montants repris au dispositif de leurs écritures, une indemnisation équivalente à 48 mois de salaire, outre une indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi que la fixation de leurs créances, sous la garantie du CGEA d'Amiens, au passif de la procédure collective de la société ABELIA DECORS ;
Vu les conclusions en date du 13 septembre 2007, reprises oralement à l'audience, par lesquelles la société VDN demande à titre principal à la cour de déclarer l'appel et le contredit irrecevables par application des dispositions des articles 80 et 561 et suivants du nouveau code de procédure civile, subsidiairement confirmer le jugement entrepris en ce qu'il s'est déclaré matériellement incompétent pour connaître des demandes présentées à son encontre, plus subsidiairement dire ces demandes irrecevables au regard des dispositions du règlement européen no1346 / 2000 du 29 mai 2000, débouter en tout état de cause les salariés de leurs demandes et les condamner aux entiers dépens ;
Vu les conclusions en date du 31 août et 13 septembre 2007, reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles Maître Nicolas Z... (SELARL Bernard et Nicolas Z...) ès qualités de liquidateur judiciaire de la société ABELIA DECORS, réfutant les moyens et l'argumentation développés par les salariés au soutien de leur recours, demande à la cour de déclarer les salariés protégés dont le licenciement a été autorisé par l'inspecteur du travail ainsi que ceux bénéficiaires d'une convention ASFNE ou d'une convention de reclassement personnalisé irrecevables à agir en indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, confirmer pour le surplus le jugement déféré en ce que celui-ci a débouté les salariés de leurs demandes indemnitaires liées au caractère prétendument insuffisant du plan de sauvegarde de l'emploi et condamner chacun d'entre eux à lui payer une indemnité de 100 euros par application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 13 septembre 2007, soutenues oralement à l'audience, par lesquelles l'AGS-CGEA d'Amiens, rappelant que l'adhésion à une convention ASFNE prive en principe le salarié du droit de contester le bien fondé de son licenciement sauf en cas de fraude ou de vice du consentement, sollicite également le débouté des demandes présentées par les quatre salariés bénéficiaires d'une convention ASFNE et déclare s'en rapporter à justice sur la régularité du plan de sauvegarde de l'emploi, sauf à rappeler qu'une éventuelle irrégularité ou insuffisance de ce plan ne saurait être sanctionnée par la nullité de celui-ci et des licenciements consécutifs mais sur le fondement de l'absence de cause réelle et sérieuse de rupture et à opposer les plafonds et limites de sa garantie légale ;
SUR CE, LA COUR
Attendu qu'après avoir ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société ABELIA DECORS (filiale de la société de droit allemand VEREINIGTE DEUTSCHE NIKEL WERKE, ci-après V. D. N.) par jugement du 8 décembre 2004, le tribunal de commerce d'ABBEVILLE a par une seconde décision du 1er juin 2005 prononcé la liquidation judiciaire de cette société et désigné Maître Nicolas Z... (SELARL Bernard et Nicolas Z...) en qualité de mandataire liquidateur ; qu'après avoir mis en oeuvre la procédure de consultation prévue aux livres IV et III du code du travail et établi un plan de sauvegarde de l'emploi, le mandataire liquidateur a notifié à l'ensemble des salariés de l'entreprise (au nombre de 269) leur licenciement pour motif économique le 13 juin 2005 ;
Attendu que par requêtes en date des 16 et 19 décembre 2005 et 23 janvier 2006,103 salariés ont saisi le conseil de prud'hommes d'Abbeville de demandes dirigées contre les sociétés ABELIA DECORS et V. D. N. tendant au prononcé de la nullité du plan de sauvegarde de l'emploi et de leurs licenciements et à la condamnation solidaire de ces deux sociétés à leur payer à chacun des dommages et intérêts au titre de la nullité encourue du plan de sauvegarde ou de l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement ;
Attendu que statuant par jugement du 4 mai 2006, frappé d'appel et de contredit, le conseil de prud'hommes s'est prononcé comme indiqué ci-dessus ;
Attendu qu'il convient par souci d'une bonne administration de la justice de disjoindre les instances enregistrées au nom des salariés dont les noms sont repris ci-avant pour statuer à l'égard de chacun d'entre eux par arrêt distinct :
Attendu que le présent arrêt concerne Monsieur Cédric A... ;
Attendu concernant la recevabilité des recours qu'il résulte des dispositions de l'article 80, alinéa 1er, du nouveau code de procédure civile que lorsque le juge se prononce sur la compétence sans statuer sur le fond du litige, sa décision ne peut être attaquée que par la voie du contredit, quand bien même le juge aurait tranché la question de fond dont dépend la compétence ; qu'en vertu de l'article 323 du même code, en cas de pluralité de parties, les conditions d'exercice du contredit doivent, sauf le cas d'indivisibilité, s'apprécier à l'égard de chaque partie ; qu'en l'espèce le conseil de prud'hommes s'est déclaré incompétent pour connaître du litige opposant les salariés à la société V. D. N et a statué au fond à l'égard la liquidation judiciaire de la société ABELIA DECORS en rejetant les demandes indemnitaires dirigées contre celle-ci pour insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi ; que reposant l'une et l'autre sur l'insuffisance alléguée du plan de sauvegarde de l'emploi, les demandes de condamnations solidaires des sociétés ABELIA DECORS et V. D. N. présentaient entre elles un caractère d'indivisibilité, en sorte qu'ayant tranché la question de fond en rejetant le moyen de nullité pris de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi, le jugement du conseil de prud'hommes ne pouvait être attaqué sur le fond et sur la compétence que par la voie de l'appel ;
Attendu qu'il convient en l'état de dire la cour régulièrement saisie par la voie de l'appel régulièrement interjeté par les salariés le 10 mai 2006 et de déclarer irrecevable le contredit formé le 16 mai 2006 ;
Attendu concernant la compétence des juridictions prud'homales contestée par la société V. D. N que l'article L. 511-1 du code du travail confère compétence exclusive aux conseils de prud'hommes pour connaître des différends pouvant s'élever à l'occasion de tout contrat de travail entre les employeurs et les salariés qu'ils emploient ; que cette compétence exclusive s'étend notamment aux contestations relatives aux licenciements économiques individuels ou collectifs et dans ce dernier cas à l'appréciation de la validité et du caractère suffisant du plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'en l'espèce, le litige a bien trait à un différend en rapport avec les contrats individuels de travail des salariés et les demandes indemnitaires dirigées par ces derniers contre la procédure collective de la société ABELIA DECORS et contre la société V. D. N reposent sur la contestation de la légitimité de leur licenciement au regard de l'insuffisance des mesures contenues dans le plan de sauvegarde de l'emploi établi dans le cadre du licenciement collectif ; que la juridiction prud'homale est donc compétente pour connaître des demandes indemnitaires dirigées à la fois contre la procédure collective de la société ABELIA DECORS et contre la société V. D. N, le fait que ces demandes ne puissent prospérer à l'égard de cette dernière à raison du fait que celle-ci n'aurait pas la qualité d'employeur étant un moyen de défense au fond dénué d'incidence sur l'appréciation de la compétence des juridictions prud'homales ;
Attendu au fond qu'à moins d'établir une fraude de leur employeur ou un vice du consentement, les salariés licenciés pour motif économique et qui ont personnellement adhéré à une convention passée entre leur employeur et l'État, laquelle, compte tenu de leur classement dans la catégorie des salariés ne pouvant faire l'objet d'un reclassement, leur assure le versement d'une allocation spéciale jusqu'au jour de leur retraite, ne peuvent remettre en discussion la régularité et la légitimité de la rupture de leur contrat de travail, même dans le cas où la convention leur a été proposée dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi dont ils entendent contester la pertinence, ces principes s'appliquant aux licenciements prononcés dans le cadre d'une procédure collective, lesquels doivent intervenir dans le délai de quinze jours du jugement de liquidation judiciaire afin de préserver les droits des salariés vis à vis de l'AGS ;
Attendu que par arrêt distinct de ce jour la cour a décidé que les quatre salariés (Messieurs X... Oulaïd et autres) qui ont librement adhéré à une convention ASFNE qui leur a été proposée sans fraude dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi établi par l'employeur ne pouvaient, par application des principes ci-dessus rappelés, se prévaloir de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi à l'appui d'une demande indemnitaire au titre de leurs licenciements ;
Attendu que si par application des dispositions combinées des articles L. 321-4-1 et L. 321-9 dans leur rédaction applicable à la date des licenciements, la nullité de la procédure de licenciement et des licenciements subséquents n'est pas encourue en raison de l'absence ou de l'insuffisance d'un plan de sauvegarde de l'emploi établi dans le cadre d'une procédure collective, les salariés demeurent toutefois recevables et fondés à solliciter la réparation du préjudice causé par l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi ;
Attendu que nonobstant l'autorisation de licenciement délivrée par l'inspecteur du travail, laquelle n'implique aucune appréciation de la pertinence du plan de sauvegarde de l'emploi, les représentants du personnel ou salariés dits protégés conservent également la possibilité de poursuivre devant le juge judiciaire la réparation du préjudice consécutif au non respect par l'employeur de son obligation générale et collective de reclassement résultant du caractère insuffisant des mesures contenues dans le plan de sauvegarde ;
Attendu que la même solution doit prévaloir à l'égard des salariés ayant adhéré à une convention de reclassement personnalisé dès lors que l'adhésion à ce dispositif, comme auparavant l'adhésion à une convention de conversion, n'a pas pour effet de priver les salariés de la possibilité de se prévaloir à l'appui d'une demande indemnitaire, de l'absence de cause économique de licenciement, du non respect par l'employeur de son obligation individuelle de reclassement ou de l'absence ou de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi ;
Attendu que les salariés ayant adhéré à une convention de reclassement personnalisé, comme les représentants du personnel dont le licenciement a été autorisé par l'inspecteur du travail qu'ils aient ou non adhéré à une convention de reclassement personnalisé, sont donc recevables et fondés à poursuivre, au même titre que les salariés dits ordinaires, la réparation de leur préjudice consécutif à l'insuffisance alléguée du plan de sauvegarde de l'emploi ;
Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 321-4-1 du code du travail dans sa rédaction applicable en la cause, que tout licenciement pour motif économique de plus de dix salariés sur une même période de trente jours dans une entreprise employant au moins cinquante salariés doit donner lieu à l'établissement et à la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi destiné à éviter les licenciements ou à en limiter le nombre et à faciliter le reclassement du personnel dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment des salariés âgés ou qui présentent des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile ;
Qu'aux termes de l'alinéa 3 de ce texte, ce plan doit prévoir des mesures, telles que par exemple :
« – des actions en vue du reclassement interne des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ;
– des créations d'activités nouvelles par l'entreprise ;
– des actions favorisant le reclassement externe à l'entreprise, notamment par le soutien à la réactivation du bassin d'emploi ;
– des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés ;
– des actions de formation, de validation des acquis de l'expérience ou de reconversion de nature à faciliter le reclassement interne ou externe des salariés sur des emplois équivalents ;
– des mesures de réduction ou d'aménagement du temps de travail ainsi que des mesures de réduction du volume des heures supplémentaires (...) ; La validité du plan de sauvegarde de l'emploi est appréciée au regard des moyens dont dispose l'entreprise ou, le cas échéant, l'unité économique et sociale ou le groupe " ;

Attendu qu'ainsi défini le plan de sauvegarde de l'emploi impose à l'employeur de rechercher et proposer, en fonction des moyens dont il dispose, éventuellement appréciés au niveau du groupe auquel il appartient, toutes mesures propres à éviter les licenciements, à en réduire le nombre ou à en atténuer les effets notamment par le biais d'actions de reclassement externe ou d'accompagnement ;
Qu'il incombe ainsi à l'employeur de rechercher et proposer dans l'ordre les mesures propres à éviter les licenciements, celles susceptibles de permettre le reclassement interne des salariés au sein de l'entreprise ou des sociétés du groupe auquel elle appartient dont les activités et l'organisation structurelle permettent la permutation de tout ou partie du personnel, enfin les mesures de reclassement externe ou d'accompagnement ;
Attendu en l'espèce que si la liquidation judiciaire de la société ABELIA DECORS et sa cessation d'activité consécutive ont eu pour effet de rendre impossible le reclassement des salariés au sein de l'entreprise, cette circonstance ne dispensait pas son mandataire liquidateur de rechercher activement les possibilités de reclassement des salariés concernés par la mesure de licenciement collectif au sein des sociétés et filiales du groupe VDN (au nombre de 82), groupe contrôlant à 100 % la société ABELIA DECORS ;
Attendu qu'à cet égard, le plan de sauvegarde de l'emploi, qui ne comporte en lui-même aucune offre de reclassement au sein des sociétés du groupe VDN, se contente de mentionner que " des recherches de postes de reclassement ont été engagées au sein des différentes filiales du groupe auquel appartient la société, qui doivent communiquer le cas échéant à cette dernière une liste des postes disponibles avant le 9 juin prochain " ;
Attendu que s'il est établi que dès le 3 juin 2005 le mandataire liquidateur a interrogé la société VDN sur d'éventuelles possibilités de reclassement en joignant à sa demande une liste mentionnant la catégorie professionnelle et l'emploi occupé par les salariés concernés par le licenciement collectif, les éléments du dossier font apparaître que ces recherches de reclassement n'ont pas été étendues à l'ensemble des sociétés du groupe VDN ; que les pièces et documents produits font en effet apparaître que seules 43 sociétés sur les 82 composant le groupe ont été contactées aux fins de reclassement, dans des termes au demeurant inconnus, puisque seuls les avis de réception des lettres adressées à ces sociétés sont versés aux débats ;
Attendu qu'au regard du périmètre de reclassement envisageable couvrant l'ensemble des sociétés du groupe de dimension européenne VDN et si l'on considère par ailleurs qu'il n'est pas démontré en l'espèce que le mandataire liquidateur se serait trouvé dans l'impossibilité absolue de déterminer le périmètre de l'obligation de reclassement et d'identifier les différentes sociétés du groupe auprès desquelles le reclassement des salariés devait être recherché, les démarches entreprises ne sauraient être regardées comme suffisantes pour établir que le reclassement des salariés visés par le licenciement collectif aurait été activement et suffisamment recherché, aucun élément n'étant de surcroît fourni relativement à l'organisation et à la structure des effectifs des sociétés composant le groupe VDN de nature à faire apparaître que le reclassement des salariés au sein de ces sociétés, dont un grand nombre n'était pas affectée par la procédure collective de la société V. D. N., aurait été effectivement impossible ;
Attendu par ailleurs qu'à l'exception de la mise en place d'une cellule de reclassement externe, le plan de sauvegarde de l'emploi se contente de rappeler les dispositifs d'accompagnement et d'aide prévus par la loi (convention ASFNE, PARE Anticipé, convention de reclassement personnalisé, aide à la création d'entreprise) et de prévoir le versement des indemnités conventionnelles de licenciement et la levée des clauses de non concurrence ; qu'il ne comporte aucun engagement ou participation financière de l'entreprise ou du groupe pour la mise en oeuvre des mesures envisagées, ni une quelconque mesure en matière d'aide ou d'accompagnement des salariés, notamment pour ce qui a trait au soutien à la création ou à la reprise d'activités, à la mobilité ou à la formation, alors qu'il n'est nullement démontré que les sociétés ABELIA DECORS et VDN auraient été confrontées à une situation financière tellement dégradée qu'elles se seraient trouvées dans l'impossibilité de dégager la moindre enveloppe pour assurer le financement de mesures destinées à accompagner les salariés dans leur recherche d'un nouvel emploi ou dans leur reconversion professionnelle ; que les pièces et documents du dossier font à cet égard apparaître que l'actif disponible de la société ABELIA s'élevait à près de 1 500 000 euros, alors que la société VDN, qui avait réalisé en 2004 un chiffre d'affaires de 400 millions d'euros et dont le capital propre était estimé à 13 millions d'euros, disposait à la date de son placement en liquidation judiciaire par le tribunal de Cologne (1er septembre 2005) d'actifs disponibles et réalisables évalués par son mandataire liquidateur à 45 millions d'euros ;
Attendu qu'en l'état les mesures contenues dans le plan de sauvegarde de l'emploi doivent être considérées comme insuffisantes au regard des prescriptions de l'article L. 321 – 4 – 1 du code du travail ;
Que la charge de l'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi conforme aux prescriptions légales incombant à l'employeur, la société ABELIA DECORS doit être considérée dans ses rapports avec les salariés comme seule responsable des carences du plan social qu'elle a établi et tenue d'en supporter les conséquences qui s'en évincent, notamment en ce qui concerne la réparation du préjudice subi par les intéressés, l'inertie de la société VDN et le refus de participation de celle-ci à l'élaboration et au financement du plan de sauvegarde de l'emploi de sa filiale ABELIA DECORS relevant d'une action en responsabilité de cette dernière vis à vis de sa société mère qui échappe à la compétence des juridictions prud'homales ;
Attendu que si en application des dispositions combinées des articles L. 321 – 4 – 1 et L. 321 – 9 du code du travail, dans leur rédaction applicable à la date du licenciement, la nullité de la procédure de licenciement n'est pas encourue en raison de l'insuffisance du plan social ou de sauvegarde de l'emploi établi dans le cadre d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, l'insuffisance constatée des mesures contenues dans le plan fait nécessairement apparaître que tout n'a pas été fait pour favoriser le reclassement des salariés, en sorte que ces derniers demeurent fondés à solliciter à ce titre la réparation du préjudice en découlant ;
Attendu que pour les raisons indiquées ci-dessus et en l'état du droit applicable cette réparation doit être mise à la charge exclusive de la procédure collective de la société ABELIA DECORS qui a seule la qualité d'employeur des salariés ; que la demande de condamnation solidaire de la société VDN ne peut par conséquent être accueillie ;
Attendu qu'en considération de la situation particulière de Monsieur Cédric A..., notamment de son âge (24 ans) et de son ancienneté dans l'entreprise (2 ans et 5 mois), du montant de sa rémunération moyenne (1. 388,66 euros) la cour dispose des éléments nécessaires pour fixer sa créance de dommages et intérêts à la somme qui sera précisée au dispositif de l'arrêt ;
Attendu que les salariés n'étant pas indemnisés au titre de l'absence de cause réelle et sérieuse mais à raison de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi, les conditions d'application de l'article L. 122-14-4 du code du travail ne sont pas réunies et il n'y a donc pas lieu de faire application de ce texte en faveur de l'Assedic ;
Attendu qu'il convient en revanche de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au profit des salariés, d'allouer à chacun, pour l'ensemble de la procédure, une indemnité dont le montant sera précisé au dispositif de l'arrêt et de débouter la SELARL Z... ès qualités de ses demandes formées sur ce même fondement ;
PAR CES MOTIFS
Ordonne la disjonction des instances d'appel enregistrées sous le numéro 06 / / 01970 ;
Statuant à l'égard de Monsieur Cédric A... ;
Déclare recevable l'appel interjeté par Monsieur Cédric A... et irrecevable le contredit formé par celui-ci ;
Infirme le jugement entrepris en ces dispositions relatives à l'incompétence de la juridiction prud'homale pour connaître du litige opposant les salariés à la société V. D. N.
Déclare les juridictions prud'homales compétentes pour connaître de l'ensemble du litige y compris en ce qui concerne les demandes dirigées contre la société VDN. ;
Constate l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi établi par la société ABELIA DECORS ;
Fixe la créance de dommages et intérêts de Monsieur Cédric A... dans la procédure collective de l'entreprise à la somme suivante qui sera inscrite sur l'état des créance déposé au greffe du tribunal de commerce conformément aux dispositions de l'article L. 621-129 du code du commerce :
-8. 331,96 euros à titre de dommages et intérêts ;
Précise que le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que tous intérêts de retard et majorations ;
Déclare le présent arrêt opposable à l'AGS-CGEA d'Amiens qui sera tenu à garantie dans les limites prévues aux articles L. 143-11-8 et D. 143-2 du code du travail ;
Condamne Maître Nicolas Z... (SELARL Bernard et Nicolas Z...), ès qualités, à payer Monsieur Cédric A... une indemnité de 150 euros par application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires ;
Condamne Maître Nicolas Z... (SELARL Bernard et Nicolas Z...) ès qualités aux dépens de première instance et d'appel.
Le Greffier Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Ct0081
Numéro d'arrêt : 06/01970
Date de la décision : 20/11/2007

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes d'Abbeville, 04 mai 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.amiens;arret;2007-11-20;06.01970 ?
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