ARRET
No
X...
C /
Y... LJ SA COSPAN
Dar. / JL
COUR D'APPEL D'AMIENS
5ème chambre sociale cabinet B
PRUD'HOMMES
ARRET DU 26 SEPTEMBRE 2007
*************************************************************
RG : 06 / 02354
JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE BEAUVAIS en date du 23 mai 2005
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
Madame Louisa X...
...
60230 CHAMBLY
Représentée, concluant et plaidant par Me Dominique Z..., avocat au barreau de PARIS
ET :
INTIMEE
Madame Y..., prise en son nom personnel et en sa qualité de liquidatrice de la société COSPAN
......
...
60540 PUISEUX LE HAUBERGER
Représentée, concluant et plaidant par la SCP LHOMME HUCHET JOUGLA, avocats au barreau du HAVRE
DEBATS :
A l'audience publique du 09 Mai 2007 ont été entendus les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives devant Mme DARCHY, Président de chambre, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du nouveau Code de procédure civile et sans opposition des parties, qui a renvoyé l'affaire à l'audience publique du 20 juin 2007 pour prononcer l'arrêt par mise à disposition au greffe de la copie.
GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme LEROY
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme DARCHY en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, cabinet B de la Cour composée en outre de :
Mme BESSE, Conseiller,
Mme SEICHEL, Conseiller,
qui en a délibéré conformément à la loi.
Le 20 juin 2007, le délibéré a été prolongé au 26 septembre 2007 pour prononcé de l'arrêt par mise à disposition au greffe.
PRONONCE :
A l'audience publique du 26 Septembre 2007, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme DARCHY, Président de chambre et Mme LEROY, Greffier, présente lors du prononcé.
*
* *
DECISION :
Vu le jugement rendu le 23 mai 2005 par le conseil de prud'hommes de BEAUVAIS qui a débouté Louisa X... de l'ensemble de ses demandes.
Vu l'appel de cette décision interjeté le 9 juin 2005 par Louisa X....
Vu les conclusions et observations orales des parties à l'audience du 9 mai 2007 auxquelles il convient de se référer pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d'appel.
Vu les conclusions enregistrées le 9 mai 2007, reprises à l'audience par lesquelles, faisant essentiellement valoir qu'elle a toujours exercé son activité de femme de ménage au domicile de Madame Y... qui dirigeait différentes sociétés, que son employeur lui a fait une application volontaire de la convention collective de l'industrie chimique, que la procédure de licenciement qui ne lui a pas permis d'être assistée, est irrégulière, à titre subsidiaire que le motif du licenciement étant économique, les dispositions de l'article R 122-2 du code du travail plus favorables que la convention collective doivent lui être appliquées, à titre infiniment subsidiaire, à supposer applicable la convention collective des salariés des particuliers employeurs, qu'elle n'a pas été intégralement remplie de ses droits en matière d'indemnité de licenciement, qu'en tout état de cause le motif invoqué au soutien de son licenciement, à savoir la diminution des revenus des entreprises de Mme Y..., est à caractère économique, que celle-ci ne justifie pas du caractère réel des difficultés qu'elle invoque, que le licenciement critiqué qui lui a causé un important préjudice est sans cause réelle et sérieuse, Louisa X... demande à la Cour :
-d'infirmer le jugement qui lui est déféré,
-de condamner solidairement Mme Y... prise en son nom personnel et en sa qualité de liquidatrice de la société COSPAN à lui payer :
• à titre principal :
* la somme de 5. 781,72 € à titre de solde d'indemnité de licenciement,
* la somme de 1. 112,92 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure,
• à titre subsidiaire :
* la somme de 5. 145,39 € à titre de solde d'indemnité de licenciement,
* la somme de 1. 112,92 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure,
• à titre infiniment subsidiaire :
* la somme de 1. 589,89 € à titre de solde d'indemnité de licenciement,
ces sommes avec intérêt au taux légal à compter du jour de la demande,
• en tout état de cause, la somme de 15. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle de 3. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Vu les conclusions enregistrées le 9 mai 2007, soutenues à l'audience par lesquelles, contestant et réfutant les moyens et l'argumentation de l'appelante, Francine Y... prise en son nom personnel et en sa qualité de liquidatrice de la société COSPAN sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de l'appelante à lui payer la somme de 2. 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, en soutenant principalement qu'elle était personnellement l'employeur de Louisa X..., que la convention collective applicable était celle des gens de maison, que Louisa X... a été remplie de ses droits au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, que les employés de maison sont exclus du champ d'application de la procédure de licenciement pour motif économique, que le licenciement d'un employé de maison, même s'il repose sur un motif étranger à sa personne, n'est pas soumis aux dispositions concernant les licenciements pour cause économique, que les dispositions relatives à l'assistance du salarié lors de l'entretien préalable ne sont pas applicables aux employés de maison, que le refus de Louisa X... d'accepter une modification de son contrat de travail par une diminution d'horaires hebdomadaires, pour des raisons économiques, à savoir une diminution des revenus de l'employeur, constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement, que ni l'obligation de reclassement, ni la priorité de réembauchage ne s'appliquent en cas de licenciement d'un employé de maison, l'employeur étant dans ce cas un particulier et non une entreprise ;
SUR CE :
Attendu que Louisa X... a été embauchée par Madame Francine Y... en qualité de femme de ménage à compter 1er septembre 1981 ;
Attendu que le 22 mai 2002, Madame Y... écrivait à Louisa X... :
" Comme suite à notre dernier entretien du 13 mai 2002, je vous confirme par la présenté être dans l'obligation de modifier votre contrat de travail par une diminution d'horaires hebdomadaires, pour des raisons économiques.
En effet, la situation économique de mon entreprise a entraîné une diminution importante de mes revenus.
Vos nouveaux horaires se décomposeront comme suit :
Lundi9 h-12 h14 h-17 h
Mardi9 h-12 h14 h-17 h
Mercredi9 h-12 h14 h-17 h
Jeudi9 h-12 h14 h-17 h
Vendredi9 h-14 h 30
Soit un total hebdomadaire de 29 h ½
En application de l'article L 321-1-2 du code du travail, vous disposez d'un délai d'un mois à compter de la date de réception de cette lettre pour me faire connaître votre acceptation ou votre refus.A défaut de réponse de votre part, vous serez considérée comme ayant accepté la modification que je vous propose.
Cette modification prendra alors effet ".
Attendu que par courrier du 22 juin 2002, Louisa X... refusait la modification de son contrat de travail ;
Attendu que par courrier du 12 septembre 2002, elle était convoquée à un entretien préalable au licenciement, entretien fixé au 24 septembre 2002 puis était licenciée par une lettre en date du 1er octobre 2002 indiquant : " A la suite de notre entretien du 24 septembre 2002, nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour le motif suivant : proposition en date du 30 mai 2002 de modification substantielle de votre contrat de travail sous forme de réduction d'horaires que vous avez refusée par courrier en date du 22 juin 2002 ;
Votre préavis débutera...... "
Attendu que contestant son licenciement et estimant qu'elle n'avait pas été remplie de ses droits, Louisa X... a saisi le 21 avril 2004 le conseil de prud'hommes de BEAUVAIS qui par jugement du 23 mai 2005, dont elle a régulièrement interjeté appel, l'a déboutée de ses demandes ;
Attendu que si de septembre 1981 à avril 1993 les bulletins de salaire de Louisa X... ont mentionné comme employeur : Francine B... SA et si de mai 1993 à novembre 1993 ils ont mentionné comme employeur COSPAN SA et s'ils ont visé jusqu'en novembre 1993 la convention collective de l'industrie chimique, ils ont à partir de décembre 1993 mentionné comme employeur : " C...,... " et indiqué comme étant applicable la convention collective des agents de maison ;
Attendu qu'il est reconnu par les parties que Louisa X... a toujours travaillé comme femme de ménage au domicile personnel de Madame Y... ; qu'elle a donc exercé une activité professionnelle, pour laquelle elle a été rémunérée, au profit exclusif de Mme Y... et dans un lien de subordination à l'égard de celle-ci qui l'employait personnellement ; que la procédure de licenciement a été mise en oeuvre par Madame Y... sans aucunement faire référence à une quelconque société, que de même la salariée a adressé ses courriers à Mme Y... sans référence à une société ; que le contrat de travail existait donc entre Louisa X... et Madame Y... personnellement qui avait dès lors seule la qualité d'employeur, peu important qu'elle soit dirigeante de société ;
Attendu dans ces conditions que Madame Y... prise en sa qualité de liquidatrice de la société COSPAN doit être mise hors de cause ;
Attendu que la convention collective applicable se détermine par référence à l'activité principale de l'employeur ;
Attendu que Louisa X... ne peut se prévaloir d'une application volontaire valant usage de la convention collective de l'industrie chimique alors que depuis environ 10 ans ses bulletins de salaire faisaient référence à la convention collective des agents de maison et qu'elle ne justifie pas de la volonté claire et non équivoque de son employeur de lui octroyer le bénéfice d'une convention autre ne correspondant nullement à l'activité exercée, et sans aucun rapport avec cette activité ;
Attendu que la convention collective applicable est donc celle des particuliers employeurs ;
Attendu que les employés de maison sont exclus du champ d'application de la procédure de licenciement pour motif économique et le licenciement d'un employé de maison, même s'il repose sur un motif étranger à sa personne, n'est pas soumis aux dispositions concernant les licenciements pour motif économique ;
Attendu en effet que les particuliers employeurs ne sont pas des entreprises, seules soumises aux dispositions régissant le licenciement économique ;
Attendu que Louisa X... ne peut donc se prévaloir des dispositions de l'article R 122-2 du code du travail régissant l'indemnité de licenciement économique ;
Attendu qu'elle a perçu la somme de 1. 966,43 € à titre d'indemnité de licenciement ; que compte tenu de son ancienneté depuis le 1er septembre 1981, du montant de sa rémunération et des dispositions de la convention collective des salariés du particulier employeur qui prévoit pour le calcul de l'indemnité de licenciement,1 / 10ème de mois par année d'ancienneté de services continus chez le même employeur et 1 / 6ème de mois par année d'ancienneté de services continus chez le même employeur au-delà de 10 ans, il convient d'allouer à Louisa X... la somme de 1. 215,17 € à titre de solde d'indemnité de licenciement, avec intérêt au taux légal à compter du 23 avril 2004 date de réception par l'employeur de sa convocation devant le conseil de prud'hommes ;
Attendu que les dispositions relatives à l'assistance du salarié lors de l'entretien préalable n'étant applicables qu'aux entreprises, elles ne sont pas applicables au particulier employeur ; qu'il n'y a donc pas eu en l'espèce irrégularité de procédure ; que Louisa X... doit dès lors être déboutée de sa demande de ce chef ;
Attendu que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement déterminent les limites du litige ;
Attendu que la diminution de ses revenus alléguée par l'employeur pour justifier la réduction des heures de travail de Louisa X..., réduction refusée par celle-ci, n'est établie par aucune pièce, l'employeur procédant par affirmations et se bornant à faire état de la situation difficile de la société COSPAN dissoute depuis le 27 juin 2000 alors que le licenciement est intervenu fin 2002 ; que dès lors le licenciement critiqué ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse ;
Attendu qu'il résulte des pièces qu'elle produit, que Louisa X... était toujours au chômage en décembre 2004 ; que compte tenu du préjudice que lui a causé la perte de son emploi, de ses aptitudes à retrouver du travail eu égard à son expérience et à sa formation, de son ancienneté dans l'entreprise et des dispositions de l'article L 122-14-5 du code du travail applicables en l'espèce, il y a lieu de lui allouer la somme de 7. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que succombant pour l'essentiel Madame Y... prise en son nom personnel sera déboutée de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, réglera de ce chef la somme de 800 € à Louisa X... et supportera l'intégralité des dépens de 1ère instance et d'appel ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Reçoit l'appel régulier en la forme,
Au fond,
Confirme le jugement en ses dispositions non contraires au présent arrêt,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau sur le tout,
Met hors de cause Madame Y... prise en sa qualité de liquidatrice de la société COSPAN,
Dit que le licenciement de Louisa X... est régulier mais qu'il est sans cause réelle et sérieuse,
Condamne Madame Y... prise en son nom personnel à payer à Louisa X... les sommes de :
-1. 215,17 € à titre de complément d'indemnité de licenciement, avec intérêt au taux légal à compter du 23 avril 2004,
-7. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-800 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Condamne Mme Y... prise en son nom personnel aux dépens de 1ère instance et d'appel.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,