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18/05/2004 | FRANCE | N°03/03433

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5ème chambre sociale, 18 mai 2004, 03/03433


ARRET N° 203
X... C/ S A URANIE INTERNATIONAL
COUR D'APPEL D'AMIENS
5ème Chambre Sociale
ARRÊT DU 18 MAI 2004 RG : 03/ 03433
JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE COMPIÈGNE (RÉFÉRENCE DOSSIER N° RG F 98/ 273) EN DATE DU 17 JANVIER 2000
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT
Madame Catherine X... épouse Y... née en Septembre 1950 de nationalité française...
NON COMPARANTE
Représentée, concluant et plaidant par Me Claire SEICHET-SOULE, avocat au barreau de COMPIÈGNE.
ET :
INTIMEE S. A. URANIE INTERNATIONAL agissant poursuites et diligences de se

s représentants légaux pour ce domicilié en cette qualité audit siège : Z. I de Compiègne Le Meux...

ARRET N° 203
X... C/ S A URANIE INTERNATIONAL
COUR D'APPEL D'AMIENS
5ème Chambre Sociale
ARRÊT DU 18 MAI 2004 RG : 03/ 03433
JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE COMPIÈGNE (RÉFÉRENCE DOSSIER N° RG F 98/ 273) EN DATE DU 17 JANVIER 2000
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT
Madame Catherine X... épouse Y... née en Septembre 1950 de nationalité française...
NON COMPARANTE
Représentée, concluant et plaidant par Me Claire SEICHET-SOULE, avocat au barreau de COMPIÈGNE.
ET :
INTIMEE S. A. URANIE INTERNATIONAL agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux pour ce domicilié en cette qualité audit siège : Z. I de Compiègne Le Meux BP 60118 60881 LE MEUX CEDEX
NON COMPARANTE
Représentée, concluant et plaidant par Me Catherine BOUTON, avocat au barreau d'AMIENS.
DÉBATS :
A l'audience publique du 23 Mars 2004, ont été entendus les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives devant M. AARON, Conseiller, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du nouveau Code de Procédure Civile et sans opposition des parties, qui a renvoyé l'affaire à l'audience publique du 18 Mai 2004 pour prononcer l'arrêt.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme CAMBIEN
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE : M. AARON en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre Sociale, cabinet A de la Cour composée de : Mme SANT, Président de Chambre Mme SEICHEL, Conseiller, qui en a délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
A l'audience publique du 18 Mai 2004, l'arrêt a été rendu par Madame SANT, Président de chambre qui a signé la minute avec Mme CAMBIEN, greffier présent lors du prononcé.
DÉCISION :
Vu le jugement en date du 17 janvier 2000 par lequel le Conseil de Prud'hommes, statuant dans le litige opposant Madame Catherine X... à son ancien employeur, la SA URANIE INTERNATIONAL, a retenu l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, débouté la salariée de ses demandes et condamné celle-ci au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 32-1 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Vu l'appel interjeté par Madame X... le 11 février 2000 ;
Vu la réinscription de l'affaire au rôle de la Cour après radiation prononcée par arrêt du 16 septembre 2001 ;
Vu les conclusions et observations orales des parties à l'audience du 23 mars 2004 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d'appel ;
Attendu qu'aux termes des ses conclusions enregistrées au secrétariat-greffe le 11 septembre 2003, soutenues oralement à l'audience, Madame X..., contestant les griefs énoncés dans la lettre de notification de la rupture et faisant valoir que son licenciement constitue une mesure de représailles à la procédure de divorce par elle engagée à l'encontre de son mari et dirigeant de l'entreprise, Monsieur Y..., sollicite l'infirmation du jugement entrepris et la condamnation de la SA URANIE INTERNATIONAL à lui payer la somme de 68 602, 06 euros à titre de dommages et intérêts outre celle de 3000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Attendu que par conclusions en date du 22 mars 2004, reprises oralement à l'audience, la société URANIE INTERNATIONAL, réfutant les moyens et l'argumentation de la partie appelante, notamment en ce qui concerne la prétendue illégitimité du licenciement, sollicite pour sa part la confirmation du jugement déféré et la condamnation de madame X... à lui payer une indemnité de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de Procédure Civile ;
SUR CE, LA COUR :
Attendu que Madame Catherine X..., engagée le 1er avril 1986 par la SA URANIE INTERNATIONAL dirigée par son mari Monsieur Alain Y..., devenue par la suite attachée de direction, statut Etam, niveau 5, échelon 3, coefficient 365 de la convention collective de la métallurgie de la région de Compiègne, a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 26 mars 1998 par lettre du 12 mars précédent, mise à pied à titre conservatoire, puis licenciée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 8 avril 1998, motivée comme suit :
" Suite à notre entretien du 26 mars dernier, au cours duquel vous vous êtes fait assister par M. Z... conseiller du salarié, nous vous notifions par la présente votre licenciement. En effet, la dégradation des relations matrimoniales ayant des répercussions directes sur l'exécution de vos obligations professionnelles et notre collaboration, puisque vous occupez le poste d'attachée de direction, ne nous permet pas de maintenir votre contrat de travail ; Vous avez outrepassé vos fonctions :- en vous attribuant, ainsi qu'à votre fils, des primes et en vous remboursant des frais d'essence, sans respect des procédures internes et surtout sans accord de la direction.- en profitant de votre situation pour utiliser des documents comptables à des fins personnelles. Sans compter votre comportement agressif avec certains membres du personnel, votre refus d'effectuer certaines tâches et vos remarques désobligeantes, ayant entraîné un climat incompatible avec la bonne marche de l'entreprise. Nous tenons à vous rappeler que votre maintien dans nos effectifs nécessitait un comportement correct, tant vis à vis de vos collègues que de votre hiérarchie. Sur ce point, nous avons pris note de votre refus d'accepter tout changement et du commentaire de votre conseiller vous précisant que votre position vous faisait prendre la responsabilité de votre licenciement. En conséquence, votre préavis de 2 mois, que nous vous dispensons d'effectuer et qui vous sera rémunéré mois par mois, débutera à la date de première présentation de la présente lettre. Votre mise à pied à titre conservatoire, notifiée le 13/ 03/ 98, vous sera rémunérée... "
Attendu que contestant la légitimité de son licenciement et estimant ne pas avoir été remplie de ses droits au titre de la rupture de son contrat de travail, Madame X... a saisi le Conseil de Prud'hommes de Compiègne, qui, statuant par jugement du 17 janvier 2000, dont appel, s'est prononcé comme indiqué ci-dessus.
SUR LE LICENCIEMENT
Attendu que la dégradation des relations matrimoniales entre l'employeur et le salarié ne peut constituer une cause de licenciement qu'au travers de ses répercussions sur l'exécution du contrat de travail et des manquements susceptibles d'être commis par le salarié dans l'exécution de ses obligations contractuelles ;
Qu'en l'espèce, la lettre de notification de la rupture, qui fixe définitivement les termes du litige, reproche en premier lieu à la salariée de s'être attribuée à elle-même ainsi qu'à son fils des primes et autres remboursements de frais d'essence sans accord de la direction et sans respect des procédures ; qu'elle lui fait également grief d'avoir profité de sa situation pour utiliser des documents comptables à des fins personnelles et, enfin, de s'être montrée agressive avec certains tâches, d'avoir tenu des propos désobligeants, toutes circonstances ayant entraîné un climat incompatible avec la bonne marche de l'entreprise ;
Attendu s'agissant du premier grief qu'il ressort des éléments non contredits du dossier que de longue date Madame X..., actionnaire de l'entreprise et épouse de Monsieur Y..., président directeur général, bénéficiait, à l'instar d'autres membres du personnel, du remboursement de ses frais de déplacement ainsi que de primes diverses, dont les montants étaient unilatéralement fixés pour chacun par l'employeur ;
Qu'en l'absence de tout élément de nature à établir que Madame X... se serait allouée à elle-même ou à son fils Stéphane Y... des primes d'un montant supérieur à celui autorisé par l'employeur ou qu'elle se soit fait rembourser des frais d'essence qui n'auraient pas été justifiés professionnellement, le premier grief ne peut être considéré comme établi ;
Attendu s'agissant du deuxième grief qu'aucun élément probant ne vient étayer le reproche fait à Madame X... d'avoir fautivement utilisé des documents comptables à des fins personnelles, étant observé que celle-ci, en sa qualité d'administrateur de la société et de par ses fonctions incluant pour partie des tâches comptables, pouvait légitimement détenir tout ou partie des pièces et documents comptables de l'entreprise ;
Attendu enfin concernant le dernier grief relatif au comportement de madame X... (attitude agressive avec certains membres du personnel, refus d'exécution des tâches, propos désobligeants et détérioration du climat de l'entreprise) qu'il ressort des éléments du dossier, notamment des procès-verbaux de constat produits, que les faits étaient pour l'essentiel connus de l'employeur depuis plus de deux mois au moment de l'engagement de la procédure de licenciement et ne pouvaient donc plus servir de fondement à un licenciement disciplinaire ;
Que dans ces conditions et si l'on considère d'une part qu'aucun salarié n'atteste de la dégradation du climat de l'entreprise en raison du comportement de Madame X... et d'autre part que les pièces et documents produits ne permettent pas de considérer que malgré les difficultés inhérentes à la procédure de divorce en cours, Madame X... ait refusé de manière fautive d'exécuter les tâches relevant de ses attributions, le licenciement de cette dernière doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse ;
Que le jugement entrepris sera par conséquent infirmé ;
SUR LES DOMMAGES ET INTERETS
Attendu que justifiant d'une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise occupant habituellement au mois onze salariés, Madame X... peut prétendre à l'indemnisation de l'absence de cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L122-14-4 du Code du Travail ;
Qu'en considération de sa situation particulière et eu égard notamment à son âge, à l'ancienneté de ses services, à sa formation et à ses capacités à retrouver un nouvel emploi, la Cour dispose des éléments nécessaires pour évaluer la réparation qui lui est due à la somme qui sera indiquée au dispositif de l'arrêt ;
SUR L'APPLICATION DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE L. 122-14-4 DU CODE DU TRAVAIL EN FAVEUR DE L'ASSEDIC
Attendu que la salariée ayant plus de deux ans d'ancienneté et l'entreprise occupant habituellement au moins onze salariés, il convient de faire application de ce texte et d'ordonner à l'employeur de rembourser à l'ASSEDIC concernée les indemnités de chômage éventuellement versées à l'intéressée depuis son licenciement dans la limite de six mois de prestations ;
SUR L'ARTICLE 700 DU NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE
Attendu qu'il y a lieu de faire application de ce texte au profit de la salariée et de lui allouer sur ce fondement, pour l'ensemble de la procédure, une indemnité dont le montant sera précisé au dispositif de l'arrêt ;
Que l'employeur, qui succombe, doit en revanche être débouté de sa demande indemnitaire présentée sur le même fondement ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement entrepris,
Statuant à nouveau :
Déclare sans cause réelle et sérieuse le licenciement de madame Catherine X...,
Condamne la SA URANIE INTERNATIONAL à payer à Madame X..., avec intérêts au taux légal à compter de présent arrêt, les sommes suivantes :
-38 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L 122-14-4 du Code du Travail,
-800 euros à titre d'indemnité par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Condamne la SA URANIE INTERNATIONAL à rembourser à l'ASSEDIC concernée les indemnités de chômage éventuellement versées à la salariée dans la limite de six mois de prestations,
Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties, Condamne la SA URANIE INTERNATIONAL aux dépens de première instance et d'appel. Le Greffier,
Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5ème chambre sociale
Numéro d'arrêt : 03/03433
Date de la décision : 18/05/2004
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Défaut - Applications diverses

La dégradation des relations matrimoniales entre l'employeur et le salarié ne peut constituer une cause de licenciement que s'il existe des répercussions sur l'exécution du contrat de travail et des manquements susceptibles d'être commis par le salarié dans l'exécution de ses obligations contractuelles. Est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement d'une salariée, épouse du président directeur général de la société qui l'employait et dont elle était elle-même actionnaire, dès lors qu'il n'est pas établi que son comportement a engendré une dégradation du climat dans l'entreprise ni que celle-ci ait refusé de manière fautive d'exécuter les tâches relevant de ses attributions en raison des difficultés inhérentes à la procédure de divorce en cours


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.amiens;arret;2004-05-18;03.03433 ?
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