COUR D'APPEL D'AMIENS 5ème Chambre Sociale - Cabinet B PRUD'HOMMES ARRET DU 27 JUIN 2001 RG : 99/02755 JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE BEAUVAIS EN DATE DU 01 JUIN 1999 PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE SA CAMABRIC ET : INTIME Monsieur Thierry DUCHATAUX X... : A l'audience publique du 22 mai 2001 ont été entendus les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives COMPOSITION DE LA COUR LORS DES X... ET DU DELIBERE : Mme DARCHY, Président de Chambre, Mmes Y... et SEICHEL, Conseillers Qui a renvoyé l'affaire à l'audience publique du 27 juin 2001 pour prononcer l'arrêt et en a délibéré conformément à la loi. GREFFIER LORS DES X... : Melle Z... A... :
A l'audience publique du 27 juin 2001, l'arrêt a été rendu par Mme DARCHY, Président de Chambre qui a signé la minute avec Melle Z..., Greffier. DECISION :
Vu le jugement rendu le 1er juin 1999 par le Conseil des Prud'hommes de BEAUVAIS qui a : Condamné la SA CAMABRIC à payer à Thierry DUCHATAUX les sommes suivantes : À 6.800 F à titre d'indemnité de préavis, À 680 F à titre d'indemnité de congés payés, À 6.800 F au titre du non respect de la procédure de licenciement, À 6.800 F à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive, À 1.500 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Ordonné la rectification de l'attestation ASSEDIC sous astreinte de 50,00 F par jour de retard à compter de la signification du jugement ;
Vu l'appel interjeté le 24 juin 1999 par la SA CAMABRIC à l'encontre de cette décision qui lui a été notifiée le 5 juin 1999 ;
Vu les conclusions déposées le 21 mai 2001 par la SA CAMABRIC, régulièrement communiquées et soutenues à l'audience du 22 mai 2001, tendant à voir la Cour infirmer le jugement entrepris, débouter Thierry DUCHATAUX et le condamner à lui payer 6.000 F sur le
fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Vu les conclusions déposées le 21 mai 2001 par Thierry DUCHATAUX, régulièrement communiquées et développées à l'audience du 22 mai 2001, demandant à la Cour de : Confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a reconnu que la rupture de son contrat de travail était imputable à la SA CAMABRIC ; L'infirmer sur le quantum des condamnations et condamner la SA CAMABRIC à lui payer les sommes suivantes : À 6.800 F à titre d'indemnité de préavis, À 680 F à titre de congés payés sur préavis, À 80.000 F à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive sur le fondement de l'article L.122-14-5 du Code du Travail, À 6.800 F à titre d'indemnités pour non respect de la procédure de licenciement, À 10.000 F à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Ordonner la rectification de l'attestation ASSEDIC remise à Thierry duchataux sous astreinte de 50 F par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ; SUR CE LA COUR
Attendu que Thierry DUCHATAUX a été engagé par la SA CAMABRIC, exerçant son activité sous l'enseigne BRICOMARCHE, le 11 mars 1996 sous contrat à durée déterminée ;
Que par avenant à son contrat de travail du 8 mars 1997, son embauche s'est vue prolongée sous contrat à durée indéterminée en qualité de vendeur matériaux pour une rémunération brute de 6.800 Francs ;
Que le 22 septembre 1997 à 14 H 30, il quittait son travail pour n'y plus reparaître ;
Que le 23 septembre 1997, il se rendait chez son médecin traitant qui lui ordonnait un arrêt de travail jusqu'au 26 septembre suivant ;
Que le 25 septembre 1997, la SA CAMABRIC lui adressait une lettre recommandée avec avis de réception par laquelle elle prenait acte de sa démission ;
Que le 30 septembre 1997, la SA CAMABRIC remettait à Thierry
DUCHATAUX son certificat de travail, son solde de tout compte, qu'il signait, ainsi que l'attestation pour l'ASSEDIC ;
Que le 6 octobre 1997, l'Inspection du Travail, saisie d'une réclamation par Thierry DUCHATAUX, adressait un courrier à la SA CAMABRIC ;
Attendu que Thierry DUCHATAUX conteste avoir démissionné, ne serait-ce que verbalement ; qu'il soutient que la rupture de son contrat de travail doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il a quitté le magasin sous la pression de son employeur pour se rendre chez le médecin qui lui a prescrit un arrêt de travail jusqu'au 28 septembre 1997 ; qu'il n'a pas exprimé une volonté claire et non équivoque de mettre fin au contrat de travail ; que la démission ne se présume ; que l'employeur a considéré le salarié comme démissionnaire sans le mettre en demeure de reprendre le travail ; que le silence du salarié ne peut constituer une manifestation non équivoque de démissionner et que la prise d'acte de la rupture par l'employeur s'analyse alors en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu 'en envoyant à son salarié un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte et une attestation destinée à l'ASSEDIC, l'employeur a rompu le contrat de travail qui s'analyse comme un licenciement imputable à l'employeur ;
Attendu que la SA CAMABRIC réplique que le 22 septembre Thierry DUCHATAUX a déclaré verbalement démissionner, indiquant qu'il partait et demandant qu'on veuille bien lui préparer son solde de tout compte en présence du Directeur de la société et de Monsieur B... ; qu'il a rempli sa fiche en indiquant qu'il finissait son travail à 14 H30 ; qu'elle expose lui avoir laissé trois jours pour voir s'il revenait sur sa décision ; qu'à défaut elle lui a alors envoyé un courrier recommandé avec avis de réception prenant acte de sa volonté et à
tout le moins pour tenter de provoquer sa réaction ; qu'elle n'a reçu qu'une lettre de l'inspection du Travail du 6 octobre suivant ; que Thierry DUCHATAUX a justifié avec retard être malade en fournissant un certificat médical ; qu'il a accepté le principe de la démission en ne réagissant pas et en signant son solde de tout compte ; que le seul courrier l'informant du rejet de l'interprétation de son départ comme démission date du 21 octobre 1997 ; que Thierry DUCHATAUX, à défaut de lui indiquer clairement sa volonté, l'a plutôt induit en erreur de mauvaise foi ; qu'il a de plus contacté d'autres entreprises afin de retrouver un emploi et n'a pas exécuté son préavis ainsi que cela lui avait été demandé dans la lettre du 25 septembre ; que si la Cour devait décider qu'il y avait licenciement, il serait justifié par une absence irrégulière prolongée ;
Attendu que la démission ne peut résulter que d'une manifestation de volonté non équivoque de la part du salarié ;
Qu'il convient donc de rechercher les éléments de nature à démontrer cette manifestation de volonté ;
Que Thierry DUCHATAUX conteste avoir donné verbalement sa démission le 22 septembre 1997 ;
Que cependant, il ne démontre pas avoir quitté son travail sous la pression de l'employeur ;
Qu'il est allé lui-même indiquer son heure de départ à 14 H30 sur sa fiche horaire ;
Qu'il n'a pas reparu à son travail et n'est allé chez le médecin que le lendemain ;
Qu'il n'a adressé que très tardivement à son employeur le justificatif de son arrêt maladie du 23 au 26 septembre 1997 ;
Qu'à l'issue de son arrêt maladie, il n'a pas repris son travail et ne s'est pas manifesté auprès de l'employeur ;
Qu'il n'a pas réagi au courrier de l'employeur du jeudi 25 septembre
1997, qui ne lui a été adressé que le samedi 27 septembre 1997, et par lequel celui-ci prenait acte de sa démission ;
Qu'il n'en a pas contesté les termes ;
Que de plus l'employeur lui rappelait dans cette lettre qu'il devait exécuter son préavis, sans qu'il ne reprenne son travail, alors que son arrêt maladie était terminé lorsqu'il l'a reçue ;
Qu'en outre il a accepté les documents que lui a remis l'employeur le 30 septembre 1997 et mentionnant clairement comme motif de la rupture " démission " ; qu'il a signé son reçu pour solde de tout compte sans émettre la moindre protestation ;
Que seule l'inspection du travail écrira le 6 octobre 1997, le premier écrit de Thierry DUCHATAUX n'étant adressé à l'employeur que le 21 octobre suivant ;
Que la volonté claire et non équivoque de démissionner de Thierry DUCHATAUX ressort clairement de ses agissements ;
Qu'en conséquence, le jugement entrepris sera réformé de ce chef ;
Attendu que Thierry DUCHATAUX, qui n'a pas exécuté son préavis malgré la demande formulée par son employeur dans la lettre du 25 septembre 1997, ne peut en réclamer le paiement ;
Qu'il sera donc débouté de sa demande à ce titre ;
Attendu qu'il ne paraît pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses frais hors dépens ; PAR CES MOTIFS LA COUR
Statuant publiquement et contradictoirement,
Reçoit l'appel régulier en la forme,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Dit que la rupture du contrat de travail de Thierry DUCHATAUX s'analyse en une démission,
Déboute Thierry DUCHATAUX de l'intégralité de ses demandes,
Déboute la SA CAMABRIC de sa demande au titre de l'article 700 du
Nouveau Code de Procédure Civile,
Condamne Thierry DUCHATAUX aux dépens de première instance et d'appel. LE GREFFIER, LE PRESIDENT.