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18/09/2000 | FRANCE | N°99/00539

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 18 septembre 2000, 99/00539


COUR D'APPEL D'AMIENS CHAMBRE SOLENNELLE ARRÊT DU 18 SEPTEMBRE 2000 RG : 99/00539 RENVOI CASSATION DU 5 JANVIER 1999 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS DU 30 MARS 1992 COUR D'APPEL DE PARIS DU 13 SEPTEMBRE 1996 PARTIES EN CAUSE : APPELANT: Monsieur EnriqueBOSCA X... Y... : LA S.A LABORATOIRE DES GRANIONS, "prise en la personne de ses représentants légaux pour ce domiciliés audit siège" DECISION :

Souffrant d'allergies, Monsieur BOSCA X... consultait le docteur Z... qui lui prescrivait depuis plusieurs années un traitement renouvelable comprenant l'utilisation d'ampoules de gran

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COUR D'APPEL D'AMIENS CHAMBRE SOLENNELLE ARRÊT DU 18 SEPTEMBRE 2000 RG : 99/00539 RENVOI CASSATION DU 5 JANVIER 1999 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS DU 30 MARS 1992 COUR D'APPEL DE PARIS DU 13 SEPTEMBRE 1996 PARTIES EN CAUSE : APPELANT: Monsieur EnriqueBOSCA X... Y... : LA S.A LABORATOIRE DES GRANIONS, "prise en la personne de ses représentants légaux pour ce domiciliés audit siège" DECISION :

Souffrant d'allergies, Monsieur BOSCA X... consultait le docteur Z... qui lui prescrivait depuis plusieurs années un traitement renouvelable comprenant l'utilisation d'ampoules de granions d'argent fabriquées par la société LABORATOIRES DES GRANIONS.

Alléguant avoir été victime de l'explosion des ampoules le 26 mars 1987 au cours de leur préchauffage avant leur utilisation, il saisissait le Juge des Référés du Tribunal de Grande Instance de PARIS qui ordonnait une expertise, puis au fond le même juridiction par jugement du 30 Mars 1992 le déboutait de ses demandes.

Sur appel interjeté par Monsieur BOSCA X..., la Cour de Paris ordonnait une nouvelle expertise et par arrêt du 13 septembre 1996 retenait le responsabilité de la société LABORATOIRE DES GRANIONS pour ne pas avoir mis en garde les utilisateurs contre la violence de l'explosion pouvant se produire en cas de dépassement de la durée d'ébullition mentionnée sur la notice mais décidait également qu'en s'abstenant de surveiller le durée d'ébullition, la victime avait contribué à la réalisation de son préjudice à concurrence de deux tiers.

Sur le pourvoi formé par Monsieur BOCA X... la Première Chambre

Civile de la Cour de Cassation par décision rendue le 5 janvier 1999 cassait l'arrêt précité au visa des articles 1382 et 1147 de Code Civil interprétés à la lumière de la directive CEE n°85374 du 25 juillet 1985 en retenant une violation de ces textes dès lors que la Cour d'Appel avait constaté que la notice de présentation des ampoules ne mettait pas les utilisateurs en garde contre le violence de l'explosion pouvant se produire en cas de dépassement de la durée d'ébullition mentionnée tout en déclarant la société responsable seulement à concurrence d'un tiers des conséquences dommageables de l'accident puisque Monsieur BOSCA X... qui s'était abstenu de surveiller la durée d'ébullition des ampoules avait principalement concouru à la réalisation de son propre préjudice.

Monsieur BOSCA X... demande à la Cour :

- de réformer le jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris et statuant à nouveau,

- de dire la société LABORATOIRE DES GRANIONS entièrement responsable de l'accident survenu et des conséquences dommageables,

- de condamner in solidum la société LABORATOIRE DES GRANIONS et son assureur la Cie GENERALI FRANCE au paiement des sommes suivantes :

- 22.704,29 francs outre les frais médicaux et d'hospitalisation soumis au recours des organismes sociaux,

- 158.152,77 francs au titre de l'ITT,

-720.000 francs au titre de l'IPP,

-40.000francs pour le préjudice esthétique,

-200.000 francs pour le pretium doloris,

-200.000 francs pour le préjudice d'agrément,

-100.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La société LABORATOIRE DES GRANIONS et son assureur la Cie GENERALI FRANCE sollicitent la confirmation du jugement et subsidiairement que la réparation du préjudice soit réduite en outre, la société LABORATOIRE DES GRANIONS conclu à la condamnation de l'appelant au paiement d'une somme de 25.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La C.P.A.M. a été citée le 13 juillet 1999 à personne habilitée ; devant la Cour d'Appel de Paris elle avait fixé le montant de ses débours à la somme totale de 151.351,77 francs au titre des prestations versées.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 7 mars 2000.

SUR CE :

Vu les dernières écritures de Monsieur BOSCA A... du 29 février 2000, celles de la S.S. LABORATOIRE DES GRANIONS ainsi que de la Cie GENERALI FRANCE ASSURANCES du 26 janvier 2000.

Sur la responsabilité

Attendu que devant la présente juridiction Monsieur BOSCA X... fonde sa demande sur la violation de l'obligation de sécurité qui aurait été commise par le fabricant des produits qu'il incrimine dans la réalisation de son préjudice ;

Attendu que l'expertise conduite par Monsieur B..., qui est versée aux débats par les parties, a démontré que les ampoules explosaient trois minutes après évaporation de l'eau, avec une particulière violence puisque la casserole a été déplacée d'environ 25 cm et a été déformée, que le support de la gazinière a aussi été déplacé d'environ 10cm et qu'enfin les ampoules explosaient en se désintégrant complètement ;

Attendu que la notice d'utilisation qui était fournie lors de l'achat d'un produit se borne à indiquer que les ampoules doivent être placées dans un récipient contenant de l'eau froide qui sera chauffé jusqu'à ébullition qu'on maintiendra pendant une minute environ et qu'il convient de refroidir avant l'emploi ;

Attendu qu'aucune mention relative au risque d'explosion mentionné

ci-dessous, fût ce dans des conditions d'utilisation excédant celles du mode d'emploi préconisé par le fabricant, n'y figure alors que si un tel danger avait été mis en évidence par le LABORATOIRE DES GRANIONS, l'attention de Monsieur BOSCA X... aurait été attirée soit directement par la lecture de la notice soit indirectement par les recommandations d'utilisation que son médecin faisait figurer sur les ordonnances en se référant aux consignes du fabricant ;

Attendu que le fait que les circonstances de l'accident ne soient pas parfaitement déterminées ou que Monsieur BOSCA X... ait pu indiquer à un expert qu'il se référait plus particulièrement aux prescriptions de son médecin est sans incidence sur l'étendue de l'obligation de renseignements du fabricant, alors même que rien n'a été fait à l'époque du dommage pour parfaire l'information des utilisateurs d'autant que d'autres personnes ont été victimes du même produit dans des circonstances analogues et que le docteur Z... a précisé dans un courrier adressé à l'expert GONNEAY qu'il prescrivait le produit avec le mode d'emploi du fabricant ;

Attendu que dès lors que le fabricant n'est pas en mesure d'établir qu'il a respecté l'obligation à sa charge il ne serait être retenu à l'encontre de la victime d'avoir fait une utilisation fautive du produit puisqu"elle n'était pas informée des dangers encourus ; qu'en conséquence il ne peut y avoir de partage de responsabilité, et le LABORATOIRE DES GRANIONS doit supporter l'entière réparation du dommage causé le lien de causalité entre la projection des éclats de verre du fait de l'explosion et les blessures subies étant établi ;

SUR LE PREJUDICE

Attendu que Monsieur BOSCA X... a été grièvement blessé aux yeux par l'explosion des ampoules qu'il devait faire chauffer et a subi cinq opérations entre le 27 septembre 1987 et le 3 février 1988 avant de recevoir un implant oculaire le 15 mars 1990 ;

Attendu que compte tenu des expertises, la date de consolidation doit être fixée au 30 janvier 1989, l'incapacité de travail ayant été totale du 26 septembre 1987 au 30 juillet 1988 et de 50 % DU 31 juillet 1988 au 30 janvier 1989 ;

Attendu que le taux D'IPP est de 36 % ;

SUR LE PREJUDICE SOUMIS AU RECOURS DE LA CAISSE

Attendu que la CPAM de Paris qui a été régulièrement assignée n'a pas constitué avoué ; que Monsieur BOSCA X... a versé aux débats les conclusions de cet organisme prises devant la Cour d'Appel de Paris ; Attendu qu'il ressort de ses écritures que la CPAM soutient avoir versé:

-95.704 francs pour les prestations en nature

-55.647,77 francs pour les prestations en espèce TOTAL 151.351,77 francs ; que ce montant correspondant à la période pendant laquelle l'appelant n'a pu exercer sa profession totalement ou partiellement

sans qu'il établisse avoir subi un préjudice distinct en dehors des frais pharmaceutiques restés à sa charge pour un montant de 13074,79 francs, les troubles pour lesquelles il sollicite une indemnisation n'étant pas précisé et différenciés des autres chefs de préjudice dont il souhaite réparation ;

Attendu que concernant l'IPP, Monsieur BOSCA X... était âgé de 47 ans lors de l'accident et exerçait le profession de peintre ; qu'il a été reconnu inapte à la poursuite de cette activité et la COTOREP a estimé qu'il pouvait effectué des travaux de petite manutention au sol ;

Attendu cependant que la victime s'abstient de verser aux débats le moindre élément sur sa situation actuelle alors que les intimés soutiennent qu'il exerce son métier à plein temps sans diminution de salaire et font référence à une valeur du point 7000 francs ;

Attendu que l'incidence professionnelle de l'accident n'étant pas établie par la victime qui affirme sans le démontrer n'avoir pu retrouver un emploi, l'IPP sera évaluée à 7000 francs x 36 % =

252.000 francs ;

Attendu qu'en conséquence le préjudice soumis au recours est fixé à :

151.351,77 francs

13.074,79 francs

252.000,00 francs TOTAL : 416.426,56 francs

Attendu que compte tenu de la créance de la CAISSE, il reviendra à la victime la somme de 265.074,79 francs ;

SUR LE PREJUDICE NON SOUMIS AU RECOURS

Attendu que le pretium doloris est important, puisqu'évalué à 6/7ä Monsieur BOSCA X... ayant dû subir de nombreuse interventions et des soins longs et délicats au laser qui ont été douloureux qu'en conséquence un somme de 100.000 francs sera accordée ;

Attendu que le préjudice esthétique est modéré, l'un des experts l'ayant estimé à 2/7, compte tenu des éléments figurant dans les rapports respectifs, il sera alloué une somme de 40.000 francs à la victime ;

Attendu que Monsieur BOSCA X... affirme ne pouvoir conduire alors que le professeur GERVAIS avait relevé qu'il était gêné pour conduire ; que les attestations présentées sont insuffisantes pour établir ce point en l'absence d'éléments objectifs administratifs ou médicaux qui auraient dû être fournis, qu'il en va de même pour la pratique d'une activité sportive ou pour le fait de regarder la télévision, qu'en conséquence une somme de 10.000 francs répara le préjudice allégué ;

Attendu qu'il est équitable d'accorder à Monsieur BOSCA X... une

somme de 40000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Cade de Procédure Civile et de débouter les intimés de la demande qu'ils ont présentée sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS :

La Cour :

Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire,

Reçoit l'appel,

Infirme le jugement,

Statuant à nouveau,

Déclare la société LABORATOIRE DES GRANIONS responsable du dommage causé à Monsieur BOSCA X... lors de l'accident du 26 septembre 1987,

La condamne in solidum avec le Cie d'Assurance GENERALI FRANCE à payer à Monsieur BOSCA X... la somme de 415.074,79 francs à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice et celle de 40000 francs sur la fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Les condamne in solidum aux entiers dépens exposés devant le Tribunal de Grande Instance, la Cour d'Appel de Paris et la présente Cour qui comprendront les frais d'expertises, avec droit de recouvrement

direct au profit de la SCP MILLON-PLATEAU-CREPIN, Avoué.

Prononcé à l'audience publique et solennelle tenue par les Première et Quatrième Chambres Civiles Réunies de la Cour d'Appel d'Amiens, siégeant au Palais de Justice de ladite ville le 18 Septembre 2000, où siégeaient :

M. DELZOIDE, Premier Président,

M. MAHIEUX, Président de Chambre,

M.me ROHART-MESSAGER, Mme C..., M. COURAL, Conseillers,

Assistés de Madame D..., Greffier désigné en application de l'article 812-6 du Code de l'Organisation Judiciaire pour remplacer le Greffier en Chef empêché.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Numéro d'arrêt : 99/00539
Date de la décision : 18/09/2000

Analyses

RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Obligation de sécurité - Fabricant

Dès lors que le fabricant n'est pas en mesure d'établir qu'il a respecté l'obligation de sécurité à sa charge il ne saurait être retenu à l'encontre de la victime d'avoir fait une utilisation fautive du produit puisqu'elle n'était pas informée des dangers encourus


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.amiens;arret;2000-09-18;99.00539 ?
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