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27/06/2024 | FRANCE | N°21/01621

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 27 juin 2024, 21/01621


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 27 JUIN 2024

ph

N° 2024/ 234













N° RG 21/01621 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG4L7







S.C.I. VARAGE





C/



[M] [B] épouse [N]

[Z] [N]

[E] [G]

[H] [G]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Carole ROMIEU



SCP DAYDE - PLANTARD -

ROCHAS & VIRY



SELAS ALIAS AVOCATS ASSOCIES













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de proximité de MARTIGUES en date du 22 Décembre 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 11-19-1093.



APPELANTE



S.C.I. VARAGE, dont le siège social est [Adresse 5], prise en la pers...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 27 JUIN 2024

ph

N° 2024/ 234

N° RG 21/01621 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG4L7

S.C.I. VARAGE

C/

[M] [B] épouse [N]

[Z] [N]

[E] [G]

[H] [G]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Carole ROMIEU

SCP DAYDE - PLANTARD - ROCHAS & VIRY

SELAS ALIAS AVOCATS ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de proximité de MARTIGUES en date du 22 Décembre 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 11-19-1093.

APPELANTE

S.C.I. VARAGE, dont le siège social est [Adresse 5], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

représentée par Me Carole ROMIEU, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Joëlle CABROL, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Madame [M] [B] épouse [N]

demeurant [Adresse 9]

représentée par Me Maxime PLANTARD de la SCP DAYDE - PLANTARD - ROCHAS & VIRY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Marinella MATTERA, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

Monsieur [Z] [N]

demeurant [Adresse 9]

représenté par Me Maxime PLANTARD de la SCP DAYDE - PLANTARD - ROCHAS & VIRY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Marinella MATTERA, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

Monsieur [E] [G]

demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Pascal ALIAS de la SELAS ALIAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

Madame [H] [G]

demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Pascal ALIAS de la SELAS ALIAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Patricia HOARAU, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Président

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Juin 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Juin 2024

Signé par Madame Patricia HOARAU, Conseiller, pour Monsieur Marc MAGNON, Président de chambre, empêché et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

Selon acte notarié du 20 décembre 2010, la SCI Varage a acquis un bien immobilier situé à [Adresse 11], en dernier lieu cadastré section [Cadastre 2]. Elle y a procédé à la construction d'une piscine après déclaration préalable approuvée du 1er juin 2011.

M. [Z] [N] et Mme [M] [B] épouse [N] sont, quant à eux, voisins immédiats et en contrebas, en tant que propriétaires de la parcelle cadastrée section [Cadastre 10].

M. [E] [G] et Mme [F] [G] sont également voisins immédiats, en contrebas de la SCI Varage, propriétaires de la parcelle cadastrée section [Cadastre 1].

Se plaignant de subir des infiltrations d'eaux depuis la construction de la piscine par la SCI Varage, M. et Mme [N] ont obtenu par ordonnances de référé des 23 août 2016 et 23 mai 2017, la désignation d'un expert, aux fins notamment de décrire les désordres allégués, rechercher et indiquer les causes, préciser les travaux propres à y remédier.

M. [C] [A] a déposé son rapport le 9 mai 2018.

Par exploit d'huissier du 11 juillet 2019, M. et Mme [N] ont a fait assigner la SCI Varage ainsi que M. et Mme [G] devant le tribunal d'instance de Martigues, afin d'obtenir leur condamnation à exécuter les travaux préconisés par l'expert, sous astreinte.

Par jugement du 22 décembre 2020, le tribunal de proximité de Martigues a :

- condamné la SCI Varage à procéder aux travaux préconisés par l'expert judiciaire [C] [A] dans son rapport du 9 mai 2018 à savoir :

- obturation des barbacanes existantes dans le mur de soutènement existant entre les parcelles [Cadastre 2] (parcelle SCI Varage) et [Cadastre 1] ([G])- AS 114 ([N]),

- drain et tranchée drainante à réaliser sur le fonds [G], aux frais de la SCI Varage,

- constaté que les consorts [G] se sont engagés à laisser la SCI Varage diligenter les travaux nécessaires sur leur propriété et qu'ils ne s'opposeront pas à l'entrée sur leur fonds des personnes, matériaux et entreprises utiles pour réaliser lesdits travaux,

- laissé à la SCI Varage un délai de quatre mois à compter de la date de signification du jugement pour diligenter les travaux mis à sa charge, et conformes aux travaux préconisés par l'expert judiciaire pages 21 et 22 de son rapport,

- dit qu'au-delà de ce délai, une astreinte de 50 euros par jour de retard dans l'exécution sera mise en 'uvre,

- condamné la SCI Varage à payer la somme de 800 euros à M. et Mme [N] ainsi que la même somme à M. et Mme [G] en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SCI Varage aux dépens, comprenant le coût des honoraires de l'expert judiciaire.

Le tribunal a considéré que la SCI Varage a aggravé la servitude de ruissellement des eaux à laquelle sont tenus les deux fonds inférieurs.

Par déclaration du 3 février 2021, la SCI Varage a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 3 mars 2023, la SCI Varage demande à la cour de :

- déclarer son appel recevable,

- reformer le jugement querellé en toutes ses dispositions,

- dire et juger que la preuve n'est pas rapportée de l'aggravation d'une servitude d'écoulement des eaux pluviales,

- dire et juger que la preuve n'est pas rapportée de l'existence d'un lien de causalité entre les éventuels dommages et la construction de sa piscine,

- condamner solidairement les consorts [N] et les consorts [G] à payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

La SCI Varage soutient en substance :

Sur la preuve de l'aggravation de la servitude d'écoulement des eaux,

- que seule une aggravation de la servitude du fonds inférieur peut donner lieu à dommages et intérêts et réalisation de travaux,

- il semble que les infiltrations aient toujours existé dans le garage des époux [N],

- il en est de même en ce qui concerne la stagnation des eaux sur le fonds des consorts [G],

Sur le lien de causalité

- qu'il n'y a pas de preuve du lien de causalité,

- les travaux de la piscine datent de 2011 et les époux [N] ne se sont nullement plaints d'une aggravation des infiltrations de leur garage durant la période de 2012, 2013 et 2014,

- qu'il en est de même pour les consorts [G],

- que l'origine des infiltrations dans le garage des consorts [N] n'est pas formellement déterminée,

- le garage est attenant à la piscine des époux [N], dont l'étanchéité n'a pas été testée,

- au niveau altimétrique, les constructions des consorts [N] se trouvent être distantes de quelques mètres de l'étang de Berre et il n'a pas été vérifié si l'eau proviendrait d'une remontée capillaire des eaux de l'étang de Berre,

- la piscine implantée par elle ne se trouve pas dans l'axe de la propriété des consorts [N],

- le jardin potager des consorts [N] se trouve également être en surplomb du garage, et un simple arrosage intensif dudit jardin potager pourrait aussi engendrer une aggravation des infiltrations

- que sur la stagnation des eaux sur la propriété des consorts [G], rien n'établit que cette stagnation des eaux soit apparue postérieurement à la construction de la piscine,

- la parcelle [Cadastre 1] appartenant aux consorts [G] se trouve être surplombée également par la parcelle [Cadastre 3],

Sur les travaux préconisés,

- que l'obturation des barbacanes semble être injustifié dans la mesure où il n'est nullement établi que le mur de clôture dans lequel se trouve être implantées les barbacanes, serait un mur mitoyen ou un mur propre à la SCI Varage ou appartiendrait aux consorts [N],

- qu'elle rapporte la preuve de ce que ces barbacanes sont présentes depuis de nombreuses années dans ce mur,

- que les travaux préconisés pour éviter la stagnation des eaux de pluie sur le terrain [G] ne peuvent être mis à sa charge, dans la mesure où il n'est pas établi de lien de causalité, entre la stagnation des eaux de pluies sur la propriété [G] et l'implantation de sa piscine.

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 13 juillet 2021, M. et Mme [N] demandent à la cour de :

Vu le rapport du 9 mai 2018 établi par M. [C] [A],

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de proximité de Martigues le 22 décembre 2020 en ce qu'il a :

- condamné la SCI Varage à procéder aux travaux préconisés par l'expert judiciaire [C] [A] dans son rapport du 9 mai 2018 à savoir :

- obturation des barbacanes existantes dans le mur de soutènement existant entre les parcelles [Cadastre 2] (parcelle SCI Varage) et [Cadastre 1] ([G])- AS 114 ([N]),

- drain et tranchée drainante à réaliser sur le fonds [G], aux frais de la SCI Varage,

- constaté que les consorts [G] se sont engagés à laisser la SCI Varage diligenter les travaux nécessaires sur leur propriété et qu'ils ne s'opposeront pas à l'entrée sur leur fonds des personnes, matériaux et entreprises utiles pour réaliser lesdits travaux,

- réformer le jugement en ce qu'il a :

- laissé à la SCI Varage un délai de quatre mois à compter de la date de signification du jugement pour diligenter les travaux mis à sa charge, et conformes aux travaux préconisés par l'expert judiciaire pages 21 et 22 de son rapport,

Et statuant de nouveau :

- laisser à la SCI Varage un délai de deux mois à compter de la date de signification de la décision pour diligenter les travaux mis à sa charge, et conformes aux travaux préconisés par l'expert judiciaire en pages 21 et 22 de son rapport,

- réformer le jugement en ce qu'il a :

- dit qu'au-delà de ce délai, une astreinte de 50 euros par jour de retard dans l'exécution sera mise en 'uvre,

Et statuant de nouveau :

- dire qu'au-delà de ce délai, une astreinte de 100 euros par jour de retard dans l'exécution sera mise en 'uvre,

- réformer le jugement en ce qu'il a :

- condamné la SCI Varage à payer la somme de 800 euros à M. et Mme [N] ainsi que la même somme à M. et Mme [G] en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuant de nouveau :

- condamner solidairement les consorts [G] et la SCI Varage à leur payer la somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

- condamné la SCI Varage aux dépens, comprenant le coût des honoraires de l'expert judiciaire.

M. et Mme [N] font essentiellement valoir :

- que le rapport d'expertise retient que deux causes essentielles à l'origine des remontées des eaux dans leur garage :

- d'une part, l'imperméabilisation de la partie aval du terrain de la SCI Varage par la construction d'une piscine qui a entraîné la perte d'infiltration dans le terrain naturel,

- d'autre part, la présence d'eau stagnante à deux endroits sur le terrain de M. [G], ainsi que la présence de remontées capillaires au niveau du mur de limite avec la propriété [N] (pages 7 à 11 du rapport),

- qu'il n'est pas avéré que les désordres seraient antérieurs à la déclaration de sinistre, en tout état de cause, le fait que la mise en eau de la piscine ait été effectuée dans le courant de l'année 2012, ne suffit pas à contester l'existence d'un lien de causalité entre les désordres subis et les travaux réalisés,

Dans leurs conclusions d'intimés déposées et notifiées par le RPVA le 30 avril 2021, M. et Mme [G] demandent à la cour de :

Vu le rapport du 9 mai 2018 de M. [C] [A],

Vu l'article 640 du code civil,

Vu l'article 562 du code de procédure civile,

- déclarer que les demandes des époux [N] n'emportent pas d'effet dévolutif,

- déclarer que la cour n'est pas valablement saisie des demandes des époux [N],

- confirmer la décision dont appel en toutes ses dispositions,

- condamner la SCI Varage à leur payer la somme de 5 000 euros pour résistance abusive,

- condamner la SCI Varage à leur payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l'instance.

M. et Mme [G] arguent :

Sur l'effet dévolutif de l'appel,

- qu'aux termes de leurs écritures notifiées le 7 avril 2021 et donc antérieurement aux écritures de l'appelante, M. et Mme [N] ne sollicitent ni réformation ni confirmation de la décision dont appel, mais seulement :

Condamner solidairement Les consorts [G] et la SCI Varage à exécuter les travaux tels que préconisés en page 21 et 22 du rapport de l'expert, et ce sous astreinte d'avoir à verser la somme de 100 euros par jour de retard, passé un délai de deux mois,

Condamner solidairement Les consorts [G] et la SCI Varage aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise.

Condamner solidairement Les consorts [G] et la SCI Varage à payer aux concluants la somme de 3.000 €uros par application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel ;

Sur le fond,

- que la SCI Varage conteste pour la première fois en cause d'appel, l'origine des désordres et le lien de causalité entre les travaux entrepris sur son fonds et les désordres constatés,

- que l'appelante ne peut soutenir qu'elle n'est pas propriétaire du mur qui soutient ses terres,

- qu'il importe peu que les barbacanes soient présentes depuis plusieurs années,

- qu'ils ne sont pas à l'origine des désordres constatés mais en sont les victimes,

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 2 avril 2024.

L'arrêt sera contradictoire puisque toutes les parties ont constitué avocat.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'étendue de la saisine de la cour

En application de l'article 562 du code de procédure civile, l'appel ne défère à la cour que les chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent et la dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Le dispositif des conclusions de l'appelante comporte des demandes de « dire et juger », qui ne constituent pas des prétentions, mais des moyens, si bien que la cour n'en est pas saisie.

M. et Mme [G] arguent de l'absence d'effet dévolutif des conclusions de M. et Mme [N] du 7 avril 2021 et par suite de l'absence de saisine de la cour des demandes qui y sont formées, faute de contenir une demande de confirmation ou d'infirmation du jugement.

Il est vérifié que ces conclusions ont été déposées et notifiées avant les conclusions d'appelant et que de nouvelles conclusions ont été déposées et notifiées le 13 juillet 2021 dans les trois mois des conclusions de l'appelante, distinguant les chefs de jugements critiqués, ceux dont il est demandé confirmation et ceux dont il est demandé infirmation.

Par suite, c'est à ces dernières écritures qu'il y a lieu de se référer pour apprécier l'étendue de l'effet dévolutif et la cour se trouve saisie de toutes les demandes de M. et Mme [N].

Sur la nature et la cause des désordres

Aux termes du rapport d'expertise, l'expert M. [A] a relevé deux désordres :

- une remontée d'eau au niveau du sol du garage de M. et Mme [N],

- la présence d'eau stagnante à l'arrière de la maison de M. et Mme [G].

Il conclut, après analyse de l'état des lieux, à deux causes essentielles quant à la remontée des eaux dans le garage de M. et Mme [N] :

- d'une part, l'imperméabilisation de la partie avale du terrain de la SCI Varage, par la construction d'une piscine, entraînant la perte d'infiltration sur le terrain naturel et le ruissellement vers le terrain de M. et Mme [G] en aggravation ; il a constaté la présence de trois barbacanes (ouverture dans le mur de soutènement), dont il a indiqué qu'elles sont interdites selon l'article 640 du code civil ; il a constaté que le mur de soutènement a subi une poussée et que la question se pose quant à la solidité de l'ouvrage.

- d'autre part, la présence d'eau stagnante à deux endroits sur le terrain de M. et Mme [G], ainsi que des remontées capillaires au niveau du mur de limite avec la propriété [N].

Les travaux préconisés pour y remédier doivent, selon l'expert, être réalisés sur la propriété de la SCI Varage et sur la propriété de M. et Mme [G]. Ils consistent à :

1. Sur la propriété de la SCI Varage :

- obturer les barbacanes,

- gérer d'une manière autonome le ruissellement pluvial sur la propriété, afin d'éviter une poussée dangereuse sur le mur de soutènement,

2. Sur la propriété [G] :

- mettre en place une tranchée drainante, afin de capter les eaux de ruissellement qui affluent sur le terrain, dans un système de collecte et de rétention, et ce pour éviter les inondations des bâtiments situés en aval, en installant un drain parallèle à la façade Sud de la maison afin de recueillir une partie des eaux de ruissellement arrivant de la partie haute du terrain, en réalisant le long de la façade Ouest de la maison une tranchée drainante qui canalisera et retiendra les eaux accumulées dans cette zone située en point bas du terrain, en mettant en place une canalisation de rejet des eaux ainsi drainées depuis la limite Nord de la propriété jusqu'à l'exutoire qui sera créé dans le milieu naturel, après traitement réglementaire, pour un coût prévisionnel de 12 500 euros pouvant être réajusté à 15 000 euros hors taxe.

Sur les demandes de M. et Mme [N]

Elles portent sur l'exécution des travaux préconisés par l'expert, tels qu'ordonnés par le premier juge à la charge de la SCI Varage, toutes les parties se plaçant sur la notion d'aggravation de la servitude d'écoulement des eaux, contestée par la SCI Varage.

Aux termes de l'article 640 du code civil, les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l'homme y ait contribué. Le propriétaire inférieur ne peut point élever de digue qui empêche cet écoulement. Le propriétaire supérieur ne peut rien faire qui aggrave la servitude du fonds inférieur.

En l'espèce, il ressort du rapport d'expertise ci-dessus examiné que la construction de la piscine de la SCI Varage a eu pour effet d'imperméabiliser la partie avale du terrain de la SCI Varage, entraînant la perte d'infiltration sur le terrain naturel et le ruissellement vers le terrain de M. et Mme [G] en aggravation. L'expert met ainsi en évidence la mauvaise gestion des eaux de ruissellement sur le terrain de la SCI Varage et l'aggravation consécutive du ruissellement sur le fonds inférieur de M. et Mme [G], sur lequel l'eau stagne puis s'infiltre au niveau du garage du fonds voisin de celui de M. et Mme [G], soit le fonds de M. et Mme [N].

La SCI Varage qui conteste cet avis de l'expert, ne verse aux débats aucune pièce de nature à le contredire.

Alors que la SCI Varage était présente aux opérations d'expertise, même non représentée par un avocat, celle-ci n'a pas mis en cause la piscine de M. et Mme [N], ni la proximité de l'Etang de Berre, comme de nature à expliquer les infiltrations au niveau de leur garage, mais a seulement fait des dires sur la préexistence des barbacanes, l'état du mur de soutènement (tel que qualifié par elle dans son dire), et a affirmé : « en ce qui concerne l'eau stagnante de la parcelle [Cadastre 7] (page 14), la parcelle [Cadastre 8] récupère son trop plein d'eau de la piscine dans deux bidons, d'où l'eau s'évacue en écoulement le long de la parcelle 2830 sci varage, et fini sur la parcelle [Cadastre 7] ». L'expert a précisé sur ce point, la correspondance des parcelles citées avec le dernier cadastre et que la page 14 concernait uniquement la présence d'une barbacane.

La SCI Varage n'a pas répliqué, ni n'a appelé en cause le propriétaire de la parcelle [Cadastre 8], soit la parcelle [Cadastre 3], voisine de la sienne (116) située en contre-haut, comme la sienne, de la parcelle [Cadastre 1] de M. et Mme [G].

Les photographies produites par la SCI Varage, à l'appui de son dire, permettent de confirmer que les travaux de construction de la piscine, ont consisté à creuser la partie avale de son terrain, retenue par un mur, à monter deux rangs de parpaings sur ledit mur, à installer la piscine et à remblayer de terre, jusqu'à hauteur du premier rang de parpaings (selon photographies que la SCI Varage date de mai 2012). Il est vérifié que les travaux occupent toute la partie avale du terrain de la SCI Varage située immédiatement au-dessus de la parcelle appartenant à M. et Mme [G].

Il doit être conclu qu'il est démontré que l'imperméabilisation de la partie avale de la parcelle [Cadastre 2], a aggravé la servitude d'écoulement des eaux sur la parcelle [Cadastre 1], sur laquelle le surplus d'eau de ruissellement stagne désormais, et s'infiltre au niveau du garage situé sur le fonds voisin 114 de M. et Mme [N].

Pour y remédier l'expert préconise à la fois des travaux sur le fonds de la SCI Varage, mais aussi sur le fonds de M. et Mme [G]. A cet égard, l'expert n'a produit une évaluation que des travaux sur la parcelle de M. et Mme [G].

Il est constaté que M. et Mme [G] comme M. et Mme [N] sollicitent la confirmation du jugement sur les travaux à la charge de la SCI Varage. Particulièrement, M. et Mme [G] acquiescent à la décision du premier juge concernant la réalisation de travaux sur leur fonds aux frais de la SCI Varage, pour gérer le surplus des eaux de ruissellement, généré par l'imperméabilisation du terrain de la SCI Varage.

Il convient donc de confirmer le jugement sur ce point, y compris quant à l'astreinte fixée, aucune pièce nouvelle produite par les intimés, ne venant justifier une décision différente de celle prise, par une juste appréciation des faits et du droit, par le premier juge.

Cependant, il ressort tant du rapport d'expertise, que de la reconnaissance de la SCI Varage dans son dire et enfin de la simple constatation que le mur retient les terres de la SCI Varage, que le mur séparant la parcelle de la SCI Varage, de celles de M. et Mme [G] d'une part, de M. et Mme [N] d'autre part, constitue un mur de soutènement.

L'installation de barbacanes est généralement opérée dans les murs de soutènement pour limiter la pression des terres sur le mur de soutènement.

Dès lors, la suppression des barbacanes telle qu'ordonnée par le premier juge, présente le risque à terme, d'entraîner l'effondrement du mur de soutènement, alors que celui-ci est déjà fragilisé selon l'expert, ce qui est d'ailleurs reconnu par la SCI Varage.

Le jugement sera donc infirmé sur ce point et la SCI Varage, ne sera pas condamnée à obturer lesdites barbacanes.

Il est précisé que le mur de soutènement appartient au propriétaire du fonds dont il retient les terres, qui doit en assurer la pérennité afin qu'il ne cause pas de dommages aux fonds situés en contrebas, notamment par une bonne gestion des eaux de ruissellement sur son fonds, dont il doit s'assurer de l'efficacité, pour limiter la pression des terres sur le mur.

Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts

Il est constant que l'exercice d'une action en justice constitue un droit, qui ne peut dégénérer en abus que s'il est démontré une volonté de nuire de la partie adverse ou sa mauvaise foi ou une erreur ou négligence blâmable équipollente au dol, ce qui suppose de rapporter la preuve de ce type de faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux, dans les conditions prévues par l'article 1240 du code civil.

En l'espèce, il n'est pas démontré que la SCI Varage a abusé de son droit d'agir en justice comme de son droit d'interjeter appel, dans une intention de nuire à M. et Mme [G], ou la mauvaise foi ou une légèreté particulièrement blâmable.

M. et Mme [G] seront donc déboutés de leur demande de dommages et intérêts formée en cause d'appel.

Sur les demandes accessoires

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement sur les dépens comprenant le coût de la mesure d'expertise et les frais irrépétibles.

La SCI Varage, qui succombe pour l'essentiel en appel, sera condamnée aux dépens et aux frais irrépétibles, qu'il est inéquitable de laisser à la charge des intimés.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement appelé sauf en ce qu'il a condamné la SCI Varage à procéder à l'obturation des barbacanes existantes dans le mur de soutènement entre les parcelles [Cadastre 2] (parcelle SCI Varage) et [Cadastre 1] ([G])- AS 114 ([N]) ;

Y ajoutant,

Déboute M. [E] [G] et Mme [F] [G] de leur demande reconventionnelle de dommages et intérêts en cause d'appel ;

Condamne la SCI Varage aux dépens d'appel ;

Condamne la SCI Varage à verser à M. [E] [G] et Mme [F] [G], la somme de 2 000 euros (deux mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SCI Varage à verser à M. [Z] [N] et Mme [M] [B] épouse [N], la somme de 2 000 euros (deux mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER POUR LE PRESIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 21/01621
Date de la décision : 27/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-27;21.01621 ?
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