La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/06/2024 | FRANCE | N°21/00049

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 27 juin 2024, 21/00049


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 27 JUIN 2024

ac

N° 2024/ 240









Rôle N° RG 21/00049 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BGXGC







[W] [U] [R] [J] épouse [A]

[Z] [A]





C/



Syndic. de copro. [Adresse 9]















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SELARL MAXIME ROUILLOT - FRANCK GAMBINI





SCP ASSUS-JUTTNER -MAGAUD- RABHI

- JUTTNER









Décision déférée à la Cour :



Jugement du tribunal judiciaire de NICE en date du 27 Novembre 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01836.





APPELANTS



Madame [W] [U] [R] [J] épouse [A]

demeurant [Adresse 3]





Monsieur [Z] [A]

de...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 27 JUIN 2024

ac

N° 2024/ 240

Rôle N° RG 21/00049 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BGXGC

[W] [U] [R] [J] épouse [A]

[Z] [A]

C/

Syndic. de copro. [Adresse 9]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SELARL MAXIME ROUILLOT - FRANCK GAMBINI

SCP ASSUS-JUTTNER -MAGAUD- RABHI- JUTTNER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du tribunal judiciaire de NICE en date du 27 Novembre 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01836.

APPELANTS

Madame [W] [U] [R] [J] épouse [A]

demeurant [Adresse 3]

Monsieur [Z] [A]

demeurant [Adresse 3]

représentés par Me Maxime ROUILLOT de la SELARL MAXIME ROUILLOT - FRANCK GAMBINI, avocat au barreau de NICE substituée par Me Romain TOESCA, avocat au barreau de NICE, plaidant

INTIME

Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier '[Adresse 9]', sis [Adresse 8], prise en la personne de son syndic bénévole, Madame [S] [B] demeurant [Adresse 8], prise en la personne de son représentant légal en exercice domililié en cette qualité audit siège

représenté par Me Françoise ASSUS-JUTTNER de la SCP ASSUS-JUTTNER -MAGAUD- RABHI- JUTTNER, avocat au barreau de NICE substituée par Me Valentine PONTI SIMONIS DI VALLARIO, avocat au barreau de NICE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 16 Avril 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Président

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Juin 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Juin 2024,

Signé par Madame Patricia HOARAU, Conseiller, pour Monsieur Marc MAGNON, Président de chambre, empêché et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 1 er octobre 1936, M.[G] propriétaire de terrain situé [Adresse 5] à [Localité 7] a autorisé Madame [D] Veuve [H], sa voisine, à installer une canalisation d'égouts traversant son terrain.

Selon acte authentique en date des 31 janvier, 11 mars, 4 avril 1968 et 1er août 1968, Madame [D] Veuve [H] a vendu à [Z] [A] et [W] [J] épouse [A] la propriété située 68 et [Adresse 4] à [Localité 7] anciennement cadastrée F [Cadastre 2] et désormais cadastrée HC[Cadastre 1].

M.[G] a quant à lui vendu son bien situé [Adresse 8] à [Localité 6] le 19 novembre 1957. Par donation du 20 juin 1986 [O] [T] en est devenu propriétaire.

Selon exploit d'huissier en date du 25 mars 2016, les époux [A] ont assigné Monsieur [O] [T] devant le Tribunal de Grande Instance de Nice aux fins de le voir condamner à leur remettre la clé du portail sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter du délai d'un mois du jugement à intervenir.

Selon exploit d'huissier en date du 13 août 2018, les consorts [A] ont assigné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier VILLA LES FAUVETTES aux mêmes fins.

Par décision du 27 novembre 2020 le tribunal judiciaire de Nice a :

- Déclaré irrecevables les époux [A] en leur action à l'encontre de M.[O] [T] ;

- Débouté Monsieur et Madame [A] de leurs demandes à l'encontre du Syndicat des Copropriétaires [Adresse 9],

- Débouté M.[T] de ses demandes reconventionnelles ;

- Condamné Monsieur et Madame [A] à payer à Monsieur [O] [T] la somme de 1.500 € du Code de Procédure Civile.

- Débouté Monsieur et Madame [A] de leur demande au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens.

Le tribunal a retenu en substance :

- que les demandeurs ne versent aucun acte justifiant de la constitution d'une servitude à leur bénéfice ni au bénéfice de leur auteur ;

- que leur demande de remise de la clé du portail fermant l'accès au chemin sur lequel est installé le regard de leur canalisation d'eau usée sera rejetée ;

- que les demandes formées à l'encontre de M.[T] sont irrecevables en ce que le bien est soumis aux règles de la copropriété ;

Par acte du 4 janvier 2021 [Z] [A] et [W] [J] épouse [A] ont interjeté appel de la décision.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 10 novembre 2021, les appelants demandent à la cour de:

REFORMER PUREMENT ET SIMPLEMENT EN TOUTES SES DISPOSITIONS LE JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NICE DU 27 NOVEMBRE 2020.

Statuant à nouveau,

DÉBOUTER le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier « Villa LES FAUVETTES » de ses demandes, fins et conclusions.

DIRE ET JUGER que l'acte du 1er octobre 1936 constitue une servitude conventionnelle de canalisation d'égouts.

DIRE ET JUGER que Madame [W] [A] et Monsieur [Z] [A] ainsi que le syndicat des copropriétaires bénéficient d'une servitude de canalisation d'égouts.

CONDAMNER le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier « [Adresse 9]» sis à [Adresse 8], pris en la personne de son syndic bénévole en exercice, Madame [S] [B] demeurant [Adresse 8], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter du délai d'un mois de la signification de la décision à intervenir, à remettre Madame [W] [A] et Monsieur [Z] [A] la clé du portail qu'il a fait construire sur la servitude de passage.

CONDAMNER le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier « Villa LES FAUVETTES» sis à [Adresse 8], pris en la personne de son syndic bénévole en exercice, Madame [S] [B] demeurant [Adresse 8], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, à payer à Madame [W] [A] et Monsieur [Z] [A] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, outre les entiers dépens.

Au soutien de leurs prétentions, ils font valoir :

-que selon acte sous seing privé en date du 1er octobre 1936, M.[G] a expressément autorisé Mme [H] à installer une canalisation d'égouts,

- que lors de ces ventes, il a été opéré un transfert de cette servitude de canalisation d'égouts aux acquéreurs successifs.

- que les époux [A] sont bénéficiaires d'une servitude de passage d'égout depuis plus de trente années

- que le syndicat des copropriétaires a fait installer en 2016 un portail fermé à clé sur le chemin où se trouve la servitude de canalisation d'égouts.

- que le syndicat des copropriétaires avait le droit d'installer ce portail et de le fermer à clé à la condition qu'il remette une clé de ce portail aux époux [A]

Par conclusions notifiées par voie électronique le 25 juin 2021 le syndicat des copropriétaires demande à la cour de :

JUGER que les consorts [A] ne bénéficient pas d'une servitude.

JUGER qu'ils n'ont pas droit à l'accès sur la propriété privée de la copropriété LES FAUVETTES.

JUGER qu'ils n'ont pas droit à la remise des clés du portail y donnant accès.

CONFIRMER LE JUGEMENT en date du 27 novembre 2020, en conséquence.

CONDAMNER les appelants succombant au paiement de la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de la SCP ASSUS-JUTTNER AVOCATS ASSOCIES, sous sa due affirmation de droit.

L'intimé réplique:

- qu'il ressort de la fiche de renseignement délivrée par le Bureau de la Conservation des hypothèques l'absence de servitude légale des époux [A].

- que si l'acte sous seing privé en date du 1er octobre 1936 a autorisé Mme [H] à se brancher sur la fosse d'aisance de Monsieur [G], cela ne révèle en rien l'existence d'une servitude.

- que la correspondance du 2 avril 2014 ne saurait être retenue pour preuve puisque Monsieur [T] n'a pas engagé sans mandat exprès de l'assemblée générale de la copropriété à cette fin la copropriété à reconnaître une servitude ;

- que le raccord de canalisation est situé sur la propriété de Madame [F] [T], laquelle est clôturée par un portail, et ce depuis l'origine.

- que cet accès par portail sur la propriété d'autrui reposerait sur une servitude de passage et non sur celle relative à un passage de canalisation dont ils ne bénéficient pas davantage.

- qu'il résulte du Procès-Verbal de constat d'huissier en date du 2 mars 1971 que le portail dont ils demandent l'accès était déjà implanté ;

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 2 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'étendue de la saisine de la cour

Aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Il est constaté que le dispositif des conclusions des parties comporte des demandes de « juger » qui ne constituent pas toutes des prétentions, mais des moyens, si bien que la cour n'en est pas saisie.

Sur l'existence d'une servitude de canalisation

L'article 686 du code civil prévoit qu'il est permis aux propriétaires d'établir sur leurs propriétés, ou en faveur de leurs propriétés, telles servitudes que bon leur semble, pourvu néanmoins que les services établis ne soient imposés ni à la personne, ni en faveur de la personne, mais seulement à un fonds et pour un fonds, et pourvu que ces services n'aient d'ailleurs rien de contraire à l'ordre public. L'usage et l'étendue des servitudes ainsi établies se règlent par le titre qui les constitue ; à défaut de titre, par les règles ci-après.

L'article 688 du code civil précise que les servitudes sont ou continues, ou discontinues. Les servitudes continues sont celles dont l'usage est ou peut être continuel sans avoir besoin du fait actuel de l'homme : tels sont les conduites d'eau, les égouts, les vues et autres de cette espèce. Les servitudes discontinues sont celles qui ont besoin du fait actuel de l'homme pour être exercées : tels sont les droits de passage, puisage, pacage et autres semblables.

L'article 691 du code civil prévoit que les servitudes continues non apparentes, et les servitudes discontinues apparentes ou non apparentes, ne peuvent s'établir que par titres. La possession même immémoriale ne suffit pas pour les établir, sans cependant qu'on puisse attaquer aujourd'hui les servitudes de cette nature déjà acquises par la possession, dans les pays où elles pouvaient s'acquérir de cette manière.

Il est admis qu'une servitude d'écoulement des eaux usées, dont l'exercice exige le fait de l'homme et ne peut se perpétuer sans son intervention renouvelée, a un caractère discontinu ne permettant pas son acquisition par prescription.

Il est établi que par acte sous seing privé du 1er octobre 1936 M.[G] auteur du syndicat des copropriétaires a autorisé Mme [H] auteur des appelants à faire passer sur son terrain une canalisation d'égouts en ces termes «  j'accepte de vous laisser installer une canalisation d'égout traversant le chemin et le terrain m'appartenant jusqu'à la Voie Romaine inférieure aux conditions suivantes : vous installerez à vos frais ce branchement au départ de ma fosse d'aisance avec une section de départ de 0,15 extérieure. Cette partie sera raccordée à un regard de visite qui recevra également la canalisation venant de votre propriété. À l'angle où la canalisation traversera la route pour passer dans mon terrain voisin de la voie Romaine sera établi un second regard de visite. Ce travail sera exécuté dans le délai d'un mois de ce jour, passé ce délai la présente sera considérée comme non-avenue. Il est entendu que je ne pourrai jamais être inquiété pour l'entretien, la réparation ultérieure et tous frais et taxe provenant de cette canalisation dont vous garantissez le bon fonctionnement (...) » et signé par les deux intervenants à l'acte.

Il s'évince de la rédaction de ce document et de la volonté des parties que le passage de la canalisation sur le terrain de M.[G] n'est pas de nature à créer un rapport entre les deux fonds au titre d'une charge pour l'un et d'une utilité pour l'autre.

Ainsi la canalisation installée en ce qu'elle est branchée au départ de la fosse appartenant à M.[G] et partage le même regard de visite ne constitue pas une charge qui pèserait sur son fonds en tant que fonds servant. Les parties n'ont par ailleurs envisagé aucune compensation au profit de M.[G] relativement à l'adjonction de ce branchement.

La description peu précise des fonds concernés, de la dimension et de la longueur de la canalisation, et le caractère très limitatif des termes de l'acceptation conduisent à retenir que les parties ont entendu s'accorder sur une tolérance d'aménagement et non sur l'instauration d'un droit réel accessoire d'un fonds dominant.

Enfin le libellé de l'acte démontre que les parties ont entendu convenir d'un droit personnel conféré à Mme [H] dans un temps contraint d'organiser le branchement de sa canalisation et non à établir une servitude au profit de sa parcelle.

Cette analyse du caractère très personnel de l'accord est confirmée par l'absence de mention de celui-ci lors de la vente par Mme [H], pourtant partie à l'acte sous seing privé, de sa parcelle aux appelants.

La cour constate que les appelants, au même titre qu'en première instance, ne produisent pas de titre permettant d'établir l'existence de la servitude alléguée. À cet égard la correspondance adressée par M.[T] aux appelants le 2 avril 2014 et relative à l'entretien de la canalisation ne peut être analysée comme un titre valant reconnaissance de servitude au sens des dispositions légales précitées.

En l'absence d'éléments nouveaux soumis à son appréciation, il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris.

sur les demandes accessoires

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement dans ses dispositions concernant les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

[Z] [A] et [W] [J] épouse [A] qui succombent seront condamnés aux dépens et aux frais irrépétibles qu'il est inéquitable de laisser à la charge du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 9]. Il sera fait droit à la demande de distraction des dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour ;

Condamne [Z] [A] et [W] [J] épouse [A] aux entiers dépens  distraits au profit de la SCP ASSUS-JUTTNER AVOCATS ASSOCIES;

Condamne [Z] [A] et [W] [J] épouse [A] à verser au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 9] pris en la personne de son syndic en exercice la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

LE GREFFIER POUR LE PRESIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 21/00049
Date de la décision : 27/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-27;21.00049 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award