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13/06/2024 | FRANCE | N°23/10420

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 13 juin 2024, 23/10420


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 13 JUIN 2024

PH

N° 2024/ 213









Rôle N° RG 23/10420 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLXUE







S.A.S. ARCELORMITTAL MEDITERRANEE





C/



[R] [K]

S.A.S. ESSO RAFFINAGE

S.A. DEPOTS PETROLIERS DE [Localité 4]











Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ



SELARL BREU

-AUBRUN-GOMBERT ET ASSOCIES



SCP CHARLES TOLLINCHI - CORINNE PERRET-VIGNERON



SELARL TEISSONNIERE TOPALOFF LAFFORGUE ANDREU ASSOCIES





Décision déférée à la Cour :



Ordonnance du Juge de la mise en état d'AIX-EN-PROVENCE en date du 24 Juillet 2023 enre...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 13 JUIN 2024

PH

N° 2024/ 213

Rôle N° RG 23/10420 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLXUE

S.A.S. ARCELORMITTAL MEDITERRANEE

C/

[R] [K]

S.A.S. ESSO RAFFINAGE

S.A. DEPOTS PETROLIERS DE [Localité 4]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ

SELARL BREU-AUBRUN-GOMBERT ET ASSOCIES

SCP CHARLES TOLLINCHI - CORINNE PERRET-VIGNERON

SELARL TEISSONNIERE TOPALOFF LAFFORGUE ANDREU ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du Juge de la mise en état d'AIX-EN-PROVENCE en date du 24 Juillet 2023 enregistrée au répertoire général sous le n° 23/05038.

APPELANTE ET INTIMÉE

S.A.S. ARCELORMITTAL MEDITERRANEE, dont le siège social est [Adresse 3], poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié ès qualité audit siège social

représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Joëlle HERSCHTEL du PARTNERSHIPS KING & SPALDING INTERNATIONAL LLP, avocat au barreau de PARIS, plaidant

INTIMÉES ET APPELANTES

S.A.S. ESSO RAFFINAGE, dont le siège social est [Adresse 1], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par Me François xavier GOMBERT de la SELARL BREU-AUBRUN-GOMBERT ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, Me Jean-Nicolas CLEMENT de l'AARPI GIDE LOYRETTE NOUEL AARPI, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Alice BOUILLIÉ, avocat au barreau de PARIS, plaidant

S.A. DEPOTS PETROLIERS DE [Localité 4], dont le siège social est [Adresse 9], prise en la personne de ses représentants légaux domciliés en cette qualité audit siège

représentée par Me Charles TOLLINCHI de la SCP CHARLES TOLLINCHI - CORINNE PERRET-VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Sabine DU GRANRUT de l'AARPI FAIRWAY, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Cécile PEYRONNET, avocat au barreau de PARIS, plaidant et de Me Juliette BRIL, avocat au barreau de PARIS, plaidant

INTIMÉE

Madame [R] [K]

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Julie ANDREU de la SELARL TEISSONNIERE TOPALOFF LAFFORGUE ANDREU ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 19 Mars 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Patricia HOARAU, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Président

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Juin 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 JUIN 2024,

Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

La société Arcelormittal Méditerranée, filiale du groupe Arcelormittal, exploite à [Localité 6], une usine sidérurgique dite « intégrée » au sein de laquelle sont produits de l'aggloméré de minerai de fer ainsi que du coke nécessaire à la production d'acier, activité, soumise à la législation sur les installations classées et classée SEVESO seuil haut, régie par des arrêtés préfectoraux successifs dont le dernier réglementant l'ensemble du site date du 23 mai 2017. L'usine sidérurgique d'Arcelormittal Méditerranée s'est implantée dans la zone industrialo-portuaire de [Localité 6] en 1971 et a démarré progressivement ses installations de production d'acier entre 1973 et 1974.

La société Dépôts pétroliers de [Localité 4] est spécialisée dans le stockage, la manipulation, la gestion et la distribution de produits parapétroliers et pétroliers raffinés, directement destinés à la consommation ou à la fabrication de produits dérivés. Son activité est autorisée au titre de la réglementation ICPE et est classée SEVESO seuil haut, régie par les arrêtés préfectoraux des 5 janvier 2006 et 26 octobre 2009 du préfet des Bouches-du-Rhône. Son exploitation a débuté en 1969-1970, sur un terrain de 40 hectares dans la zone industrialo-portuaire de [Localité 6], au sein du pôle dédié aux dépôts pétroliers, à la pétrochimie, raffineries et pipelines.

La société Esso raffinage Raffinerie exploite son activité sur la commune de [Localité 6] depuis 1965, cette exploitation a été autorisée et est encadrée par un arrêté préfectoral délivré sur le fondement de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) du 10 juillet 1963, et relève du champ des installations SEVESO seuil haut.

Par acte notarié du 12 juin 1996, Mme [R] [K] a acquis son lieu d'habitation dans la commune d'[Localité 7], [Adresse 2].

Par exploits des 28 décembre 2021 et 4 janvier 2022, Mme [R] [K] a fait assigner les sociétés Arcelormittal Méditerranée, Dépôts Pétroliers de [Localité 4] et Esso Raffinage devant le tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence pour troubles anormaux du voisinage en raison des émissions atmosphériques en provenance de leurs usines de [Localité 6], afin qu'il leur soit fait injonction de se mettre en conformité avec les prescriptions administratives qui leur sont applicables sous astreinte et afin d'indemnisation de préjudices d'anxiété, de jouissance et corporel.

La société Esso raffinage a soulevé des incidents d'irrecevabilité des demandes pour défaut d'intérêt à agir, prescription, et incompétence de la juridiction judiciaire pour prononcer une mise en conformité des sociétés avec la réglementation.

Les sociétés Arcelormittal Méditerranée et Dépôts pétroliers de [Localité 4] ont soulevé les mêmes moyens d'irrecevabilité et d'incompétence.

Par ordonnance du 24 juillet 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence a :

- écarté les exceptions de procédure tirées de l'incompétence matérielle et de la nullité partielle de l'assignation,

- écarté les fins de non-recevoir tirées de la prescription et du défaut d'intérêt à agir,

- renvoyé l'affaire et les parties à l'audience de mise en état du lundi 2 octobre 2023,

- condamné in solidurn les sociétés Arcelormittal Méditerranée, Dépôts pétroliers de [Localité 4] et Esso raffinage à verser à Mme [K] la somme de 3 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens de l'instance incidente.

Le juge de la mise en état a considéré :

- que la nullité partielle de l'assignation faute d'exposé des moyens en fait pour la demande de réparation du préjudice corporel, ne saurait être retenue car Mme [K] a détaillé les éléments factuels et les moyens à son soutien et qu'au surplus aucun grief n'est établi par la société Arcelormittal Méditerranée,

- que Mme [K] ne demande pas au juge judiciaire de prononcer des mesures contraires à celles édictées par l'administration, mais seulement à faire assurer le complet respect des mesures édictées par l'administration,

- que seules les données scientifiques et médicales peuvent attester de la réalité des conséquences de l'activité industrielle des sociétés assignées sur la santé et que la première étude scientifique de grande ampleur est celle de [Localité 4] EPSEAL publiée le 6 janvier 2017, médiatisée dans le courant du mois de mars 2017,

- qu'au regard des violations de la réglementation par chacune des trois sociétés assignées, celles-ci ne peuvent faire valoir la théorie de la préoccupation.

Par déclaration du 3 août 2023, la société Arcelormittal Méditerranée a interjeté appel de cette ordonnance (23/10420).

Par déclarations des 4 août 2023 (23/10543) et 5 août 2023 (23/10590) les sociétés Esso raffinage et Dépôts pétroliers de [Localité 4] ont interjeté appel de la même ordonnance.

Le président de la cour a, en application de l'article 905 du code de procédure civile, fixé une date d'appel de l'affaire à bref délai.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées sur le RPVA le 1er mars 2024 (23/10420, 23/10543 et 23/10590), la société Arcelormittal Méditerranée demande à la cour de :

Vu les articles 56, 122 et 789 du code de procédure civile,

Vu l'ancien article 2270-1 et l'article 2224 du code civil,

Vu les dispositions de l'article L. 113-8 du code de la construction et de l'habitation,

- infirmer l'ordonnance prononcée le 24 juillet 2023 sous le n° RG 21/05042 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence,

Et, statuant à nouveau,

- juger la juridiction civile incompétente pour connaître de la demande de Mme [K] d'injonction de mise en conformité avec la réglementation à son encontre, au profit de la juridiction administrative,

- juger prescrite l'action de Mme [K],

- juger Mme [K] irrecevable en sa demande d'injonction de mise en conformité avec la réglementation à son encontre, faute d'intérêt à agir,

- juger Mme [K] irrecevable en l'ensemble de ses demandes, faute d'intérêt à agir à son encontre sur le fondement de la préoccupation,

En tout état de cause,

- débouter Mme [K] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner Mme [K] à lui verser la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [K] aux entiers dépens de l'incident.

La société Arcelormittal Méditerranée fait essentiellement valoir :

Sur l'incompétence matérielle du tribunal judiciaire,

- qu'il est de jurisprudence constante que les juridictions judiciaires ont compétence pour se prononcer sur les mesures propres à faire cesser le préjudice que le fonctionnement d'une installation classée pour la protection de l'environnement pourrait causer, à condition toutefois que ces mesures ne contrarient pas les prescriptions édictées par l'administration en vertu des pouvoirs de police spéciale qu'elle détient, conformément au principe de séparation entre les autorités administratives et judiciaires (Cass, Civ., 2ème, 25 janvier 2017, n° 15-25.526 ; Cass, Civ., 1ère, 8 novembre 2017, n° 16-22.213),

- le juge judiciaire ne doit pas substituer pas sa propre appréciation à celle que l'autorité administrative a portée sur les dangers ou inconvénients que peuvent présenter l'installation classée, notamment en matière de santé et de salubrité publiques,

- le juge de la mise en état n'a pas tiré les conséquences des principes qu'il a pourtant rappelés,

- que l'ensemble des non-conformités identifiées dans l'ordonnance du juge de la mise en état ont été régularisées,

- les mesures et injonctions prononcées par le préfet des Bouches-du-Rhône attestent que la police des installations classées est dûment exercée et qu'elle est soumise à un étroit contrôle de l'inspection des installations classées,

- la décision déférée préjuge de ce qu'elle ne se serait pas conformée aux prescriptions des arrêtés de mise en demeure qui lui ont été notifiés,

- les mises en demeure ont été levées, de sorte qu'aucune violation des prescriptions réglementaires ne saurait être constituée, et la demande d'injonction ne saurait prospérer sans générer une immixtion du juge judiciaire dans les pouvoirs de police des installations classées détenus par le préfet,

- certaines fiches d'écarts établies par l'inspection des installations classées et invoquées par Mme [K] ont été levées à la suite des observations formulées par l'exploitante,

- le délai de mise en conformité courait toujours pour d'autres non-conformités imputées,

- elle a pris selon les cas, les mesures correctrices des écarts constatés par l'inspection des installations classées ou les mesures pour satisfaire les prescriptions des arrêtés préfectoraux :

- pour le paramètre benzène : si la réalisation du programme de travaux a entrainé les manquements observés et l'adoption d'un arrêté de mise en demeure daté du 12 décembre 2017, ces manquements ont été expliqués rationnellement et l'achèvement dudit programme courant 2019 a permis une amélioration durable depuis lors des émissions des fours de la cokerie, avec un retour à la conformité,

- pour le paramètre dioxyde d'azote (NO2) : la même mise en demeure du 12 décembre 2017 avait accordé à l'exploitante un délai de mise en conformité jusqu'au 30 décembre 2018, si bien qu'il ne peut lui être reproché de n'avoir pas respecté les prescriptions à la date du 11 juillet 2018, les dépassements observés à cette période étant la conséquence directe du programme de rénovation des fours de la cokerie qui, lorsqu'ils sont en cours de rénovation, émettent davantage d'oxydes d'azote, outre qu'il ressort du courrier de l'inspection des installations classées du 27 juin 2019 que la mise en demeure du 12 décembre 2017 est levée ; les dépassements constatés en septembre 2019, janvier et février 2020, sont liés au recours exceptionnel au gaz de cokerie pour chauffer les fours, et entrent dans le cadre des prescriptions fixées par l'article 9.4.2.5 de l'arrêté préfectoral du 23 mai 2017 régissant l'exploitation du site d'Arcelormittal Méditerranée à [Localité 6], en cas d'indisponibilité de gaz de haut-fourneau,

- pour le paramètre dioxyde de soufre (SO2) : en droit des installations classées, l'on ne saurait déduire d'un dépassement temporaire une non-conformité, de manière générale, aux prescriptions applicables ; si des dépassements des VLE journalières du dioxyde de soufre (SO2) ont été observés ultérieurement par l'inspection des installations classées, la DREAL a indiqué qu'il s'agissait de dépassements ponctuels, ne présentant aucun lien avec le mécanisme de désulfuration mis en place, de sorte que les prescriptions administratives, respectées, n'ont plus jamais nécessité l'adoption de nouvelles mises en demeure s'agissant de ce paramètre,

- pour le paramètre poussières (PM2,5 et PM10) : la VLE de poussières en sortie d'émissaire a été significativement réduite au 1er juillet 2017, par un arrêté préfectoral du 23 mai 2017 actualisant les prescriptions applicables, passant de 100 mg/Nm3 à 30 mg/Nm3, soit une division par trois ; elle a mis en place les dispositifs nécessaires et plusieurs plans d'actions ont été arrêtés en fonction des émissaires concernés, dont l'administration a tenu compte dans son arrêté de mise en demeure du 12 décembre 2017, puisqu'elle a accordé des délais de mise en conformité différents suivants les postes d'émissions : 31 mai 2018 pour les rejets issus des locaux de l'agglomération, 31 octobre 2018 pour les rejets issus des installations du refroidisseur de l'agglomération, 31 mars 2019 pour les rejets issus des installations de cuisson de l'agglomération et, enfin, un délai de trois mois à compter de la mise en demeure pour les rejets issus de la bascule des hauts-fourneaux ; qu'ainsi, le fait que des manquements aux VLE fixées aient été constatés « en juillet 2018 » par la DREAL PACA, n'est pas en soi contraire aux prescriptions administratives compte tenu des délais de mise en conformité accordés ; qu'elle a mis en 'uvre, à compter de novembre 2019, le projet « 0DAS » (« Zero Dust At Sinter ») permettant l'installation d'un système de filtrage innovant sur les deux cheminées du dépoussiérage secondaire de l'agglomération et que le préfet des Bouches-du-Rhône a, aux termes d'une lettre datée du 22 septembre 2023, actant d'un retour à la conformité à compter du 1er janvier 2023, décidé de lever l'astreinte,

- pour le paramètre composés organiques volatils (COV) : à l'instar du benzène et du dioxyde d'azote (NO2), les dépassements observés à cette période sont la conséquence directe du programme de rénovation des fours de la cokerie qui, lorsqu'ils sont en cours de rénovation, émettent davantage de COV ; il y a eu une levée de la mise en demeure du 12 décembre 2017 intervenue en mars 2019 pour les batteries 1 et 2 et en avril 2019 pour la batterie 3 ainsi qu'il est attesté par la lettre de l'inspection des installations classées du 27 juin 2019,

- pour le paramètre dioxines et furanes (PCDD/F) : les dépassements observés par l'APAVE lors de ses contrôles inopinés en 2017, ont été justifiés dans un courrier adressé à la DREAL PACA le 20 mars 2018 comme dus à une anomalie matérielle, ne reflétant pas les valeurs d'émissions exactes qui respectaient les VLE réglementaires sur l'ensemble de l'année 2017 et par la suite aucune mise en demeure s'agissant des paramètres PCDD/F n'a été édictée,

- pour le paramètre métaux lourds : comme pour le paramètre précédent, des observations ont été adressées le 20 mars 2018 et à nouveau aucune mise en demeure concernant ce paramètre n'a été édictée à son encontre,

- pour les autres écarts : l'ordonnance du juge de la mise en état se réfère à un arrêté préfectoral du 14 août 2021, en réalité daté du 11 août 2021 visant à contraindre l'exploitant à mesurer systématiquement la qualité de l'air dans l'environnement en cas d'incident et à mettre en place un dispositif d'allumage des chandelles pour les batteries des fours 1 et 2 de la cokerie afin de supprimer l'émission directe à l'atmosphère de ces gaz ; elle a expliqué pourquoi le fonctionnement automatique n'a pas été estimé souhaitable et depuis la DREAL ne s'est plus positionnée en faveur de l'entière automatisation du système d'allumage des chandelles ; l'obligation mise à la charge de l'exploitant par l'arrêté préfectoral du 6 avril 2022, et non par l'arrêté préfectoral du 11 août 2021, est pleinement respectée,

- que la demande d'injonction est nécessairement irrecevable,

- à la date de l'ordonnance dont appel, les arrêtés de mises en demeure et de sanction, ont été levés,

- le préfet assure le contrôle de la mise en 'uvre des mesures qu'il prescrit et des sanctions qu'il prend, de sorte que le juge judiciaire ne saurait empiéter sur sa compétence,

- l'injonction de mise en conformité sollicitée par l'intimée, à supposer même qu'elle vise des écarts auxquels il n'aurait pas été remédié, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, empièterait sur les prérogatives de l'administration,

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription,

- que le premier critère déclencheur du délai de prescription repose sur la connaissance effective des faits par l'intéressé ou encore celui de la connaissance supposée,

- en matière de trouble anormal du voisinage, la jurisprudence considère que le point de départ de la prescription correspond au jour de la première manifestation du trouble ou de son aggravation, et plus précisément la date à laquelle les nuisances invoquées sont apparues dans leur anormalité,

- l'intéressé ne peut prétendre qu'il ignorait l'étendue de son préjudice, car la prescription débute avec le fait dommageable et non avec ses conséquences,

- la Cour de cassation l'a rappelé en sanctionnant la cour d'appel de Grenoble qui avait fixé le point de départ à la date à laquelle le voisin a eu connaissance du dépassement des seuils réglementaires grâce au dépôt d'un rapport d'expertise (Cass, Civ., 3ème, 6 avril 2023, n° 22-12.928),

- ce raisonnement est identique lorsqu'il est fait état d'études comme en l'espèce,

- l'intéressé ne peut prétendre qu'il ignorait l'existence d'une faute de la part de l'auteur présumé du trouble, pour tenter de repousser le point de départ du délai de prescription,

- la jurisprudence rappelle la distinction entre l'action pour trouble anormal du voisinage et celle pour faute et les conséquences de cette distinction s'agissant du point de départ de la prescription de l'action en trouble anormal du voisinage,

- la répétition d'un fait ne permet en aucun cas de déclencher une nouvelle action,

- la jurisprudence souligne régulièrement que le point de départ de l'action en responsabilité pour troubles anormaux du voisinage se situe au jour de la première manifestation du trouble ou de son aggravation, y compris lorsque ces troubles sont constants dans le temps,

- la solution inverse conduirait à rendre cette action imprescriptible,

- le principe de droit pénal, selon lequel le point de départ de la prescription doit être reporté au jour où l'infraction a cessé, ne saurait être appliqué dans le cadre d'une action en troubles anormaux du voisinage,

- lorsque les troubles successifs émanent de la même activité et qu'il n'est pas démontré leur aggravation, celle-ci ne pouvant résulter d'un manquement à la règlementation, ils ne sauraient être analysés comme étant des faits distincts susceptibles de reporter, à chacune de leur manifestation, le point de départ du délai de prescription,

- que Mme [K] se plaint de panaches de fumées, de mauvaises odeurs et de retombées de poussières, qui lui causeraient un préjudice de jouissance et seraient à l'origine de l'anxiété de l'intimée quant à leur impact sur sa santé ;

- l'implantation de Mme [K] dans la zone de [Localité 5] est bien postérieure au début de son activité, survenue trente-huit années auparavant,

- les émanations dont fait état l'intimée étaient déjà présentes lors de son installation à [Localité 6], sachant que ces émissions n'ont cessé de diminuer depuis lors,

- les causes de l'anxiété éprouvée par l'intimée sont apparues plus de cinq ans avant la saisine du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence,

- des plaintes à ce sujet avaient été déposées dès 2007 par des habitants de [Localité 6],

- que Mme [K] aurait donc dû démontrer que son activité a significativement évolué depuis lors, alors que ce n'est pas le cas,

- les conditions d'exploitation sont restées les mêmes, les seuls changements intervenus n'ayant eu pour objet que de moderniser et d'améliorer la performance environnementale des outils de production,

- du fait des investissements majeurs réalisés, les émissions atmosphériques en provenance de son usine n'ont cessé de diminuer,

- les arrêtés préfectoraux successifs n'ont cessé de réduire les valeurs limites d'émissions applicables aux différentes installations composant son usine,

- les premières manifestations des troubles du voisinage, à les supposer constituées, doivent être fixées au 12 juin 1996, date de l'acquisition par Mme [K], si bien que son action était déjà prescrite avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription,

- l'aggravation du trouble imputé à une activité industrielle, ne se déduit pas, par exemple, de la seule circonstance qu'un panache de fumée soit plus épais et plus visible qu'un autre, mais d'un examen des conditions d'exploitation de l'activité en cause, à savoir, le développement de cette activité ou encore la modification des installations existantes,

- que le raisonnement du juge de la mise en état est erroné,

- une confusion a été opérée entre le trouble et les conséquences du trouble pour la détermination du point de départ de la prescription,

- la connaissance de l'origine industrielle des troubles subis ainsi que celle des risques sanitaires consécutifs à leur exposition, à les supposer même établies, sont inopérantes dans le cadre du calcul du point de départ du délai de prescription d'une action fondée sur les troubles anormaux du voisinage, mais c'est la connaissance du trouble qui doit être prise en considération,

- il est erroné de faire courir le point de départ du délai de prescription à compter de la prise de connaissance du risque auquel l'intimée serait exposée,

- la connaissance des résultats de l'étude [Localité 4] EPSEAL ne saurait avoir une incidence sur la dégradation alléguée des conditions de vie matérielles ou les prétendus désordres sur le lieu d'habitation de l'intimée,

- qu'en toute hypothèse et subsidiairement, le délai de prescription ne saurait être repoussé au mois de mars 2017, date de médiatisation de l'étude [Localité 4] EPSEAL,

- il ne s'agit clairement pas d'une étude médicale, mais d'une enquête psychologique puisque les informations et données recueillies, ne sont ni formulées ni confirmées par des médecins,

- l'agence Santé publique France, qui s'est donnée pour objectif de faire « une analyse neutre de l'étude, c'est-à-dire étayée scientifiquement et indépendante », souligne la faiblesse de la méthodologie mise en 'uvre par les auteurs de l'étude [Localité 4] EPSEAL,

- le directeur général de l'agence régionale de la santé (ARS) considère que les données recueillies reposent sur « du déclaratif, du sentiment et non de la mesure rationnelle »,

- la conclusion du comité d'experts de l'agence Santé publique France est sans appel en ce qu'elle dénie à l'étude [Localité 4] EPSEAL d'avoir apporté une quelconque preuve de l'existence d'un excès local de pathologies en lien avec une exposition à un excès de pollution,

- Mme [K] n'habite ni à [Localité 6] ni à [Localité 8], mais à [Localité 7], commune hors du champ géographique de l'étude [Localité 4] EPSEAL,

- une plaquette synthétisant les principaux résultats, a été mise en ligne le 24 novembre 2016, dans un article librement accessible, expressément destiné aux habitants de [Localité 6] et de [Localité 8],

- l'ordonnance dont appel a fait courir le délai de prescription à partir d'une date plus tardive que celle dont se prévalait l'intimée dans son assignation, qui a retenu la date de la publication de cette étude (janvier 2017) et non celle de sa médiatisation (mars 2017), et a donc statué ultra petita,

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir :

- que Mme [K] n'a pas d'intérêt à agir en sa demande d'injonction de mise en conformité avec la réglementation,

- cette demande excède largement le trouble anormal du voisinage invoqué,

- l'ordonnance appelée n'a pas expressément statué sur ce point,

- que l'article L. 113-8 du code de la construction et de l'habitation consacre une exception à l'engagement de la responsabilité pour trouble anormal du voisinage, d'où il résulte que le principe de la préoccupation constitue une règle de recevabilité de l'action en trouble anormal de voisinage,

- il y a antériorité de son activité et absence de modification des conditions d'exploitation,

- les prescriptions de l'arrêté préfectoral du 23 mai 2017 imposées au site d'Arcelormittal ont été respectées dans leur ensemble.

Par ses dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 28 février 2024 (23/10420, 23/10543 et 23/10590), la société Dépôts pétroliers de [Localité 4] demande à la cour de :

Vu les articles 122 et suivants du code de procédure civile,

Vu l'article 2224 du code civil,

Vu l'article L. 113-8 du code de la construction et de l'habitation,

Vu la jurisprudence versée au débat,

Vu les pièces versées au débat,

- ordonner la jonction de la présente procédure avec la procédure d'appel mise en 'uvre par la société Dépôts pétroliers de [Localité 4] devant la cour d'appel de céans (RG n° 23/10589) à l'encontre de l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Aix en Provence du 24 juillet 2023,

- la recevoir en son appel incident,

- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a écarté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de Mme [R] [K],

Statuant à nouveau :

- déclarer Mme [R] [K] irrecevable car prescrite en sa demande d'indemnisation au titre de son préjudice corporel,

- déclarer Mme [R] [K] irrecevable car prescrite en sa demande d'indemnisation au titre de son préjudice de jouissance,

- déclarer Mme [R] [K] irrecevable car prescrite en sa demande d'indemnisation au titre de son préjudice d'anxiété,

- débouter Mme [R] [K] de sa demande visant à voir juger que le délai de prescription n'aurait pas commencé à courir,

- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a écarté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de Mme [R] [K] fondée sur l'article L. 113-8 du code de la construction et de l'habitation,

Statuant à nouveau :

- déclarer Mme [R] [K] irrecevable en l'ensemble de ses demandes pour défaut d'intérêt à agir sur le fondement de l'article L. 113-8 du code de la construction et de l'habitation,

En tout état de cause :

- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle l'a condamnée in solidum avec les sociétés Arcelormittal Méditerranée et Esso raffinage, aux dépens de la procédure d'incident devant le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Aix en Provence, et à verser à Mme [R] [K] une somme de 3 200 euros au titre de ses frais irrépétibles,

Statuant à nouveau :

- débouter Mme [R] [K] de ses demandes,

- condamner Mme [R] [K] à lui payer une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [R] [K] aux entiers dépens.

La société Dépôts pétroliers de [Localité 4] soutient en substance :

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription :

Principalement,

- qu'en matière industrielle, le point de départ du délai de prescription d'une action fondée sur le trouble anormal de voisinage est la date de début de l'activité industrielle,

- la Cour de cassation a jugé que la première manifestation des troubles de voisinage est la date de début d'activité industrielle,

- c'est le cas en particulier, lorsque les documents produits permettent de constater que l'activité industrielle n'a pas significativement évolué depuis cette date,

- la Cour de cassation considère que ce point de départ reste le début d'activité industrielle, même en cas de modifications de l'activité industrielle, lorsque ces modifications se sont accompagnées d'améliorations techniques (Civ. 2e, 5 octobre 2017, n° 16-23810),

- que l'implantation de Mme [K] dans la zone, en 1996, est bien postérieure au début de son activité survenue vingt-sept années auparavant,

- que son activité a évolué, cette évolution s'est accompagnée d'améliorations techniques significatives ainsi que d'une baisse des émissions polluantes, ainsi qu'il ressort d'ailleurs de l'état des lieux environnemental établi par la société AECOM du 22 septembre 2020,

Subsidiairement,

- que le point de départ du délai de prescription doit être fixé à la première manifestation du dommage,

- le juge de la mise en état a en tout état de cause ajouté une condition aux critères constants posés par la jurisprudence en reportant le point de départ du délai de prescription à la connaissance, par Mme [K], des conséquences du trouble de voisinage qu'elle invoque,

- le point de départ du délai de la prescription, doit être fixé au plus tard à la date d'installation de Mme [K], tant pour le préjudice de jouissance que d'anxiété,

- que Mme [K] reconnaît que les manifestations visuelles, sonores et olfactives sont très anciennes, si bien que l'étude [Localité 4] EPSEAL publiée en janvier 2017, mais dont les principaux résultats ont été présentés et rendus publics le 24 novembre 2016, est sans incidence,

- la jurisprudence a également fixé le point de départ du délai de prescription à la première apparition des désordres ayant causé une éventuelle anxiété,

- que la cour ne saurait accueillir l'argument de Mme [K] selon lequel le délai de prescription n'aurait pas commencé à courir, au motif que l'exposition prétendument fautive qu'elle subit perdurerait, les manquements à la règlementation des sociétés mises en cause n'ayant, selon elle, jamais cessé,

- les décisions sur lesquelles elle se fonde, ne sont pas transposables en l'espèce,

- le raisonnement de la chambre sociale, de la chambre criminelle, du Conseil d'Etat, n'est pas applicable,

Sur la fin de non-recevoir tirée de la théorie de la primo-occupation :

- que pour exclure l'application de l'article L. 113-8 du code de la construction et de l'habitation, alors même qu'il aurait acquis sa résidence à une date à laquelle les nuisances incriminées existaient déjà, un demandeur doit démontrer les deux éléments suivants :

- une modification de l'activité industrielle,

- que l'activité est exploitée en infraction avec les dispositions législatives ou réglementaires en vigueur,

- que la jurisprudence considère que la modification de l'activité industrielle en tant que telle doit avoir entrainé une aggravation du risque industriel,

- la charge de la preuve pèse sur le demandeur,

- Mme [K] ne démontre ni une modification de son activité industrielle, ni que cette modification si elle était avérée, aurait pour conséquence d'aggraver le risque industriel supposément créé,

- le durcissement et la multiplication des textes législatifs et réglementaires en matière environnementale, notamment depuis la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 ainsi que les très nombreuses améliorations techniques ont entrainé une baisse des émissions polluantes dans la zone industrialo-portuaire de [Localité 6], ainsi que cela ressort du rapport de la société AECOM du 22 septembre 2020,

- les données scientifiques collectées montrent une baisse globale des émissions atmosphériques sur la commune de [Localité 6] de 2007 à 2017, hormis pour les Nox dont les émissions sont restées stables dans le temps,

- que Mme [K] allègue le non-respect de la réglementation en se prévalant de l'arrêté préfectoral du 1er juin 2018, par lequel elle a été mise en demeure par le préfet des Bouches-du-Rhône de respecter l'article 48-2 de l'arrêté ministériel du 3 octobre 2010 en raison d'un faible dépassement des valeurs réglementaires,

- elle ne conteste pas cette mise en demeure, mais aux termes d'un courrier du 22 octobre 2019, le préfet des Bouches-du-Rhône a expressément indiqué qu'elle avait remédié aux écarts identifiés et que ladite mise en demeure pouvait ainsi être levée,

- ceci a été confirmé par le rapport de l'inspection du 22 juillet 2022,

- le dernier rapport de l'inspection des ICPE du 6 octobre 2023 produit par Mme [K], suite à la visite d'inspection du 4 avril 2023, concernant spécifiquement les émissions de COV, n'a donné lieu à aucune mise en demeure et les huit fiches de constat réalisées dans le cadre de cette inspection n'ont donné lieu à aucune proposition de suites autres que des demandes documentaires qui ont été satisfaites.

Par ses dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 1er mars 2024 (23/10420, 23/10543 et 23/10590), la société Esso raffinerie demande à la cour de :

Vu le code civil et en particulier son article 2224,

Vu le code de l'environnement et en particulier ses articles L. 511-1 et suivants,

Vu le code de la construction et de l'habitation et en particulier son article L. 113-8,

Vu le code de procédure civile,

Vu l'ensemble des pièces versées au débat,

Et sous réserve de tous autres éléments à produire, déduire ou suppléer d'office,

- déclarer son appel incident irrecevable (sic) et bien fondé,

- infirmer l'ordonnance du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence en date du 24 juillet 2023 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau :

- juger que Mme [R] [K] est dépourvue d'intérêt à agir à son encontre,

- juger prescrite l'action de Mme [R] [K],

En conséquence,

- prononcer l'irrecevabilité des demandes de Mme [R] [K],

En tout état de cause :

- déclarer le juge judiciaire incompétent au profit des juridictions administratives pour prononcer la mesure d'injonction demandée par Mme [R] [K],

- condamner Mme [R] [K] à lui verser la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [R] [K] aux entiers dépens.

La société Esso raffinerie argue :

Sur l'incompétence matérielle du tribunal judiciaire :

- que le juge judiciaire n'est pas compétent pour se substituer à l'administration et enjoindre à l'exploitant d'une activité classée de mettre ses installations en conformité avec la réglementation,

- la législation des installations classées réglementée par les articles L. 511-1 et suivants et R. 511-1 et suivants du code de l'environnement, constitue une police administrative spéciale, dont l'exercice relève de la seule compétence du préfet,

- le juge administratif est seul compétent pour contrôler les décisions prises par le préfet,

- que la mesure d'injonction sollicitée par la demanderesse aurait pour conséquence de contredire les mesures édictées par les services de l'Etat,

- à supposer, comme le soutient l'ordonnance attaquée, qu'au moins un écart constaté à l'occasion des visites de contrôle effectuées régulièrement sur le site n'ait pas été régularisé, il appartient aux seuls services de l'Etat, s'ils l'estiment fondé, d'édicter une mise en demeure fixant le délai jugé raisonnable pour une mise en conformité des installations, le cas échéant, assortie d'une astreinte administrative,

- prononcer une mesure d'injonction assortie d'une astreinte administrative aurait donc bien pour effet de substituer le juge judiciaire aux autorités de contrôle des installations classées et de contredire l'action menée par ces autorités sous le contrôle du juge administratif,

- que le juge judiciaire est compétent pour se prononcer sur les mesures propres à faire cesser un préjudice subi par les tiers du fait de l'exploitation d'une activité classée, mais en l'espèce, la demanderesse n'apporte aucun élément de nature à démontrer que les écarts qu'elle invoque seraient à l'origine pour elle d'un préjudice,

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir :

- que l'article L. 113-8 du code de la construction et de l'habitation prévoit que les riverains d'installations industrielles ne peuvent pas demander réparation à l'exploitant lorsque les trois conditions suivantes sont réunies :

- l'installation de la victime des nuisances est postérieure à l'existence des activités occasionnant ces nuisances,

- l'auteur des nuisances a respecté la réglementation applicable,

- et il a poursuivi son activité dans les mêmes conditions,

- que contrairement à ce qu'affirme l'ordonnance appelée, les écarts constatés lors des visites d'inspection ont bien été levés et, de fait, les services de l'Etat n'ont donné aucune suite,

- que le juge de la mise en état a omis de prendre en compte d'une part, le fait non contesté que les émissions des installations industrielles du site de [Localité 4], et des installations exploitées par la société Esso Raffinage en particulier, ont considérablement diminué depuis 2010, d'autre part, la circonstance, pas plus contestée, qu'aucun des « écarts » prétendus fautifs invoqués par la demanderesse n'est en rapport avec les préjudices qu'elle invoque,

- qu'aucun des constats de l'inspection des installations classées produits, ne vient caractériser un dépassement de valeurs limites d'émission, ni même un risque de dépassement de ces valeurs,

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription :

- que Mme [K] a acquis sa résidence à [Localité 7] le 12 juin 1996 et que sa prétendue exposition à des émissions anormales d'odeurs et de particules - si elle était démontrée - serait donc bien antérieure au mois de janvier 2018,

- que des études publiques évaluant la qualité de l'air et les impacts des activités industrielles en zone PACA ont été menées bien antérieurement à l'étude [Localité 4]-EPSEAL de 2017,

- le juge de la mise état n'a pas tiré les conséquences du constat que « Mme [K] n'ignore pas que l'environnement dans lequel elle vit depuis plusieurs décennies interroge la population depuis quelques années déjà au regard des manifestations visuelles et olfactives liées aux différentes émanations de gaz, fumées et poussières visibles » et que des études relatives aux impacts des activités industrielles en région PACA ont été publiées antérieurement à l'étude [Localité 4]-EPSEAL,

- il s'agit d'une étude dit « participative », fondée sur le seul ressenti des participants et qui présente de nombreuses et sérieuses limites méthodologiques,

- la surmédiatisation d'une étude dont les résultats ont été invalidés par les experts de santé publique France qui estiment que « l'étude ne permet pas d'apporter la preuve de l'existence d'un excès local de pathologies en lien avec une exposition à un excès de pollution » ne saurait constituer le point de départ de la connaissance de la manifestation ou de la connaissance des prétendus troubles anormaux de voisinage invoqués,

- au demeurant, l'ordonnance attaquée reconnaît que les résultats de l'étude [Localité 4]-EPSEAL ont été portés à la connaissance du public, et des riverains en particulier, dès le mois de novembre 2016,

- que bien consciente de la prescription de son action, Mme [K] tente d'y faire obstacle en soutenant que le délai de prescription n'aurait pas commencé à courir,

- la demanderesse invoque, successivement et de façon confuse, les notions d'infractions continues et de préjudice évolutif en fondant sa position sur des jurisprudences sans aucun rapport avec ses demandes,

- les jurisprudences visées sont inopérantes en l'espèce, s'agissant de décisions rendues soit en matière pénale, soit en matière sociale,

- Mme [K] fait par ailleurs état d'une jurisprudence du Conseil d'Etat rendue dans des circonstances de droit comme de fait, totalement différentes du cas d'espèce et en aucun cas transposable,

- que la prescription de l'action de la demanderesse a couru à compter du jour où elle a eu connaissance des faits qu'elle considère comme à l'origine des troubles dont elle sollicite la réparation ou, le cas échéant de leur aggravation

- Mme [K] n'invoque pas une aggravation de sa situation, mais le fait qu'elle n'aurait eu connaissance de l'ensemble des éléments lui permettant d'agir qu'à compter de janvier 2017.

Par ses dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 16 février 2024 (23/10420, 23/10543 et 23/10590), Mme [K] demande à la cour de :

- la recevoir en son appel incident,

A titre principal :

- réformer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence du 24 juillet 2023 en ce qu'elle a fixé le point de départ de la prescription à la publication de l'étude [Localité 4] ESPEAL en début d'année 2017,

Statuant à nouveau,

- dire que le délai de prescription n'a pas commencé à courir,

- écarter en conséquence la fin de non-recevoir tirée de la prescription de son action,

- confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Aix du 24 juillet 2023 en ce qu'elle a :

- Ecarté l'exception de procédure tirée de la nullité partielle de son assignation,

- Ecarté l'exception de procédure tirée de l'incompétence de la juridiction,

- Ecarté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir au titre de l'article L. 113-8 du code de la construction et de l'habitation,

- Condamné in solidum les sociétés Arcelormittal, Dépôts pétroliers de [Localité 4] et Esso raffinage à lui verser la somme de 3 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens de la présente instance incidente,

A titre subsidiaire :

- confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Aix du 24 juillet 2023 en toutes ses dispositions,

En tout état de cause :

- condamner les sociétés Arcelormittal, Dépôts pétroliers de [Localité 4] et Esso raffinage à lui verser chacune la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

- condamner les défenderesses aux entiers dépens.

Mme [K] réplique :

Sur la demande de mise en conformité avec la réglementation :

- que l'exception d'incompétence du juge judiciaire doit être rejetée,

- le juge judiciaire est compétent pour prendre les mesures nécessaires à ce que le préjudice qu'il constate cesse,

- une jurisprudence bien établie reconnaît que « les tribunaux judiciaires ont compétence pour se prononcer tant sur les dommages-intérêts à allouer aux tiers lésés par le voisinage d'un établissement dangereux, insalubre ou incommode, que sur les mesures propres à faire cesser le préjudice qu'ils pourraient causer dans l'avenir, à la condition que ces mesures ne contrarieront point les prescriptions édictées par l'administration dans l'intérêt de la sûreté et de la salubrité publique » (Cass., 1re chambre civile, 13 juillet 2004, n° 02-15176 et Cass., 1re chambre civile, 25 janvier 2017, n° 15-25.526),

- la demande de mise en conformité avec la réglementation ne vient aucunement contrarier un quelconque arrêté de mise en demeure ayant fixé un calendrier pour un retour aux normes, car ces sociétés ne respectent pas les mises en demeure édictées à leur encontre ou manquent de manière répétée à leurs obligations, comme révélé par les fiches d'écarts,

- la seule limite tirée du principe de séparation des pouvoirs, tient à ce que le juge judiciaire ne doit pas ordonner des mesures qui contredisent directement les prescriptions édictées par l'administration, en remettant en cause l'existence même de l'exploitation litigieuse,

- les jurisprudences précitées permettent au juge judiciaire de soutenir l'action de l'administration dans la mise en conformité des entreprises qui ne respectent pas la réglementation qui leur est applicable,

- l'argument de l'éventuelle régularisation des manquements, ne saurait prospérer, dans la mesure où il conduit à faire du juge de la mise en état le juge du fond de ce dossier, le contraignant ainsi à se prononcer sur l'existence du trouble pour évaluer la pertinence de la demande d'injonction, certaines des régularisations évoquées par les défenderesses étant intervenues après le dépôt de son assignation,

- qu'elle établit son intérêt à agir au titre de sa demande d'injonction de mise en conformité,

- la Cour de cassation a pu rappeler que les autorisations et enregistrements des IPCE sont accordés sous réserve des droits des tiers, en vertu de l'article L. 514-19 du code de l'environnement,

- les trois sociétés sont soumises à autorisation,

- tout manquement est alors en lien avec le litige,

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription :

A titre principal,

- que le délai de prescription n'a pas commencé à courir car l'exposition perdure,

- c'est la solution des arrêts dits « amiante » du 8 juillet 2020 (Cour de cassation ch soc - 18-26.585 à 18-26.655),

- cette solution a été adoptée aussi par les juridictions pénales (Cour de cassation, criminelle, 2.11.2016, 15-87.163),

- la jurisprudence administrative adopte également la même position (CE, 3 déc. 2018, n° 412010),

- que si l'action pour trouble anormal du voisinage constitue une action en responsabilité extracontractuelle qui répond aux règles de droit commun, elle concerne un préjudice évolutif dû à une exposition continue,

- que c'est d'ailleurs le raisonnement retenu par le tribunal judiciaire d'Aix en Provence dans une décision définitive du 6 juillet 2021 dans un litige opposant les associations FNE à la société Arcelormittal et qui concerne les manquements de l'exploitant en matière de dépassement des valeurs limites d'émissions atmosphériques de plusieurs polluants et la non-conformité d'équipements constatés,

- que d'autres jugements du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence ont été rendus le 4 juillet 2022 s'inscrivant dans la même dynamique jurisprudentielle, aujourd'hui frappés d'appel,

- que les jurisprudences visées par la société Arcelormittal Méditerranée ne sont pas applicables à l'espèce, et ne permettent pas de répondre à la question du point de départ de la prescription en l'absence d'évènement aussi notable, qu'indiscutable,

A titre subsidiaire,

- que la jurisprudence et la doctrine s'accordent pour retenir que c'est le jour où une personne connaît tous les éléments lui permettant d'agir qui doit marquer le point de départ du délai de prescription

- si le trouble préexistait, les dommages générés par ce trouble et l'anormalité dudit trouble ne lui ont été révélés qu' en 2017 seulement,

- c'est à compter de la publication de l'étude [Localité 4] EPSEAL qu'elle a découvert la part prépondérante des activités industrielles dans la pollution du territoire de la commune et les conséquences sanitaires graves de son exposition aux polluants d'origine industrielle, qu'elle a en outre découvert par la suite la méconnaissance des règles encadrant l'activité des sociétés mises en cause, ayant pour objectif de préserver la santé publique,

- que les sociétés mises en cause opèrent une confusion entre l'apparition d'un trouble, la connaissance du risque et les conséquences du trouble,

- son action ne se limite pas aux nuisances visuelles ou olfactives en tant que telles : les émissions de fumées, torches ou encore odeurs en provenance des sociétés mises en cause sont des manifestations parmi d'autres du trouble subi,

- son action est fondée sur l'impact sanitaire des activités des sociétés mises en cause,

- elle n'a eu connaissance du risque de développer des pathologies graves du fait de son exposition quotidienne à ces polluants qu'à compter de la publication de l'étude [Localité 4] EPSEAL en janvier 2017,

- avant cette date, elle n'était tout simplement pas en mesure d'appréhender et de comprendre l'étendue du risque auquel la pollution industrielle l'exposait,

- que les sociétés Arcelormittal et Dépôts pétroliers [Localité 4] s'appuient encore sur une jurisprudence, dans laquelle le fait dommageable pouvait aisément être fixé, ce qui n'est pas le cas en l'espèce,

- les décisions citées par les sociétés concernent des affaires dans lesquelles les requérants avaient une connaissance des nuisances et de leurs incidences dès l'installation ou l'achat de leur propriété,

- qu'elle ne demande aucunement que la prescription soit décalée en raison de l'aggravation de sa situation, dès lors il importe peu que les sociétés s'attachent à démontrer que des améliorations seraient intervenues ou que l'exploitation et la production auraient diminué,

- que l'argument des sociétés tendant à faire débuter le point de départ de la prescription au mois de novembre 2016 ne saurait prospérer,

- que le juge de la mise en état n'a pas violé l'article 4 du code de procédure civile, puisqu'il a bien fondé sa décision sur la fin de non-recevoir soulevée et qu'en tout état de cause elle a assigné le 28 décembre 2021 et le 4 janvier 2022, soit en respectant le délai de prescription, que le point de départ soit fixé en janvier ou en mars 2017,

- qu'il ne peut être sérieusement contesté que c'est l'étude [Localité 4] EPSEAL qui a permis d'alerter le grand public sur les conséquences sanitaires de la pollution industrielle,

- il est révélateur qu'avant la publication de cette étude en 2017, l'Etat et les collectivités ne s'étaient pas eux-mêmes pleinement emparés du sujet,

- les sociétés remettent en question la portée de l'étude [Localité 4] EPSEAL en tentant de décrédibiliser la rigueur scientifique de ces travaux, en la qualifiant d'étude psycho-sociologique entachée par divers biais méthodologiques, mais que cette étude a été réalisée par une équipe scientifique pluridisciplinaire, avec le financement de fonds confiés notamment à l'ANSES,

- sa publication a eu pour conséquence la mise en place, par les autorités publiques, de programmes destinés à améliorer les conditions de vie des riverains,

Sur la fin de non-recevoir tirée de l'article L. 113-8 du code de la construction et de l'habitation,

- que l'immunité de la préoccupation ne s'applique plus dès lors qu'une des trois conditions cumulatives prévues n'est pas remplie,

- dès lors, il est indifférent de ne pas apporter la preuve d'une modification de l'activité des sociétés mises en cause,

- le non-respect de la réglementation applicable suffit à faire échec à cette immunité,

- que tant les fiches d'écarts dressées par l'inspection des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), que les arrêtés de mise en demeure pris par le préfet à l'encontre des sociétés mises en cause, constituent des éléments de preuve du non-respect de la réglementation applicable,

- la fiche d'écart est dressée par un agent assermenté de l'administration, lequel fait référence aux dispositions réglementaires violées, et précise les suites impératives à donner au constat dressé,

- c'est sur ces constats de l'inspection des ICPE que le préfet se base pour prendre des arrêtés de mise en demeure à l'encontre des exploitants, afin de contraindre ces derniers à respecter les prescriptions qui leur sont applicables dans un délai qu'il détermine

- ce n'est qu'en cas de manquements répétés et persistants, ou d'une particulière gravité, que de tels arrêtés sont prononcés,

- la circonstance selon laquelle un écart à la réglementation n'est pas suivi d'une mise en demeure ou de toute autre sanction administrative ne saurait exonérer l'exploitant de sa responsabilité, eu égard au non-respect des prescriptions qui lui sont applicables,

- il est indifférent qu'aucune poursuite pénale n'ait été diligentée compte-tenu des écarts constatés par l'inspection des installations classées,

- la circonstance selon laquelle les seuils de recommandation ou réglementaires sont globalement respectés à l'échelle d'un territoire ne signifie pas que les industriels respectent les prescriptions réglementaires et valeurs limites d'émission qui leurs sont propres,

- les relevés ATMOSUD versés aux débats par les sociétés mises en cause ne sauraient constituer une quelconque preuve du respect de la réglementation qui leur est applicable,

- que la société Arcelormittal Méditerranée ne respecte pas la réglementation,

- pour le paramètre benzène : la société Arcelormittal Méditerranée a fait l'objet d'une mise en demeure du 21 mai 2012 de respecter les valeurs limite d'émission dans le délai de dix-huit mois ; plus de trois ans après la DREAL relevait encore que les concentrations présentaient plusieurs dépassements en particulier sur la batterie n° 2 ; une nouvelle mise en demeure a été prise par le préfet le 12 décembre 2017 et une amende administrative prononcée d'un montant de 15 000 euros, ainsi qu'une astreinte de 1 500 euros par jour, par arrêtés préfectoraux du 27 décembre 2018 ; ce n'est que le 27 juin 2019 que la DREAL a fini par proposer la levée des sanctions,

- pour le paramètre dioxyde d'azote : la société Arcelormittal Méditerranée a fait l'objet d'une mise en demeure du 21 mai 2012 de respecter les prescriptions ; le rapport de la DREAL en mars 2015 indiquait que la société Arcelormittal Méditerranée ne respectait toujours pas l'article 2.5.2.1 de son arrêté d'autorisation de décembre 2008, ni le calendrier qu'elle a elle-même fixé à l'issue de la mise en demeure de 2012 ; le 19 juin 2017, la DREAL faisait le point sur les différents écarts constatés lors de sa visite du 26 juillet 2016 ; après deux ans de dépassements répétés, le préfet des Bouches-du-Rhône a mis en demeure le 12 décembre 2017 la société Arcelormittal Méditerranée de respecter son arrêté préfectoral d'autorisation concernant les valeurs limites en concentrations et flux horaire pour le paramètre NOx des rejets issus de la batterie fours à coke n°3 de la cokerie au 31 décembre 2018 ; un retour à la conformité a été constaté trois mois après l'échéance de la mise en demeure, qui elle-même lui octroyait plus d'un an pour respecter ses obligations ; quelques mois plus tard, dans un rapport du 20 mai 2020 et à la suite d'une visite d'inspection du 26 novembre 2019, l'inspecteur de la DREAL a relevé encore des dépassements du paramètre NOx au niveau de la batterie 3 des fours à coke,

- pour le paramètre dioxyde de souffre : le 05 mars 2013, le préfet a mis en demeure la société Arcelormittal Méditerranée de respecter avant le 31 décembre 2014 l'article 2.5.1.1 de son arrêté d'autorisation, soit deux ans supplémentaires pour se mettre en conformité ; un nouveau report d'échéance a été demandé le 15 octobre 2014, obtenu jusqu'au 31 mai 2015 ; dans ses conclusions du 23 mars 2015, la DREAL fait état de ce suivi dans le cadre de la mise en demeure relative à la désulfuration du gaz de cokerie, qui n'est toujours pas soldé, puisque des dépassements ont été constatés le 12 juillet 2017, le 10 juillet 2018, le 10 janvier 2019, du 28 mars 2019 au 3 avril 2019, du 24 novembre 2020 au 5 avril 2021, du 7 janvier 2022 au 30 octobre 2022,

- pour les poussières : le 3 août 2012, le préfet a adopté un arrêté portant prescriptions complémentaires relatives aux émissions de poussières issues des installations industrielles de la société Arcelormittal Méditerranée, dans lequel il impose à la société de réaliser un plan d'action de lutte contre les émissions de poussières, au plus tard le 1er janvier 2014 ; une mise en demeure a été délivrée le 12 décembre 2017 ; le 10 juillet 2018, la DREAL a relevé quatre nouveaux écarts à la réglementation ; dans un courrier du 27 juin 2019, la DREAL a précisé solder l'écart relatif aux dépassements en concentration au niveau de la batterie 3 des fours à coke, relevés lors de l'inspection du 10 juillet 2018, soit 9 mois après sa constatation ; de récents documents montrent que les dépassements continuent ; ainsi, sur les quatre échéances fixées par l'arrêté de mise en demeure du 12 décembre 2017, une seule a été honorée ; le 14 octobre 2020, soit deux ans après l'échéance de la mise en demeure, le préfet des Bouches-du-Rhône a adopté la plus haute sanction administrative à l'encontre de la société Arcelormittal Méditerranée pour la seconde fois, soit une amende de 15 000 euros à la suite du non-respect de la mise en demeure et une astreinte journalière de 500 euros jusqu'à satisfaction de cette dernière ; si la société Arcelormittal Méditerranée indique qu'aux termes d'un arrêté préfectoral du 19 octobre 2023, le mise en demeure adoptée le 20 octobre 2021 a été levée, la régularisation d'une infraction ne la fait pas disparaître,

- pour la réglementation concernant les COV (composés organique volatils) : des dépassements ont été constatés en 2010, les 19 et 27 octobre 2016, le 12 juillet 2017 ; le préfet a mis en demeure la société Arcelormittal Méditerranée le 12 décembre 2017 avec un délai de six mois ; le 10 juillet 2018 plusieurs écarts étaient encore relevés, notamment concernant les COV ; le préfet a alors adopté, le 27 décembre 2018, deux arrêtés préfectoraux complémentaires infligeant une amende administrative de 15 000 euros et une astreinte journalière de 1 500 euros, qui constituent les sommes les plus élevés que le préfet peut prononcer, jusqu'à satisfaction de la mise en demeure pour fours à coke ; les travaux de rénovation des fours de la cokerie à nouveau invoqués par la société Arcelormittal Méditerranée ne peuvent en aucun cas justifier de tels manquements à la réglementation ; il est très important de souligner que concernant les COV, seule la mesure du benzène est réglementée dans l'air ambiant et donc mesurée et qu'aucune surveillance n'est mise en place pour tous les autres COV dont un grand nombre présente un grave danger pour la santé humaine,

- pour les dioxines et furanes (PCDD/F) : des dépassements ont été relevés le 18 janvier 2012, Le 7 septembre 2012, les 24 et 26 juillet 2013, ainsi qu'en 2017 ; il a été relevé l'impossibilité d'accéder à une information cohérente sur la réalité de l'impact environnemental des émissions de PSDD/F d'origine industrielle, au regard de l'emplacement des points de mesure à l'extérieur du site, aucun exploitant de retenant de prélèvement au niveau des habitations, mais seulement à l'intérieur des enceintes des établissements ou en limite de site,

- pour les métaux lourds : des manquements lors d'un contrôle inopiné des 24 et 26 juillet 2013, en 2017, de 2014 à 2017 aux termes de la pièce adverse n° 11,

- pour les émissions visibles : dans son rapport du 2 octobre 2017, la DREAL indiquait que « depuis le mois janvier 2017, le pourcentage d'émissions visibles au-dessus des fours à coke est largement supérieur à 1%, limite imposée par l'article 9.4.2.2 de l'arrêté préfectoral susvisé » ; le préfet a décidé de l'inclure dans la mise en demeure prononcée à l'encontre de la société Arcelormittal Méditerranée le 12 décembre 2017,

- pour les écarts relevés par l'inspection du travail : un courrier de la DIRECCTE du 16 octobre 2018 énumère un grand nombre de manquements aux procédures prévues pour protéger les salariés ; très récemment, le 19 juin 2023, l'inspection du travail a prononcé une décision d'arrêt temporaire de l'activité de la société ARCELORMITTAL Méditerranée, après avoir pris connaissance des rapports mesurant l'exposition des travailleurs aux agents CMR et aux agents chimiques dangereux à l'aciérie pour les années 2021, 2022 et 2023, ainsi que l'inadéquation des mesures de protection mises en place ; si la décision d'arrêt temporaire de l'activité décision a été suspendue par le tribunal administratif le 6 juillet 2023, cette ordonnance repose essentiellement sur des motifs relatifs aux conditions de forme de l'acte entrepris par l'inspection du travail et ne remet absolument pas en cause la réalité des manquements constatés et la mise en danger des salariés,

- que la société Dépôts pétroliers de [Localité 4] ne respecte pas la réglementation,

- si cette société affirme qu'elle n'émet ni fumée ni odeur, elle est pourtant bien à l'origine d'émission dans de benzène et de composés organiques volatils non méthaniques (COVNM), tel que cela ressort du registre des émissions polluantes du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires,

- le site exploité par la société à [Localité 6] accueille quarante réservoirs de stockage de produits pétroliers et parapétroliers, pour un total de 865 502 m³ de capacité utile, à l'origine de rejets de polluants sous forme de gaz et vapeurs d'hydrocarbures,

- ces dernières années, l'inspection des installations classées a relevé plusieurs écarts à la réglementation, à l'occasion de visites de contrôle de l'établissement,

- le rapport réalisé par la société AECOM en 2020, produit à l'appui de l'affirmation que les écarts ont été régularisés, a été réalisé à la demande de la société Dépôts pétroliers de [Localité 4] et son indépendance doit être relativisée, outre qu'il ne saurait invalider les constats effectués par les agents assermentés de la DREAL,

- la société a fait l'objet, le 1er juin 2018, d'un arrêté préfectoral de mise en demeure de respecter les prescriptions de l'article 48-2 de l'arrêté ministériel susmentionné du 3 octobre 2010 relatif au stockage en réservoirs aériens manufacturés exploités au sein d'une installation classée soumise à autorisation, avant le 30 juin 2019,

- un deuxième arrêté de mise en demeure a été pris à son encontre le 10 février 2020, en raison du dépassement des valeurs limites d'émission des COV en sortie d'unité de récupération des vapeurs,

- ce n'est finalement que le 1er février 2022 que la DREAL a adressé un courrier à la société Dépôts pétroliers de [Localité 4], indiquant que les mesures d'émissions de COV en sortie d'URV relevées depuis la mise en service de nouveaux équipements en septembre 2021, confirment « le retour à une conformité des émissions de COV au point e) de l'article 42 de l'arrêté ministériel du 12/10/2011 » ; un rapport d'inspection en date du 22 juillet 2022 a par la suite officiellement constaté le respect de l'arrêté de mise en demeure du 10 février 2020,

- le solde d'un écart à la réglementation ne fait pas disparaitre l'infraction,

- que la société Esso raffinage ne respecte pas la réglementation,

- des écarts à la réglementation ont été relevés en matière d'auto-surveillance et de gestion des risques,

- il a fallu que la DREAL rappelle à l'ordre la société Esso raffinage en matière de surveillance d'équipements fuyards, représentant donc un risque d'accroissement d'émissions non maîtrisées de polluants, pour que l'industriel agisse et respecte la réglementation qui lui est applicable en la matière,

- la société Esso raffinage indique que depuis la communication des conclusions de visite de l'inspection, la DREAL a soldé quatre de ces cinq écarts, et précise qu'un analyseur a été installé en octobre 2021 afin de se conformer au dernier écart, mais n'apporte aucun élément de preuve au soutien de ses propos,

- en tout état de cause, au moins un de ces écarts à la réglementation n'est toujours pas régularisé à ce jour, de sorte que la société Esso raffinage se trouve toujours en situation d'infraction,

- la régularisation d'une infraction ne suffit pas à faire disparaître cette dernière,

- si six des écarts dressés par la DREAL le 21 novembre 2019, ont été levés lors d'une inspection du 20 février 2020, tel n'est pas le cas de l'écart relatif aux émissions à la torche, alors que cette prescription est fixée dans l'arrêté portant prescription complémentaire du 19 juin 2018, de sorte que deux ans après l'entrée en vigueur de cet arrêté, la société ne s'est toujours pas conformée à cette prescription réglementaire.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 5 mars 2024.

L'arrêt sera contradictoire puisque toutes les parties ont constitué avocat.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la jonction

Les articles 367 et 368 du code de procédure civile prévoient que le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble. Il peut également ordonner la disjonction d'une instance en plusieurs. Les décisions de jonction ou disjonction d'instance sont des mesures d'administration judiciaire.

En l'espèce, il ressort des pièces de la procédure que trois appels ont été formalisés contre la même ordonnance. Aucun obstacle n'est soulevé par les parties en cause. Il convient de faire droit à la demande de jonction.

Sur l'exception d'incompétence du juge judiciaire au profit du juge administratif

Le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires posé par la loi des 16 et 24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III s'oppose à ce que le juge judiciaire substitue sa propre appréciation à celle que l'autorité administrative a portée en application de ses pouvoirs de police spéciale. Il s'ensuit que les tribunaux judiciaires saisis d'une action en trouble anormal du voisinage, visant une installation classée pour la protection de l'environnement, ne sont compétents que pour se prononcer sur les dommages et intérêts à allouer aux tiers lésés par le voisinage de cette installation, ainsi que sur les mesures propres à faire cesser le préjudice que cette installation pourrait causer à l'avenir, à condition que ces mesures ne contrarient pas les prescriptions édictées par l'administration en vertu des pouvoirs de police spéciale qu'elle détient (cassation civ. 3ème 21 décembre 2023 n° 23-14.343).

Il a ainsi été jugé en matière de police de l'eau, au visa des articles L. 214-1 et L. 216-1 du code de l'environnement, que le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires s'oppose à ce que le juge civil ordonne des mesures qui contrarient les prescriptions que l'autorité administrative a édictées, dans l'exercice de ses pouvoirs de police de l'eau et des milieux aquatiques, à la suite de l'inobservation des dispositions applicables aux installations, ouvrages, travaux et activités réalisés à des fins non domestiques par toute personne physique ou morale, publique ou privée, et entraînant des prélèvements sur les eaux superficielles ou souterraines, restitués ou non, une modification du niveau ou du mode d'écoulement des eaux, la destruction de frayères, de zones de croissance ou d'alimentation de la faune piscicole ou des déversements, écoulements, rejets ou dépôts directs ou indirects, chroniques ou épisodiques, même non polluants.

Dans ce cas d'espèce, le juge des référés avait ordonné à l'exploitant d'une station d'épuration de cesser le rejet d'effluents outrepassant les prescriptions fixées par le récépissé de déclaration du 27 juin 2008, à compter du 1er octobre 2018 et sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de cette date, après avoir constaté que les prélèvements et analyses réalisés établissaient que les eaux traitées rejetées par la station de traitement et d'épuration n'étaient pas conformes aux prescriptions réglementaires, l'arrêt énonçant que cette pollution constituait un trouble manifestement illicite qu'il appartenait au juge des référés de faire cesser, sans avoir à examiner la question de la compétence en matière de police administrative.

L'exploitant soutenait que l'injonction qui lui était faite contrariait les prescriptions édictées par l'autorité administrative titulaire de prérogatives de police spéciale, en raison de son incompatibilité avec les mesures et le calendrier fixés par le préfet du Rhône en vue de mettre un terme à la pollution constatée.

La Cour de cassation a censuré la cour d'appel au motif qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui incombait, si l'injonction qu'elle prononçait ne contrariait pas les prescriptions de l'arrêté pris le 24 août 2018 par le préfet du Rhône, la cour d'appel n'avait pas donné de base légale à sa décision (Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 9 septembre 2020, 19-17.271, Publié au bulletin).

En matière d'installations d'éoliennes, il a été jugé « qu'il résulte de l'article L. 553-1 du code de l'environnement que les installations terrestres de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent ayant fait l'objet de l'étude d'impact et de l'enquête publique prévues à l'article L. 553-2, dans sa rédaction en vigueur jusqu'à la publication de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, et bénéficiant d'un permis de construire, sont soumises au régime des installations classées pour la protection de l'environnement institué par les articles L. 511-1 et suivants du même code ; que, dès lors, les tribunaux judiciaires ont compétence pour se prononcer tant sur les dommages-intérêts à allouer aux tiers lésés par le voisinage d'une telle installation classée que sur les mesures propres à faire cesser le préjudice que cette installation pourrait causer dans l'avenir, à condition que ces mesures ne contrarient pas les prescriptions édictées par l'administration en vertu des pouvoirs de police spéciale qu'elle détient ; que le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires s'oppose, en effet, à ce que le juge judiciaire substitue sa propre appréciation à celle que l'autorité administrative a portée sur les dangers ou inconvénients que peuvent présenter ces installations, soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ».

Ce rappel étant fait, la Cour de cassation a approuvé la cour d'appel en ce qu'elle a retenu que la demande tendant à obtenir l'enlèvement des éoliennes litigieuses, au motif que leur implantation et leur fonctionnement seraient à l'origine d'un préjudice visuel et esthétique et de nuisances sonores, impliquait une immixtion du juge judiciaire dans l'exercice de cette police administrative spéciale et qu'elle a, en conséquence, relevé d'office, en application de l'article 92 du code de procédure civile, l'incompétence de la juridiction judiciaire pour en connaître (Chambre civile 1, 25 janvier 2017, 15-25526).

Dans ce cas d'espèce, c'est la suppression d'éoliennes autorisées qui était demandée d'où une évidente question de compétence, seule la juridiction administrative pouvant annuler la décision administrative d'autorisation et y substituer, au besoin, sa décision en vertu de son pouvoir de plein contentieux.

Au cas présent, Mme [K] demande au tribunal d'enjoindre aux sociétés défenderesses de se mettre en conformité avec la réglementation et ce, sous astreinte. Elle ne demande pas au juge judiciaire d'imposer aux sociétés défenderesses des mesures qui iraient soit à l'encontre, soit au-delà des prescriptions techniques, normes et limites d'émission qu'elles doivent respecter en application des arrêtés pris par l'autorité administrative, seule investie, sous le contrôle éventuel du juge administratif, du pouvoir de réglementer le fonctionnement de leurs installations et d'assurer le respect des normes sanitaires et environnementales qui leur sont applicables.

Si tel était le cas, le juge judiciaire serait effectivement manifestement incompétent pour connaître d'injonctions allant à l'encontre de la réglementation technique imposée à l'exploitant de l'installation classée par l'autorité administrative. Il serait également incompétent pour connaître d'injonctions qui aboutiraient à la suspension d'un fonctionnement autorisé par l'autorité administrative.

Sous cette réserve, la compatibilité de l'injonction demandée avec l'appréciation portée par l'autorité administrative sur les dangers ou inconvénients que peuvent présenter les installations classées des défenderesses, notamment en matière de santé et de salubrité publiques, relève du pouvoir juridictionnel du juge du fond en l'occurrence du tribunal judiciaire qui jugera, le moment venu, dans la limite de son pouvoir juridictionnel, si une telle injonction peut prospérer sans se heurter à l'appréciation portée par l'autorité préfectorale sur la conformité des installations en cause.

Il convient en conséquence de rejeter l'exception d'incompétence soulevée et de confirmer la décision déférée de ce chef.

Sur les fins de non-recevoir tirées du défaut d'intérêt à agir

Il s'agit d'une part du défaut d'intérêt à agir pour demander une injonction, soulevé uniquement par la société Arcelormittal Méditerranée, ainsi que du défaut d'intérêt à agir sur le fondement du trouble anormal de voisinage en raison de la théorie de la préoccupation.

Sur l'intérêt à agir pour demander une injonction de se mettre en conformité avec la réglementation

Selon les dispositions de l'article 31 du code de procédure civile, "L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé."

L'intérêt à agir doit être apprécié au moment de l'introduction de la demande en justice et l'existence du droit invoqué par le demandeur ou par le défendeur n'est pas une condition de recevabilité de l'action mais de son succès, après examen des moyens et pièces invoqués à l'appui des demandes.

Pour la société Arcelormittal Méditerranée, Mme [K] serait dépourvue de tout intérêt à agir sa demande excédant largement le trouble du voisinage invoqué dont l'origine alléguée serait les rejets atmosphériques imputés aux sociétés industrielles défenderesses.

Cependant, l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action, de sorte que Mme [K], qui invoque un trouble anormal du voisinage qu'elle impute au non-respect de la réglementation applicable aux installations classées pour la protection de l'environnement exploitées par les sociétés défenderesses, est recevable en sa demande d'injonction visant à obtenir le respect de cette réglementation, mesure selon elle propice à faire cesser le trouble qu'elle invoque.

Cette fin de non-recevoir est en conséquence rejetée.

Sur l'intérêt à agir sur le fondement du trouble anormal de voisinage en raison de la théorie de la préoccupation

Il est soutenu que les activités des trois sociétés préexistaient à la date d'installation de Mme [K] et que les conditions d'exploitation sont restées les mêmes et sans aggravation des risques au regard des améliorations techniques.

Mme [K] oppose que l'immunité de la préoccupation est soumise à trois conditions cumulatives et qu'il suffit de démontrer que l'une des conditions n'est pas respectée, et qu'en tout état de cause la régularisation ne supprime pas l'infraction.

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée, constitue une fin de non-recevoir, étant admis que cette liste n'est pas limitative.

L'article L. 113-8 du code de la construction et de l'habitation, créé par l'ordonnance n° 2020-71 du 29 janvier 2020, entré en vigueur le 1er juillet 2021, anciennement L 112-16 du même code, énonce que les dommages causés aux occupants d'un bâtiment par des nuisances dues à des activités agricoles, industrielles, artisanales, commerciales, touristiques, culturelles ou aéronautiques, n'entraînent pas droit à réparation lorsque le permis de construire afférent au bâtiment exposé à ces nuisances a été demandé ou l'acte authentique constatant l'aliénation ou la prise de bail établi postérieurement à l'existence des activités les occasionnant dès lors que ces activités s'exercent en conformité avec les dispositions législatives ou réglementaires en vigueur et qu'elles se sont poursuivies dans les mêmes conditions.

Il en résulte que la réparation du trouble anormal de voisinage est conditionnée à la démonstration soit d'un exercice non conforme de l'activité aux dispositions législatives ou réglementaires, soit d'une modification des conditions d'exercice de l'activité, s'agissant d'une question de fait qui relève de l'appréciation des juges du fond, mais aussi du juge de la mise en état en application de l'article 789 6° du code de procédure civile, lorsque la fin de non-recevoir nécessite que soit tranchée au préalable une question de fond, et par conséquent de la présente cour statuant sur appel de l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence.

Il est constant que l'acquisition par Mme [K] de son bien immobilier, est bien postérieure à l'existence des activités litigieuses.

A l'appui de son argumentation selon laquelle l'exploitation de ces sociétés n'est pas conforme, Mme [K] verse aux débats un grand nombre de pièces et notamment :

Concernant la société Esso raffinage :

- un rapport d'inspection du 17 janvier 2017 suite à la visite du 25 novembre 2016, concernant les rejets atmosphériques, faisant état de la constatation d'un écart relevé lors de l'inspection, qui a été levé et des remarques auxquelles il a été apporté des réponses satisfaisantes,

- un rapport d'inspection du 23 janvier 2018 suite à la visite du 5 octobre 2017, sur les émissions de composés organiques volatils (COV) : trois écarts ont été relevés puis levés,

- un rapport d'inspection du 22 mars 2019 suite à la visite du 12 juin 2018, sur les émissions atmosphériques : cinq écarts relevés, dont trois ont été levés,

- un rapport d'inspection du 17 avril 2020 suite à la visite du 21 novembre 2011, sur la thématique des rejets atmosphériques et notamment des COV : sept écarts ont été relevés, dont six ont été soldés,

- un rapport d'inspection du 14 janvier 2021 suite à la visite du 21 janvier 2020, sur la thématique de l'air, reprenant des écarts constatés lors de la visite du 12 juin 2018, non soldés,

- un arrêté préfectoral de mise en demeure du 21 juin 2021 au visa du rapport d'inspection du 7 mai 2021, fixant un délai pour la remise de la notice de réexamen de l'étude de dangers du site de [Localité 6] et sa révision si nécessaire, au constat du non-respect de l'arrêté préfectoral du 17 mai 2016 concernant la maîtrise du risque.

Concernant la société Dépôts pétroliers de [Localité 4],

- un rapport d'inspection du 21 mars 2018 suite à la visite du 22 juin 2017, sur les émissions de composés organiques volatils (COV) au terme duquel la remarque n° 1 est soldée, la remarque n° 2 est requalifiée en écart n° 4, sur les quatre écarts relevés, l'écart n° 1 est soldé,

- un arrêté préfectoral de mise en demeure du 1er juin 2018 au visa du rapport d'inspection du 21 mars 2018 fixant un délai pour diminuer les émissions diffuses de COV,

- un rapport d'inspection du 12 avril 2019 suite à la visite du 14 novembre 2018, sur les émissions dans l'air et dans l'eau, avec des remarques non levées concernant les retenues des vapeurs, mentionnant que l'écart n° 2, relevé lors de la visite du 26 juin 2017, n'est pas soldé dans l'attente de solution ou de justification de l'absence de mesures possibles pour réduire les émissions de liées aux égouttures des bras de chargement,

Par ailleurs sont versés aux débats par la société Dépôts pétroliers de [Localité 4],

- un rapport d'inspection du 23 décembre 2019 suite à la visite du 4 septembre 2019, sur les émissions dans l'air, le système de gestion de la sécurité et les mesures de maîtrise des risques, relevant que l'écart n° 2 concerne les vapeurs relevées en sortie de l'unité de récupération des vapeurs du poste de chargement wagon dépassant la valeur de 35 g/Nm3 et estimant satisfaisant, l'engagement de la société à mener un projet de mise en conformité, en annonçant au regard de l'enjeu santé, un encadrement par un arrêté préfectoral de mise en demeure,

- l'arrêté préfectoral de mise en demeure du 10 février 2020 au visa du rapport de l'inspecteur de l'environnement du 23 décembre 2019, fixant un délai au 1er septembre 2020 pour diminuer les émissions de COV de son unité de récupération des vapeurs,

- un mail du 1er février 2022, de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement, disant que le rapport d'inspection en cours de signature proposera la levée de la mise en demeure du 10 février 2020,

- le rapport d'inspection du 22 juillet 2022 suite à la visite du 14 décembre 2021, qui le confirme s'agissant précisément du thème « risques chroniques, émissions de COV ».

Concernant la société Arcelormittal Méditerranée,

- un arrêté préfectoral de mise en demeure du 21 mai 2012, fixant un délai pour respecter les prescriptions en matière d'émissions de benzènes,

- un arrêté préfectoral de mise en demeure du 5 mars 2013, fixant un délai pour respecter un procédé de désulfuration du gaz de cokerie garantissant un niveau inférieur à 0,7 g/Nm3 de souffre dans le gaz résiduel, avant le 31 décembre 2014,

- un arrêté préfectoral de mise en demeure du 9 décembre 2014, remplaçant l'arrêté du 5 mars 2013, fixant un nouveau délai au 31 mai 2015,

- un arrêté préfectoral de mise en demeure du 12 décembre 2017 au visa du rapport d'inspection du 23 octobre 2017, fixant des délais pour respecter plusieurs prescriptions en matière de rejets concernant plusieurs paramètres : benzène, COV, Nox, poussières,

- un arrêté préfectoral du 27 décembre 2018 prononçant une amende administrative de 15 000 euros pour non-respect du terme de la mise en demeure du 12 décembre 2017, concernant les paramètres benzène et COV,

- un arrêté préfectoral du 27 décembre 2018 fixant une astreinte journalière de 1 500 euros par jour jusqu'à satisfaction de la mise en demeure du 12 décembre 2017, concernant les paramètres benzène et COV,

- un arrêté préfectoral du 14 octobre 2020 infligeant une amende administrative de 15 000 euros au visa du rapport d'inspection du 9 janvier 2020, pour non-respect du terme de la mise en demeure du 12 décembre 2017 pour le paramètre poussières,

- un arrêté préfectoral du 14 octobre 2020 fixant une astreinte journalière de 500 euros par jour jusqu'à satisfaction de la mise en demeure du 12 décembre 2017 pour le paramètre poussières,

- un arrêté préfectoral de mise en demeure du 20 octobre 2021 au visa du rapport d'inspection du 10 août 2021, fixant un délai pour respecter les valeurs limite en concentration et flux horaire pour le paramètre poussières des rejets issus des installations de cuisson.

Il ressort de l'ensemble de ces pièces que sont démontrés des manquements de chacune de ces trois sociétés aux prescriptions en matière de rejets atmosphériques, ceux-là mêmes qui sont critiqués par Mme [K], comme à l'origine des troubles qu'elle invoque. Ces manquements s'analysent en une exploitation non conforme aux dispositions réglementaires. La régularisation postérieure des écarts relevés n'est pas de nature à faire disparaître la non-conformité qui a été constatée.

Il convient donc de rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir sur le fondement du trouble anormal de voisinage en raison de la théorie de la préoccupation et de confirmer l'ordonnance appelée sur ce point.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription

Il est soutenu que Mme [K] est prescrite à agir sur le fondement de la théorie des troubles anormaux du voisinage dont le point de départ est soit :

- la date du début d'exploitation,

- la date de la connaissance du trouble ou de l'aggravation du trouble, laquelle est antérieure de plus de cinq ans à la date de l'assignation du 28 décembre 2021 et 4 janvier 2022, Mme [K] n'alléguant pas d'aggravation du trouble.

Mme [K] oppose :

- principalement, que la prescription n'a pas couru car l'exposition perdure, par référence aux jurisprudences en matière sociale, pénale, administrative,

- subsidiairement, qu'elle n'a eu pleine connaissance du trouble qu'à la date de la publication du rapport [Localité 4] EPSEAL du 6 janvier 2017,

- qu'elle n'invoque pas une aggravation de sa situation et qu'il importe peu de s'interroger sur les améliorations alléguées par les sociétés appelantes.

L'article 2224 du code civil créé par la loi du 17 juin 2008 publiée le 18 juin 2008 et entrée en vigueur le 19 juin 2008, énonce que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

L'article 2222 du code civil précise que la loi qui allonge la durée d'une prescription ou d'un délai de forclusion est sans effet sur une prescription ou une forclusion acquise. Elle s'applique lorsque le délai de prescription ou le délai de forclusion n'était pas expiré à la date de son entrée en vigueur. Il est alors tenu compte du délai déjà écoulé. En cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

En l'espèce, Mme [K] a formé son action en justice sur le fondement du trouble anormal de voisinage, qui constitue un fondement autonome de responsabilité extra contractuelle, totalement indépendant de toute notion de faute.

Dès lors, Mme [K] n'est pas fondée à se prévaloir des régimes de prescription spécifiques admis par la jurisprudence en matière d'amiante à raison d'une faute commise par l'employeur, en matière pénale à raison de l'existence d'infractions renouvelées dans le temps, ou en matière administrative à raison d'une faute commise par l'Etat.

En matière de trouble anormal de voisinage, la jurisprudence considère que le point de départ de la prescription correspond au jour de la première manifestation du trouble, c'est-à-dire la date à laquelle le dommage se manifeste au titulaire du droit, ou de son aggravation.

La date de la révélation du dommage est une question de fait qui relève de l'appréciation des juges du fond, mais aussi du juge de la mise en état en application de l'article 789 6° du code de procédure civile, lorsque la fin de non-recevoir nécessite que soit tranchée au préalable une question de fond, et par conséquent de la présente cour statuant sur appel de l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence.

En l'espèce, outre que Mme [K] n'avait pas la qualité de voisin au début des exploitations litigieuses, il ne peut être considéré que le dommage dont elle se plaint, est révélé par le début d'activité des sociétés appelantes.

En effet, ces sociétés exploitent des installations classées pour la protection de l'environnement et leur fonctionnement est strictement réglementé, parce qu'elles peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique, selon les termes mêmes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement.

L'objet de cette réglementation étant de prévenir notamment les dangers pour la santé publique, la révélation du trouble n'est pas sa manifestation apparente, par les fumées, odeurs et autres émissions, qui d'après les sociétés appelantes ont diminué depuis la mise en service par suite d'une réglementation plus stricte et des investissements réalisés, mais la prise de conscience des répercussions de ces émissions sur la santé.

Mme [K] savait lors de son acquisition le 12 juin 1996, que son habitation se situait dans le périmètre de plusieurs installations classées pour la protection de l'environnement. Si elle a pu constater les fumées, odeurs et autres émissions en provenance de ces installations classées pour la protection de l'environnement, et était nécessairement consciente des nuisances apparentes auxquelles elle était exposée, elle n'avait en revanche pas nécessairement conscience des dangers pour sa santé, sachant que ces installations étaient réglementées et surveillées de façon à prévenir les atteintes à la santé publique.

Il est justifié de nombreuses études dès le début des activités des installations classées, notamment :

- la publication datée de 1973 intitulée « Pollution de l'air et climatologie locale dans le secteur de [Localité 4]-Berre »,

- les évaluations des risques sanitaires sur le site de [Localité 6] demandées par la société Arcelormittal Méditerranée datées de septembre 2005 et mai 2008,

- l'étude BURGEAP du 6 mai 2008 intitulée « rapport final de l'évaluation des risques sanitaire dans la zone industrielle de [Localité 6] dans les Bouches-du-Rhône »,

- l'étude publiée par la cellule interrégionale d'épidémiologie Sud (CIRE Sud) et l'institut de veille sanitaire intitulé « pollution atmosphérique et hospitalisations pour pathologies cardio-vasculaires et respiratoires et pour cancers dans le secteur de l'Etang de Berre en 2004-2007 », en juin 2011,

- le bulletin de veille sanitaire de la CIRE Sud, daté d'avril 2013 intitulé « Spécial pollution atmosphérique », dans lequel on trouve une tentative d'évaluation du lien entre l'exposition à la pollution atmosphérique et l'état de santé de la population.

Toutefois, ces études techniques particulièrement denses et dont le niveau de diffusion auprès des populations locales n'est pas connu, ne sont pas de nature à mettre en évidence un lien entre les niveaux de pollution industrielle provenant des installations classées exploitées par les sociétés appelantes et la prévalence de certaines pathologies parmi les populations exposées.

Ainsi, les résultats des études de 2005 et 2008 sur l'évaluation des risques sanitaires liés aux activités du site de [Localité 6], commandées par la société Arcelormittal, sont présentés sous formes de tableaux chiffrés des différents indices de risques identifiés, peu accessibles à un public profane. En outre, ces résultats restent théoriques faute d'être corrélés avec l'état sanitaire des populations exposées.

Il en est de même de l'étude BURGEAP de 2008, intitulée « rapport final » qui comporte plus de 150 pages, même si en page 11 figure un résumé non technique qui indique que les risques cancérigènes et non cancérigènes pour les populations sont jugés non significatifs.

Le bulletin de veille sanitaire de la cellule d'intervention en région (CIRE Sud), produit par la société Esso raffinage daté d'avril 2013 intitulé « Spécial pollution atmosphérique », ne peut non plus être considéré comme donnant une information suffisante sur le risque sanitaire. On y trouve une tentative d'évaluation du lien entre l'exposition à la pollution atmosphérique et l'état de santé de la population avec la mention que « l'étude de faisabilité n'a pas été concluante, en raison de la difficulté à mobiliser la population, (') et que la taille réduite du panel d'étude n'a pas permis de définir un modèle statistique suffisamment fiable pour étudier l'association entre l'exposition à la pollution atmosphérique et les symptômes déclarés ».

Les quelques pages de la publication datée de 1973 intitulée « Pollution de l'air et climatologie locale dans le secteur de [Localité 4]-Berre », communiquées par la société Dépôts pétroliers de [Localité 4], document de 118 pages, ne permettent pas mieux de démontrer une prise de conscience antérieure à 2017 du risque sanitaire généré par les installations classées en cause.

Au contraire, la publication de l'étude [Localité 4] EPSEAL en janvier 2017 a mis en évidence le risque de développer des pathologies graves du fait de l'exposition quotidienne aux polluants émanant de l'activité des sociétés exploitantes. Si ces résultats ont effectivement fait l'objet d'une présentation à l'occasion des Rencontres scientifiques de l'ANSES le 14 novembre 2016, à Paris, la date officielle de publication du rapport est intervenue le 6 janvier 2017, concomitamment à la tenue de réunions d'informations des populations avoisinantes.

Cette révélation publique et plus particulièrement localisée, relative à l'impact sanitaire en cas de non-respect de la réglementation apporte une information, qui doit dès lors, être retenue comme le point de départ de la prise de conscience du risque sanitaire lié à la proximité de ces établissements et de l'allégation de préjudices d'anxiété, de jouissance et corporel, dont l'appréciation appartient au juge du fond.

En dépit de la remise en cause de la pertinence de cette étude, c'est bien le lien établi entre la pollution industrielle sur le site de [Localité 6] et certaines pathologies graves prévalentes au regard des statistiques nationales, porté à la connaissance des populations, qui a révélé les dangers auxquels les exposaient les activités des sociétés appelantes.

L'assignation délivrée les 28 décembre 2021 et 4 janvier 2022 par Mme [K] n'est donc pas couverte par la prescription quinquennale, dont le délai a commencé à courir à la date de publication de l'étude [Localité 4] EPSEAL, le 6 janvier 2017.

L'ordonnance sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a écarté la fin de non-recevoir tirée de la prescription, et y ajoutant, le point de départ de la prescription sera précisé à la date du 6 janvier 2017 et pas celle de mars 2017, comme précisé dans les motifs de l'ordonnance, non repris dans le dispositif.

Sur les demandes accessoires

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état dans ses dispositions concernant les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

Les sociétés appelantes qui succombent, seront condamnées aux dépens d'appel et aux frais irrépétibles qu'il est inéquitable de laisser à la charge de Mme [K].

PAR CES MOTIFS

Ordonne la jonction des procédures RG 23/ 10420, RG 23/ 10543 et RG 23/10590, sous le numéro RG 23/ 10420.

Confirme l'ordonnance appelée en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Rejette la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir pour demander une injonction de se mettre en conformité avec la réglementation ;

Dit que les sociétés Arcelormittal Méditerranée, Dépôts pétroliers de [Localité 4] et Esso raffinage ont commis des manquements aux prescriptions de leurs arrêtés d'autorisation qui s'analysent en une exploitation non conforme à la réglementation ;

Dit que point de départ de la prescription est la date de la publication de l'étude [Localité 4] EPSEAL le 6 janvier 2017 ;

Condamne les sociétés Arcelormittal Méditerranée, Dépôts pétroliers de [Localité 4] et Esso raffinage aux dépens d'appel ;

Condamne les sociétés Arcelormittal Méditerranée, Dépôts pétroliers de [Localité 4] et Esso raffinage à payer chacune à Mme [X] [K], la somme de 3 000 euros (trois mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 23/10420
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;23.10420 ?
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