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06/06/2024 | FRANCE | N°21/03888

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 06 juin 2024, 21/03888


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 06 JUIN 2024

mm

N°2024/ 203













Rôle N° RG 21/03888 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHDS6







S.D.C. [Adresse 16]





C/



[E], [V] [I] [C] veuve [C]

Commune COMMUNE DE [Localité 15]

S.D.C. [Adresse 18]



























opie exécutoire délivrée le :

à :


>Me Christelle OUILLON



Me Edith ANGELICO



SELARL MAUDUIT-LOPASSO-GOIRAND & ASSOCIES





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 18 Janvier 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 18/01584 .





APPELANT



Syndicat des Copropriétaires...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 06 JUIN 2024

mm

N°2024/ 203

Rôle N° RG 21/03888 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHDS6

S.D.C. [Adresse 16]

C/

[E], [V] [I] [C] veuve [C]

Commune COMMUNE DE [Localité 15]

S.D.C. [Adresse 18]

opie exécutoire délivrée le :

à :

Me Christelle OUILLON

Me Edith ANGELICO

SELARL MAUDUIT-LOPASSO-GOIRAND & ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 18 Janvier 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 18/01584 .

APPELANT

Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier ' [Adresse 16]', sis [Adresse 21], représenté par son syndic en exercice la société GRECH IMMOBILIER, dont le siège social est sis [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal en exercice

représenté par Me Christelle OUILLON, avocat au barreau de TOULON

INTIMES

Madame [E], [V] [I] veuve [C]

demeurant [Adresse 24]

représentée par Me Edith ANGELICO, avocat au barreau de TOULON

COMMUNE DE [Localité 15], sise [Adresse 14], représentée par son maire en exercice audit siège

représentée par Me Patrick LOPASSO de la SELARL MAUDUIT-LOPASSO-GOIRAND & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULON

Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 18] demeurant [Adresse 6],

représenté par son syndic en exercice le Cabinet MERLE, dont le siège social est sis [Adresse 1], pris en la personne de son représentant légal en exercice

assignation portant signification de la déclaration d'appel le 27.05.2021 à personne habilitée

défaillant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Mars 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Marc MAGNON, Président, et Mme Audrey CARPENTIER, Conseiller, chargés du rapport.

Monsieur Marc MAGNON, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Président

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Juin 2024.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Juin 2024.

Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET PROCÉDURE :

La Commune de [Localité 15] est propriétaire d'une parcelle cadastrée section [Cadastre 20], contiguë aux parcelles:

' BI n°240, propriété actuelle du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 18]",

' BI n°146 et n°[Cadastre 3], propriété actuelle de Madame [E] [I] veuve [C],

' BI n°340, propriété actuelle du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]".

La Commune de [Localité 15] a envisagé d'édifier un immeuble sur cette parcelle dont elle soutient qu'elle est en état d'enclave.

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 18]", sollicité par la commune par courrier du 30 octobre 2014, lui a fait part, par correspondance du 26 mai 2015, de son refus de lui accorder le bénéfice d'un droit de passage sur son fonds.

Par acte du 19 février 2016, la Commune de [Localité 15] a fait assigner en référé le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 18]" et le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]", représentés chacun par leur syndic en exercice, ainsi que Madame [E] [C] née [I] devant le président du tribunal de grande instance de Toulon aux fins d'expertise judiciaire sur les solutions de désenclavement.

Par ordonnance de référé du 1er avril 2016, il a été fait droit à cette demande et Monsieur [D] [B], ultérieurement remplacé par Monsieur [Y] [A], a été désigné en qualité d'expert afin de donner son avis sur l'état d'enclave et le cas échéant, sur les solutions de désenclavement.

L'expert a déposé son rapport définitif le 18 avril 2017, préconisant quatre solutions alternatives aux fins de remédier à un état d'enclave relatif de la parcelle [Cadastre 20].

Par actes d'huissier signifiés les 21 et 23 février 2018, la Commune de [Localité 15] a fait assigner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 18]", pris en la personne de son syndic en exercice, Madame [E] [I] épouse [C] et le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]", représenté par son syndic en exercice, devant le Tribunal de grande instance de Toulon, aux fins d'obtenir, au visa de l'article 682 du code civil, et sous le bénéfice de l'exécution provisoire, le désenclavement de sa parcelle.

La commune de [Localité 15] a demandé au tribunal :

A titre principal, de constater que la parcelle [Cadastre 20] de la commune est en situation d'enclave relative, et de juger que la solution de désenclavement se fera selon l'accès n°4 préconisé par l'expert judiciaire, soit en empruntant l'assiette des parcelles du Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 18]" et de Madame [I], juger que l'indemnité mise à sa charge ne pourra excéder 23.880 euros pour la copropriété [Adresse 18] et 796 euros pour Madame [I] ;

A titre subsidiaire, juger que la solution de désenclavement se fera selon l'accès n°1 préconisé par l'expert judiciaire, soit en empruntant l'assiette de la parcelle du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]" ; juger que l'indemnité due par la commune à ce titre ne pourra excéder la somme de 34.950 euros,

En tout état de cause,

Débouter les défendeurs de toutes leurs prétentions, et condamner in solidum tous succombants à lui payer une somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens distraits au profit de Maître Patrick Lopasso.

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 18]", représenté par son syndic en exercice l' EURL Cabinet Merle, et Madame [E] [I] veuve [C] ont demandé au tribunal :

A titre liminaire, de prononcer la nullité du rapport d'expertise et, à titre principal, de débouter la commune de [Localité 15] et le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]" de toutes leurs demandes,

A titre infiniment subsidiaire, de condamner la commune de [Localité 15] à payer à titre d'indemnité de désenclavement la somme de 72.520 euros au syndicat des copropriétaires et 1.480 euros à Madame [I] veuve [C],

En tout état de cause, de condamner la commune de [Localité 15] et le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]" à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile les sommes de 1.500 euros à Madame [I] veuve [C] et de 7.000 euros au syndicat des copropriétaires.

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]", représenté par son syndic en exercice la société Grech Immobilier, a sollicité du tribunal, à titre principal, de déclarer la commune irrecevable en sa demande de désenclavement ;

A titre subsidiaire, d' homologuer la solution de désenclavement n°4 de l'expertise judiciaire ;

A titre infiniment subsidiaire, de condamner la commune à lui payer la somme de 34.950 euros au titre de l'indemnité de désenclavement préconisée par l'expert judiciaire si la solution n°1 était retenue,

En tout état de cause, de débouter les autres parties de toutes leurs demandes, laisser la charge des frais d'expertise judiciaire à la commune, et condamner tout succombant à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Maître Julia Soler.

Par jugement du 18 janvier 2021, le tribunal de grande instance de Toulon a :

Débouté le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 18]", représenté par son syndic en exercice, et Madame [E] [C] née [I] de leur demande d'annulation du rapport d'expertise judiciaire déposé par Monsieur [Y] [A] le 18 avril 2017,

Dit que la parcelle référencée section [Cadastre 20] sur la commune de [Localité 15] est en situation d'enclave,

Dit que la solution de désenclavement se fera selon l'accès numéro 1 tel que défini par Monsieur [Y] [A] dans son rapport du 18 avril 2017, soit sur la parcelle référencée section [Cadastre 13] sise sur la commune de [Localité 15] dont est actuellement propriétaire le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]",

Condamné la commune de [Localité 15] à payer au Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]", représenté par son syndic en exercice, la somme de 34.950 euros à titre d'indemnité compensatrice,

Condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]", représenté par son syndic en exercice, à payer à la commune de [Localité 15] la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné la Commune de [Localité 15] et le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]", représenté par son syndic en exercice, à payer à Madame [E] [C] née [I] la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné la commune de [Localité 15] et le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]", représenté par son syndic en exercice, à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 18]", représenté par son syndic en exercice, la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Débouté le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]", représenté par son syndic en exercice, de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné la commune de [Localité 15] et le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]", représenté par son syndic en exercice, aux entiers dépens d'instance,

Ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Par déclaration du 15 mars 2021, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier '[Adresse 16]' a relevé appel de ce jugement,

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble Immobilier' [Adresse 18]' n'a pas constitué avocat. La déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant lui ont été signifiées le 27 mai 2021, par acte d'huissier délivré à personne morale contenant assignation.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 mars 2024.

Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l'espèce des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la cour entend se référer pour l'exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessous.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

Vu les conclusions notifiées et signifiées respectivement le 20 mai et le 27 mai 2021 par le syndicat des copropriétaires [Adresse 16] tendant à :

Vu l'article 682 du Code civil

Vu les pièces versées aux débats

Réformer le jugement du 18 janvier 2021 dans toutes ses dispositions ;

En Conséquence,

A Titre Principal

Constater, dire et juger que l'état d'enclavement de la parcelle [Cadastre 20] est dû au propre fait de la commune de [Localité 15],

Déclarer irrecevable la demande de désenclavement formulée par la commune de [Localité 15],

A titre subsidiaire,

Homologuer les termes du rapport d'expertise de Monsieur [Y] [A] daté du 18 avril 2017 en ce qu'il a préconisé une solution de désenclavement visée « accès n°4»

Dire et juger que la solution de désenclavement se fera par l'accès dit n°4 ' en empruntant l'assiette de la copropriété [Adresse 18] et de Madame [I],

En tout état de cause

Débouter la commune de [Localité 15], le syndicat des copropriétaires [Adresse 18] et Madame [I] de toutes autres demandes, fins et conclusions,

Dire et juger que la commune de [Localité 15] gardera à sa charge les frais d'expertise judiciaire,

Condamner tout succombant à payer au syndicat des copropriétaires [Adresse 16] la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner tout succombant aux entiers dépens distraits au profit de Maître Christelle Ouillon, avocat sur son affirmation de droit.

Le syndicat de l'ensemble immobilier [Adresse 16] fait valoir en substance :

' l'absence d'enclave faute de respecter les conditions de l'intérêt à agir : la cession de la parcelle litigieuse à la commune par la SCI [Adresse 16], condition du permis de construire délivré par arrêté préfectoral , est intervenue pour la réalisation d'une école maternelle. La commune envisage maintenant de construire des logements sociaux, sans toutefois que le projet ne soit définitivement arrêté. La parcelle a fait l'objet d'un changement de destination. Cette demande de désenclavement a donc pour objet une éventuelle construction , sans que les règles d'urbanisme applicables à cette dernière puissent être définies avec certitude.

' La parcelle concernée, numérotée [Cadastre 20], est attenante à la parcelle [Cadastre 10] également propriété de la commune qui n'est pas enclavée, étant bordée par la voie publique. Le tout forme une même unité foncière. L'état d'enclave n'est donc pas constitué. Ainsi, plusieurs terrains, parcelles cadastrales ou lots contigus appartenant initialement à des propriétaires distincts forment une seule et même unité foncière dès lors qu' ils sont réunis entre les mains d'un même propriétaire (CE. 31 octobre 1990).

' La commune de [Localité 15] peut rendre accessible la parcelle [Cadastre 20] en mettant en 'uvre des moyens normaux et raisonnables en passant par la parcelle [Cadastre 10], ce qu'a admis le maire lors de la séance du conseil municipal du 8 mars 2021, en évoquant la possibilité d'un passage par l'école [22].

' Si le projet d'une école maternelle avait été maintenu , la question de l'enclave ne se serait jamais posée. La parcelle [Cadastre 20] a ainsi été enclavée du propre fait de la commune.

' L'expert propose deux accès par la parcelle [Cadastre 10] envisageables avec des travaux de réaménagement.

' L'expert s'est prononcé en faveur de la solution n° 4 qui prévoit un passage sur les parcelles de l'ensemble immobilier [Adresse 18] et de Mme [C] née [I], solution qui est la plus courte et la moins dommageable.

' le tribunal a écarté cette solution , au visa de l'article 684 du code civil inapplicable au cas d'espèce, l'état d'enclave n'étant pas la conséquence directe de la division d'un fond, l'enclavement de la parcelle [Cadastre 20] résultant de la division du fonds [F] de 1930 et non des conventions passées en 1978 entre la commune et la SCI [Adresse 16]. La condition de passage suffisant sur une parcelle résultant de la division d'origine n'est en outre pas satisfaite.

Vu les conclusions notifiées le 3 septembre 2021 par la commune de [Localité 15] tendant à :

Vu l'article 682, 683 et 684 du Code Civil,

Vu le rapport d'expertise en date du 18 avril 2017

Réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Toulon en date du 18 janvier 2021 en ce qu'il n'a pas retenu la solution de désenclavement n°4 au profit de la solution n°1 et, pour le surplus,

Confirmer la décision entreprise,

En conséquence et statuant à nouveau,

Dire que la parcelle section [Cadastre 20] sise sur la commune de [Localité 15] est en situation d'enclave,

Homologuer la solution de désenclavement préconisée par l'expert dans son rapport en date du 18 avril 2017, selon l'accès 4, en empruntant l'assiette de la copropriété "[Adresse 18]" cadastrée section [Cadastre 12] à [Localité 15], et de Madame [C], cadastrée section [Cadastre 11], fonds servant au profit de la parcelle cadastrée Section [Cadastre 20] sise sur la commune de [Localité 15], fonds dominant,

Autoriser la commune de [Localité 15] à emprunter l'assiette de la Copropriété "[Adresse 18]" cadastrée section [Cadastre 12] à [Localité 15], et de Madame [C], cadastrée section [Cadastre 11], à savoir par l'accès dit n°4, aux fins de désenclavement,

Dire qu'une indemnité sera due par la commune à ce titre et dans la limite de la somme de 23.880 euros pour la copropriété [Adresse 18] et 796 euros pour Madame [C],

En tout état de cause,

Débouter les parties défenderesses de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions qui viendraient en contradiction des demandes formées par la commune de [Localité 15],

Condamner in solidum tous succombants aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise et à payer « aux demandeurs » une somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens au profit de Maître Patrick LOPASSO, avocat sur son affirmation de droit.

A l'appui de ses prétentions, la commune fait valoir que :

' La parcelle [Cadastre 20] , classée en zone UB du PLU, est constructible Elle est cependant enclavée et ne dispose d'aucun accès à la voie publique.

' Les conditions d'accès sont fixées par l'article UB-3-1 du PLU. Les voies de circulation doivent notamment permettre la circulation et l'utilisation des engins et matériels de lutte contre l'incendie. Ainsi, les voies nouvelles ne peuvent avoir une largeur inférieure à 5 mètres d'emprise. La sécurité des piétons doit être assurée par des aménagements adéquats.

' L'expert a conclu que la parcelle [Cadastre 20] est en état d'enclave relative dû à la présence sur la parcelle [Cadastre 10] d'obstacles majeurs (unités foncières différentes et terrains de sports et écoles) et domaine public.

' Le changement de destination du projet constructif n'a pas d'incidence sur la recevabilité de la demande, alors que dans les deux projets , il est question d'un usage normal du fonds, qui est constructible et de superficie suffisante pour être construit.

' Les parcelles [Cadastre 20] et [Cadastre 10] ne forment pas un ensemble indissociable. Si la parcelle [Cadastre 20] est mitoyenne avec l'extrémité Ouest de la parcelle [Cadastre 10], le terrain est desservi par une voie dont les caractéristiques techniques sont insuffisantes au regard de l'importance et de la nature du projet. Les conditions d'accès à la parcelle [Cadastre 10] sont limitées par la présence d'obstacles majeurs . L'état d'enclave est donc avéré. L'insuffisance du passage tient à l'impraticabilité de l'issue, sans travaux préalables importants, ainsi qu'à l'impossibilité d'exploiter normalement le fonds.

' La parcelle [Cadastre 10] appartient au domaine public de la commune. Son caractère imprescriptible , inaliénable , insaisissable exclut toute modification des ouvrages qui pourrait permettre le désenclavement de la parcelle [Cadastre 20] par la parcelle [Cadastre 10].

' Comme l'a retenu le tribunal, il ne peut être reproché à la commune de s'être volontairement enclavée, la parcelle [Cadastre 20] ayant été acquise après l'achèvement des aménagements de la parcelle [Cadastre 10].

' L'expert a retenu la solution de désenclavement n° 4 par le fonds du syndicat '[Adresse 18]' et celui de Mme [C], qui, étant le tracé le plus court et le moins dommageable, répond aux exigences de l'article 683 du code civil.

' L'état d'enclave résulte du partage d'origine de 1930, le partage [F]. Il n'y avait donc aucune raison, comme l'a fait le tribunal, de rechercher un autre passage sur le fonds de la copropriété '[Adresse 16]' , à raison des conventions passées entre la SCI du même nom et la commune, en 1978 , alors que l'état d'enclave de la parcelle [Cadastre 20] préexistait.

' Il existe de plus des difficultés importantes touchant à la sécurité dans l'anneau de circulation qui entoure l'ensemble immobilier '[Adresse 16]', la présence de logements collectifs conduisant déjà à une saturation permanente de l'issue desservant la voie publique. L'expert a ainsi retenu que le passage était de 195 m et très encombré. La route circulaire privée dessert de nombreux garages générant une importante circulation. Les parkings sont occupés et débordent sur des espaces libres à l'origine prévus en espaces verts.

' Les solutions 2 et 3, par la parcelle [Cadastre 10] appartenant au domaine public de la commune, sont inopérantes. Ces solutions impliqueraient des travaux importants affectant les ouvrages publics que sont le stade [19] et l'école communale [22].

' Or, le domaine public est imprescriptible et inaliénable. De plus l'intangibilité d'un ouvrage public entrave toute décision qui en ordonnerait la démolition. Il existe donc des obstacles juridiques aux solutions de désenclavement 2 et 3.

Vu les conclusions notifiées le 19 août 2021 par Madame [E] [I] veuve [C] tendant à :

A titre principal :

Réformer le Jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du rapport d'expertise et dit que la parcelle cadastrée section [Cadastre 20] est en situation d'enclave,

Prononcer la nullité du rapport d'expertise,

Dire que la parcelle cadastrée section [Cadastre 20] sur la commune de [Localité 15] (83) n'est pas en situation d'enclave,

Débouter la commune de [Localité 15] et le syndicat des copropriétaires '[Adresse 16]' de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire:

Confirmer le Jugement entrepris en ce qu'il a ordonné le désenclavement selon l'accès n°1 du rapport d'expertise, passant par le fonds du syndicat des copropriétaires '[Adresse 16]',

Ordonner que la solution de désenclavement se fasse selon l'accès numéro 1 tel que défini par Monsieur [Y] [A] dans son rapport du 18 avril 2017, soit sur la parcelle référencée section [Cadastre 13] sise sur la commune de [Localité 15] dont est actuellement propriétaire le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier '[Adresse 16]',

Débouter la Commune de [Localité 15] et le syndicat des copropriétaires '[Adresse 16]' de toutes leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,

A titre Infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la cour ordonnait le désenclavement au moyen d'un passage par le fonds de Madame [I] veuve [C]:

Condamner la commune de [Localité 15] à payer à titre d'indemnité de désenclavement à Madame [I] Veuve [C] la somme de 1.480 €.

En tout état de cause :

Condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier '[Adresse 16]' à payer à Madame [E] [I] Veuve [C] la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Condamner la commune de [Localité 15] à payer à Madame [E] [I] veuve [C] la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier '[Adresse 16]' et la commune de [Localité 15] aux entiers dépens en cause d'appel,

Madame [E] [I] veuve [C] soutient en premier lieu la nullité du rapport d' expertise aux motifs que l'expert aurait récupéré et/ ou examiné des documents, cadastre refait en 1935, ancien cadastre napoléonien, acte de partage notarié [F] de 1930, plusieurs autres titres fonciers évoqués, documents qui n'étaient joints ni au pré-rapport ni au rapport, soustrayant ces pièces à un débat contradictoire, au motif que ces documents en mauvais état n'étaient pas photocopiables. Cette violation du principe du contradictoire cause un grief évident aux défendeurs. L'expert s'est en outre contredit dans ses constatations.

Au fond, elle fait valoir les moyens et arguments suivants :

' la parcelle [Cadastre 20] dont le désenclavement est demandé par la commune est contiguë de la parcelle [Cadastre 10] également propriété de la commune qui est bordée par la voie publique . L'état d'enclave est donc illusoire.

' La parcelle [Cadastre 20] résulte de la subdivision de la parcelle originelle [Cadastre 9] qui était la propriété des auteurs du [Adresse 16]. Sa cession à la commune a été envisagée par arrêté préfectoral du 13 septembre 1976 en contrepartie d'une dérogation aux règles d'urbanisme pour le permis de construire de l'ensemble immobilier [Adresse 16]. Cette cession à la commune était destinée à édifier une école maternelle.

' La commune de [Localité 15] entend désormais lui donner une autre destination, la construction de logements sociaux.

' La cession de la parcelle [Cadastre 20] ex [Cadastre 7] est intervenue par acte notarié du 18 septembre 1980 annexant un arrêté préfectoral du 9 mai 1980 autorisant cette cession et annexant une délibération du conseil municipal du 17 octobre 1979 indiquant le classement de la parcelle [Cadastre 7] dans le domaine public de la commune. Tout comme la parcelle [Cadastre 10], la parcelle [Cadastre 20] qui est attenante à la première fait partie du domaine public de la commune

' Dès cette époque, la parcelle [Cadastre 20] était desservie par un accès à l'Ouest débouchant sur la copropriété [Adresse 16], ce qui était admis dans une correspondance de la commune du 13 février 2001, adressée au commissaire enquêteur chargé de l'enquête publique sur la révision du POS de la commune. Cet accès a manifestement été clôturé par la suite.

' Il n'y a pas d'état d'enclave faute pour la commune de produire un certificat d'urbanisme opérationnel définissant la largeur minimale des voies de desserte au regard du projet autorisé initialement, à savoir une école maternelle.

' Il n'y a pas d'enclavement , la parcelle [Cadastre 20] bénéficiant d'un accès à la voie publique par la parcelle [Cadastre 10].

' L'état d'enclave résulte des propres constructions de la commune sur la parcelle [Cadastre 10].

' En 2000, la parcelle n'était pas enclavée et bénéficiait d'un accès à la voie publique par la copropriété [Adresse 16].

' La dernière division qui aurait produit l'enclave , à supposer cet état avéré, résulte de l'acte du 18 septembre 1980 opérant cession gratuite de la parcelle [Cadastre 20] à la commune par les auteurs du [Adresse 16], le fait que la copropriété [Adresse 16], la copropriété [Adresse 18] et la parcelle [Cadastre 20], sous ensemble du [Adresse 16], aient une même origine remontant au partage [F] des 1er et 22 mars 1930 étant sans conséquence.

' L'enclave résultant de la division du fonds appartenant aux auteurs de la copropriété du [Adresse 16] impose le désenclavement par cette copropriété.

' Le désenclavement par la copropriété [Adresse 18] et le fonds de la concluante n'est pas le moins dommageable car il impacte trois bâtiment représentant 49 logements ce qui justifierait une indemnité de désenclavement de 75520 euros (49x 1480 euros ).

MOTIVATION :

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 18] ayant été assigné à personne morale, l'arrêt sera réputé contradictoire.

Sur la nullité du rapport d'expertise :

En droit les irrégularités affectant le déroulement des opérations d'expertise sont sanctionnées selon les dispositions de l'article 175 du code de procédure civile qui renvoit aux règles régissant la nullité des actes de procédure et notamment aux irrégularités de l'article 114 du code de procédure civile, dont l'observation ne peut être sanctionnée par la nullité qu'à charge de prouver un grief.

Madame [E] [I] veuve [C] soutient que le rapport d'expertise de Monsieur [Y] [A] est entaché d'irrégularités tenant, d'une part, en l'absence de remise aux parties, ou en pièces annexes des pré-rapport et rapport d'expertise, de tous les documents consultés par l'expert, et, d'autre part, aux contradictions que recèlerait le rapport.

Comme l'a retenu exactement le tribunal, la critique de l'avis ou des constatations de l'expert, au motif de l'existence alléguée de contradictions dans son raisonnement, ressort non pas de la régularité du rapport d'expertise mais de sa valeur probante et donc du débat au fond. Cette critique du rapport d'expertise ne peut fonder une demande d'annulation.

Quant au moyen tiré de la violation du principe du contradictoire, il est fait grief à l'expert d'avoir fondé son analyse, outre sur les titres qui lui ont été communiqués, sur ses propres recherches, soit les cadastres napoléoniens de 1927 et 1935 et un acte authentique de partage [F] du 22 mars 1930 et le plan de division qui lui était joint, alors qu'il n'adjoint ni au pré-rapport, ni au rapport définitif les documents consultés , à l'exception d'un extrait du plan cadastral ancien.

Toutefois, l'expert judiciaire a expliqué ne pas avoir pu procéder à la photocopie des actes anciens, matériellement impossible, compte tenu de leurs conditions de conservation (protection en plastique inamovible, mauvais état...). Cependant, l'expert a retranscrit les mentions utiles à sa mission et reporté dans son rapport le plan étudié, de manière à permettre un débat contradictoire sur ses investigations.

En outre, il a mentionné les actes et pièces qu'il a consultés, leur origine et, s'agissant du partage et du plan de 1930, l'étude notariale auprès de laquelle il était possible de les consulter, de sorte que les parties ont été régulièrement informées des actes étudiés et mises en mesure, si elles le souhaitaient, de procéder elles-mêmes à cette consultation, le cadastre comme les titres de propriété étant des documents publics.

Enfin, Madame [E] [C] née [I] ne justifie pas d'un grief, dès lors qu'elle ne remet pas en cause les informations tirées de l'acte de 1930 , mais soutient qu'elles sont sans conséquence juridique sur la situation d'enclave de la parcelle litigieuse et son désenclavement éventuel, la division originelle d'un fonds commun étant selon elle supplantée par le détachement plus récent de la parcelle [Cadastre 20] du fonds ayant servi à réaliser l'opération immobilière du [Adresse 16], en 1979 1980. Or cette dernière division résulte notamment des pièces qu'elle verse aux débats.

En conséquence, Madame [E] [I] veuve [C] doit être déboutée de sa demande tendant à l'annulation du rapport d'expertise judiciaire.

Sur l'état d'enclave de la parcelle cadastrée [Cadastre 20] :

Selon l'article 682 du code civil, le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner.

Selon une jurisprudence constante, les juges du fond disposent d'un pouvoir souverain pour apprécier l'état d'enclave Cette appréciation souveraine se fait d'après les lieux et les circonstances de la cause selon l'utilisation normale du fonds, notion évolutive qui tient compte de l'évolution notamment technique, économique et des conditions de vie.

La tolérance, état de fait précaire, peut conduire à écarter la protection légale instituée par l'article 682, tant qu'elle demeure. En revanche, la cessation de la tolérance permet d'invoquer l'état d'enclave.

Toutefois, une servitude légale de passage ne peut être accordée pour un motif de simple commodité.

De même, aucun droit de passage n'est dû lorsque l'enclave résulte du fait volontaire du propriétaire enclavé.

Le caractère volontaire de l'enclave ne résulte pas nécessairement du fait du propriétaire actuel du fonds enclavé, mais peut aussi résulter du fait de ses auteurs.

Enfin, la charge de la preuve du caractère volontaire de l'enclave, invoqué par voie d'exception, incombe au propriétaire du fonds sur lequel est réclamé le passage.

En l'espèce, le syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 16] et Mme [I] veuve [C] soutiennent que la demande de désenclavement de la commune serait irrecevable en tout cas infondée dès lors que la parcelle [Cadastre 20] aurait été acquise par la commune pour y construire une école maternelle et non réaliser un projet de construction de logements sociaux. Madame [C] soutient en outre que la parcelle [Cadastre 20] relève tout comme la parcelle [Cadastre 10], à laquelle elle est contiguë, du domaine public de la commune et forme avec elle une même unité foncière disposant d'un accès à la voie publique.

Cependant, comme le relève la commune, le changement de projet ne remet pas en cause la constructibilité de la parcelle litigieuse classée en zone UB du plan local d'urbanisme ce qui implique au regard de la réglementation des voies d'accès par l'article UB -3-1 , la réalisation de voies ouvertes à la circulation publique permettant d'assurer la circulation des véhicules de lutte contre l'incendie et offrant une largeur qui ne peut être inférieure à 5 mètre d'emprise, ou, s'agissant des voies en impasse, la réalisation d'aires de retournement. L'usage normal du fonds, quels que soient le projet et ses modalités techniques implique par conséquent une desserte suffisante au regard de ces règles d'urbanisme. Par ailleurs, la cour ne saurait apprécier l'opportunité de la destination envisagée et son évolution dans le temps sur plus de trois décennies.

Le changement de destination de la parcelle n'a donc pas d'incidence sur la recevabilité de la demande de désenclavement.

L'expert [A] a conclu à un état d'enclave relative qui est fondé sur l'insuffisance des accès existants, notion qui est contestée par le syndicat de l'ensemble immobilier [Adresse 16] et par Mme [C] qui estiment que l'expert judiciaire n'a pas motivé cette conclusion.

Il ressort cependant du rapport de l'expert judiciaire( page 20) que la parcelle [Cadastre 20] est en état d'enclave relative due à la présence d'obstacles majeurs sur la parcelle [Cadastre 10] ( unité foncière différente classée dans le domaine public de la commune supportant terrains de sports et école ). Elle ne bénéficie pas d'une servitude de passage sur le fonds des auteurs de la copropriété [Adresse 16], dont elle est issue, servitude qui n'a pas été constituée dans l'acte de cession du 18 septembre 1980, et ne bénéficie pas non plus d'une servitude de passage sur le fonds de la copropriété [Adresse 18]. Elle n'a pas d'autre perspective de passage vers la voie publique que par les fonds précités.

Or, le fait que la parcelle [Cadastre 20] appartienne à la commune tout comme la parcelle [Cadastre 10] dont elle est contiguë n'exclut pas l'état d'enclave relative. En effet si la parcelle [Cadastre 10] dispose d'un accès direct sur la voie publique elle comporte l'enceinte du stade municipal de rugby, un terrain de sport et une école communale, ouvrages publics ou destinés à l'utilité publique. Le passage par la parcelle [Cadastre 10] pour accéder à la voie publique impliquerait, selon l' accès n° 2 étudié par l'expert, la suppression du bloc des vestiaires et de la tribune Nord du Stade, le réaménagement de l'entrée sur la [Adresse 23], le déplacement de l'aire de jeux et d'une clôture de protection sur 120 mètres. L' accès numéro 3, au travers toujours de la parcelle [Cadastre 10], impliquerait quant à lui de longer sur 50 mètres la cour de l'école [22] et d'empiéter sur l' accès de l'école qui est aménagé en aire de réception des enfants pour l'entrée et la sortie des classes. Ce tracé impliquerait selon l'expert de réaménager complètement le groupe scolaire. Il convient d'ajouter que l'augmentation de la circulation au travers de la parcelle [Cadastre 10], pour desservir les logements à construire sur la parcelle [Cadastre 20] , serait en outre un facteur de risque supplémentaire pour la sécurité du public fréquentant le stade et l'école.

Ces aménagements, à supposer qu'ils soient techniquement et juridiquement possibles compte tenu de l'atteinte portée à des ouvrages publics, seraient en outre particulièrement dommageables compte tenu de l'ampleur des travaux à entreprendre.

Par ailleurs , si l'état d'enclave volontaire est invoqué par les défendeurs à l'action , il résulte des plans fournis par l'expert que la parcelle numérotée [Cadastre 10] ne faisait pas partie du fonds [F] divisé par un acte de partage de 1930, qui est l'assiette d'origine des parcelles de la copropriété du [Adresse 16] ( [Cadastre 13]), de Mme [C]( [Cadastre 11] et [Cadastre 3]), de celles de la copropriété [Adresse 18] ( [Cadastre 12], [Cadastre 4] et [Cadastre 5]) et de la parcelle [Cadastre 20] propriété de la commune. A cet égard , il ressort du rapport d'expertise, qui n'est pas démenti sur ce point par un élément de preuve contraire, que la commune a acquis la parcelle litigieuse des consorts [H] à l'origine du projet immobilier « [Adresse 17] », par acte du 18 septembre 1980, postérieurement à l'aménagement de la parcelle [Cadastre 10] en un stade et une école.

Les parcelles [Cadastre 20] et [Cadastre 10] ne formaient pas ainsi une unité foncière au moment où l'état d'enclave relatif est apparu par suite de la division de la parcelle [Cadastre 9], partie de l'assiette foncière du projet immobilier [Adresse 16], en deux parcelles [Cadastre 8], vendue à la SCI [Adresse 16], et [Cadastre 7], devenue [Cadastre 20], cédée à la commune.

Il ne peut dans ces conditions être reproché à la commune de s'être enclavée .

De même, si comme le relève Mme [C], la commune a renoncé en 2001 à un emplacement réservé « ER 74 bis » sur le projet de plan d'occupation des sols révisé, destiné à créer un accès à partir de l'ensemble immobilier [Adresse 18], au bénéfice du « délaissé public situé au Nord », à savoir la parcelle [Cadastre 20], au motif notamment que ce délaissé bénéficiait déjà d'un passage sur le fonds de la copropriété [Adresse 16], ce passage, depuis fermé, ne pouvait être qu'une simple tolérance en l'absence de servitude constituée. Ce n'est donc pas du fait de cette renonciation que la parcelle [Cadastre 20] s'est retrouvée enclavée.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a retenu l'état d'enclave relatif, par absence d'accès suffisant à la voie publique, de la parcelle [Cadastre 20].

Sur le désenclavement :

Selon l'article 683 du code civil 'Le passage doit régulièrement être pris du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique. Néanmoins, il doit être fixé dans l'endroit le moins dommageable à celui sur le fonds duquel il est accordé.'

Ces critères, trajet le plus court et le moins dommageable, ne sont pas cumulatifs et ne doivent pas nécessairement être retenus dans cet ordre. Le trajet le moins dommageable peut être privilégié même s'il n'est pas le plus court.

Aux termes de l'article 684 du code civil, 'Si l'enclave résulte de la division d'un fonds par suite d'une vente, d'un échange, d'un partage ou de tout autre contrat, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l'objet de ces actes.

Toutefois, dans le cas où un passage suffisant ne pourrait être établi sur les fonds divisés, l'article 682 serait applicable.'

Mais il faut que l'état d'enclave procède directement de la division du fonds. Ainsi, « Si l'état d'enclave relative résulte non de la division du fonds mais des besoins de l'exploitation actuelle d'un des fonds divisés, les dispositions des articles 682 et 683 du code civil sont seules applicables et le propriétaire du fonds dominant est tenu au payement de l'indemnité prévue par ces textes.'(Civ. 3ème 5 février 1974, Bull 58, pourvoi 72-13.679).

Ce n'est qu'à titre subsidiaire et si le passage par le fonds divisé n'est pas susceptible de permettre une desserte suffisante de la parcelle enclavée que les

dispositions des articles 682 et 683 peuvent être appliquées.

Il a notamment été jugé que « saisie, par l'acquéreur, d'une parcelle enclavée, d'une part par la propriété de son vendeur et, d'autre part, par les terres d'un tiers, d'une action en vue de se voir reconnaître un passage sur ce dernier fonds et retenant, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, que le coût de la reconstruction d'un pont et des travaux annexes de surélévation de la chaussée, nécessaires pour passer sur le fonds divisé, était "hors de proportion avec la valeur des parcelles" une cour d'appel a pu en déduire que l'article 684, alinéa 1er, du code civil ne saurait recevoir application »( cassation Civ. 1ère 14 décembre 1965, Bull 709).

L' expert judiciaire a proposé 4 solutions possibles pour permettre l'accès de la parcelle [Cadastre 20] à la voie publique, toutes étant contestées par l'une ou l'autre des parties.

Il se prononce en faveur de la solution dite n°4, qui prévoit un passage sur les parcelles de l'ensemble immobilier "[Adresse 18]" et de Madame [E] [I] veuve [C], en tant que tracé le plus court et le moins dommageable.

La Commune de [Localité 15] conclut à l'infirmation du jugement sur le trajet de désenclavement et demande la validation de cette solution. A titre subsidiaire, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 16] conclut au désenclavement par ce passage n° 4.

Cependant, Madame [C] se prévaut du tracé n°1, à raison des dispositions de l'article 684 du code civil, précitées. En effet, il est établi par les titres des parties, corroborés par les investigations de l'expert, qu'avant la cession de la parcelle [Cadastre 7], devenue [Cadastre 20], à la commune, par les auteurs de la SCI [Adresse 16], en 1980, la parcelle [Cadastre 7] formait avec la parcelle [Cadastre 8] un même tènement cadastré [Cadastre 9] qui n'était pas enclavé. Ce tènement a été divisé en 1977, selon un document d'arpentage établi par le Cabinet Arragon, géomètre expert, pour se conformer aux conditions du permis de construire délivré en 1976 à la SCI du [Adresse 16].

En application de l'article 684 alinéa 1, il faut considérer que l'état d'enclave de la parcelle [Cadastre 20] résulte de cette division plus récente issue du document d'arpentage de 1977et de la cession gratuite de la parcelle [Cadastre 7] à la commune, intervenue en 1980.

Ainsi, les parcelles de la copropriété [Adresse 18] et de Madame [E] [C] ne sont pas concernées par la division à l'origine de l'état d'enclave, étant liées à la parcelle [Cadastre 20] par la division d' un fonds plus ancien, en 1930.

La parcelle communale [Cadastre 10] est elle aussi étrangère à la division parcellaire dont résulte l'enclave relative, n'ayant jamais appartenu au fonds d'origine partagé en 1930.

Aucune de ces parcelles ne peut donc faire l'objet d'une solution de désenclavement, à partir du moment où un passage suffisant peut être établi sur la parcelle issue de la division de 1977-1980, en l'espèce sur la parcelle [Cadastre 13] de la propriété du [Adresse 16], anciennement cadastrée [Cadastre 8].

Ainsi, la solution numéro 4 proposée par l'expert, si elle répond aux critères posés par les articles 682 et 683 du même code, ne répond pas à l'exigence posée par l'article 684 qui se trouve satisfaite, en revanche, par la solution n°1, laquelle prévoit un passage sur le fonds du Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier "[Adresse 16]", passage qui apparaît suffisant en l'état des éléments recueillis par l'expert , même s'il n'est pas le plus court. Il convient d'ajouter que les considérations développées à hauteur d'appel par la commune sur la saturation de la circulation sur la voirie circulaire qui entoure la copropriété du [Adresse 16] ne sont étayées par aucun élément probant.

Ainsi, en dépit de cette contestation infondée et des considérations de l'expert sur le trajet le plus court et le moins dommageable, et la saturation du trafic sur les voies de desserte de la copropriété "[Adresse 16]", ce trajet numéro 1 est suffisant.

En conséquence, il y a lieu de juger que le désenclavement s'opérera suivant la solution n°1 définie par l'expert judiciaire; soit sur la parcelle [Cadastre 13] dont est propriétaire le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 16].

Sur l'indemnité due au Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 16]:

L'indemnité de 34950,00 euros allouée par le tribunal, sur la base du calcul justifié de l'expert, n'étant pas contestée, il convient de confirmer le jugement de ce chef.

Sur les demandes annexes:

Compte tenu de la nature et de l'issue du litige, les dépens de première instance seront supportés, par moitié chacun, par la commune de [Localité 15] et par le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 16], en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

Au regard des circonstances de la cause et de la position respective des parties, l'équité justifie de confirmer le jugement sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile s'agissant des frais non compris dans les dépens de première instance.

Le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 16] qui succombe en totalité en son appel est condamné aux dépens de la présente instance distraits au bénéfice de Maître Lopasso, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'équité justifie de condamner le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 16] à payer à Madame [E] [I] veuve [C] une somme de 2000,00 euros au titre des frais non compris dans les dépens d'appel.

En revanche, les considérations d'équité ne justifient pas de faire application de l' article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la commune de [Localité 15].

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions soumises à la cour, sauf à préciser que

les dépens de première instance seront supportés, par moitié chacun, par la commune de [Localité 15] et par le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 16], en ce compris les frais d'expertise judiciaire,

Y ajoutant,

Condamne le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 16] aux dépens d' appel, avec distraction au bénéfice de Maître Lopasso de ceux des dépens dont il a fait l'avance sans recevoir provision,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 16] à payer à Madame [E] [I] veuve [C] une somme de 2000,00 euros au titre des frais non compris dans les dépens d'appel,

Déboute la commune de [Localité 15] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 21/03888
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;21.03888 ?
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