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30/05/2024 | FRANCE | N°21/02624

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-4, 30 mai 2024, 21/02624


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4



ARRÊT AU FOND

DU 30 MAI 2024



N°2024/

NL/FP-D











Rôle N° RG 21/02624 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG7QJ







[W] [B]





C/



S.A. ENEDIS GRDF

S.A. GRDF





































Copie exécutoire délivrée

le :

30 MAI 2024

à :

Me Florence

MASSA, avocat au barreau de GRASSE



Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 19 Janvier 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 19/00666.







APPELANT



Monsieur [W] [B], demeurant [A...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 30 MAI 2024

N°2024/

NL/FP-D

Rôle N° RG 21/02624 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG7QJ

[W] [B]

C/

S.A. ENEDIS GRDF

S.A. GRDF

Copie exécutoire délivrée

le :

30 MAI 2024

à :

Me Florence MASSA, avocat au barreau de GRASSE

Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 19 Janvier 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 19/00666.

APPELANT

Monsieur [W] [B], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Florence MASSA, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEES

S.A. ENEDIS (anciennement dénommée ERDF), demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

et par Me Romain ZANNOU, avocat au barreau de PARIS

S.A. GRDF, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

et par Me Romain ZANNOU, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Avril 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Natacha LAVILLE, Présidente, et Madame Stéphanie MOLIES, Conseillère, chargés du rapport.

Madame Natacha LAVILLE, Présidente, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Natacha LAVILLE, Présidente

Mme Emmanuelle CASINI, Conseillère

Madame Stéphanie MOLIES, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Mai 2024..

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Mai 2024.

Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat à durée indéterminée, la société ERDF a engagé M. [B] (le salarié) en qualité de chargé d'affaires au sein de l'unité réseau électricité Languedoc Roussillon à compter du 1er décembre 2011 à temps plein moyennant une rémunération mensuelle brute de 24 259.30 euros sur treize mois.

La relation de travail a notamment été soumise au statut national du personnel des industries électriques et gazières.

En dernier lieu, M. [B] a perçu une rémunération mensuelle brute de 2 152.29 euros.

M. [B] a répondu à un appel à compétence pour un poste d'adjoint au chef d'agence au sein de l'agence Ingénierie Client qui traite les demandes relatives à la construction des raccordements, un des pré-requis pour le poste étant un diplôme de niveau III (BTS, DUT, L2).

M. [B] a alors fourni un relevé de note portant la mention manuscrite: 'admis au DUT GMP'.

Il n'a fourni aucun diplôme pour accompagner le relevé de notes.

L'employeur ayant donné une suite favorable, une convention a été conclue le 10 juillet 2015 entre la société Enedis anciennement dénommée ERDF et M. [B] aux termes de laquelle le salarié s'est engagé à suivre du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017 au plus tard une formation Cap Initiative Cadre (formation CIC) visant à préparer le diplôme d'ingénieur en électronique informatique industrielle au sein de l'Ecole [7] de [Adresse 6] à [Localité 4], en alternance avec une remise à niveau en amont de la formation du 17 juillet au 31 décembre 2015.

La convention a en outre prévu que le 1er du mois suivant l'obtention du diplôme, M. [B] sera muté dans l'emploi d'adjoint au chef d'agence.

Par courriel du 29 septembre 2017, M. [B] a dénoncé à la société Enedis anciennement dénommée ERDF une situation de harcèlement moral par son tuteur M. [D].

En réponse et par courrier du 30 octobre 2017, la société Enedis anciennement dénommée ERDF a indiqué qu'une enquête était diligentée sur les faits en cause.

Le 20 décembre 2017, à l'occasion de la soutenance de mémoire par M. [B] dans les locaux de l'Ecole [7] de [Adresse 6] à laquelle assistait l'adjoint au directrice des ressources humaines de la société Enedis anciennement dénommée ERDF, un professeur a affirmé que M. [B] ne pouvait pas valider sa formation CIC d'ingénieur pour avoir produit lors de son inscription à la formation un faux relevé de notes de son diplôme universitaire technologique (DUT) en génie mécanique et productique.

Par courrier du 5 février 2018, la société Enedis anciennement dénommée ERDF a fait savoir à M. [B] que l'enquête n'avait révélé aucun harcèlement moral et que la situation relevait d'une incompréhension entre le salarié et sa hiérarchie.

Le 23 février 2018, la section disciplinaire de l'Université [Adresse 6], dont dépend l'Ecole [7] de [Adresse 6], a prononcé à l'encontre de M. [B] une peine d'exclusion de 60 mois ferme de tout établissement public d'enseignement supérieur avec annulation de toutes les sessions d'examen validées précédemment par l'Université de [Adresse 6] en considérant que les relevés de notes authentiques communiqués par l'Université de [Localité 5] permettaient d'établir que les documents fournis par M. [B] en vue de son inscription à l'Ecole [7] de [Adresse 6] étaient des faux.

M. [B] a fait appel de cette décision.

Suivant application de la procédure disciplinaire prévue par le statut national du personnel des industries électriques et gazières, la société Enedis anciennement dénommée ERDF a par lettre du 15 février 2018 remise en main propre le 16 février 2018 convoqué M. [B] le 6 mars 2018 en vue d'un entretien préalable de première phase.

M. [B] ne s'est pas présenté à l'entretien préalable, déplacé au 15 mars 2018 selon courrier du 6 mars 2018 remis par huissier de justice le 8 mars 2018.

Le 20 mars 2018, la société Enedis anciennement dénommée ERDF a saisi le rapporteur de la commission secondaire du personnel.

Le 21 mars 2018, la société Enedis anciennement dénommée ERDF a notifié à M. [B] sa comparution devant la commission secondaire du personnel exécution-maîtrise siégeant en matière disciplinaire.

Cette comparution a eu lieu le 29 mai 2018.

Le 9 juillet 2018, M. [F] en qualité de directeur régional de la société Enedis anciennement dénommée ERDF a reçu M. [B].

Le 12 juillet 2018, M. [F] a notifié M. [B] sa mise à la retraite d'office à compter du même jour pour la falsification de ses notes de DUT, lequel était requis pour l'obtention d'un diplôme d'ingénieur afin d'occuper le poste d'adjoint au chef d'agence d'une part, et pour préjudice financier d'autre part.

Par courrier du 10 août 2018, le salarié a demandé à la présidente de la commission de revoir la décision du 23 février 2018 dont il avait par ailleurs fait appel.

Lz 15 novembre 2018, la commission a maintenu sa décision.

Le 11 juillet 2019, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Nice pour voir requalifier la mise à la retraite d'office en licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour obtenir le paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Par jugement rendu le 19 janvier 2021, le conseil de prud'hommes a débouté le salarié de l'intégralité de ses demandes et l'a condamné aux dépens.

°°°°°°°°°°°°°°°°°

La cour est saisie de l'appel formé le 19 février 2021 par le salarié.

Le 23 juin 2021, le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche a annulé la sanction prononcée le 23 mars 2018 par la section disciplinaire de l'Université [Adresse 6] et a relaxé le salarié.

Par ses dernières conclusions du 9 mai 2022 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile, M. [B] demande à la cour de:

REFORMER en intégralité le Jugement du 19 janvier 2021 et STATUER A NOUVEAU :

SUR L'EXECUTION DU CONTRAT DE TRAVAIL

CONDAMNER la société ENEDIS, à verser à Monsieur [B] la somme de27.206,17 euros à titre de rappel de salaire conformément au poste " Adjoint Chef d'Agence " - catégorie cadre.

SUR LA MISE A LA RETRAITE D'OFFICE

REQUALIFIER la mise à la retraite d'office du 12 juillet 2018 en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

A TITRE PRINCIPAL : SUR LA DEMANDE DE REINTEGRATION

ORDONNER la réintégration de Monsieur [B] au sein d'ENEDIS avec les avantage acquis au jour de sa mise à la retraire d'office,

A TITRE SUBSIDIAIRE : EN L'ABSENCE DE REINTEGRATION

A titre principal :

FIXER le montant du salaire fixe brut mensuel de Monsieur [B] à la somme de 2.903,63 euros conformément au poste " d'Adjoint Chef d'Agence " - Echelon 6;

CONDAMNER la société ENEDIS, à verser à Monsieur [B] les sommes suivantes :

o 4.981,82 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;

o 29.036,30 euros au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

o 6.387,98 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents,

o 30.000,00 euros à titre à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi.

o 1 .000, 00 euros à titre de dommages et intérêts pour la remise de documents de fins de contrat erronés et le paiement tardif du solde de tout compte

À titre subsidiaire :

FIXER le montant du salaire fixe brut mensuel de Monsieur [B] à la somme de 2.152,29 euros conformément à la rémunération effectivement perçue par Monsieur [B] CONDAMNER la société ENEDIS, à verser à Monsieur [B] les sommes suivantes :

o 3.692,73 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement ;

o 21.522,90 euros au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

o 4.304, 58 euros au titre de l'indemnité de préavis ;

o 30.000,00 euros à titre à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi.

o 1.000,00 euros au titre de la remise de documents de fin de contrat erronés et le paiement tardif du solde de tout compte.

En tout état de cause :

CONDAMNER la société ENEDIS à remettre au salarié les bulletins de salaire de janvier à juillet 2018 ainsi que l'ensemble des documents de fin de contrat rectifiées et un bulletin de salaire rectificatif conforme à la décision à intervenir sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard passé un délai de 30 jours à compter du prononcé de la décision ;

DIRE que la Juridiction se réserve le droit de procéder à la liquidation de l'astreinte ;

DIRE ET JUGER que l'intégralité des sommes prononcées sera productive de l'intérêt au taux légal à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes et que ces intérêts seront même productifs d'intérêts par année entière conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil ;

ORDONNER la transmission du jugement à intervenir au POLE EMPLOI afin de faire application de l'article L1235-4 du Code du travail et CONDAMNER la société à verser au POLE EMPLOI les indemnités chômages dans la limite de six mois de salaire ;

CONDAMNER la société ENEDIS à 2.500,00 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions du 17 août 2021 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la société Enedis anciennement dénommée ERDF demande à la cour de:

-CONFIRMER le jugement rendu le 19 janvier 2021 par le Conseil de prud'hommes de Nice

-DIRE ET JUGER que le licenciement de Monsieur [B] repose sur une cause

réelle et sérieuse

En conséquence,

-DEBOUTER Monsieur [B] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions

-CONDAMNER Monsieur [B] à payer à la Société ENEDIS la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance, distraits au profit de la SELARL LEXAVOUE AIXEN-PROVENCE, avocats aux offres de droit.

L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 4 mars 2024.

MOTIFS

1- Sur la nouvelle classification

Il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant

de la classification qu'il revendique.

En l'espèce, le salarié fait valoir qu'il a exercé la fonction d'adjoint de chef d'agence et non celle de chargé d'affaires et de projet. Il se prévaut de divers documents internes de la société. Il ajoute que cette situation l'a conduit à demander à son employeur de retenir qu'il devait aussi consacrer des heures à sa formation au sein de l'Ecole [7] de [Adresse 6].

Dès lors que M. [B] présente à titre principal des demandes financières au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail sur la base de cette nouvelle classification, il revient à la cour de se prononcer en premier lieu sur la classification alléguée par M. [B] avant l'examen de toute autre demande.

Pour s'opposer à la demande de nouvelle classification, la société Enedis anciennement dénommée ERDF soutient que M. [B] n'a pas occupé les fonctions d'adjoint au chef d'agence.

La cour relève après analyse de l'ensemble des pièces que durant les heures de formation pratique durant sa scolarité au sein de l'Ecole [7] de [Adresse 6] pour préparer un diplôme d'ingénieur dans le cadre de l'appel à compétence lancé par la société Enedis anciennement dénommée ERDF, cette dernière a confié à M. [B] des activités relevant du poste d'adjoint au chef d'agence pour lequel ce dernier était justement préparé sans que pour autant il ait quitté son poste de chargé d'affaires.

Cela ressort ainsi de la convention conclue le 10 juillet 2015 entre la société Enedis anciennement dénommée ERDF et M. [B] aux termes de laquelle le salarié s'est engagé à suivre du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017 au plus tard une formation Cap Initiative Cadre (formation CIC) visant à préparer le diplôme d'ingénieur en électronique informatique industrielle au sein de l'Ecole [7] de [Adresse 6] à [Localité 4], en alternance avec une remise à niveau en amont de la formation du 17 juillet au 31 décembre 2015, avec la précision que le 1er du mois suivant l'obtention du diplôme, M. [B] sera muté dans l'emploi d'adjoint au chef d'agence.

Et d'ailleurs, M. [B] ne répond pas au moyen de la société Enedis anciennement dénommée ERDF selon lequel le poste d'adjoint au chef de service était en réalité occupé par M. [M] comme l'indique l'organigramme de la société Enedis anciennement dénommée ERDF, ce dont il résulte que M. [B] ne pouvait pas occuper ce poste et qu'il était donc affecté dans le service en surnombre le temps de sa formation au poste d'adjoint au chef d'agence et de son éventuelle affectation à ce poste.

Enfin, il y a lieu d'observer que M. [B] faisait l'objet d'un accompagnement durant sa formation pratique au sein de la société Enedis anciennement dénommée ERDF dès lors qu'il n'est pas contesté que M. [D] exerçait à son égard un rôle de tuteur, ce dont il résulte que M. [B] ne pouvait pas exercer des fonctions d'adjoint au chef de service.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que M. [B] ne démontre pas qu'il a assuré de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique, soit le poste d'adjoint au chef d'agence.

En conséquence, il y a lieu de dire que M. [B] est mal fondé à présenter des demandes financières au titre d'un emploi d'adjoint au chef d'agence.

2- Sur la requalification de la mise à retraite d'office

La société Enedis anciennement dénommée ERDF reproche à M. [B] à l'appui de la sanction de mise à la retraite d'office d'avoir falsifié le relevé de notes de DUT qu'il a présenté au momenr de sa candidature et d'avoir ainsi intégré de manière illégitime une formation CIC pour l'obtention d'un diplôme d'ingénieur, cette situation ayant causé à la société Enedis anciennement dénommée ERDF un préjudice financier correspondant aux frais de ladite formation.

Le salarié fait valoir à l'appui de sa demande de requalification de la sanction de mise à la retraite d'office en licenciement sans cause réelle et sérieuse que:

- la notification de la décision du 15 novembre 2018 tendant au maintien de la sanction disciplinaire est prescrite en ce qu'elle n'a pas été notifiée dans le délai d'un mois de sa saisine prévu par le statut national du personnel des industries électriques et gazières;

- la décision disciplinaire du 26 février 2018 est nulle en ce que le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche a par décision du 23 juin 2021 annulé la sanction prononcée le 26 février 2018 par la section disciplinaire de l'Université [Adresse 6] et a relaxé le salarié;

- la mise à la retraite d'office a été décidée sur la base de preuves obtenues de manière illicite en ce que l'Université [Adresse 6] a obtenu de l'Université de [Localité 5] le relevés de notes litigieux sans l'autorisation de M. [B] ;

- la falsification et le préjudice financier allégués dans le courrier de notification de la sanction ne sont pas établis en ce que le salarié est de bonne foi, que la société Enedis anciennement dénommée ERDF n'a disposé d'aucun élément pour établir la réalité du faux allégué et que cet employeur été négligent en s'abstenant de vérifier les diplômes de M. [B].

La société Enedis anciennement dénommée ERDF conteste les moyens ainsi soulevés par M. [B] et fait valoir que la falsification est établie.

La cour relève après analyse des pièces du dossier que:

- l'article 6 du statut national du personnel des industries électriques et gazières dispose: 'En cas de faute grave, le directeur peut décider sous sa propre responsabilité de relever immédiatement l'agent de son service avec privation partielle ou totale de son traitement pour une durée n'excédant pas un mois, jusqu'à proposition de sanction par la commission compétente. Cette commission devra, dans ce cas, formuler son avis au plus tard dans le délai d'un mois.'; il s'ensuit que ces dispositions, qui visent à organiser la phase qui précède le prononcé de la sanction, n'ont pas vocation à s'appliquer à la décision du 15 novembre 2018, laquelle se borne à répondre à la demande de M. [B] en vue d'un réexamen de la sanction déjà prononcée le 12 juillet 2018; il s'ensuit que la prescription alléguée n'est pas encourue;

- le descriptif de l'appel à compétence indique expressément un diplôme de niveau III, soit DUT, BTS ou L2, comme pré-requis pour intégrer l'école préparant au diplôme d'ingénieur permettant d'occuper le poste d'adjoint au chef de service; M. [B] ne justifie au surplus par aucune pièce son affirmation selon laquelle on lui aurait indiqué qu'aucun diplôme n'était requis et que seul un niveau de bac + 2 était exigé pour postuler à l'appel à compétence;

- par décision du 23 mars 2021, le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche s'est interrogé sur le processus de délivrance du relevé de notes litigieux établi par l'Université de [Localité 5] alors que l'Université de [Adresse 6] n'a pas été représentée durant la procédure disciplinaire mise en oeuvre à l'encontre de M. [B]; la décision du 23 mars 2021 consiste ainsi expressément à enjoindre à l'Université de [Adresse 6] de produire sous quinzaine l'origine de la communication du relevé de notes de l'Université de [Localité 5] et à dire qu'une nouvelle convocation sera adressée aux parties en vue d'une prochaine formation de jugement; ensuite, et par décision du 23 juin 2021, le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche a annulé la décision disciplinaire du 26 février 2018 et relaxé M. [B] aux motifs que l'Université ne rapporte pas la preuve de la culpabilité de M. [B] et qu'il existe un sérieux doute; pour autant, il y a lieu de dire que cette annulation, qui se fonde sur des motifs liés aux modalités d'obtention du relevé de notes authentique, n'a aucune incidence sur la réalité de la falsification justifiant la mise à la retraite d'office qui ne saurait s'apparenter à une simple présomption de fraude au diplôme comme le soutient à tort M. [B] dès lors que cette falsification résulte non pas de la décision du 26 février 2018 mais bien du comportement malhonnête de M. [B] dont la société Enedis anciennement dénommée ERDF a été informée dès le 20 décembre 2017 suivant un signalement fait à M. [F], directeur régional, par M. [E], adjoint au directrice des ressources humaines, à l'occasion de la soutenance par M. [B] de son mémoire dans les locaux de l'Ecole [7] de [Adresse 6] auquel il assistait, un professeur ayant en effet alors affirmé à cette occasion que M. [B] ne pouvait pas valider sa formation CIC d'ingénieur pour avoir produit lors de son inscription à la formation un faux relevé de notes de son diplôme universitaire technologique (DUT) en génie mécanique et productique; il y a lieu de dire que cette falsification se trouve d'ailleurs confirmée par les propres déclarations que M. [B] fera devant le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche dans lesquelles il indique avoir été poussé à postuler à l'emploi d'adjoint au chef de service par la société Enedis anciennement dénommée ERDF et avoir fourni à son employeur dans le cadre de l'appel à compétence non pas un diplôme mais un relevé de notes le 20 avril 2015, ce relevé de notes s'avérant un faux en ce qu'il porte la mention 'admis au DUT GMP' alors que M. [B] n'est pas titulaire de ce diplôme;

- la demande de communication du relevé de notes de M. [B] à l'Université de [Localité 5] a été faite par l'Université [Adresse 6], l'employeur n'étant pas intervenu dans ce processus;

- M. [B] ne justifie pas que la société Enedis anciennement dénommée ERDF aurait commis une négligence à l'occasion du recrutement de ce salarié pour la formation au diplôme d'ingénieur qui aurait concouru à la réalisation de son préjudice dès lors que M. [B] lui avait fourni un relevé de notes mentionnant qu'il était bien titulaire du diplôme en cause et qu'aucun élément ne pouvait laisser présumer la fraude du salarié;

- du fait de la falsification par M. [B] du relevé de notes remis à son employeur lorsqu'il a répondu à l'appel à compétence, la société Enedis anciennement dénommée ERDF a subi un préjudice financier correspondant aux sommes que cet employeur a déboursées afin que M. [B] puisse suivre la formation au sein de l'Ecole [7] de [Adresse 6] pour préparer le diplôme d'ingénieur lui permettant d'occuper le poste d'adjoint au chef d'agence au sein de la société Enedis anciennement dénommée ERDF, alors que ce droit à la formation ne lui était pas ouvert faute d'être titulaire du pré-requis.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [B] n'est fondé en aucun de ses moyens et que les griefs invoqués à l'appui de la sanction de mise à la retraite d'office sont établis.

En conséquence, la cour dit que la demande de requalification de la sanction de mise à la retraite d'office en licenciement sans cause réelle et sérieuse n'est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu'il l'a rejetée et en ce qu'il a rejeté la demande de réintégration et les demandes financières au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

3 - Sur le préjudice distinct

L'article 1780 du code civil dispose:

'On ne peut engager ses services qu'à temps, ou pour une entreprise déterminée.

Le louage de service, fait sans détermination de durée, peut toujours cesser par la volonté d'une des parties contractantes.

Néanmoins, la résiliation du contrat par la volonté d'un seul des contractants peut donner lieu à des dommages-intérêts.

Pour la fixation de l'indemnité à allouer, le cas échéant, il est tenu compte des usages, de la nature des services engagés, du temps écoulé, des retenues opérées et des versements effectués en vue d'une pension de retraite, et, en général, de toutes les circonstances qui peuvent justifier l'existence et déterminer l'étendue du préjudice causé.

Les parties ne peuvent renoncer à l'avance au droit éventuel de demander des dommages-intérêts en vertu des dispositions ci-dessus.

Les contestations auxquelles pourra donner lieu l'application des paragraphes précédents, lorsqu'elles seront portées devant les tribunaux civils et devant les cours d'appel, seront instruites comme affaires sommaires et jugées d'urgence.'

En l'espèce, M. [B] fait valoir à l'appui de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice distinct de celui résultant de la rupture du contrat de travail au visa des principes précités:

- que la société Enedis anciennement dénommée ERDF l'a accusé de faux alors qu'il a toujours été de bonne foi et investi dans sa formation malgré les difficultés rencontrées notamment celles liés à un harcèlement moral;

- que la procédure disciplinaire a été instruite à charge en ce que la société Enedis anciennement dénommée ERDF avait l'intention de l'évincer;

- qu'il est dans l'impossibilité de retrouver un emploi faute de pouvoir se prévaloir de son relevé de notes et donc de son niveau bac + 2.

La cour ne peut que constater que M. [B], qui procède par affirmations, ne verse aux débats aucun élément de nature à établir la réalité de difficultés notamment liées à un harcèlement moral, la réalité de l'intention de la société Enedis anciennement dénommée ERDF de l'évincer et de la réalité de son impossibilité de retrouver un emploi en l'absence de son relevé de notes.

En conséquence, la cour dit que la demande n'est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu'il l'a rejetée.

4 - Sur la remise des documents de rupture

M. [B] fait valoir à l'appui de sa demande de dommages et intérêts que:

- l'attestation destinée à Pôle Emploi mentionne un licenciement pour faute grave comme motif de la rupture au lieu d'une mise à la retraite d'office, cette situation l'ayant privé d'allocations de retour à l'emploi durant trois mois;

- la société Enedis anciennement dénommée ERDF a versé le solde de tout compte d'un montant de 1 559.41 euros en partie au mois de septembre 2018 et le solde en octobre et novembre 2018.

La société Enedis anciennement dénommée ERDF n'a pas conlu sur ces demandes.

La cour relève que M. [B]:

- ne justifie d'aucun préjudice résultant du paiement tardif d'allocations de retour à l'emploi du fait d'une erreur de libellé dans l'attestation destinée à Pôle Emploi;

- ne verse aux débats aucun élément de nature à établir que la société Enedis anciennement dénommée ERDF a commis la faute alléguée à l'occasion du règlement du solde de tout compte.

En conséquence, la cour dit que la demande n'est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu'il l'a rejetée.

5 - Sur les demandes accessoires

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a mis à la charge de M. [B] les dépens de première instance et en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [B] est condamné aux dépens d'appel.

Le ministère d'avocat n'étant pas obligatoire devant la présente juridiction statuant en matière prud'homale, la demande au titre de l'article 699 du code de procédure civile est rejetée.

L'équité et les situations économiques respectives des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d'appel dans la mesure énoncée au dispositif.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE M. [B] à payer à la société Enedis anciennement dénommée ERDF la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d'appel,

CONDAMNE M. [B] aux dépens d'appel,

REJETTE la demande au titre de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-4
Numéro d'arrêt : 21/02624
Date de la décision : 30/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-30;21.02624 ?
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