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23/05/2024 | FRANCE | N°21/01668

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 23 mai 2024, 21/01668


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 23 MAI 2024

PH

N° 2024/ 176













N° RG 21/01668 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG4RO







[Y] [U]





C/



[X] [O]

[T], [P] [L] épouse [O]



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SELARL LX AIX EN PROVENCE



SELARL MENABE-AMILLr>




















Décision déférée à la Cour :



Jugement du tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN en date du 08 Janvier 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 18/04250.



APPELANT



Monsieur [Y] [U]

demeurant Lieudit [Adresse 9]



représenté par la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 23 MAI 2024

PH

N° 2024/ 176

N° RG 21/01668 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG4RO

[Y] [U]

C/

[X] [O]

[T], [P] [L] épouse [O]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SELARL LX AIX EN PROVENCE

SELARL MENABE-AMILL

Décision déférée à la Cour :

Jugement du tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN en date du 08 Janvier 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 18/04250.

APPELANT

Monsieur [Y] [U]

demeurant Lieudit [Adresse 9]

représenté par la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Pénélope BARGAIN, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

INTIMES

Monsieur [X] [O]

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Nathalie AMILL de la SELARL MENABE-AMILL, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

Madame [T], [P] [L] épouse [O]

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Nathalie AMILL de la SELARL MENABE-AMILL, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Patricia HOARAU, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Président

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Mai 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Mai 2024

Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

Selon acte notarié du 30 mai 2000, M. [Y] [U] a fait l'acquisition avec son épouse, des consorts [Z], d'une maison à usage d'habitation à rénover et terrain attenant, figurant au cadastre section [Cadastre 7], [Cadastre 2] et [Cadastre 4] lieudit « [Localité 8] » de la commune de [Localité 10], s'agissant d'un bien qui a été attribué à M. [Y] [U] dans le cadre du partage post-divorce intervenu le 12 décembre 2007.

M. [X] [O] et Mme [T] [L] épouse [O] ont selon acte notarié du 2 septembre 2003, acquis de M. [D] [I], la parcelle voisine cadastrée section [Cadastre 3], consistant en une ancienne bâtisse vétuste (à rénover et aménager), élevée d'un étage sur rez-de-chaussée, étant précisé que cette parcelle provenait de la division d'un immeuble de plus grande importance, cadastré section [Cadastre 6] dont le surplus a été conservé par le vendeur et cadastré section [Cadastre 5].

M. et Mme [O] ont entrepris la rénovation de la bâtisse et obtenu à cette fin un permis de construire.

Par ordonnance de référé du 2 juin 2010 rendue sur assignation de M. [X] [O], le président du tribunal de grande instance de Draguignan qui a rejeté les demandes reconventionnelles de M. [Y] [U], a désigné M. [H] [A], comme expert aux fins notamment de vérifier :

- la conformité des fosses septiques,

- si des fenêtres et ouvertures en façades Nord et Est de la maison [O], existaient antérieurement en l'état où elles se trouvent aujourd'hui.

Par ordonnance du 15 décembre 2010 rendue sur assignation de M. [U], le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan a condamné M. et Mme [O], in solidum, à supprimer la vue résultant de l'ouverture d'une fenêtre au premier étage en façade Nord de leur maison, soit par transformation de la vue en jour, conformément aux dispositions de l'article 676 du code civil, et ce dans un délai de quatre mois à compter de la signification de l'ordonnance et sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai, ainsi qu'à retirer tous encombrants et gravats accumulés contre le pignon de la propriété de M. [U] à Trigance, cadastrée section [Cadastre 4] et ce, dans un délai de huit jours à compter de la signification l'ordonnance et sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

L'expert [A] a déposé son rapport le 31 mai 2013.

Par exploit d'huissier du 14 juin 2018, M. [Y] [U] a fait assigner M. et Mme [O] devant le tribunal de grande instance de Draguignan aux fins de les voir condamner à supprimer ou réduire les vues créées en façade Nord et Ouest, effectuer les travaux concernant la fosse septique préconisés par l'expert, remédier à l'écoulement de l'eau de pluie détournée vers sa courette et son « devant-de-porte », ainsi qu'à des dommages et intérêts pour trouble anormal de voisinage.

Par jugement contradictoire du 8 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Draguignan a :

- débouté M. [Y] [U] de l'intégralité de ses demandes,

- condamné M. [Y] [U] à payer à M. [X] [O] et Mme [T] [L] épouse [O] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [Y] [U] aux dépens.

Le tribunal a retenu que les ouvertures querellées en façade Ouest et Nord, en dehors de celle transformée en jour en façade Nord, sont d'origine et en tout cas antérieures aux années 1970, de sorte que la prescription trentenaire est acquise, que concernant la fosse septique l'installation des époux [O] ne passe pas sur le fonds de M. [U] et ne lui cause aucun trouble de jouissance, que l'écoulement des eaux de toiture sur le fonds de M. [U] n'est pas démontré.

Par déclaration du 4 février 2021, M. [Y] [U] a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses conclusions d'appelant déposées et notifiées sur le RPVA le 3 mai 2021, M. [Y] [U] demande à la cour de :

Vu l'article A. 424-8 du code de l'urbanisme,

Vu les articles 676 à 680 du code civil,

Vu les articles 640 et 681 du code civil,

Vu l'article 702 du code civil,

Vu l'article 1240 du code civil,

Vu l'article 1242 alinéa 1 du code civil,

Vu la jurisprudence constante en matière de trouble anormal du voisinage,

Vu le rapport d'expertise 10 mai 2013,

Vu le droit positif en la matière,

Vu les pièces portées au contradictoire,

A titre principal :

- réformer le jugement entrepris du 8 janvier 2021 du tribunal judiciaire de Draguignan en ce qu'il l'a débouté de l'intégralité de ses demandes et l'a condamné à payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Et statuant à nouveau,

Sur les servitudes de vue :

- juger que les époux [O] ont créé ou aggravé des servitudes de vue en façade Nord et Ouest de leur maison au détriment du fonds [U],

En conséquence,

- condamner in solidum les époux [O] à rectifier le bâti de leur maison sise à [Localité 11], cadastrée section [Cadastre 3] tel que ci-après :

- En façade Nord :

- La suppression pure et simple de la fenêtre ouverte au premier étage mesurant 125 cm de hauteur, de teinte verte sur la planche n° 2 de l'expert

- La réduction à 40 cm de hauteur et 40 cm de largeur de la fenêtre ouverte au rez-de-chaussée mesurant 98 cm de hauteur, de teinte orange sur la planche n° 2 de l'expert

- La suppression pure et simple du balcon ouvert au premier étage, cerclé d'orange sur la planche n° 2 de l'expert

- La réduction à 40 cm de hauteur et 40 cm de largeur de la fenêtre ouverte au rez-de-chaussée mesurant 150 cm de hauteur, de teinte orange sur la planche n° 2 de l'expert

- En façade Ouest :

- La suppression pure et simple du balcon ouvert au premier étage, cerclé de vert sur la planche n° 2 de l'expert

- La réduction à 110 cm de hauteur et 50 cm de largeur de la fenêtre ouverte à l'étage au niveau du balcon, de teinte verte sur la planche n° 2 de l'expert

- La suppression pure et simple de la fenêtre ouverte au premier étage, de teinte verte à droite du balcon sur la planche n° 2 de l'expert

- Le rétablissement à 200 cm de hauteur et 50 cm de largeur de la porte en lieu et place de la fenêtre ouverte au rez-de-chaussée, de teinte orange sur la planche n° 2 de l'expert

- condamner in solidum les époux [O] à lui verser 5 000 euros de dommages et intérêts pour trouble anormal du voisinage,

Sur la fosse septique des époux [O] :

- juger que la fosse septique des époux [O] n'est pas conforme à la réglementation en vigueur et lui crée un préjudice,

- juger que la fosse septique, sa propriété, a été mise aux normes et est désormais conforme (Pièce n°29),

En conséquence,

- condamner in solidum les époux [O] à effectuer les travaux concernant leur fosse septique conformément aux dispositions 5.4 du rapport de l'expert judiciaire sous astreinte de 50 euros par jour de retard, un mois à compter de la signification du jugement à intervenir (sic),

Sur l'écoulement naturel des eaux et la toiture :

- condamner in solidum les époux [O] de remédier à l'écoulement de l'eau de pluie détourné par la main de l'homme vers la courette et devant-de-porte [U] et à placer des cheneaux sur toute la longueur de l'arête des tuiles de rive supérieure de leur toiture surélevée, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, un mois à compter de la signification à compter du jugement à venir (sic),

- les condamner in solidum à lui verser 1 000 euros de dommages et intérêts pour trouble anormal du voisinage,

En tout état de cause,

- les condamner in solidum à 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner in solidum aux entiers dépens, comprenant notamment les frais de l'expertise judiciaire [A], ceux d'appel distraits au profit de Me Françoise Boulan, membre de la SELARL Lexavoué Aix-en-Provence, avocats associés, aux offres de droit.

M. [Y] [U] fait valoir en substance :

Sur le préjudice de vue,

- qu'aucun patec n'existe pour justifier la création de vues,

- que le permis de construire de M. [O] a été fait à l'appui d'une déclaration frauduleuse puisqu'il a déclaré que la parcelle [Cadastre 4] était la sienne et que cela a changé l'appréhension du dossier par les services de l'urbanisme,

- que si la cour devait considérer la validité du permis de construire, il n'en demeure pas moins que les règles du droit civil priment sur ledit permis,

- que la modification ou la création de fenêtres a été constatée par l'expert,

- que l'usucapion n'était pas même invoquée par les époux [O] et que pourtant le jugement entrepris s'est emparé de ce moyen ultra petita,

- qu'en cours d'instance, les intimés ont obturé l'ensemble des baies, portes et fenêtres élargies, déplacées ou créées, comme un aveu du retour à résipiscence,

- que la fenêtre qui a été munie d'une baie fixe opacifiante à l'étage de la propriété [O], ne respecte toujours pas la législation en vigueur de l'article 677 du code civil,

- qu'il convient de maintenir l'interdiction des ouvertures en façade et pignon,

- qu'il a subi un préjudice de jouissance depuis 2007 jusqu'en 2020,

Sur l'écoulement naturel des eaux et la toiture,

- que les intimés ont transgressé les dispositions de l'article 640 et surtout 681 du code civil,

- que la surélévation et le décroché en partie droite, entrainent un écoulement conséquent des eaux de pluies,

- que le préjudice est constitué par la gêne pour lui d'accéder à son logement lors des intempéries survenues depuis l'inversion de la pente des tuiles en août 2004,

- que les époux [O] se sont empressés de faire installer une gouttière à réception de l'assignation, mais que cette réparation provisoire ne saurait le satisfaire,

Sur la non-conformité de la fosse septique des époux [O],

- que des odeurs nauséabondes s'en dégagent en sus de l'écoulement pâteux débordant régulièrement,

- que de son côté il a mis en conformité sa fosse septique, si bien que la demande reconventionnelle est infondée et empreinte de mauvaise foi.

Dans leurs conclusions d'intimés déposées et notifiées par le RPVA le 22 juin 2021, M. et Mme [O] demandent à la cour de :

Vu les dispositions combinées des articles 640, 680, 676 à 680, 702 et 1240 et suivants du code civil,

Vu les pièces versées aux débats,

Vu le jugement du tribunal judiciaire de Draguignan du 8 janvier 2021,

Vu le procès-verbal de constat d'huissier de la SCP Actazur du 11 octobre 2019,

- confirmer purement et simplement et en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Draguignan du 8 janvier 2021, qui a :

- Débouté M. [Y] [U] de l'intégralité de ses demandes,

- Condamné M. [Y] [U] à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné M. [Y] [U] aux entiers dépens, incluant les frais d'expertise, avec distraction au profit de la SCP Ferlaud Menabe Amill, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Y ajoutant,

- condamner Monsieur [Y] [U] à leur payer la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, outre les entiers dépens d'appel,

- débouter Monsieur [Y] [U] de toutes autres demandes plus amples ou contraires.

M. et Mme [O] soutiennent pour l'essentiel :

- que les demandes de réalisation de travaux sous astreinte sont devenues sans objet du fait de ce que la propriété [O] a intégralement été murée et ne sera donc jamais habitée,

- que les demandes de M. [U] étaient de toutes façons infondées et injustifiées,

Sur les servitudes de vue,

- que l'expert a constaté que l'intégralité des travaux réalisés sont conformes au permis de construire obtenu le 9 juillet 2010, même s'il précise qu'il n'a pas pu avoir la remise des plans annexés au permis de construire initial du 5 août 2004,

- qu'aucun des deux permis de construire n'a fait l'objet de recours,

- que toutes les ouvertures existaient et qu'elles ont été seulement réduites ou agrandies,

- que concernant le balcon, les pièces versées au débat démontrent qu'il a été créé à des endroits où des ouvertures existaient déjà, ce qui exclut qu'il puisse être générateur d'une aggravation de la servitude de vue subie par le fonds [U],

- que la seule création de servitude consiste en l'ouverture d'une fenêtre au premier étage en façade Nord, et que celle-ci a été masquée conformément à l'obligation imposée par le juge des référés,

Sur le prétendu écoulement naturel des eaux et de la toiture,

- que si effectivement, la pente d'une partie de la toiture [O] oriente l'écoulement des eaux de pluie vers le fonds [U], il n'en demeure pas moins que ces eaux sont récupérées et dirigées vers la propriété [O] par une gouttière,

Sur la fosse septique,

- que la démonstration est faite des allégations mensongères de M. [U] qui prétend subir des nuisances consistant en des odeurs ou des écoulements d'une fosse septique qui n'est pas reliée à la maison et qui n'est donc pas utilisée, et qui en outre se trouve à l'opposé de sa propriété,

- qu'au contraire la fosse septique de M. [U] est implantée quasiment contre le pied de façade de leur maison, mais que dès lors qu'ils ont renoncé à occuper leur propriété, ils renoncent pour l'heure à leurs demandes reconventionnelles à l'encontre de M. [U].

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 27 février 2024.

La décision sera contradictoire, toutes les parties ayant constitué avocat.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'étendue de la saisine de la cour

Aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Il est constaté que le dispositif des conclusions de l'appelant contient des demandes de « juger », qui ne constituent pas toutes des prétentions, si bien que la cour n'en est pas saisie.

Sur les vues

M. [U] qui se plaint de la création ou de l'aggravation de vues depuis le fonds [O], forme les demandes suivantes :

- En façade Nord :

- La suppression pure et simple de la fenêtre ouverte au premier étage mesurant 125 cm de hauteur, de teinte verte sur la planche n° 2 de l'expert

- La réduction à 40 cm de hauteur et 40 cm de largeur de la fenêtre ouverte au rez-de-chaussée mesurant 98 cm de hauteur, de teinte orange sur la planche n° 2 de l'expert

- La suppression pure et simple du balcon ouvert au premier étage, cerclé d'orange sur la planche n° 2 de l'expert

- La réduction à 40 cm de hauteur et 40 cm de largeur de la fenêtre ouverte au rez-de-chaussée mesurant 150 cm de hauteur, de teinte orange sur la planche n° 2 de l'expert

- En façade Ouest :

- La suppression pure et simple du balcon ouvert au premier étage, cerclé de vert sur la planche n° 2 de l'expert

- La réduction à 110 cm de hauteur et 50 cm de largeur de la fenêtre ouverte à l'étage au niveau du balcon, de teinte verte sur la planche n° 2 de l'expert

- La suppression pure et simple de la fenêtre ouverte au premier étage, de teinte verte à droite du balcon sur la planche n° 2 de l'expert

- Le rétablissement à 200 cm de hauteur et 50 cm de largeur de la porte en lieu et place de la fenêtre ouverte au rez-de-chaussée, de teinte orange sur la planche n° 2 de l'expert.

Aux termes de l'article A. 424-8, dernier alinéa, du code de l'urbanisme, le permis est délivré sous réserve du droit des tiers : il vérifie la conformité du projet aux règles et servitudes d'urbanisme. Il ne vérifie pas si le projet respecte les autres réglementations et les règles de droit privé. Toute personne s'estimant lésée par la méconnaissance du droit de propriété ou d'autres dispositions de droit privé peut donc faire valoir ses droits en saisissant les tribunaux civils, même si le permis respecte les règles d'urbanisme.

Selon les dispositions des articles 676 et suivants du code civil, le propriétaire d'un mur non mitoyen, joignant immédiatement l'héritage d'autrui, peut pratiquer dans ce mur des jours ou fenêtres à fer maillé et verre dormant. Ces fenêtres doivent être garnies d'un treillis de fer dont les mailles auront un décimètre (environ trois pouces huit lignes) d'ouverture au plus et d'un châssis à verre dormant.

Ces fenêtres ou jours ne peuvent être établis qu'à vingt-six décimètres (huit pieds) au-dessus du plancher ou sol de la chambre qu'on veut éclairer, si c'est à rez-de-chaussée, et à dix-neuf décimètres (six pieds) au-dessus du plancher pour les étages supérieurs.

On ne peut avoir des vues droites ou fenêtres d'aspect, ni balcons ou autres semblables saillies sur l'héritage clos ou non clos de son voisin, s'il n'y a dix-neuf décimètres de distance entre le mur où on les pratique et ledit héritage, à moins que le fonds ou la partie du fonds sur lequel s'exerce la vue ne soit déjà grevé, au profit du fonds qui en bénéficie, d'une servitude de passage faisant obstacle à l'édification de constructions.

On ne peut, sous la même réserve, avoir des vues par côté ou obliques sur le même héritage, s'il n'y a six décimètres de distance.

La distance dont il est parlé dans les deux articles précédents se compte depuis le parement extérieur du mur où l'ouverture se fait, et, s'il y a balcons ou autres semblables saillies, depuis leur ligne extérieure jusqu'à la ligne de séparation des deux propriétés.

L'article 702 du code civil dispose que celui qui a un droit de servitude ne peut en user que suivant son titre, sans pouvoir faire, ni dans le fonds qui doit la servitude, ni dans le fonds à qui elle est due, de changement qui aggrave la condition du premier.

L'expert judiciaire a pris un grand nombre de photographies qu'il a commentées et dont il ressort que la parcelle [Cadastre 4], propriété de M. [U], comprend à la fois le garage, la maison [U] et la parcelle de terre sur laquelle donne la façade Nord de la maison [O].

L'expert judiciaire, qui note que M. et Mme [O] ont obtenu un permis de construire le 5 août 2004 et un permis de construire modificatif le 9 juillet 2010, conclut à la conformité de la construction [O] au permis de construire du 9 juillet 2010, tout en observant qu'il n'a pas reçu communication des plans du permis de construire d'origine du 5 août 2004, mais seulement des plans d'état des lieux de cette époque.

La comparaison des photographies avant réalisation des premiers travaux et après, permet de vérifier en façade Est, Nord et Ouest, que des ouvertures préexistaient (portes et fenêtres), qu'elles ont été modifiées, notamment qu'il n'existait pas de balcon/loggia qui a été construit conformément au permis de construire du 9 juillet 2010.

La façade Nord donne sur le terrain cadastré [Cadastre 4], propriété de M. [U].

Au moment des opérations d'expertise, il a été constaté au rez-de-chaussée, outre la porte d'entrée dont la dimension a été réduite, que deux fenêtres ont été agrandies, et au premier étage qu'une ouverture a été agrandie et une fenêtre a été créée, cette dernière, objet de la décision rendue par ordonnance de référé du 15 décembre 2010.

L'expert judiciaire indique que dans les suites de cette ordonnance de référé, un châssis fixe opacifiant a été placé sur la fenêtre en question, et répondant aux dires du conseil de M. [U], il précise que le bas de cette fenêtre est à une hauteur différente à 19 décimètres par rapport au plancher.

En considération de ces éléments révélateurs de l'aggravation de la servitude de vue qui préexistait, par agrandissement de trois ouvertures en façade Nord et la création d'une nouvelle ouverture qui a été opacifiée, mais pas totalement en conformité avec les prescriptions légales quant à sa hauteur par rapport au plancher, inférieure à 19 décimètres, et quant à l'absence de treillis de fer, M. [U] est fondé à obtenir la mise en conformité avec les prescriptions édictées par les articles 676 et 677 du code civil de la fenêtre située au premier étage d'une part, et le retour à l'état antérieur des trois autres ouvertures d'autre part.

Selon le procès-verbal de constat d'huissier du 11 octobre 2019 établi à la requête de M. [X] [O], au niveau du pignon Nord de la maison au rez-de-chaussée et au premier étage, toutes les ouvertures à l'exception de la porte d'entrée, ont été condamnées par la pose de planelles en briques rouges.

Il doit donc être constaté que les demandes de M. [U] concernant la façade Nord, n'ont plus d'objet.

S'agissant de la façade Ouest, qui donne sur la rue, il est constaté une modification des trois ouvertures préexistantes, quant à leur dimension et leur distance par rapport à la limite avec la façade Nord.

Seules les deux ouvertures (au rez-de-chaussée et au premier étage) situées à proximité de la limite avec la façade Nord, plus exactement à moins de 6 décimètres, sont susceptibles de générer une vue oblique sur la parcelle [Cadastre 4] qui lui appartient, par référence à la photographie A28 de l'expert. Ce n'est pas le cas de la fenêtre ouverte à l'étage au niveau du balcon (en réalité une baie vitrée) et de l'autre fenêtre ouverte au premier étage.

M. [U] sera donc débouté de ses demandes concernant la baie vitrée et la fenêtre au premier étage, en façade Ouest.

Selon les plans annexés au rapport d'expertise, les ouvertures litigieuses sises au rez-de-chaussée et au premier étage, sont à 50 centimètres de la limite avec la façade Nord donnant sur la parcelle [Cadastre 4]. M. [U] est donc fondé à obtenir la mise en conformité avec les prescriptions édictées par l'article 679 du code civil, du balcon ouvert au premier étage et de l'ouverture au rez-de-chaussée, afin qu'elles soient situées au minimum à 6 décimètres de la limite séparative avec la parcelle [Cadastre 4].

Selon le procès-verbal de constat d'huissier du 11 octobre 2019 établi à la requête de M. [X] [O], au niveau de la façade Ouest de la maison, la baie du rez-de-chaussée a été condamnée par la pose de planelles en briques.

Il doit donc être constaté que la demande de M. [U] concernant la baie du rez-de-chaussée située en façade Ouest, n'a plus d'objet.

Quant au balcon situé au premier étage en façade Ouest, M. et Mme [O] seront condamnés à le mettre en conformité avec les prescriptions édictées par l'article 679 du code civil, quant à sa distance minimale de 6 décimètres avec le fonds voisin.

Le jugement appelé sera donc infirmé en ce qu'il a débouté M. [U] de l'intégralité de ses demandes.

Selon les dispositions de l'article 1310 du code civil, la solidarité est légale ou conventionnelle ; elle ne se présume pas, la jurisprudence admettant la solidarité entre les coresponsables d'un même dommage, en qualifiant la condamnation d'in solidum.

En l'espèce, aucun fondement n'est invoqué à l'appui de la demande de condamnation solidaire, qui sera donc rejetée.

Sur la servitude d'écoulement

M. [U] demande la condamnation in solidum des époux [O] à remédier à l'écoulement de l'eau de pluie détourné par la main de l'homme vers sa courette et son « devant-de-porte » et à placer des cheneaux sur toute la longueur de l'arête des tuiles de rive supérieure de leur toiture surélevée.

Aux termes de l'article 640 du code civil, les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l'homme y ait contribué. Le propriétaire inférieur ne peut point élever de digue qui empêche cet écoulement. Le propriétaire supérieur ne peut rien faire qui aggrave la servitude du fonds inférieur.

L'article 681 du code civil énonce que tout propriétaire doit établir des toits de manière que les eaux pluviales s'écoulent sur son terrain ou sur la voie publique ; il ne peut les faire verser sur le fonds de son voisin.

Selon procès-verbal de constat d'huissier du 20 août 2018, établi à la requête de M. [X] [O], une gouttière a été installée tout le long de la toiture de la maison de M. et Mme [O].

Il est vérifié que cette gouttière n'existait pas auparavant, sur les photographies prises par l'expert judiciaire.

M. [U] soutient que cette installation n'est pas satisfaisante, sans produire aucune pièce de nature à démontrer qu'il subit toujours un écoulement irrégulier des eaux pluviales en provenance de la toiture de M. et Mme [O] sur son fonds.

Il sera donc débouté de sa demande de condamnation à remédier à l'écoulement des eaux de pluie depuis la toiture [O].

Sur la fosse septique

M. [U] demande la condamnation in solidum des époux [O] à effectuer les travaux concernant leur fosse septique conformément aux dispositions 5.4 du rapport de l'expert judiciaire.

L'expert judiciaire a conclu que les systèmes septiques de M. [U] d'une part, et de M. et Mme [O] d'autre part, n'étaient pas conformes ni à la réglementation en vigueur, ni à la loi sur l'eau, en notant que le SPANC a établi pour chacune des installations un rapport négatif. L'expert judiciaire précisait s'agissant de la fosse septique de M. et Mme [O], qu'elle ne passe pas sur la parcelle [U], mais rejoint la fosse septique et le système septique existant sur la partie de la propriété [I], le long de la route. L'expert a déterminé et évalué le coût des travaux nécessaires pour y remédier à la charge de chacune des parties.

M. [U] justifie qu'il a obtenu un avis favorable du SPANC le 7 juin 2016 suite aux travaux qu'il a fait exécuter sur sa fosse septique.

De leur côté, M. et Mme [O] produisent un procès-verbal de constat du 20 août 2018, aux termes duquel l'immeuble est hors d'eau, que dans la salle d'eau il n'y a aucun raccordement à la fosse septique, aucun appareil sanitaire, ni évier dans la cuisine. Il en est de même à l'étage, auquel on accède par une échelle, l'escalier n'étant pas réalisé. L'huissier précise que la fosse septique commune aux deux maisons [O] et [I], enterrée dans la dalle béton de l'abri voiture propriété de M. [I], ne dégage aucune odeur, la maison [I] étant inoccupée depuis cinq ans et la maison [O] étant inhabitable.

De son côté, M. [U] ne produit aucune pièce relative aux désagréments allégués, à savoir odeurs nauséabondes et écoulement pâteux débordant régulièrement.

En conséquence, il n'est pas fondé à obtenir la mise en conformité de la fosse septique de M. et Mme [O], laquelle est de surcroit également celle de M. [I], qui n'est pas dans la cause.

Il sera donc débouté de sa demande au titre de la fosse septique de M. et Mme [O] et le jugement appelé sera confirmé sur ce point.

Sur les demandes de dommages et intérêts

M. [U] demande la condamnation in solidum des époux [O] à lui verser la somme de 5 000 euros au titre du préjudice de vue et 1 000 euros au titre du préjudice d'écoulement des eaux pluviales sur le fondement des articles 1240 et 1241 du code civil et de la théorie du trouble anormal de voisinage.

Aux termes de l'article 1382 ancien du code civil aujourd'hui 1240 du code civil, celui qui commet une faute doit réparer le préjudice qui en résulte.

Il appartient à celui qui s'en prévaut de faire la preuve de cette faute, de son préjudice et du lien de causalité entre les deux.

Par ailleurs, l'article 544 du code civil, énonce : « La propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. »

La limite de ce droit est que nul ne doit causer à autrui de trouble anormal de voisinage, et qu'à défaut, il en devra réparation, même en l'absence de faute.

L'anormalité du trouble doit s'apprécier au regard des circonstances locales, et doit présenter un caractère grave et/ou répété, dépassant les inconvénients normaux de voisinage, sans qu'il soit nécessaire de caractériser une faute de son auteur.

Il appartient à celui qui invoque le trouble anormal de voisinage d'en rapporter la preuve.

Il a été retenu des manquements de M. et Mme [O] relativement à l'aggravation des vues créées sur le fonds de M. [U]. Cependant, il est constaté que M. [U] ne démontre pas en avoir subi un préjudice dès lors que la maison n'a jamais été habitée depuis la réalisation des travaux d'agrandissement des ouvertures.

S'agissant de l'écoulement des eaux pluviales depuis la toiture de la maison [O], dépourvue de gouttière de nature à canaliser les eaux de pluies, il ressort de la comparaison des photographies avant et après les travaux de rénovation de la bâtisse [O], que la pente de la toiture a été modifiée, sans prévoir immédiatement un remède à l'écoulement naturel des eaux de pluies, dirigées de ce fait vers le fonds de M. [U].

Au regard de la plainte formulée de ce chef dans l'instance en référé qui a donné lieu à l'ordonnance du 15 décembre 2010 et du remède apporté en août 2018, dans les deux mois de l'assignation tendant à ce qu'il soit mis fin à l'écoulement irrégulier des eaux pluviales en toiture, la somme de 640 euros indemnisera le préjudice subi.

M. et Mme [O] seront donc condamnés à verser à M. [U] la somme de 640 euros en réparation du préjudice qui a été causé par l'écoulement irrégulier des eaux pluviales depuis la toiture [O] et M. [U] sera débouté de sa demande d'indemnisation fondée sur l'aggravation des vues créées vers son fonds.

Sur les demandes accessoires

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient d'infirmer le jugement sur les dépens et les frais irrépétibles.

M. [U] succombant partiellement dans ses demandes, il sera fait masse des entiers dépens auxquels il convient d'ajouter les frais de l'expertise judiciaire ordonnée par l'ordonnance de référé du 2 juin 2010, et de les partager par moitié entre les parties.

De ce fait, les demandes au titre des frais irrépétibles seront rejetées.

Les dépens seront distraits au profit du conseil de M. [U] qui le réclame.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement appelé sauf en ce qu'il a débouté M. [Y] [U] de sa demande au titre de la fosse septique de M. [X] [O] et Mme [T] [L] épouse [O] ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Dit que M. [Y] [U] est fondé à obtenir la mise en conformité avec les prescriptions édictées par les articles 676 et 677 du code civil, de la fenêtre située au premier étage, et le retour à l'état antérieur des trois autres ouvertures, en façade Nord ;

Constate que les demandes de M. [Y] [U] concernant la façade Nord, n'ont plus d'objet ;

Déboute M. [Y] [U] de ses demandes concernant la baie vitrée et la fenêtre au premier étage, en façade Ouest ;

Dit que M. [Y] [U] est fondé à obtenir la mise en conformité avec les prescriptions édictées par l'article 679 du code civil, du balcon ouvert au premier étage et de l'ouverture au rez-de-chaussée, en façade Ouest, afin qu'elles soient situées au minimum à 6 décimètres de la limite séparative avec la parcelle [Cadastre 4] ;

Constate que la demande de M. [Y] [U] concernant la baie du rez-de-chaussée située en façade Ouest, n'a plus d'objet ;

Condamne M. [X] [O] et Mme [T] [L] épouse [O] à mettre en conformité le balcon situé au premier étage en façade Ouest, avec les prescriptions édictées par l'article 679 du code civil, quant à sa distance minimale de 6 décimètres avec le fonds voisin cadastré [Cadastre 4] ;

Déboute M. [Y] [U] de sa demande de condamnation à remédier à l'écoulement des eaux de pluie depuis la toiture [O] ;

Déboute M. [Y] [U] de sa demande d'indemnisation au titre de l'aggravation des vues créées vers son fonds cadastré [Cadastre 4] ;

Condamne M. [X] [O] et Mme [T] [L] épouse [O] à verser à M. [Y] [U], la somme de 640 euros (six cent quarante euros) en réparation du préjudice causé par l'écoulement irrégulier des eaux pluviales depuis la toiture [O] ;

Fait masse des dépens, qui comprendront le coût de l'expertise ordonnée par l'ordonnance de référé du 2 juin 2010 et dit qu'ils seront partagés par moitié entre les parties, à savoir M. [Y] [U] d'une part, M. [X] [O] et Mme [T] [L] épouse [O] d'autre part, avec distraction éventuelle au profit de Me Françoise Boulan ;

Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 21/01668
Date de la décision : 23/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-23;21.01668 ?
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