COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-4
ARRÊT AU FOND
DU 18 AVRIL 2024
N° 2024/
SM/FP-D
Rôle N° RG 20/07743 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGFGH
S.A.S. LOUIS PION
C/
[LJ] [YC]
Copie exécutoire délivrée
le :
18 AVRIL 2024
à :
Me Jean-françois JOURDAN, avocat au barreau d'AIX-EN-
PROVENCE
Me Olivier ROMANI, avocat au barreau de NICE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de GRASSE en date du 31 Juillet 2020 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 18/00039.
APPELANTE
S.A.S. LOUIS PION, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Jean-françois JOURDAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
et par Me Jérôme DANIEL, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Nathalie DAUXERRE, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
Madame [LJ] [YC], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Olivier ROMANI, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Février 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Stéphanie MOLIES, Conseillère, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Natacha LAVILLE, Présidente
Mme Emmanuelle CASINI, Conseillère
Madame Stéphanie MOLIES, Conseillère
Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Avril 2024.
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Avril 2024
Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente et Madame Françoise PARADIS-DEISS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :
Suivant contrat à durée indéterminée du 22 septembre 2003, le G.I.E. Europa quartz a engagé Mme [LJ] [YC] (la salariée) en qualité de vendeuse niveau II, échelon 1, coefficient 155, la durée de travail mensuelle étant fixée à 151,67 heures et le salaire mensuel brut à la somme de 1 207,22 euros, outre une prime d'1/24ème de 50,30 euros et une commission égale à 1% de son chiffre d'affaire hors taxes réalisé comprenant le 1/24ème.
Suivant avenant du 1er novembre 2003, les parties ont convenu que Mme [YC] exercerait désormais la fonction de responsable du magasin situé à [Localité 4], niveau IV, échelon 1, coefficient 285, sa rémunération mensuelle étant portée à la somme de 1 491,96 euros, outre une prime d'1/24ème de 62,16 euros et une commission égale à 1% de son chiffre d'affaire hors taxes réalisé comprenant le 1/24ème ainsi que 0,5 % du chiffre d'affaires T.T.C. du magasin et ce à partir d'un chiffre d'affaires mensuel minimum de 38 112,25 euros T.T.C. comprenant le 1/24ème et 0,5 % du chiffre d'affaires T.T.C. du magasin comprenant le 1/24ème sur les objectifs à réaliser.
Par application d'un avenant signé le 5 mai 2006, Mme [YC] a été soumise à une convention de forfait en jours à hauteur de 218 jours, moyennant le versement d'une rémunération de base annuelle fixée à 18 649,56 euros bruts.
La relation de travail a été soumise à la convention collective de l'horlogerie de détail.
Au cours du mois de mai 2006, Mme [YC] a été mutée à sa demande au poste de responsable sur le magasin de [3] à [Localité 7].
Suivant avenant du 18 décembre 2009, Mme [YC] a ensuite été affectée au magasin Louis Pion à [Localité 6], son employeur étant désormais la S.A.S. Louis Pion venant aux droits du G.I.E. Europa quartz.
Par avenant du 9 février 2015, Mme [YC] s'est vue confier la responsabilité de la gestion des boutiques Louis Pion au sein des centres commerciaux Carrefour [5] et TNL à [Localité 6], moyennant le versement d'une prime mensuelle de 200 euros bruts.
A compter du 5 avril 2016, Mme [YC] s'est vue confier la responsabilité de la gestion des boutiques Louis Pion au sein des centres commerciaux Carrefour [5] à [Localité 6] et [3] à [Localité 7], moyennant le versement d'une prime mensuelle de 200 euros bruts.
La mission de Mme [YC] au sein du magasin de [Localité 6] [5] a pris fin le 30 juin 2016, de sorte que la prime mensuelle de 200 euros et les primes afférentes à la gestion dudit magasin n'ont plus été versées à compter de cette date.
En dernier lieu, Mme [YC] a donc exercé les fonctions de responsable de magasin au sein du seul établissement situé dans le centre commercial [3] à [Localité 7].
Mme [YC] a été placée en arrêt de travail pour maladie non professionnelle du 17 au 25 octobre 2017.
Par courrier remis en main propre en date du 28 octobre 2017, la société a convoqué la salariée le 9 novembre 2017 en vue d'un entretien préalable à son licenciement et lui a notifié sa mise à pied conservatoire.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 21 novembre 2017, la société a notifié à la salariée son licenciement pour faute grave dans les termes suivants :
'Madame,
Nous vous avons convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 28 octobre 2017 à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au jeudi 9 novembre 2017.
Lors de l'entretien du 9 novembre 2017 - au cours duquel vous étlez assistée - nous vous avons exposé les raisons qui nous amenaient à envisager votre licenciement et vous avez pu présenter vos observations et votre position.
Malgré les explications que vous nous avez fournies lors de cet entretien et dans votre courrier du 12 novembre 2017, nous avons pris la décision de vous licencier pour faute grave pour les motifs suivants.
A la suite de différentes alertes, votre Directrice Régionale a diligenté en octobre 2017 une enquête auprès des membres de votre équipe actuelle et d'anciens collaborateurs et collègues.
Cette enquête a permis de mettre en lumière certains de vos agissements, en totale contradiction avec les valeurs élémentaires à respecter dans l'exercice du management, et qui se sont manifestés de la façon suivante:
' Agissements déstabilisants
A titre d'exemple, Madame [K] [Z] met en avant le fait que lorsque « l'on ne va pas dans votre sens, on le paye dans les plannings ».
Vous diviseriez pour mieux régner et dénigriez le travail des uns par rapport aux autres. Ce point a été mis en avant par plusieurs membres de votre équipe et d'anciens collaborateurs: [K] [Z]-
[Y] [C] - [CO] [S] - [D] [L] - [V] [T].
[CO] [S] relève également que vous seriez « dans le reproche. Reproches pouvant être anodins ou non mais systématiques, quotidien ».
' Agissements visant à vous pousser à la faute
Par exemple, vous vous déchargeriez de manière importante auprès des membre de votre équipe, sans vous préoccuper de la charge de travail et de l'impact sur leur état de santé.
Mme [N] [Z] nous indique vous avoir alertée, sans succès.
Cette dernière nous indique que lorsqu'elle ne finissait pas les tâches, vous indiquiez que cela n'est pas grave alors même que vous dénigrez cette personne auprés des autres membres de l'équipe.
[V] [T], [D] [L], [R] [J], [PU] [MV] nous ont fait part d'attitude similaire de votre part.
' Attitudes d'évitement
A titre d'exemple, [CO] [S] et [D] [L] nous indiquent que vous n'auriez pas accepté que [V] puisse vous remettre en cause, et que vous le saluiez plus, vous détourniez son regard, vous l'ignoriez et l'isoliez du groupe.
[K] [Z] confirme en indiquant « quand on lui demande quelque chose qui ne lui plait pas, elle ne nous parle plus ».
En mai 2017, [V] [V] s'était ouvert auprès de votre Directrice Régionale. Cette dernière s'est déplacée en magasin afin de construire avec vous un plan d'action permettant d'apaiser les tensions et rétablir une communication entre vous et votre équipe. La situation n'a fait qu'empirer et a motivé les départs de [V] [T] et [D] [L].
Nous avons par ailleurs pris connaissance que votre attitude n'était pas nouvelle puisqu'elle avait déjà entrainé des demandes de mobilité voir de départ de l'entreprise de collaborateurs.
A l'ensemble de ces faits, nous considérons que votre attitude n'est pas en phase avec ce que nous attendons d'un manager au sein de la société LOUIS PION, à savoir :
' des changements de plannings fréquents de votre équipe, de dernière minute, afin de satisfaire notamment vos impératifs personnels,
' des absences multiples et répétées au cours d'une même journée, non justifiées pour des raisons professionnelles, et générant un sentiment d'abandon des membres de votre équipe,
' Une absence d'implication révélée notamment par :
la prise d'une pause cigarette alors même que vous n'aviez pas finalisé une vente en et que nous avons reçu une plainte du client,
votre absence en magasin alors même que vous vous étiez planifiée le dimanche 15 octobre 2017.
Vos fonctions et vos responsabilités de manager impliquent pourtant une exemplarité en matière de respect des droits et de la dignité des personnes et nous estimons que votre attitude constitue une violation de vos obligations de loyauté à notre égard et de respect à l'égard de salariés placés sous votre autorité.
Vous avez méconnu les dispositions du règlement intérieur de l'entreprise et vos obligations contractuelles les plus essentielles.
Compte tenu de ce qui précède nous sommes contraints de vous notifier votre licenciement pour faute grave privatif de préavis et de l'indemnité de licenciement.
Votre période de mise à pied conservatoire ne vous sera pas rémunérée.
Nous vous libérons par la présente de la clause de non concurrence contractuelle et, par conséquent, nous ne vous verserons aucune contrepartie financière à ce titre.
Votre certificat de travail, votre attestation Pôle Emploi ainsi que votre solde de tout compte vous seront envoyés directement par le Service Ressources Humaines à votre domicile.
Enfin, en application de l'article L.911-8 du code de la sécurité sociale, vous bénéficierez à compter de la date de cessation de votre contrat de travail du maintien à titre gratuit des garanties frais de santé et prévoyance, à savoir des remboursements de soins liés à la maladie, l'accident ou la maternité ainsi que des garanties prévoyance, tels que les risques décès, d'incapacité de travail ou d'invalidité prévues par le contrat de prévoyance souscrit par l'entreprise et ce, pendant une période égale au maximum à la durée d'indemnisation du chômage, et dans la limite de la durée de votre dernier contrat de travail sans pouvoir excéder 12 mois. Les garanties maintenues seront identiques à celles en vigueur dans l'entreprise et seront applicables dans les mêmes conditions aux ayants droit du salarié qui en bénéficiaient effectivement à la date de la cessation du contrat de travail.
Vous devez fournir aux organismes de frais de santé et de prévoyance la justification de votre prise en charge par le régime d'assurance-chômage. Cette justification sera adressée par lettre recommandée avec avis de réception (LRAR). Vous devrez également les informer de tout changement de situation au regard du régime d'assurance-chômage.
Nous vous prions de recevoir, Madame, l'expression de nos salutations distinguées.'
Suivant requête enregistrée le 29 janvier 2018, la salariée a saisi le conseil des prud'hommes de Grasse à l'encontre de la S.A.S. Louis Pion pour voir obtenir :
Production sous astreinte dès l'audience de conciliation et d'orientation des plannings hebdomadaires réalisés (collectif) ainsi que le décompte mensuel individuel (dit « planning jour») de Madame [YC].
Nullité et inopposabilité de la convention de forfait jours
Rappel de salaire heures supplémentaires, contrepartie obligatoire en repos et congés payés : mémoire
Rappel de salaire sur la prime d'ancienneté :700,00€
Rappel de salaire sur la prime de démarque non versée en juillet 2017 : mémoire
Dommages et intérêts pour travail dissimulé:12 789,42€
Rappel de salaire sur mise à pied à titre conservatoire : 1 666,35€
Congé payés afférents :166,64€
Indemnité compensatrice de préavis :4 263,14€
Congés payés afférents :426,31€
Indemnité légale de licenciement :8 262,18€
Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 50 000,00€
Dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire :25 000,00€
Délivrance de l'attestation de salaire maladie nécessaire au maintien du salaire de la mutuelle entreprise sous astreinte de 100 euros par jour de retard, faculté de liquidation réservée
Remise des documents de fin de contrat rectifiés sous astreinte de 100€/jour
Intérêts légaux capitalisés à compter de la demande
Article 700 du CPC : 3.000,00 €
Exécution provisoire.
Suivant jugement de départage du 31 juillet 2020, le conseil des prud'hommes de Grasse a :
- déclaré que le licenciement de [LJ] [YC] est dépourvu de faute grave et de cause réelle et sérieuse,
- condamné la S.A.S. Louis Pion à lui verser les sommes suivantes :
- 1 666,35 € à titre de rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire,
- 166,63 € à titre de congés payés afférents à la mise à pied conservatoire,
- 156 € à titre de rappel de salaire sur la prime d'ancienneté,
- 15,60 € à titre de congés payés afférents à la prime d'ancienneté,
- 4 263,14 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 426,31 € à titre de congés payés afférents à l'indemnité de préavis,
- 8 262,18 € à titre d'indemnité de licenciement,
- 25 560 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamné la S.A.S. Louis Pion à payer à [LJ] [YC] la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la S.A.S. Louis Pion aux dépens de l'instance,
- les condamnations portent intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2018,
- ordonné le remboursement par la S.A.S. Louis Pion à Pôle emploi des indemnités de chômage versées à [LJ] [YC] du jour du licenciement au jour du jugement prononcé dans la limite de six mois d'indemnité de chômage,
- prononcé l'exécution provisoire du jugement,
- rejeté toutes les autres demandes.
****
La cour est saisie de l'appel formé le 14 août 2020 par l'employeur.
Cette procédure a été enregistrée sous le R.G. n°20-7743.
****
La salariée a également interjeté appel de la décision susvisée le 31 août 2020.
Cette procédure a été enregistrée sous le R.G. n°20-8361.
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Par ordonnance du 15 octobre 2020, le président de chambre a ordonné la jonction des procédures n°20-7743 et 20-8361.
Par ses dernières conclusions régulièrement remises au greffe le 21 décembre 2023 et auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la S.A.S. Louis Pion, représentée, demande à la cour de :
- RECEVOIR la société appelante en ses conclusions,
- LA DÉCLARER bien fondée,
- INFIRMER le jugement du Conseil de prud'hommes de Grasse du 31 juillet 2020 en ce qu'il a jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Mme [YC] et a condamné la société LOUIS PION à lui verser :
- 1 666,35€ à titre de rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire
- 166,63€ à titre de congés payés afférents à la mise à pied conservatoire
- 156,00€ à titre de rappel de salaire sur la prime d'ancienneté
- 15,60 €
- 4 263,14€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis
- 426,31€ à titre de congés payés afférents à l'indemnité de préavis
- 8 262,18€ à titre d'indemnité de licenciement
- 25 560,00€ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 1 500€ sur le fondement de l'article 700 du CPC et aux dépens
- INFIRMER le jugement du Conseil de prud'hommes de Grasse du 31 juillet 2020 en ce qu'il a ordonné à la société LOUIS PION le remboursement des indemnités de chômage versées à Mme [YC] dans la limite de 6 mois d'indemnité
- CONFIRMER le jugement du Conseil de prud'hommes de Grasse du 31 juillet 2020 en ce qu'il a :
- jugé la convention de forfait jours opposable à Mme [YC]
- rejeté la demande de rappel de salaires pour heures supplémentaires
- rejeté la demande de Mme [YC] au titre du travail dissimulé
- rejeté la demande de Mme [YC] au titre de la prime d'activité
- rejeté la demande d'indemnité de Mme [YC] au titre du licenciement brutal et vexatoire
- JUGER le licenciement pour faute grave de Mme [YC] bien fondé ;
- JUGER que la convention de forfait en jours est valable et opposable à Mme [YC]
En conséquence,
- JUGER que Mme [YC] est mal-fondée en ses demandes afférentes à la rupture du contrat de travail,
- JUGER que Mme [YC] est mal-fondée en sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires, contrepartie obligatoire en repos et congés payés,
- JUGER que Mme [YC] est mal-fondée en sa demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé ;
- DEBOUTER Mme [YC] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
Par ses dernières conclusions régulièrement remises au greffe le 3 janvier 2024 et auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile, Mme [LJ] [YC] demande à la cour de :
A titre liminaire, DECLARER IRRECEVABLE la demande nouvelle de la société LOUIS PION visant à faire « condamner de Mme [YC] « à payer à la société LOUIS PION une somme de 3683,16€ bruts correspondant aux JRTT dont elle a bénéficié entre le 21/11/2014 et le 21/11/2017 ».
INFIRMER le jugement sur départage rendu le 31 juillet 2020 par le Conseil de prud'hommes de Grasse
ET STATUANT DE NOUVEAU SUR CES CHEFS :
- JUGER nulle et inopposable à Madame [YC] la convention de forfait en jours du 5 mai 2006
- CONDAMNER la société LOUIS PION, au paiement des sommes suivantes :
- Rappel de salaire heures supplémentaires : ------------------------------ 7 542,54 €
- Congés payés : ----------------------------------------------------- 754,35 €
- Rappel de salaire sur la prime d'activité : ----------------------------------- 750,00 €
- Congés payés afférents : ------------------------------------------------------ 75,00 €
- Dommages et intérêts pour travail dissimulé : ------------------------- 12 789,42 €
- Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : --- 50 000,00 €
- Dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire : ---25 000,00 €
CONFIRMER le jugement de départage du 31 juillet 2020 pour le surplus, en ce qu'il a :
- JUGE le licenciement de [YC] dépourvu de faute grave et de cause réelle et sérieuse,
- CONDAMNE la SAS LOUIS PION à lui verser les sommes suivantes :
- Rappel de salaire sur la prime d'ancienneté : ----------------------------- 156,00€
- Congés payés afférents : ------------------------------------------------------ 15,60€
- Rappel de salaire sur mise à pied à titre conservatoire : ------------ 1 666,35€
- Congé payés afférents : ----------------------------------------------------- 166,64€
- Indemnité compensatrice de préavis : ------------------------------------ 4 263,14€
- Congés payés afférents : ----------------------------------------------------- 426,31€
- Indemnité légale de licenciement : ---------------------------------------- 8 262,18€
DEBOUTER la société LOUIS PION de l'ensemble de ses demandes,
CONDAMNER la société LOUIS PION au paiement des intérêts légaux à compter de la demande en justice, avec capitalisation en application de l'article 1343-2 du code civil.
CONDAMNER la société LOUIS PION au paiement de la somme de 6.5000,00 € sur le fondement de l'article 700 du C.P.C au titre des frais irrépétibles d'appel et à la charge des entiers dépens.
L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 22 janvier 2024.
MOTIFS :
1. Sur la rupture du contrat de travail :
L'employeur rappelle qu'il est tenu de prendre les mesures propres à faire cesser tout comportement ou toute situation de nature à porter atteinte à la santé physique ou mentale de son personnel, et notamment les agissements liés aux méthodes managériales d'un salarié.
Il estime à ce propos qu'il n'était pas tenu de diligenter une enquête dès lors que les faits étaient avérés et corroborés par de nombreux témoignages et que l'urgence de la situation imposait une réaction rapide.
Il soutient que Mme [YC] n'a pas adopté à l'égard de ses collaborateurs le comportement managérial attendu d'une responsable de magasin, et précise que ces dérives managériales n'ont pas été abordées lors des entretiens d'évaluation de la salariée en raison de leur dissimulation par les salariés par peur des représailles.
Il indique qu'un plan d'action a été mis en place après les premières révélations au cours du mois de mai 2017 et estime que la salariée est mal fondée à contester les griefs retenus à son endroit dès lors qu'elle n'a aucunement remis en cause le contenu du plan d'action.
Il ajoute avoir finalement décidé de diligenter une enquête interne à la suite du départ de plusieurs salariés et de plaintes de certains autres.
L'employeur remet en cause les justificatifs produits en défense par la salariée au regard de leur relativité et des événements très ponctuels auxquels ils ont pu se rapporter. Il observe que Mme [YC] ne produit aucune attestation émanant d'un salarié placé sous sa subordination.
L'employeur reproche également à la salariée d'avoir manqué à ses obligations professionnelles, en l'état de ses absences injustifiées et du mécontentement de la clientèle.
Il estime que même si l'ensemble des témoignages ne répond pas aux exigences posées par l'article 202 du code de procédure civile, ces éléments sont recevables et non contredits par des éléments objectifs produits par la salariée.
Il écarte toute prescription au regard de la réitération du comportement fautif après la mise en place du plan d'action courant mai 2017, ainsi que la thèse du licenciement pour motif économique déguisé alors qu'il aurait cherché à remplacer la salariée dès le 11 décembre 2017.
En réponse, la salariée souligne n'avoir jamais fait l'objet de la moindre critique ou sanction disciplinaire pendant toute sa carrière dans l'entreprise, mais avoir, au contraire, toujours eu des retours positifs à l'occasion de ses entretiens annuels, et notamment 9 mois avant son licenciement pour faute grave.
Elle remet en cause la réalité du plan d'action et relève que les différents témoins évoquent des plaintes auprès de l'employeur antérieures à son entretien annuel du 17 février 2017 et précédant de plusieurs mois voire plusieurs années la mise en oeuvre de la procédure de licenciement pour faute grave.
Elle estime que la gestion désinvolte de l'employeur de ces prétendues plaintes, sans saisine du C.H.S.C.T., démontre leur fictivité et fait valoir, en tout état de cause, la prescription des faits reprochés puisque l'employeur en avait connaissance dès le 16 mai 2017.
Elle remet en cause la valeur probante des attestations versées au débat, émanant de salariés et non corroborées par des éléments objectifs, et affirme produire des éléments contraires, notamment la copie de ses échanges téléphoniques visant à valoriser et motiver ses collègues, ainsi que les photographies versées au débat.
Elle observe que les plannings prétendument modifiés ne sont pas versés au débat et précise avoir procédé à des ajustements pour tenir compte des contraintes de ses collègues.
La salariée rappelle avoir géré plusieurs boutiques pendant plusieurs années et en déduit qu'elle ne pouvait être présente dans tous les magasins à la fois. Elle affirme ne s'être jamais absentée sans justificatif.
Elle relève que sur ses 14 années d'exercice, l'employeur ne fait état que d'une absence injustifiée le dimanche 15 octobre 2017 et précise à cet effet que le planning initial ne prévoyait la présence que d'un seul salarié. Elle a néanmoins demandé à Mme [Z] de travailler en raison des offres promotionnelles mais a décidé de quitter les lieux vers 16 heures au regard de l'absence de clients en informant sa responsable dès le 17 octobre suivant.
Elle soutient que l'ensemble des attestations émanant de salariés placés sous la subordination de l'employeur ont été recueillies à l'occasion d'une enquête non contradictoire réalisée pendant son arrêt de travail, et affirme que les raisons des démissions de ses collègues lui sont étrangères.
La salariée précise ne pas avoir les moyens de contacter les personnes qui ont travaillé avec elle ou ne pas avoir souhaité contacter les salariés toujours en poste chez Louis Pion pour ne pas leur causer de tort.
Elle fait par ailleurs valoir que les attestations produites par l'employeur ne répondent pas aux exigences posées par l'article 202 du code de procédure civile, et ajoute que ni le médecin du travail ni le C.H.S.C.T. n'ont jamais été saisis.
Elle affirme que son licenciement pour faute grave visait en réalité à faire l'économie d'un salaire important compte tenu des résultats non conformes de la société à la suite des investissements réalisés ; elle souligne à cet effet qu'aucun responsable de magasin n'a été embauché pour la remplacer.
Aux termes de l'article L.1232-1 du code du travail, le licenciement par l'employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.
Il résulte des dispositions combinées des articles L.1232-1, L.1232-6, L.1234-1 et L.1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis.
En l'espèce, il ressort de la lettre de licenciement pour faute grave dont les termes ont été restitués ci-dessus que la société reproche à la salariée :
- un management inadapté, source de souffrance pour ses collègues,
- une absence d'implication dans ses fonctions.
En premier lieu, la cour dit, en vertu de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, qu'elle n'a pas à statuer sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription que Mme [YC] oppose à la mise en oeuvre du licenciement pour faute grave dans la partie discussion de ses conclusions, dès lors qu'une telle demande n'est pas énoncée au dispositif.
La cour rappelle ensuite que la preuve étant libre en matière prud'homale, rien ne s'oppose à ce que le juge prud'homal retienne des attestations établies par des salariés de l'entreprise et en apprécie librement la valeur et la portée pour établir la faute grave fondant un licenciement sans méconnaître le principe de l'égalité des armes résultant du droit au procès équitable garanti par l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que ces attestations, versées au débat, sont soumises à la discussion contradictoire des parties.
En l'espèce, la salariée conteste les attestations produites par la S.A.S. Louis Pion par une observation d'ordre général tenant à l'existence d'un lien de subordination, sans toutefois démontrer que les témoins auraient pu être influencés par leur hiérarchie -alors au surplus que plusieurs témoins ne sont désormais plus soumis à un lien de subordination avec l'employeur.
En outre, si l'analyse des attestations versées au débat confirme que la direction a interrogé les collaborateurs de Mme [YC] la semaine du 20 octobre 2018, soit pendant son arrêt de travail, il ne saurait être tiré une quelconque conséquence de cette absence de la salariée quant à la régularité des propos ainsi recueillis et à l'absence de contradictoire, alors que les contenus des entretiens sont versés au débat et soumis à la libre discussion des parties dans le cadre de la présente instance.
Les moyens ainsi opposés par la salariée ne sont donc pas de nature à faire échec à l'analyse par la cour des attestations versées au débat par l'employeur.
Par ailleurs, la cour rappelle que dès lors que les formalités prévues par l'article 202 du code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité, le juge ne peut rejeter une attestation comme non conforme aux exigences dudit article sans préciser en quoi l'irrégularité constatée constitue l'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public faisant grief à la partie qui l'attaque.
En l'espèce, la cour relève que la majorité des justificatifs versés par l'employeur se présente sous la forme de documents intitulés 'entretien du (...) avec (...)'.
Les différents salariés s'exprimant néanmoins à la première personne du singulier aux termes de ces documents, il convient de les assimiler à des attestations.
Si ces écrits sont dactylographiés et ne précisent ni la date et le lieu de naissance des salariés, ni leur profession actuelle, ni leur lien de subordination avec la société et ne sont pas accompagnés, pour certains, de la copie de la pièce d'identité de leurs auteurs, ces irrégularités ne sont pas de nature à priver les attestations de leur valeur probante dès lors que l'identité de leurs auteurs -dont les propos ont été recueillis en présence de l'employeur avant la mise en oeuvre de la procédure de licenciement-, n'est pas contestée.
Les pièces et conclusions des parties permettent par ailleurs de savoir si ces salariés sont toujours placés sous un lien de subordination à l'égard de l'employeur.
L'absence de signature de l'attestation de Mme [J] ne peut davantage priver son attestation de toute portée dès lors que chacune des pages est paraphée, que l'ancienne salariée a apposé, de manière manuscrite en fin de document, ses éléments d'identité et la formule relative à la production en justice, et qu'il n'est pas discuté que ses propos ont été recueillis à l'occasion d'un entretien en présentiel avec l'employeur.
Enfin, si M. [L] n'a pas indiqué sa connaissance de la production en justice de l'attestation établie par ses soins, la salariée n'invoque aucun grief résultant de cette irrégularité.
S'agissant de l'attestation manuscrite de Mme [MV] épouse [H], la cour dit également que la salariée n'invoque aucun grief résultant de l'absence de copie de la pièce d'identité dès lors que l'authenticité des propos n'est pas remise en cause.
Il s'ensuit que la cour appréciera la valeur et la portée de l'ensemble des attestations versées au débat, malgré leur irrégularité de forme.
Au soutien de ses prétentions, l'employeur produit notamment huit attestations de salariés ayant travaillé avec Mme [YC], parmi lesquels figurent les quatre salariés employés au cours de l'année 2017, soit l'ensemble de l'effectif du magasin Louis Pion situé au sein du centre commercial [3] pour l'année en cause.
L'ensemble des témoins décrit une ambiance délétère en raison du comportement de Mme [YC] et de son manque d'implication, génératrice d'angoisse et pouvant avoir un impact sur leur santé, et les ayant poussés à démissionner ou solliciter un autre poste.
Tous les témoins évoquent ainsi les absences répétées de la salariée en journée pour des raisons personnelles telles que des courses à faire et ayant pour effet d'accroître leur propre charge de travail, la constitution du planning à partir des seules contraintes de Mme [YC], le désintérêt de la salariée pour des tâches administratives qu'il leur appartenait dès lors de traiter malgré leurs fonctions de vendeurs, l'absence de prise en charge des fermetures du magasin par la responsable de manière systématique le samedi, la peur de lui parler et sa tendance à les liguer les uns contre les autres.
Ainsi, la cour relève, à titre d'illustrations :
- Mme [R] [J], ancienne conseillère de [LJ] [YC] indique notamment que: ' Chaque matin à cette époque, j'allais au magasin avec la peur de l'humeur du jour...tant elle pouvait être gentille tant elle pouvait être despotique' (...) Son attitude fermée ne permettait pas l'échange, j'avais le sentiment de déranger ou de l'exaspérer par conséquent, je m'adressais très peu à elle. [O] et [P] se sont chargées de l'ensemble de ma formation. La planification de [LJ] était construite autour de ses contraintes. Elle ne faisant jamais de samedi en fermeture et ne le fait d'ailleurs toujours pas. Cette situation était très difficile à vivre, je rentrais chez moi le soir en pleurant. C'est comme si vous aviez quelqu'un derrière qui vous épiait, d'avoir un mur en face de soi. (...) La pression était quotidienne tant dans son attitude que dans le travail que nous avions à fournir, elle attendait beaucoup de son équipe mais ne fournissait pas le travail d'accompagnement qu'elle était censée nous dispenser. (...) Elle manquait cruellement d'exemplarité sur sa présence supposée en magasin (indiquée sur le planning). Sur son temps de travail elle partait chez le coiffeur, faire ses courses, sortait fumer régulièrement avec nous ou sans nous, et partait souvent de manière anticipée invoquant un rendez-vous chez le médecin, des courses à faire et estimait que sa présence n'était plus d'aucune utilité ! (...) L'exploitation du magasin ne la concernait pas : les clients, la vente, la propreté, le merchandising etc...n'était pas son affaire. (...) Mes évaluations avec [LJ] ont toujours été très bonnes mais cela ne voulait pas dire que j'étais épanouie dans mon travail avec elle comme responsable. (...) Elle a pour habitude de favoriser une personne dans son équipe au détriment des autres pour obtenir le meilleur de cette personne et se décharger sur elle. (...) J'ai beaucoup pleuré j'ai invoqué le fait d'être fatiguée...mais je regrette aujourd'hui, j'aurai dû lui dire qu'elle était despotique, que son attitude était anormale et que je ne voulais plus travailler dans ces conditions. (...) Je ne connaissais pas bien la DR malheureusement c'est par cela que je n'en ai pas parlé. (...) Un nouvel exemple le premier jour de la liquidation, une journée extraordinaire en chiffre, j'ai à plusieurs reprise dit à [LJ] de réaliser des contrôles caisses, cette dernière n'en avait que faire et m'a laissé ainsi à 18 h alors que ma collègue [U] [GZ] qui était prévue de quitter un peu plus tard est restée avec moi jusqu'à la fin soit autour de 22h le temps de rapprocher tous les tickets. Est-ce exemplaire ' Nous ne pouvions compter sur notre responsable. (...) Je la surnommais le dragon ses derniers temps....Quand je travaillais ave, elle me terrorisait, sa présence faisait que mon attitude était bridée.'
- M. [A] [T], qui a démissionné le 1er septembre 2017, précise notamment : 'J'étais vendeur sur le magasin de [Localité 6] [5] avec [LJ] [YC] comme responsable. À cette époque je rencontrai des difficultés car je n'étais pas accompagné par ma responsable (formations liées à mon intégration) elle n'était quasiment pas présente alors qu'elle était planifiée. Quand elle était présente, elle passait des après midi entière à l'extérieur du magasin ex: faire ses ongles ou achat de téléphone portable, coiffeur etc... En septembre 2016 j'ai intégré le magasin de [3] avec [LJ] [YC] comme responsable de magasin à cette époque nous avons commencé à rencontrer le même problème d'absentéisme à partir du mois de novembre.
Nous étions livrés à nous même et [EB] assurait la gestion du point de vente. Quand la DR appelait en magasin, nous ne pouvions lui dire où [LJ] était ni quand elle allait repasser. Nous disions à notre DR qu'elle était à la banque ou potentiellement passée sur le Corner et étions mal à l'aise de la situation. Nous l'informions derrière que la DR avait cherché à la joindre et celle-ci la recontactait. Ses allées et venus perduraient chez le coiffeur, la manucure, des achats vestimentaires .. à la fin elle ne se cachait même plus et se justifiait qu'elle était au forfait Jours et qu'elle devait faire minimum 4 heures. Il est arrivé une fois avec mon collègue [D] [L] que nous ayons compté son nombre d'heures de présence, elle réalisait largement moins d'heures que nous vendeur à temps complet, le décalage était considérable. (...) Les plannings réalisés n'étaient pas le reflet de la réalité et c'est pour cela qu'elle a fini par mettre ouverture/ fermeture ce qui lui permettait ne plus justifier ses horaires. Elle ne réalisait aucune fermeture car elle planifiait systématiquement une deuxième personne avec elle lui permettant d'arriver plus tard et de partir plus tôt. (...) . Elle modifiait ses plannings invoquant la maladie de ses enfants, qu'elle était souffrante, qu'elle était tombée au bord de sa piscine ... cela systématiquement à la suite de jour de repos et récupération, (...). Au mois de décembre, ses absences se sont accentuées pour réaliser ses achats de Noel, dés que nous avions besoin d'elle, elle fuyait le problème en ne se rendant pas disponible, elle était soit absente, soit dans la réserve où allait fumer une cigarette.
(...) Nous étions conscients qu'il y avait un problème managérial et d'absences mais ne disions rien à ce sujet à la DR et aux reste des responsables, cela restait entre nous.
(...) Au mois de janvier je me suis confié à ma DR sur les absences répétées de ma responsable, à chaque intervention de celle-ci nous notions un changement d'attitude (plus de présence). Changement qui durait maximum sur trois s semaines environ. Nous nous en étions fait une raison... Le trinôme, [CO], [D] et moi-même fonctionnait bien mais nous étions submergés de travail et en détresse car nous n'avions aucune aide de notre responsable. Nous nous étions formés sur le tas. Elle colportait de fausses accusations « comme le fait que je veuille faire virer [CO] ma collègue » son but étant que nous ne soyons pas proche les uns les autres pour éviter que nous nous associons contre elle. « Diviser pour mieux Reigner ».
(...) J'ai donc profité de l'absence de [LJ] lors du passage de ma DR fin avril début mai pour lui faire part de ma détresse et ne souhaitais plus travailler avec [LJ] dans ces conditions. (...) Après cela elle ne m'adressait plus la parole, ne me disait plus bonjour l'ambiance était pesante. (..) Elle m'a alors demandé de ne plus parler à [CO] la responsable, de ne plus contacter la DR et qui ce soit. J'en avais pris mon parti. Pendant ce temps là de décembre à juillet j'ai perdu 14 kg, je me sentais mal, fatigué et avait l'appréhension d'aller au travail. Au mois de juin la veille de mon retour de congés je suis passé par [3] et ai eu une crise d'angoisse à l'idée de reprendre le travail. Pendant les congés d'Aout de [LJ], j'étais épanouie et ai repris du poids. J'ai alors décidé de quitter le magasin coûte que coûte et Louis pion si ma mutation ne pouvait pas se faire. (...) J'avais des nausées en magasin, les échanges avec [LJ] étaient insupportables et c'est alors que j'ai eu une proposition de poste. A ce jour le fait d'échanger sur le sujet réveille en moi de très mauvais souvenirs et me mets en état de stress car je ne dis pas que [LJ] était méchante mais que son comportement était vicieux et provoquait chez moi un dégout. Je m'angoissais quand je voyais son nom sur mon portable... (...)
- M. [D] [L], qui a intégré la boutique de [3] à compter du mois de septembre 2016 et a quitté le magasin courant mai 2017, affirme pour sa part que : '(...) Lors des premiers mois d'activité sur la boutique, [LJ] était impliquée. J'ai commencé à . remarquer des absences répétées et régulières à partir de fin Janvier pour effectuer des achats personnels, faire des pauses cigarettes prolongées et de plus longues pauses coiffeur-esthétique, le travail effectil en magasin représentait 3h environ fréquemment
Au départ de [EB] qui effectuait un grand nombre de taches incombant à [LJ], nous nous sommes retrouvés [V] et moi-même avec une charge de travail conséquente, nous n'étions pas épaulés par notre responsable, nous avions un cahier de communication sur lequel elle nous listait de multiples taches n accomplir et y apposait des commentaires .... [LJ] ne gérait aucun litige client: quand on l'informait d'un problème avec un client, elle ne prenait pas les choses en mains et se défilait dans la réserve afin de ne pas faire face au problème.
(...) Toutes les tâches dans le magasin devaient être réalisées par [V] et moi-même : inventaires, réception marchandises, traitement des mails, SAV et PDE. [LJ] restait très en retrait de la vie active du magasin et n'était jamais au courant des faits importants et litiges que nous pouvions rencontrer. (...) Très vite nous avons formé un trio excluant [LJ] par la force des choses puisqu'elle était peu présente en magasin et peu impliquée. Le travail était devenu pénible et démotivant, nous tenions le coup car l'entente entre les vendeurs était bonne, mais seulement cordiale avec [LJ]; le magasin manquait de cohésion d'équipe.
Les plannings n'étaient pas équitables, elle posait d'abord ses horaires et ensuite elle comblait le planning avec l'équipe de vente, [LJ] ne faisait quasiment jamais de fermeture et si elle en faisait une c'était toujours accompagné d'un vendeur car elle partait plus tôt régulièrement, elle ne faisait jamais de fermeture le samedi. (...) J'avais conscience que [LJ] était plus agréable à mon égard mais j'ai été témoin de l'attitude énervée et désagréable de [LJ] à l'encontre des membres de l'équipe. Elle s'en prenait plus fréquemment à [V] et [CO] M. Elle divisait l'équipe par son attitude : par exemple [V] refaisait une vitrine pour le merchandising, elle lui donnait son avis positif sur l'exécution de celle-ci et dés que [V] avait le dos tourné ou n'était pas la, [LJ] refaisait la vitrine et se plaignait de son travail a moi même au lieu de lui dire les choses clairement. Il est d'ailleurs également arrivé que cela soit l'inverse et que ce soit donc [V] qui soit témoin de critiques à mon égard.
[LJ] n'était pas ouverte à la discussion, et pour ma part, je préférais ne pas en parler franchement afin que la situation ne se dégrade pas davantage. Il fallait faire profil bas pour eviter de la contrarier : Ne pas la contredire, effectuer les taches sans réserves et au besoin avoir des échanges oraux ou écrits non francs toujours dans son sens.
J'ai plusieurs fois échangé à ce sujet avec [V], qui comme je l'ai déjà dit, était plus souvent « victime » des remarques de [LJ] et il m'a indiqué avoir une « boule au ventre » en venant travailler et être très stressé, et encore plus quand il travaillait en même temps que [LJ]. Ce qui a entrainé pour lui une importante perte de poids au fil des mois. Depuis son changement de société, il est d'ailleurs beaucoup plus serein et heureux.
(...) Elle était certes plus présente physiquement mais elle s'est renfermée faisait preuve de rancune envers nous. Elle pouvait ne plus saluer [V] qui était à l'origine de l'intervention de la DR. Elle ignorait complètement [V] et le dénigrait régulièrement par des réflexions auprès de [CO] [X] et moi-même. Il s'agissait de critiques non constructives et blessantes sur son travail, son comportement et sur son soi-disant manque d'implication. Tout en sachant que cela n'était pas justifié. Cela faisait donc ressortir une ambiance plus que compliquée chaque jour.
Il n'y avait plus de discussion possible et cela n'a fait qu'augmenter mon désir de partir de la boutique, car au final cela avait des répercussions sur notre travail et notre quotidien.
(...) mal-être général, ambiance tendue et démotivante et manque de reconnaissance pour le travail accompli et le volume d'heures effectuées.
[LJ] [M] récupérait prioritairement ses jours alors que nous cumulions respectivement des heures et des jours de récupération, mon tableau de suivi des heures peuvent en attester. (...)
Il est clair que si malheureusement, je n'avais pas eu la chance d'être muté, j'aurais fait le choix de quitter Louis Pion et aurais posé ma démission très rapidement. Je ne pouvais en effet pas continuer dans ces conditions de travail.'
- Mme [PU] [MV] épouse [H], vendeuse de 2009 à 2014 indique : '(...) J'ai quitté la société car j'ai été dégouté du métier de vendeuse lorsque j'ai été sous la responsabilité de Mme [YC] [LJ]. Je m'en explique le 18 janvier 2012 à ma directrice régionale de l'époque Mme [B] [F].
Je vivais à cette époque les faits comme un harcèlement. (...) Je me sentais dénigrée et rabaissée car Mme [YC] avait une attitude envers moi qui me déstabilisait, le soir en rentrant je pleurais et exploser de nerf tant la tention de la journée m'avait épuisée. (...) Elle me reprochait des fautes imaginaires professionnelles tels que l'entretien du magasin (...) Elle ne me soutenait pas dans mes taches quotidiennes puisqu'elle n'était pas ou peu présente sur le point de vente (épilation, coiffeurs, magasins + courses personnelles). (...) Elle réalisait sa planification et nous bouchions les trous (...) J'ai perdu mon grand-père le 25 décembre 2011, ne me sentant pas de venir travailler le lendemain de son décès, je l'ai contacter lui demandant et l'informant de ma potentielle absence. 'Il faut que tu viennes, je ne peux pas m'organiser pour ouvrir le magasin à la place donc vient !'.
J'ai été choqué ainsi que mon entourage sur cette réponse inhumaine, alors que cette dernière avait pris sa journée quand son animal domestique était décédé.
(...) Je lui ai demandé plus tard de prendre un RDV pour moi à la médecine du travail et était déclaré inapte au vus de la situation que je ne voulais pas revivre.'
- Mme [K] [Z], vendeuse au sein de la boutique Louis Pion à [3], indique notamment : « Dimanche de la semaine 37, [CO] la responsable du corner est passée devant le magasin pour aller à sa voiture et m'a aperçu en train de faire l'Inventaire Louis pion. Inventaire qui m'a été confié par [LJ] le mardi par SMS car elle devait rattraper des heures puisque la semaine précédente elle en avait fait beaucoup cf ses propos.
(...) [CO] responsable du corner m'a trouvé déprimée au bord des larmes car J'avais dû gérer l'intégralité de l'inventaire Louis pion ce qui était énorme alors que sur cette même semaine j'avais eu 3 récupérations.
Dimanche je me suis rendue compte que les corrections d'Inventaires n'avaient pas été réalisées par [LJ] et retrouvait ce dernier dans le même état que je l'avais laissé le mercredi. J'étais éc'urée en pensant qu'elle l'aurait réalisé en mon absence.
(...) [LJ] s'est appuyée sur moi.
Elle n'était pas beaucoup présente; elle faisait des courses, ses ongles, les sourcils chez Yves Rocher, allait chez Décathlon... Tout cela sur son temps de travail. Ce phénomène s'accentuait au mois de décembre pour les fêtes de Noel car elle devait faire ses achats. J'assumais beaucoup de choses en magasin. (...) elle m'a donnée le feu vert et m'a dit de mettre en place l'organisation que je souhaitais. Refaire l'organisation du stock et de l'administratif J'étais flattée mais ce n'était pas mon rôle.
[LJ] me demande de faire beaucoup de chose et suis très prise par la masse de travail à accomplir cela s'en ressent sur mon métier de vendeuse.
[LJ] peut être gentille on peut échanger avec elle mais quand on ne va pas dans son sens, elle est agacée et on paie sur les plannings, elle focalise son attention sur notre travail est essaie de remettre la faute sur nous. Elle dit me favoriser parce que c'est moi et que je fais beaucoup de chose.
Elle dénigre [CO] devant moi pour des raisons divers.
Elle m'a dit utiliser la caméra pour vérifier le travail de [CO] et si [V] venait en magasin pour parler. Elle nous menace d'utiliser les caméras au besoin pour contrôler.
On a peur de demander quelque chose à [LJ] de peur de sa réaction « on va prendre cher « elle va plus nous adresser la parole » quand on lui demande quelque chose et cela ne lui plait pas, elle ne nous parle plus.
Encore un exemple la semaine J'avais demandé à avoir des jours pour partir en Tunisie, cela ne se fait finalement pas, je ne l'ai pas dit à [LJ] craignant sa réaction est normal '
Elle modifie les plannings sans arrêt pour s'arranger elle, encore une fois la semaine dernière et mardi 17 octobre prévue de fermeture et oralement m'a dit qu'elle serait d'intermédiaire. Son planning prévisionnel ne change jamais contrairement à nous, il est fixe calé sur ces contraintes (Sauf quand elle doit s'arranger et ne réalise jamais de fermeture le samedi).
Elle monte les personnes les unes contre les autres pour une raison que l'ignore.
(...)
Encore un exemple de réaction que je crains, [Y] et moi avons échangé nos montres Bruno et n'osais pas la porter pour ne pas avoir de remarque. [LJ] avait même dit à [Y] de ne pas échanger sa montre avec moi. Quand [LJ] s'est rendue compte que nous l'avions finalement fait, J'ai donc eu le droit à «Tu es pénible [K] ». En quoi cela la dérangeait P
[LJ] se repose beaucoup sur moi quand elle n'a pas envie de faire les choses, elle se décharge.
- exemple la semaine dernière, elle partait à la banque puis finalement fait demi-tour en disant qu'elle devait partir chercher ses filles et m'a demandé de le faire.
[Y] n'a pas été formée par [LJ] hormis le tour du magasin mais pour le reste c'est moi.
[LJ] devait travailler dimanche avec moi et devait faire l'ouverture. J'ai reçu un appel à 10H55, elle m'a demandé d'ouvrir le magasin à sa place, si j'arrivais avant elle, car elle avait un problème avec sa machine à laver.
Chose que j'ai faite.
Elle est arrivée vers 11H20 m'a demandé de déjeuner à 12h30 car elle devait déjeuner avec son mari. Elle est partie déjeuner vers 13H30, elle fut de retour vers 16H30 est restée quelques minutes et a quitté le magasin, elle a dû rester un petit peu plus de 2 heures. Sa présence sur le planning était bien prévue.
(..) . Elle réalise tout ce qu'elle doit rendre compte à la DR, le reste est géré par [Y] et moi s'est pour cela que je passe mon temps sur l'ordinateur.
(...) Elle peut constater qu'il y a du monde en magasin, elle nous laisse ainsi seule et part.
Quand elle est derrière en réserve en train de déjeuner j'ai peur de la déranger et suis mal à l'aise pour la solliciter. Cette attitude est identique même pour d'autres demandes, j'ai le sentiment de l'agacer, de la déranger de l'exaspérer. (...) Je ne dis plus rien à [LJ], je me soumets.
(...) Le fait de parler me libère, je me sens tranquille en son absence et soulagée d'en avoir parlé. Je n'ai pas osé en parler avant à la DR car j'ai eu peur des répercutions. (...) Elle est sans arrêt sur nous alors qu'elle ne fait pas preuve d'exemplarité. (...) Pour conclure [LJ] nous considère comme des Marionnettes, il faut faire ce qu'elle veut et aller dans son sens. On a peur de [LJ]'.
- Mme [CO] [S], vendeuse au sein du magasin Louis Pion à [3], affirme que :
« (...) J'ai été livrée à moi-même dés les premiers jours, sans formation, sans coéquipier et sans référent, seule en magasin dés la deuxième journée. (...) Je me suis vite rendue compte que [D] et [V] étaient débordés, au bord de la rupture et qu'ils attendaient beaucoup de mon arrivée. Ils étaient en surcharge de travail, en surcharge d'heures, ils étalent à bout de souffle. [LJ] ne participait pas aux tâches administratives et était très peu présente à cette époque là en magasin. Le magasin fonctionnait quasiment qu'à deux.
Malheureusement je ne pouvais m'appuyer que sur ces deux personnes car [LJ] n'était pas présente, à chaque fois que j'avais une question à poser c'était [D] ou [V] qui me répondait.
Par exemple, un matin en arrivant à 11H [D] m'a proposé de me former à l'intégration de marchandises, [LJ] en réalisant que j'avais intégré et signé les BL, s'en est prise à [D] en lui disant qu'il n'avait pas le droit de me former (chose qui lui était réservée mais ne le faisait pas, cela faisait déjà 3 semaines que j'étais en magasin). (...) J'ai constaté sur cette même période qu'elle donnait différentes versions en fonction de ses interlocuteurs.
Par exemple, [D] et [V] m'alertait qu'elle risquait de ne pas renouveler mon contrat alors qu'elle s'adressait à moi comme si tout allait bien.
[LJ] ne sait pas valoriser et est systématiquement dans le reproche. Reproches pouvant être anodins ou non mais systématiques, quotidien. Elle créait du conflit au sein de l'équipe (...). Elle a pour principe de diviser son équipe pour mieux Reigner.
(...). [LJ] et moi ne pouvions nous entendre, j'avais un problème d'ordre moral avec. Je ne cautionnais pas son attitude de diviser, d'abaisser, de tenir des propos sur la couleur de mon soutien gorge qui n'était assorti à mon tee shirt ... et surtout de nous reprocher des choses qu'elle faisait elle-même « faites ce que je dis mais ne faites pas ce que je fais ». Elle manquait d'exemplarité et voulait obtenir le meilleur de nous.
Par exemple elle pouvait ouvrir le magasin, J'arrivais à 11H elle repartait de suite de la surface de vente, allait fumer sa cigarette, allait dans le back office puis déjeunait et partait faire du shopping et retenait vers les coups de deux heures. Restait à peu prêt jusqu'à 16H et partait. Sur cette période Il n'était pas rare qu'elle réalise que 3 heures de travail effectif. Moi j'ai le droit mais vous non !
Elle n'arrêtait pas de prendre des pauses cigarettes soit approximativement une dizaine de fois alors que quand nous lui demandions si nous pouvions nous même en prendre une, elle nous faisait comprendre que cela était bien généreux de sa part de nous la donner....
Un autre exemple, elle nous dit qu'elle va à la banque pour faire de la monnaie et déposer les remises. 15 minutes après son départ, nous voyons le banquier venir en magasin nous remettre le ticket de remise oublié 15 mn avant par [LJ]. Nous la voyons arriver une heure après son départ nous disant: « Il y avait beaucoup de monde à la banque et que les machines étaient bloquées » Elle nous prenait vraiment pour des imbéciles.
[V] éclate et s'adresse à la DR lors de son passage. Me concernant je suis restée en retrait de peur de perdre mon CDD connaissant [LJ] et les vengeances qu'elle pouvait m'infliger.
(...) [LJ] n'a pas accepté que [V] puisse s'exprimer et la remette en cause, elle ne le saluait plus en lui faisant la bise alors qu'au reste de l'équipe oui. Elle détournait son regard à l'approche de [V], elle l'ignorait totalement et l'isolait du reste de l'équipe. Elle essayait de me monter contre lui.
Je précise que -[LJ] nous tenait le propos que la DR la soutenait, était derrière elle et ne remettait pas en cause sa présence ni son travail, ce qui nous isolait et nous laissait penser que [LJ] était intouchable.
De la, a commencé sa petite vengeance, elle était maintenant très présente en magasin et était systématiquement sur nous. Toute action était bonne à la critique et de là s'enchainait des plannings « d'enfer ». [LJ] ne modifiant jamais son planning nous planifiait des horaires pour compenser le départ de [D]. Nous n'avons jamais senti qu'elle subissait cette absence en même temps que nous, nous étions seuls à compenser. La méthode de réalisation des plannings de l'équipe est la suivante: 1/ elle planifie ses contraintes 2/nous fait boucher les trous 3/ idem pour les récupérations.
(...)
A l'arrivée de [Y], je me suis mise en arrêt maladie j'avais perdu 10 kg depuis mon arrivée sur le magasin car j'angoissais de venir en boutique, je suis descendue sous un poids où je ne tenais plus debout. (...) De là nous avons vécu une semaine sans nous adresser la parole, elle m'en voulait beaucoup car elle me disait qu'à cause de moi elle avait dû faire des ouvertures et des fermetures. (...)
- Mme [Y] [C], travaillant au sein de magasin en cause depuis le mois de juillet 2017, précise que : « Je ne suis pas présente depuis longtemps, pour ma part [LJ] est une personne gentille mais si aujourd'hui on devait me demander ce que j'en pense voici :
[LJ] monte les personnes les uns contre les autres et cela met une mauvaise ambiance au sein de l'équipe.
- Par exemple : Les fois où nous avons été en mode autonome elle est venue me dire qu'ilhem m'avait pris des ventes alors que cela était faux après vérification avec ilhem.
Un matin elle a échangé avec [CO] comme quoi je l'avais appelé pendant mon jour de repos pour me plaindre sur l'état de la salle pause alors que cela n'est Jamais arrivé. Je n'ai Jamais eu [LJ] au téléphone hormis dans l'enceinte du magasin.
[EB] revenant de congés maternité a demandé à [LJ] d'adapter son planning aux contraintes horaires qu'elle demandait. [LJ] a répondu à [EB] que cela était délicat car [Y] avait besoin de soirées hors cela était faux.
[LJ] change souvent nos plannings d'un jour à l'autre, dans la même semaine nous pouvons être amenées à avoir 2 ou 3 plannings différents soit elle se trompe dans les heures ou nous constatons des choses incohérentes.
Si je fais une journée avec [LJ] J'ai conscience qu'elle s'absentera à plusieurs reprises, elle peut fumer 4 cigarettes le matin 4 l'après midi, elle peut partir faire une course dans la galerie en dehors de sa pause déjeuner une quart d'heure par si un quart par là. (...) On ne sait jamais à quelle heure elle arrive on ne sait jamais à quelle heure elle part.
par exemple si elle est de fermeture elle peut arriver entre 11h et 15H. Je n'ai jamais vu [LJ] d'intermédiaire.
La personne en elle-même c'est une personne très gentille, mais je suis réticente à aller vers elle car j'appréhende ses réactions.
Par exemple quand nous étions en mode autonome et avions besoin d'elle, j'avais le sentiment que cela la dérangeait.
(...) Par exemple la semaine dernière une personne de la direction du centre a téléphoné pour avoir les chiffres du mois de septembre. Je l'ai sollicité, elle m'a dit qu'elle était en pause qu'elle rappellerait dans un second temps quand j'ai raccroché elle m'a dit que J'aurai pu les donner moi même. (Ce n'est rien en soit mais ce type de réflexion est systématique, nous n'osons plus la solliciter de peur de la déranger).
(...) Elle s'est confiée à moi sur [V] alors qu'il était encore dans le magasin : qu'il était hypocrite, et qu'elle ne l'appréciait pas. Cela me choque que ma responsable puisse me dire des choses de la sorte sur mes collègues. (...) Je ne me sens pas bien dans le magasin, j'ai une très bonne affinité avec [K], [CO] ou à l'époque [V] mais malheureusement le comportement de [LJ] vis-à-vis de nous, met des malaises au sein du magasin.
L'échange n'est pas sein avec ma responsable, je n'ose pas...
(...) J'appréhende le retour de [LJ], je suis toujours un peu angoissée quand elle est présente et encore davantage dans la situation actuelle. (...)',
- Mme [CO] [W], indique : '(...)Au départ de [EB], la charge de travail administratif a été reportée sur les vendeurs en place soit [V] [T] et [D] [L]. Ces derniers se retrouvaient seuls des heures entière et n'avaient aucune visibilité sur la présence de leur responsable en magasin et devaient gérer le point de vente seuls. Le plus dure étant pour eux la gestion des litiges clients, de l'ensemble des taches administratives liées à l'exploitation ainsi que le SAV clients d'autant qu'ils n'avaient pas la compétence ni de formations sur le sujet.
[V] [T] craignait tellement de faire des erreurs, qu'il m'appelait pour vérifier si tout était conforme. Les taches qui lui étaient confiées étaient supérieures à ses qualifications. Je suis descendue à plusieurs reprises pour les aider soit sur du SAV soit sur des inventaires. [V] a communiqué à [LJ] [YC] qu'il avait fait appel à moi pour l'aider. Cette dernière n'a pas apprécié et m'a sollicité pour avoir un entretien et m'expliquer que je n'avais pas à descendre sur son point de vente, qu'elle considérait que je me substituais à son autorité. Je lui ai donc dit que je ne descendrai plus et précise que mon intervention avait été liée à son absence (son équipe n'arrivait à la Joindre).
Malgré mon engagement auprès de [LJ], J'ai continué à apporter mon aide à son équipe quand elle me sollicitait, les voyants en difficulté.
(...)
Début septembre lors de la semaine de l'inventaire Louis Pion, j'ai retrouvé [K] sur son point de vente stressée, au bord des larmes à cause de la surcharge de travail laissée par sa responsable. Suite à cela elle a commencé à se confier à moi et à me dire qu'elle était extrêmement stressée, qu'elle faisait de son mieux mais qu'elle recevait quasi systématiquement des reproches de sa responsable. [K] n'osait pas s'en exprimer auprès de la DR pensant que cette dernière était très liée avec [LJ] (propos communiqué par [LJ] à l'ensemble de son équipe). (...) Je ne peux cautionner la détresse de cette équipe.'
L'employeur verse également au débat :
- le courriel adressé le 18 janvier 2012 par Mme [MV] épouse [H] à la directrice régionale Sud-Est aux fins de solliciter une rupture conventionnelle de son contrat de travail et de dénoncer le comportement de Mme [YC] tout en exprimant ses craintes que cette dernière ne l'apprenne.
- ce qu'il désigne comme un plan d'action adressé sous la forme d'un courriel à la salariée le 11 mai 2017 et fixant 9 objectifs à Mme [YC], principalement relatifs à son temps de présence dans le magasin et l'élaboration des plannings.
La cour relève que malgré les années séparant l'attestation de Mme [MV] épouse [H] de celles des autres salariés, et malgré le faits que certains salariés n'aient pas travaillé sur la même période, le même type de comportement est décrit, ainsi que la même peur de Mme [YC].
En outre, même si aucun certificat médical n'est produit, l'ensemble des salariés évoque une angoisse quotidienne à l'idée de travailler avec Mme [YC], plusieurs d'entre eux confirmant par ailleurs avoir recueilli les confidences de leurs collègues à cet égard.
M. [T] met en outre directement en relation sa perte de poids importante avec l'ambiance de travail aux termes de son attestation.
Le fait que Mme [G] mette cette perte de poids en lien avec une rupture sentimentale du salarié ne permet pas de contredire ces allégations dès lors que le salarié avec lequel elle n'a travaillé que trois mois est mieux à même de se prononcer sur le sujet d'une part et que M. [L], le collègue de travail habituel de M. [T] a confirmé l'existence d'un lien de causalité avec les conditions de travail d'autre part.
L'ensemble des attestations produites par l'employeur, circonstanciées et concordantes, met par conséquent en évidence les méthodes de management inadaptées de Mme [LJ] [YC] ainsi que le mal-être en résultant pour l'équipe travaillant sous la responsabilité et la conduisant, dans son ensemble, à envisager une autre fonction.
La cour relève à ce propos que si Mme [YC] justifie les départs des salariés de son équipe par des éléments extérieurs à son management, elle ne produit aucun justificatif au soutien de ses allégations permettant de contredire les affirmations précises et concordantes des salariés sur ce point.
Ensuite, si Mme [YC] verse au débat plusieurs photographies prises à l'occasion de formation ou de repas de fin d'année ainsi que des échanges téléphoniques écrits avec Mme [Z], la cour relève que ces éléments ponctuels ne permettent pas de remettre en cause les déclarations concordantes et circonstanciées des témoins, qui confirment par ailleurs que la salariée pouvait adopter un comportement amical certains jours.
De même, les attestations produites par la salariée ne contredisent pas utilement les différents témoignages concordants, précis et circonstanciés des salariés dès lors qu'elles émanent, pour la plupart d'entre elles, de personnes extérieures au service -soit des clients ou des personnes travaillant au sein du centre commercial [3] .
Seule Mme [G] a travaillé sous la subordination de Mme [YC], mais la cour relève la brièveté de la période, à savoir trois mois comprenant au surplus les périodes de fin d'année, et par conséquent des périodes de vacances pour les salariés.
En réponse aux arguments développés par la salariée, la cour observe en outre que le fait que l'ensemble des salariés ayant travaillé avec Mme [YC] depuis son embauche, le 22 septembre 2003, n'ait pas été entendu ne permet pas pour autant d'ôter aux agissements dénoncés leur caractérisation et leur gravité.
La salariée ne peut enfin se prévaloir des évaluations positives dont elle a fait l'objet jusqu'au mois de février 2017, dès lors qu'il est établi qu'à l'exception de Mme [MV] épouse [H], aucun des salariés n'a osé alerter la direction sur ses conditions de travail par crainte de la réaction de Mme [LJ] [YC] avant le 11 mai 2017.
La cour dit à ce propos que si la dénonciation de méthodes managériales par un salarié peut être envisagé par l'employeur comme un problème conjoncturel, tel n'est plus le cas lorsque l'ensemble des salariés dénonce un même comportement.
Il s'en déduit que l'employeur n'a eu une connaissance précise des faits reprochés à Mme [YC] qu'au cours du mois de mai 2017 à la suite de la dénonciation du comportement de la responsable de magasin par l'ensemble des salariés alors placés sous son autorité.
Il est dès lors naturel que les évaluations antérieures n'évoquent pas cette difficulté.
Aucune tardiveté ne saurait par ailleurs être reprochée à l'employeur dans la mise en oeuvre de la procédure de licenciement, dès lors qu'il résulte des pièces versées au débat qu'à la suite de la dénonciation du comportement de Mme [YC] courant mai 2017, il a mis en place un plan d'action matérialisé sous forme de courriel daté du 11 mai 2017, ledit plan nécessitant plusieurs semaines d'application pour parvenir à une amélioration de la situation.
Face au départ de M. [T] le 1er septembre 2017, et à l'alerte téléphonique de Mme [CO] [W] le 13 octobre 2017 -à la suite de sa rencontre au magasin avec Mme [K] [Z] qui réalisait seule l'inventaire-, l'employeur a néanmoins décidé de procéder à l'audition des salariés puis d'enclencher la procédure de licenciement.
Aucune tardiveté ne peut dès lors lui être reprochée dans sa réaction.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments, et sans qu'il soit nécessaire d'examiner le surplus des griefs visés dans la lettre de licenciement, que la S.A.S. Louis Pion rapporte la preuve de faits qui constituent une violation par Mme [YC] des obligations découlant de son contrat de travail et qui rendent impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis, s'agissant de pratiques managériales inadaptées engendrant une situation de souffrance chez les salariés placés sous sa responsabilité.
Le licenciement pour faute grave est donc justifié ; le jugement déféré sera par conséquent infirmé en ce qu'il a dit que la faute grave n'était pas caractérisée et que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse.
Par suite, le jugement sera également infirmé en ce qu'il a alloué à Mme [YC] les sommes de :
- 1 666,35 € à titre de rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire,
- 166,63 € à titre de congés payés afférents à la mise à pied conservatoire,
- 156 € à titre de rappel de salaire sur la prime d'ancienneté,
- 4 263,14 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 426,31 € à titre de congés payés afférents à l'indemnité de préavis,
- 8 262,18 € à titre d'indemnité de licenciement,
- 25 560 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- outre intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2018,
- et ordonné le remboursement par la S.A.S. Louis Pion à Pôle emploi des indemnités de chômage versées à [LJ] [YC] du jour du licenciement au jour du jugement prononcé dans la limite de six mois d'indemnité de chômage.
2. Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice distinct :
La salariée rappelle que son professionnalisme et son implication ont toujours été reconnus pendant les 14 années passées au sein de la société.
Elle accuse l'employeur de lui faire porter la responsabilité des chiffres décevants du nouveau concept développé au sein de la boutique de [3].
Elle affirme qu'une enquête à charge a été menée contre elle, sans qu'elle n'ait l'opportunité de se défendre, et que sa réputation a été ternie au point de ne pouvoir retrouver un emploi.
En réponse, l'employeur soutient que la procédure de licenciement a été régulièrement mise en oeuvre et que la salariée ne justifie d'aucun préjudice.
Il écarte toute circonstance vexatoire dès lors que la salariée a pu s'exprimer librement et contradictoirement dans le cadre de l'entretien préalable.
Il ajoute qu'aucune stratégie d'éviction n'a été mise en place, le licenciement étant la conséquence de son comportement.
Il fait enfin valoir n'avoir porté aucune atteinte à sa réputation.
Il résulte de l'article 1231-1 du code civil, qu'indépendamment de la cause réelle et sérieuse du licenciement, le salarié est en droit d'obtenir réparation du préjudice résultant du comportement fautif de l'employeur dans les circonstances entourant la rupture, distinct de celui résultant de la perte de son emploi.
En l'espèce, la cour dit, après analyse des pièces versées au débat, que la salariée ne produit aucun élément permettant de démontrer que le licenciement repose sur une autre cause que son comportement, alors que la faute grave a été reconnue aux termes de la présente décision.
Aucune faute ne peut davantage être reprochée à l'employeur sur le fondement des auditions de salariés menées en l'absence de Mme [YC], dès lors qu'il respectait ainsi son obligation de prévention et de sécurité à l'égard desdits salariés et qu'il a soumis à la discussion de la salariée les différents griefs à l'occasion de l'entretien préalable et dans le cadre de la présente instance.
La salariée ne démontre donc pas la réalité du comportement fautif de l'employeur allégué ; le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts présentée sur le fondement du préjudice distinct.
3. Sur la convention de forfait :
La salariée entend se prévaloir de l'insuffisance du système de contrôle auto-déclaratif prévu par l'accord d'entreprise du 29 décembre 2005 pour assurer sa protection et sa santé.
Elle précise que l'employeur n'a jamais opéré le moindre contrôle des heures déclarées par ses soins, et qu'il n'a pas davantage contrôlé sa charge de travail, cette problématique n'étant pas abordée à l'occasion de ses évaluations annuelles.
En réponse, l'employeur soutient que la salariée n'est pas fondée à remettre en cause l'existence de la convention de forfait annuel en jours qui lui a été appliquée dans le strict respect des dispositions de l'accord collectif applicable.
Il souligne à ce propos que l'accord collectif d'entreprise du 29 décembre 2005 doit primer sur la convention collective.
Il précise qu'il opérait un contrôle à travers les déclaratifs de la salariée, et souligne que cette dernière n'a jamais dénoncé une durée excessive de travail ou une surcharge de travail, que ce soit lors des nombreux points managériaux ou à l'occasion des entretiens annuels.
Les conventions de forfait en jours, qui dérogent au droit commun du temps de travail des salariés et des heures supplémentaires, sont encadrées par les dispositions des articles L.212-15-3 et suivants du code du travail dans leur rédaction applicable en l'espèce qui est celle issue de la loi n°2005-882 du 2 août 2005 dès lors que la convention de forfait a été conclue le 25 mai 2006.
Ainsi, selon l'article L. 212-15-3 :
'I. - Les salariés ayant la qualité de cadre au sens des conventions collectives de branche ou du premier alinéa de l'article 4 de la convention nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 et qui ne relèvent pas des dispositions des articles L. 212-15-1 et L.212-15-2 doivent bénéficier d'une réduction effective de leur durée de travail. Leur durée de travail peut être fixée par des conventions individuelles de forfait qui peuvent être établies sur une base hebdomadaire, mensuelle ou annuelle. La conclusion de ces conventions de forfait doit être prévue par une convention ou un accord collectif étendu ou par une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement qui détermine les catégories de cadres susceptibles de bénéficier de ces conventions individuelles de forfait ainsi que les modalités et les caractéristiques principales des conventions de forfait susceptibles d'être conclues. A défaut de convention ou d'accord collectif étendu ou de convention ou d'accord d'entreprise ou d'établissement, des conventions de forfait en heures ne peuvent être établies que sur une base hebdomadaire ou mensuelle.
(...) III - La convention ou l'accord collectif prévoyant la conclusion de conventions de forfait en jours doit fixer le nombre de jours travaillés. Ce nombre ne peut dépasser le plafond de deux cent dix-huit jours. La convention ou l'accord définit, au regard de leur autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps, les catégories de cadres concernés. La convention ou l'accord précise en outre les modalités de décompte des journées et des demi-journées travaillées et de prise des journées ou demi-journées de repos. Il détermine les conditions de contrôle de son application et prévoit des modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés concernés, de l'amplitude de leurs journées d'activité et de la charge de travail qui en résulte. L'accord peut en outre prévoir que des jours de repos peuvent être affectés sur un compte épargne-temps dans les conditions définies par l'article L. 227-1. Une convention ou un accord collectif de branche, de groupe, d'entreprise ou d'établissement peut enfin ouvrir la faculté au salarié qui le souhaite, en accord avec le chef d'entreprise, de renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d'une majoration de son salaire. La convention ou l'accord collectif détermine notamment le montant de cette majoration ainsi que les conditions dans lesquelles les salariés font connaître leur choix.
Les salariés concernés ne sont pas soumis aux dispositions de l'article L. 212-1 et du deuxième alinéa de l'article L. 212-7. Les dispositions des articles L. 220-1, L. 221-2 et L. 221-4 leur sont applicables. La convention ou l'accord doit déterminer les modalités concrètes d'application de ces dernières dispositions.
La convention ou l'accord peut également préciser que les conventions de forfait en jours sont applicables, à condition qu'ils aient individuellement donné leur accord par écrit, aux salariés non cadres dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps pour l'exercice des responsabilités qui leur sont confiées.
L'employeur doit tenir à la disposition de l'inspecteur du travail, pendant une durée de trois ans, le ou les documents existant dans l'entreprise ou l'établissement permettant de comptabiliser le nombre de jours de travail effectués par les salariés concernés par ces conventions de forfait. Lorsque le nombre de jours travaillés dépasse le plafond annuel fixé par la convention ou l'accord, après déduction, le cas échéant, du nombre de jours affectés sur un compte épargne-temps ou auxquels le salarié a renoncé dans les conditions prévues au premier alinéa et des congés payés reportés dans les conditions prévues à l'article L. 223-9, le salarié doit bénéficier, au cours des trois premiers mois de l'année suivante, d'un nombre de jours égal à ce dépassement. Ce nombre de jours réduit le plafond annuel de l'année durant laquelle ils sont pris.'.
Enfin ,la loi du 20 août 2008 a renforcé les garanties du salarié soumis à une convention de forfait en jours en instaurant un entretien annuel spécifique prévu par l'article L. 3121-46 applicable aux conventions individuelles de forfait en jours en cours d'exécution lors de son entrée en vigueur :
'Un entretien annuel individuel est organisé par l'employeur, avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l'année. Il porte sur la charge de travail du salarié, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié'.
L'accord collectif prévoyant la convention de forfait en jours doit comporter des stipulations qui assurent la garantie du respect des durées maximales raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires.
Ainsi, et notamment, l'accord d'entreprise doit instituer un suivi effectif et régulier permettant à l'employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable afin de garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et qu'il existe une bonne répartition dans le temps du travail des salariés soumis au forfait en jours.
A défaut, la convention de forfait est nulle.
En l'espèce, il n'est pas discuté que la convention de forfait a été conclue en application de l'accord d'entreprise relatif au forfait jours des salariés cadres et non cadres du 29 décembre 2005.
L'article III dudit accord impose au salarié soumis au forfait jours de remplir, chaque mois, un formulaire mis à sa disposition à cet effet afin d'assurer la mesure du nombre de jours travaillés, ainsi que les heures de début et de fin de chaque journée.
Un entretien annuel est par ailleurs prévu avec la Direction afin d'examiner l'impact de ce régime sur l'organisation du travail, l'amplitude des horaires et la charge de travail des salariés concernés.
Il en résulte que ces dispositions ne prévoient pas de suivi effectif et régulier par la hiérarchie des états récapitulatifs de temps de travail transmis et ne permettent donc pas à l'employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable.
En conséquence, dès lors que lesdites dispositions ne permettent pas d'assurer la protection de la sécurité et de la santé de la salariée, la cour prononce la nullité de la convention de forfait ; le jugement déféré est donc infirmé de ce chef.
4. Sur les heures supplémentaires :
Le régime des heures supplémentaires est applicable au salarié dont la convention individuelle de forfait est nulle.
La durée légale du travail effectif des salariés est fixée à 35 heures par semaine soit 151.67 heures par mois.
Les heures effectuées au-delà sont des heures supplémentaires qui donnent lieu à une majoration de salaire de 25% pour chacune des 8 premières heures (de la 36ème à la 43ème incluse) et de 50% à partir de la 44ème heure.
Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.
Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
En l'espèce, la nullité de la convention de forfait conclue par la salariée ayant été prononcée ci-dessus, celui-ci peut prétendre au paiement d'heures supplémentaires.
Elle rappelle avoir géré deux boutiques entre le mois de février 2015 et le 30 juin 2016, et verse aux débats :
- un calendrier portant sur la période du 1er juillet 2014 au 21 novembre 2017 sur lequel Mme [YC] a récapitulé les horaires accomplis chaque jours,
- les plannings prévisionnels pour les magasins TNL et [5] pour les semaines du 16 février 2015, 21 septembre 2015, 11 avril 2016,
- divers courriels professionnels adressés par Mme [YC] dont un le 26 août 2016 à 20h07, le 16 octobre 2018 à 22h17, le 16 octobre 2018 à 22h19, le 14 décembre 2017 à 22h43, le 27 septembre 2016 à 22h50,
- l'attestation de Mme [G] précisant que Mme [YC] a donné trois jours de repos à M. [T] à la suite d'une rupture sentimentale,
- l'attestation de Mme [E] affirmant que la salariée faisait régulièrement l'ouverture et la fermeture du magasin et venait parfois travailler pendant ses jours de repos à cause des défections de personnel,
- l'attestation de M. [I] précisant avoir régulièrement constaté que Mme [YC] travaillait de 10 heures à 20 heures.
Ces éléments sont suffisamment précis quant aux heures non rémunérées que la salariée prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur d'y répondre.
A ces éléments, la S.A.S. Louis Pion oppose que:
- la salariée n'a jamais sollicité le paiement d'heures supplémentaires,
- les heures alléguées n'ont pas été demandées par l'employeur ni effectuées avec son accord implicite et ne sont pas justifiées par les missions à accomplir,
- le décompte a été établi pour les besoins de la cause, et la salariée ne produit aucun élément justificatif contemporain de l'exécution du contrat de travail,
- la production d'emails pour fonder la démonstration du temps de travail et l'existence d'heures supplémentaires est insuffisante,
- la rémunération versée à Mme [YC] est supérieure à celle prévue par la convention collective pour un agent de maîtrise soumis à 35 heures hebdomadaires, de sorte que sa rémunération contractuelle a eu pour effet d'opérer paiement, au moins partiellement, des heures de travail accomplies au-delà de la durée légale.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la S.A.S. Louis Pion, chargée du contrôle des heures de travail effectuées, se borne à remettre en cause le caractère suffisamment précis des éléments apportés par la salariée -alors que le contraire a été jugé ci-dessus-, sans elle-même alléguer ou justifier d'éléments contraires à ceux apportés par la salariée.
La cour rappelle par ailleurs que le versement d'un salaire supérieur au minimum conventionnel dans le cadre d'un forfait annuel en jours qui a été annulé, ne peut tenir lieu de règlement des heures supplémentaires.
La cour a donc la conviction que la salariée a accompli des heures supplémentaires mais dans une proportion moindre que ce qu'elle allègue.
Ainsi, après analyse des pièces versées au débat, et en infirmant le jugement déféré, la cour condamne la S.A.S. Louis Pion à payer à la salariée la somme de 1 656 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires outre celle de 165,60 euros au titre des congés payés afférents.
5. Sur le travail dissimulé :
Il résulte de l'article L.8221-1 du code du travail qu'est prohibé le travail totalement ou partiellement dissimulé par dissimulation d'emploi salarié.
Aux termes des dispositions de l'article L.8221-5 du code du travail dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur notamment de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.
Il résulte de l'article L.8223-1 du code du travail qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l'employeur a recours en commettant les faits prévus à l'article L.8221-5 du code du travail a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
Il revient au salarié de rapporter la preuve de l'élément intentionnel du travail dissimulé.
Le caractère intentionnel ne peut se déduire de la seule application d'une convention de forfait illicite.
En l'espèce, la salariée fait valoir que l'employeur était informé des horaires accomplis, notamment en raison de la remontée des plannings collectifs du point de vente, mais également du décompte mensuel individuel établi par la salariée.
En réponse, l'employeur estime que la demande n'est motivée ni en droit ni en fait, la salariée ne versant aucune pièce au soutien de ses prétentions.
La cour relève que la salariée ne produit au débat que certains plannings prévisionnels, et non définitifs, qui au surplus ne précisent pas les horaires de Mme [YC], puisque seuls ses lieux de travail sont mentionnés ainsi que, le cas échéant, les mentions 'ouverture' et 'fermeture'.
En outre, Mme [YC] ne verse aucune copie des décomptes individuels adressés mensuellement à l'employeur, alors que ce dernier soutient qu'elle n'a jamais sollicité le paiement d'heures supplémentaires.
En l'état, la cour dit que la preuve de l'élément intentionnel du travail dissimulé n'est pas rapportée.
En conséquence, la cour dit que la demande d'indemnité pour travail dissimulé n'est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu'il l'a rejetée.
6. Sur la demande de remboursement des jours de réduction du temps de travail (R.T.T.):
6.1 -Sur la recevabilité de la demande de remboursement des jours de R.T.T. :
L'article 564 du code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
La demande reconventionnelle formée par l'employeur aux fins de solliciter le remboursement des jours de R.T.T. s'analyse comme une demande aux fins de compensation avec sa dette au titre des heures supplémentaires réclamées en conséquence de l'absence d'effet de la convention de forfait en jours.
Elle est par conséquent recevable.
6.2 - Sur le bien-fondé de la demande :
L'employeur indique que le décompte des jours de réduction du temps de travail dont Mme [YC] a bénéficié dans le cadre de la convention de forfait est versé aux débats et non contesté.
En réponse, la salariée fait valoir que les dispositions conventionnelles prévoient l'attribution de plusieurs jours de repos payés en considération de l'ancienneté des salariés et des jours fériés, et que le forfait de 218 jours comprenait nécessairement des jours de R.T.T. par déduction des jours travaillés et des repos légaux hebdomadaires des 365 jours d'une année.
La cour rappelle qu'en l'état de la nullité de la convention de forfait, le paiement des jours de R.T.T. accordés au salariés en exécution de ladite convention devient indû, de sorte que l'employeur peut en demander le remboursement auprès du salarié.
En l'espèce, l'employeur verse au débat un tableau faisant état de :
- 5,831 jours de R.T.T. sur la période allant du 1er novembre 2014 au 31 mai 2015 au taux brut de 122,21 euros par jour,
- 10 jours de R.T.T. sur la période allant du 1er juin 2015 au 31 mai 2015 aux taux brut de 122,21 euros par jour,
- 13,275 jours de R.T.T. sur la période allant du 1er novembre 2014 au 31 mai 2015 au taux brut de 131,71 euros par jour,
soit un total de 29,106 jours de R.T.T. représentant une somme totale de 3 683,16 euros.
La cour observe que si la salariée procède par affirmation de principes, elle ne démontre aucunement qu'une erreur affecte le décompte produit par l'employeur.
Dans ces conditions, et par infirmation du jugement déféré, Mme [YC] sera condamnée à payer à la S.A.S. Louis Pion la somme de 3 686,16 euros au titre des jours de R.T.T.
7. Sur le rappel de salaire sur la prime d'activité :
La salariée précise qu'une prime d'activité lui était versée chaque année en décembre et qu'elle ne l'a pas perçue pour l'année 2017 alors que ses résultats n'ont jamais été remis en cause. Elle explique que la somme de 750 euros correspond au montant de sa prime N-1.
En réponse, l'employeur fait valoir que la demande n'est ni explicitée, ni justifiée.
Au soutien de sa demande, Mme [YC] verse au débat l'avenant à son contrat de travail du 22 septembre 2003 comportant un article 5. Rémunération, rédigé comme suit :
'En contrepartie de l'accomplissement de ses fonctions, le salarié percevra un salaire mensuel brut de 1 491,96 € et une prime d'1/24ème de 62,16 €, soit 1 554,12 € brut fixe pour 151,67 heures par mois.
Il percevra également une commission égale à 1% de son chiffre d'affaires H.T. réalisé comprenant le 1/24ème, ainsi que 0,5 % du chiffre d'affaires T.T.C. du magasin et ce à partir d'un C.A. mensuel minimum de 38 112,25 € T.T.C. comprenant le 1/24ème et 0,5% du chiffre d'affaires T.T.C. du magasin comprenant le 1/24ème sur les objectifs à réaliser.
La Direction se réserve également le droit, de manière unilatérale, de verser au salarié des primes à titre exceptionnel en fonction du mérite professionnel du salarié au cours de l'année.
La rémunération fixe et variable mentionnée ci-dessus a été déterminée au-delà des minima conventionnels et intègre la prime de 1/24ème prévue à l'article 38 de la convention collective.'
La salariée produit également les copies de ses bulletins de salaire des mois de décembre 2013 à 2016, qui sont toutefois illisibles et donc inexploitables.
En l'état des éléments versés au débat, la salariée ne démontre pas qu'une prime d'activité lui était versée chaque année au mois de décembre d'une part, et que la somme de 750 euros brut lui était due à ce titre au regard des chiffres réalisés d'autre part.
Le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu'il a débouté Mme [YC] de sa demande sur ce fondement.
8. Sur les intérêts :
La cour dit que les sommes de nature salariale portent intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, les autres sommes portant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Par ailleurs, en application de l'article 1343-2 du code civil, les intérêts échus pour une année entière seront eux-même productifs d'intérêts pour les sommes dues à la salariée.
9. Sur les autres demandes :
Mme [YC], qui succombe partiellement, sera condamnée au paiement des dépens, en ce compris les dépens de première instance.
Par ailleurs, il n'est pas inéquitable de laisser à sa charge ses frais irrépétibles non compris dans les dépens ; elle sera donc déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
INFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté Mme [LJ] [YC] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice distinct, de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé et de sa demande au titre de la prime d'activité 2017,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
DIT que le licenciement est fondé sur une faute grave,
En conséquence,
DEBOUTE Mme [LJ] [YC] de sa demande tendant à dire que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse et de ses demandes d'indemnisation à titre :
- de rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire et de congés payés afférents,
- de rappel de salaire sur la prime d'ancienneté,
- d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents,
- d'indemnité de licenciement,
- d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
PRONONCE la nullité de la convention de forfait signée le 5 mai 2006,
CONDAMNE la S.A.S. Louis Pion à payer à Mme [LJ] [YC] la somme de 1 656 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires outre celle de 165,60 euros au titre des congés payés afférents,
CONDAMNE Mme [LJ] [YC] à payer à la S.A.S. Louis Pion la somme de 3 686,16 euros au titre des jours de réduction du temps de travail,
DIT que les sommes sont exprimées en brut,
DIT que les sommes de nature salariale portent intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, les autres sommes portant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
DIT que les intérêts échus pour une année entière seront eux-même productifs d'intérêts,
REJETTE la fin de non-recevoir tirée de la nouveauté de la demande de remboursement des jours de réduction du temps de travail,
CONDAMNE Mme [LJ] [YC] au paiement des dépens, en ce compris les dépens de première instance,
DEBOUTE Mme [LJ] [YC] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT