La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/04/2024 | FRANCE | N°24/00048

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-11 ho, 11 avril 2024, 24/00048


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Hospitalisation sans consentement

1-11 HO





ORDONNANCE

DU 11 AVRIL 2024



N° 2024/0048







Rôle N° RG 24/00048 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BM2XS







[B] [V]





C/



MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

MONSIEUR LE PREFET DES BOUCHES-DU-RHÔNE

ARS Provence - Alpes - Côte d'Azur (anciennement DRASS)

MONSIEUR LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER [9]





r>


Copie adressée :

par télécopie le :

11 Avril 2024

à :

-Le patient

-Le directeur

-L'avocat

-Le préfet

au Ministère Public











Décision déférée à la Cour :



Ordonnance rendue par le Juge des liberté...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Hospitalisation sans consentement

1-11 HO

ORDONNANCE

DU 11 AVRIL 2024

N° 2024/0048

Rôle N° RG 24/00048 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BM2XS

[B] [V]

C/

MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

MONSIEUR LE PREFET DES BOUCHES-DU-RHÔNE

ARS Provence - Alpes - Côte d'Azur (anciennement DRASS)

MONSIEUR LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER [9]

Copie adressée :

par télécopie le :

11 Avril 2024

à :

-Le patient

-Le directeur

-L'avocat

-Le préfet

au Ministère Public

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 29 Mars 2024 enregistrée au répertoire général sous le n°24/354.

APPELANT

Monsieur [B] [V]

né le 28 Avril 1981 à [Localité 6] (SOUDAN),

Foyer [5], [Adresse 4]

Actuellement hospitalisé au centre hospitalier [9] de [Localité 8];

Comparant en personne, assisté de Me Emeline GIORDANO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, commis d'office;

INTIMES :

MONSIEUR LE PREFET DES BOUCHES-DU-RHÔNE, demeurant [Adresse 7]

Non comparant;

MONSIEUR LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER DE [9], demeurant [Adresse 3]

Non comparant;

PARTIE JOINTE:

MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE, demeurant Cour d'Appel - [Adresse 2]

Non comparant;

*-*-*-*-*

DÉBATS

L'affaire a été débattue le 09 Avril 2024, en audience publique, devant M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller, délégué par ordonnance du premier président, en application des dispositions de l'article L.3211-12-4 du code de la santé publique,

Greffier lors des débats : Madame Ida FARKLI,

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Avril 2024.

ORDONNANCE

Réputée contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 11 Avril 2024 à 18h15,

Signée par M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller, et Madame Ida FARKLI, greffier présent lors du prononcé.

SUR QUOI,

M. [N] [B] [V] a fait l'objet le 26 janvier 2024 d'une admission en urgence en soins psychiatriques et en hospitalisation complète au sein du centre hospitalier régional [9] de [Localité 8], à la demande du représentant de l'Etat dans le département après admission provisoire initiale en soins psychiatriques sur décision du Maire de la commune de [Localité 8] le 25 janvier 2024, dans le cadre des dispositions des articles L3213-1 et L3213-2 du code de la santé publique, au vu d'un certificat médical daté du 25 janvier 2024 du Docteur [P] [W]. Ce praticien indiquait que l'intéressé présentait un état délirant aigu marqué par une désorganisation de la pensée, avec une activité délirante à mécanisme intuitif et interprétatif et à thème de persécution. Il précisait que le susnommé souffrait de schizophrénie et était connu des services psychiatriques depuis 2014. Il estimait que son état psychique compromettait l'ordre public ou la sûreté des personnes et nécessitait une hospitalisation.

Par ordonnance rendue le 6 février 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Marseille, saisi dans le cadre du contrôle obligatoire prévu aux articles L3211-12-1 et suivants du même code, a estimé que la mesure de soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète restait fondée.

Cette décision a été confirmée par la cour d'appel le 20 février 2024.

Le 18 mars 2024, M. [B] [V] a adressé au juge des libertés et de la détention de Marseille une demande de mainlevée de la mesure d'hospitalisation contrainte sous la forme complète.

Par ordonnance en date du 29 mars 2024, le juge des libertés et de la détention de Marseille a rejeté la demande de l'intéressé.

Par mail reçu au greffe de la cour d'appel le 5 avril 2024 à 11h15, M. [V] a formé appel de la décision précitée.

A l'audience, M. [N] [B] [V] ne s'est pas opposé à la publicité des débats. Il a en outre déclaré:

'Je suis né au Soudan, je suis de nationalité soudanaise. J'ai une adresse [Adresse 4], foyer [5] [Localité 1] (boîte aux lettres bis).Je n'ai pas besoin des soins. J'ai demandé d'abord la permission pour aller au travail, cela a été refusé, puis la permission pour retourner chez moi, cela a été refusé. Je suis renté à l'hôpital, personne ne peut le dire, on m'a jeté dans l'hôpital et voilà.

Le 8 j'ai eu une autorisation de sortie. Je suis sorti deux fois, et deux fois le médecin a dit que c'était interdit de venir chez moi. Du 26 jusqu'à aujourd'hui je ne suis pas retourné chez moi. Je respecte les consignes. Elle dit cela car elle ne sait pas quoi dire de nouveau pour le tribunal. J'ai discuté avec l'infirmière, je ne fais pas mal, je suis toujours calme. Je ne peux pas payer pour l'école, une fille, un garçon, j'ai des problèmes avec la CAF, avant de venir ici j'avais des problèmes pour payer mon loyer. Je suis à l'hôpital depuis janvier. Je suis au foyer depuis juin. Je veux comprendre, c'est ce que j'ai écrit : pourquoi ' Je suis retourné à l'hôpital en août 2023 juste pour récupérer les dossiers médicaux de 2019. J'ai récupéré les papiers, j'ai payé 28 euros pour la photocopie. Sur les trois premières semaines, il n'y a rien. La femme a appelé une autre personne pour que je puisse parler. J'ai gardé dans le téléphone les paroles de l'autre Monsieur.'

Maître Emeline GIORDANO, avocate de M. [V], a été entendue en ses observations. Elle rappelle que ce dernier conteste la mesure d'hospitalisation. Elle expose en outre que la procédure est irrégulière, faute pour le préfet d'avoir produit les pièces visées à l'articel R3211-12 du code de la santé publique, notamment les décisions préfectorales maintenant l'hospitalisation. Au fond, elle ajoute que les permissions de sortie accordées à l'appelant attestent du défaut de caractérisation des conditions de l'hospitalisation sous la forme complète. Elle sollicite la mainlevée de la mesure.

Le directeur de l'hôpital [9], régulièrement convoqué, n'était ni présent, ni représenté.

De la même manière, le préfet des Bouches-du-Rhône, régulièrement convoqué, n'était ni présent, ni représenté.

Enfin, le procureur général, régulièrement avisé, n'était pas représenté et n'a pas communiqué de conclusions écrites.

MOTIFS

1) Sur la forme

Selon les dispositions de l'article R3211-18 du code de la santé publique, 'L'ordonnance est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel ou son délégué, dans un délai de dix jours à compter de sa notification.Le ministère public peut, dans tous les cas, interjeter appel dans le même délai.'

Aux termes des dispositions de l'article R3211-19 du même code, 'Le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel. La déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l'heure.

Le greffier de la cour d'appel avise sur-le-champ le greffier du tribunal judiciaire qui lui transmet sans délai le dossier.

Le greffier de la cour d'appel fait connaître par tout moyen la date et l'heure de l'audience aux parties, à leurs avocats et, lorsqu'ils ne sont pas parties, au tiers qui a demandé l'admission en soins et au directeur d'établissement. Les deux derniers alinéas de l'article R. 3211-13 sont applicables.'

En l'espèce, l'ordonnance querellée a été rendue le 29 mars 2024. M. [V] a interjeté appel par mail adressé au greffe de la cour le 5 avril 2024 à 11 heures 15. Son recours sera donc déclaré recevable.

2) Sur le moyen tiré du défaut de communication des pièces visées à l'article R3211-12 du code de la santé publique

Selon les dispositions de l'article R3211-27 du code de la santé publique, 'Le directeur d'établissement, soit d'office, soit sur invitation du juge, communique par tout moyen, dans un délai de cinq jours à compter de l'enregistrement de la requête, les pièces prévues à l'article R. 3211-12.'

Cette dernière disposition prévoit que:

'Sont communiqués au juge des libertés et de la détention afin qu'il statue :

1° Quand l'admission en soins psychiatriques a été effectuée à la demande d'un tiers ou en cas de péril imminent, une copie de la décision d'admission motivée et, le cas échéant, une copie de la décision la plus récente ayant maintenu la mesure de soins, les nom, prénoms et adresse du tiers qui a demandé l'admission en soins ainsi qu'une copie de sa demande d'admission ;

2° Quand l'admission en soins psychiatriques a été ordonnée par le préfet, une copie de l'arrêté d'admission en soins psychiatriques et, le cas échéant, une copie de l'arrêté le plus récent ayant maintenu la mesure de soins ;

3° Quand l'admission en soins psychiatriques a été ordonnée par une juridiction, une copie de la décision et de l'expertise mentionnées à l'article 706-135 du code de procédure pénale ;

4° Une copie des certificats et avis médicaux prévus aux chapitres II à IV du titre Ier du livre II de la troisième partie de la partie législative du présent code, au vu desquels la mesure de soins a été décidée et de tout autre certificat ou avis médical utile, dont ceux sur lesquels se fonde la décision la plus récente de maintien des soins ;

5° Le cas échéant :

a) L'avis du collège mentionné à l'article L. 3211-9 ;

b) L'avis d'un psychiatre ne participant pas à la prise en charge de la personne qui fait l'objet de soins, indiquant les motifs médicaux qui feraient obstacle à son audition.

Le juge peut solliciter la communication de tous autres éléments utiles.'

Il sera observé que le juge des libertés et de la détention a été saisi par M. [V] d'une demande de mainlevée de la mesure d'hospitalisation sous la forme complète, soit dans le cadre d'un contrôle facultatif de la mesure. Il résulte des dispositions susvisées que même dans ce cadre, le directeur du centre hospitalier doit communiquer au juge les pièces visées à l'article R3211-12 du code de la santé publique, dont la vocation est de lui permettre d'apprécier la régularité de la procédure. Néanmoins, il importe de relever que le code de la santé publique n'assortit le défaut de production des pièces visées à cet article d'aucune sanction.

En l'espèce, comme indiqué précédemment, M. [V] a été admis en soins psychiatriques sous la forme complète le 25 janvier 2024 sur décision initiale du maire de la commune de [Localité 8], entérinée par le préfet des Bouches-du-Rhône le 26 janvier 2024, l'intéressé compromettant la sûreté des personnes, sur la base d'un certificat médical du Docteur [W], mesure dont la poursuite a été autorisée par le juge des libertés et de la détention de Marseille le 6 février dernier, décision confirmée par la juridiction de céans le 20 février.

Le moyen sera donc rejeté.

3) Sur le fond

Selon les dispositions de l'article L3213-1 du code de la santé publique, 'I.-Le représentant de l'Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil, l'admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l'admission en soins nécessaire. Ils désignent l'établissement mentionné à l'article L. 3222-1 qui assure la prise en charge de la personne malade.

Le directeur de l'établissement d'accueil transmet sans délai au représentant de l'Etat dans le département et à la commission départementale des soins psychiatriques mentionnée à l'article L. 3222-5 :

1° Le certificat médical mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 3211-2-2 ;

2° Le certificat médical et, le cas échéant, la proposition mentionnés aux deux derniers alinéas du même article L. 3211-2-2.

II.-Dans un délai de trois jours francs suivant la réception du certificat médical mentionné à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 3211-2-2, le représentant de l'Etat dans le département décide de la forme de prise en charge prévue à l'article L. 3211-2-1, en tenant compte de la proposition établie, le cas échéant, par le psychiatre en application du dernier alinéa de l'article L. 3211-2-2 et des exigences liées à la sûreté des personnes et à l'ordre public. Il joint à sa décision, le cas échéant, le programme de soins établi par le psychiatre.

Dans l'attente de la décision du représentant de l'Etat, la personne malade est prise en charge sous la forme d'une hospitalisation complète.

III.-Lorsque la proposition établie par le psychiatre en application de l'article L. 3211-2-2 recommande une prise en charge sous une autre forme que l'hospitalisation complète, le représentant de l'Etat ne peut modifier la forme de prise en charge des personnes mentionnées au II de l'article L. 3211-12 qu'après avoir recueilli l'avis du collège mentionné à l'article L. 3211-9.

IV.-Les mesures provisoires, les décisions, les avis et les certificats médicaux mentionnés au présent chapitre figurent sur le registre mentionné à l'article L. 3212-11.'

En l'espèce, dans son avis du 8 avril 2024, le docteur [K] relève chez M. [V] un contact froid avec une hostilité contenue. Elle souligne au premier plan des idées délirantes de persécution englobant la police, les services sociaux et l'hôpital fomentant un complot contre lui. Elle précise que l'intéressé adhère totalement au délire de type intuitif et interprétatif. Elle ajoute que M. [V] nie les troubles l'affectant et l'hétéro-agressivité dont il a pu faire preuve à domicile. Elle argue de son refus d'adapter son traitement. Elle préconise la poursuite de l'hospitalisation contrainte sous la forme complète.

Ces constatations établissent que les conditions de l'article L3213-1 du code de la santé publique sont toujours réunies.

C'est donc à bon droit que le premier juge a rejeté la demande de mainlevée de l'hospitalisation contrainte sous la forme complète de M. [B] [V].

Aussi, l'ordonnance entreprise sera confirmée.

Les dépens seront laissés à la charge du Trésor public en application de l'article R 93-2° du code de procédure pénale.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision réputée contradictoire, rendue en dernier ressort,

Déclarons recevable mais non fondé l'appel formé par M. [B] [V],

Confirmons la décision déférée rendue le 29 Mars 2024 par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE.

Laissons les dépens à la charge du trésor public.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-11 ho
Numéro d'arrêt : 24/00048
Date de la décision : 11/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-11;24.00048 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award