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10/04/2024 | FRANCE | N°21/12461

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-11 op, 10 avril 2024, 21/12461


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 OP



ORDONNANCE SUR CONTESTATION

D'HONORAIRES D'AVOCATS

DU 10 AVRIL 2024



N°2024/ 0075















Rôle N° RG 21/12461 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BH73C





[N] [D]





C/



S.A.R.L. 5 EXPERIENCE





































Copie exécutoire délivrée

le : 10 avril 2024r>




à :



Maître [N] [D]



Décision déférée au Premier Président de la Cour d'Appel:



Décision fixant les honoraires de Me [N] [D] rendue le

21 Juillet 2021 par le Bâtonnier de l'ordre des avocats de NICE.





DEMANDEUR



Maître [N] [D],

demeurant [Adresse 1]



comparant en personne





DEFENDERESSE...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 OP

ORDONNANCE SUR CONTESTATION

D'HONORAIRES D'AVOCATS

DU 10 AVRIL 2024

N°2024/ 0075

Rôle N° RG 21/12461 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BH73C

[N] [D]

C/

S.A.R.L. 5 EXPERIENCE

Copie exécutoire délivrée

le : 10 avril 2024

à :

Maître [N] [D]

Décision déférée au Premier Président de la Cour d'Appel:

Décision fixant les honoraires de Me [N] [D] rendue le

21 Juillet 2021 par le Bâtonnier de l'ordre des avocats de NICE.

DEMANDEUR

Maître [N] [D],

demeurant [Adresse 1]

comparant en personne

DEFENDERESSE

S.A.R.L. 5 EXPERIENCE,

demeurant C/O SOFT CONSULTING - [Adresse 2]

représentée par Me Julien CHAMARRE, avocat au barreau de NICE substitué par Me Matthieu BOTTIN, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ

L'affaire a été débattue le 24 Janvier 2024 en audience publique devant

M. Ghani BOUGUERRA, Président,

délégué par ordonnance du Premier Président .

Greffier lors des débats : Madame Anaïs DOVINA et Madame Justine MICHEL, greffier stagiaire.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Mars 2024.

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 26 Mars 2024 prorogée au 10 avril 2024.

Signée par M. Ghani BOUGUERRA, Président et Madame Anne-Marie BLANCO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Par courrier recommandé en date du 19 août 2021, reçu au greffe le 20 août 2021, Maître [N] [D] a relevé appel de la décision rendue le 21 juillet 2021, par le Bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Nice, disant irrecevable sa demande de taxation, en raison de sa prescription, et la rejetant comme étant injustifiée.

Après de très nombreux renvois, l'affaire a pu être évoquée à l'audience du 24 janvier 2024.

Maître [N] [D] soutient ses conclusions, auxquelles il est expressément renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, et demande à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de taxe rendue par le Bâtonnier de Nice le 21 juillet 2021,

- déclarer l'action recevable,

- débouter l'intimée de toutes ses demandes,

- condamner la SARL 5 EXPERIENCE à lui payer la somme de 103 600 € TTC, avec intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 1er juillet 2020,

Subsidiairement,

- dire et juger qu'il à effectué 280 heures de travail à 300 €/heure et condamner la SARL 5 EXPERIENCE à lui payer la somme de 103 600 € TTC, avec intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 1er juillet 2020,

- condamner la SARL 5 EXPERIENCE à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Me [N] [D] indique avoir été mandaté par la SARL 5 EXPERIENCE, selon contrat de mission et de rémunération en date du 20 août 2015, pour des prestations comprenant 'le conseil, la tenue de rendez-vous, la rédaction d'actes, les sessions de signatures de tous documents juridiques, la représentation et l'assistance du client et de toute personne représentant les intérêts du client'.

Il précise que, outre l'honoraire de base de 6 000 € TTC, les parties sont convenues d'éventuels honoraires complémentaires, pour tout dossier particulier ou complexe, ainsi que d'un honoraire de résultat fixé à 5% du prix des adjudications obtenues par la SARL 5 EXPERIENCE, soit une somme de 100 320 € TTC.

Il affirme avoir accompli les diligences nécessaires et avoir émis une facture des sommes convenues le 19 décembre 2015.

N'ayant obtenu aucun réglement, et sa mise en demeure en date du 1er juillet 2020 étant restée sans effet, il a sollicité la taxation de ses honoraires auprès du Bâtonnier de Nice par requête du 18 décembre 2020.

Elle critique la décision du Bâtonnier en ce qu'il a considéré, à tort, que l'action en taxation d'honoraires était prescrite alors même que les diligences se sont poursuivies jusqu'au 28 avril 2016.

La SARL 5 EXPERIENCE, par son Conseil, demande à la cour, par conclusions auxquelles il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, de :

- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de taxe rendue le 21 juillet 2021 par le Bâtonnier de l'Ordre des avocats au Barreau de Nice,

En conséquence,

- déclarer prescrite l'action de Me [D] contre la SARL 5 EXPERIENCE,

- débouter Me [D] de toutes ses demandes,

- condamner Me [D] au paiement de la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle soutient que la facture émise le 19 décembre 2015 constitue une facture de fin de mission, récapitulant les diligences accomplies par Me [D] entre le 1er juin et le 19 décembre 2015.

Elle émet des doutes sur la réalité ou l'étendue des diligences effectuées lesquelles, en tout état de cause, sont antérieures à la date d'émission de la facture.

Ainsi, la prescription quinquennale est acquise.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'appel :

Intervenu dans le délai légal, le présent recours sera déclaré recevable comme satisfaisant aux conditions prévues par l'article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991.

Sur l'irrecevable en raison de la prescription de l'action :

Il n'est pas contestable que l'action en recouvrement de ses honoraires par un avocat se precrit par cinq ans.

Il est, désormais, acquis en jurisprudence que la prescription de ladite action court à compter de la date à laquelle la mission de l'avocat prend fin.

En l'espèce, si Me [N] [D] a émis une facture d'honoraires le 19 décembre 2015, sa mission s'est poursuivie au-delà de cette date comme en témoignent les pièces versées aux débats.

Au surplus, et comme le reconnaît l'intimée elle-même, l'émission d'une facture d'honoraires ne signe pas pour autant la fin de mission d'un Conseil.

La demande de taxation d'honoraires a été présentée par Me [N] [D] au Bâtonnier de Nice le 18 décembre 2020 et n'est, dès lors, pas atteinte par la prescription pour être intervenues moins de cinq ans après la cessation de la mission confiée.

Il est, en effet, démontré que Me [N] [D] a effectué des diligences pour le compte de la SARL 5 EXPERIENCE, au-delà du 19 décembre 2015, faute de quoi cele-ci aurait perdu le bénéfice des adjudications ordonnées par le tribunal de Grasse le 9 juillet 2015.

Ainsi, il apparaît clairement que Me [N] [D] est intervenu auprès de différents protagonistes jusqu'à, au moins, la date du 19 février 2016 et, vraisemblablement, jusqu'au 28 avril 2016.

Aux termes de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971, les honoraires de postulation, de consultation, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client.

Sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.

Les honoraires tiennent compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.

Il n'appartient pas au juge de l'honoraire d'apprécier, même de manière indirecte, les critiques émises sur la qualité de sa prestation par le client.

La mission du juge de l'honoraire consiste, seulement, à vérifier la réalité des prestations de l'avocat puis d'apprécier le montant des honoraires correspondants.

Maître [N] [D] justifie des diligences accomplies pour le compte de la SARL 5 EXPERIENCE et qui ont permis à celle-ci d'être adjudicataires d'ensembles immobiliers de valeur et d'en conserver le bénéfice malgré le défaut de règlement, jusqu'au premier trismestre 2026, des frais des ventes aux enchères.

Il ne peut être, décemment, contesté que les interventions de Me [N] [D] ont été déterminantes dans la sauvegarde des intérêts pécuniaires de la SARL 5 EXPERIENCE.

Dans ses écritures, la SARL 5 EXPERIENCE reconnaît, expressément, que Me [D] a rédigé un acte d'avocat de garantie d'actif et du passif en date du 26 février 2016, faisant ainsi l'aveu de la poursuite de ses diligences au-delà de la facture du 19 décembre 2015 et toujours dans le périmètre des missions définies dans le contrat de mission et de rémunération liant les parties.

Enfin, la SARL 5 EXPERIENCE ne peut contester avoir bien pris en compte le montant des honoraires dûs à Me [D] en les portant au bilan comptable de l'année 2015 en dette fournisseur.

Il convient, d'ailleurs, de relever que le Bâtonnier de Nice souligne, dans son ordonnance, que la SARL 5 EXPERIENCE 'ne conteste pas véritablement, dans son courrier du 8 juillet 2020, être redevable d'honoraires' mais demande uniquement à ce que le montant réclamé soit justifié.

Or, s'agissant d'un honoraire de résultat basé sur un pourcentage des intérêts financiers en jeu, la survenance du résultat escompté suffit à justifier du bien fondé de la demande d'honoraires de Me [D].

Il convient, en conséquence, d'infirmer la décision dont appel et de fixer le montant des honoraires dûs à Me [N] [D] à la somme de 100 320 € TTC, montant dont il avait sollicité la taxation, outre intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 1er juillet 2020.

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Maître [N] [D] et de lui allouer la somme de 1 500 € de ce chef.

La SARL 5 EXPERIENCE supportera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement en matière de contestation d'honoraires d'avocat,

DECLARONS recevable le recours formé par Maître [N] [D] à l'encontre de la décision du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Nice en date du 21 juillet 2021,

FIXONS à la somme de 100 320 € TTC les honoraires dûs par la SARL 5 EXPERIENCE à Me [N] [D],

CONDAMNONS la SARL 5 EXPERIENCE au paiement de la somme de 100 320 € TTC, laquelle sera assortie de l'intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 1er juillet 2020.

CONDAMNONS la SARL 5 EXPERIENCE à payer à Me [N] [D] la somme de 1 500 €, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNONS la SARL 5 EXPERIENCE aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-11 op
Numéro d'arrêt : 21/12461
Date de la décision : 10/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-10;21.12461 ?
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