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04/04/2024 | FRANCE | N°23/07435

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 04 avril 2024, 23/07435


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 04 AVRIL 2024

mm

N° 2024/ 126













N° RG 23/07435 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLMO5







[P] [B]





C/



[C] [X]



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Diane ECCLI



la SELARL CABINET DEBEAURAIN & ASSOCIÉS




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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal paritaire des baux ruraux de TOULON en date du 19 Mai 2023 enregistré au répertoire général sous le n° 23/204.



APPELANT



Monsieur [P] [B]

demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Diane ECCLI, avocat au barreau de TOULON, plaidant





INTIME



M...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 04 AVRIL 2024

mm

N° 2024/ 126

N° RG 23/07435 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLMO5

[P] [B]

C/

[C] [X]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Diane ECCLI

la SELARL CABINET DEBEAURAIN & ASSOCIÉS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal paritaire des baux ruraux de TOULON en date du 19 Mai 2023 enregistré au répertoire général sous le n° 23/204.

APPELANT

Monsieur [P] [B]

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Diane ECCLI, avocat au barreau de TOULON, plaidant

INTIME

Monsieur [C] [X]

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Julien DUMOLIE de la SELARL CABINET DEBEAURAIN & ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Flore SCHINTONE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Février 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Marc MAGNON, Président, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Président

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2024

Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DES FAITS ET PROCEDURE :

Par contrat de bail à ferme en date du 1er novembre 2017, [P] [B] à donné à bail à [C] [X] deux parcelles de terre cadastrées section [Cadastre 4] et [Cadastre 3], lieudit [Adresse 7] (83), d'une superficie respective de 26 ares 50 centiares et 34 ares 34 centiares, au total 60 ares 84 centiares, moyennant un fermage annuel de 5000,00 euros payable à terme échu .

Ces deux parcelles, bien que le bail n'en fasse pas mention, supportent des serres d'une superficie de 3200 m².

Monsieur [X] a entrepris d'y produire de la spiruline.

Le 17 août 2002 un orage de grêle s'est abattu sur ces parcelles détruisant en quasi totalité la couverture des serres , seules quelques plaques de verre étant épargnées.

Par exploit d'huissier du 6 janvier 2023 , Monsieur [X] a fait assigner Monsieur [B] en référé devant le président du tribunal paritaire ds baux ruraux de Toulon pour voir :

' CONDAMNER Monsieur [B] à reconstruire et remettre en état les serres à hauteur des sommes versées par sa compagnie d'assurance ;

' CONDAMNER Monsieur [B] à libérer les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 3], de la commune de [Localité 6], de ses véhicules, bateaux, et effets personnels ;

' Le CONDAMNER à laisser à Monsieur [B] la libre jouissance des parcelles AZ5 ET AZ9 de la commune de [Localité 6] ;

' CONDAMNER Monsieur [B] à une astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

' Le CONDAMNER aux entiers dépens d'instance ainsi qu'à la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

L'affaire ayant été renvoyée à huit jours pour permettre au conseil du bailleur de prendre connaissance des pièces notifiées la veille de l'audience , par conclusions déposées à l'audience, Monsieur [X] a maintenu ses demandes et sollicité la désignation d'un expert aux fins notamment de chiffrer le coût de la remise en état du groupe de serres ; de proposer toutes solutions techniques possibles en fonction de l'indemnité d'assurance perçue par M [B] ; de procéder à toutes vérifications en diagnostic sur la présence d'amiante et se prononcer sur les mesures nécessaires et le coût aux fins de désamiantage.

Par référence à ses conclusions déposées à l'audience , Monsieur [B] a demandé au juge des référés de relever son incompétence pour statuer sur les demandes de M [X] qui se heurtent à une contestation sérieuse, de déclarer les demandes de M [X] irrecevables et de le renvoyer à mieux se pourvoir au fond ; de le débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ; de le condamner à payer à Monsieur [B] la somme de 3959 euros au titre des loyers impayés au 17 août 2022, avec intérêts à compter du 5 janvier 2023 au taux légal puis au taux légal majoré ; de condamner Monsieur [X] à entretenir les lieux loués à Monsieur [B] et notamment de les débroussailler, et d'avoir à en justifier par communication d'une pièce probante , et cela sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de 8 jours suivant la signification de la décision à intervenir compte tenu du risque encouru et de l'inertie fautive de Monsieur [X] pourtant déjà alerté ; de condamner Monsieur [X] à payer à Monsieur [B] la somme de 2000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par ordonnance du 19 mai 2023, la présidente du tribunal paritaire des baux ruraux de Toulon a statué dans les termes suivants :

« CONDAMNONS Monsieur [P] [B] à réparer les dégâts causés par la grêle du 17 août 2022 sur les serres, à hauteur des sommes versées par sa compagnie d'assurance;»

« ORDONNONS une expertise et COMMETTONS à cet effet Monsieur [Z] [S], expert assermenté inscrit sur la liste de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, qui sera autorisé à recourir en cas de nécessité à tout sapiteur de son choix après transmission d'un devis au greffe du service du contrôle des expertises, avec la mission suivante :

- se rendre sur place après avoir convoqué les parties ou leurs conseils ;

- se faire remettre par les parties ou, en cas de besoin, par les tiers, tout document utile à l'accomplissement de sa mission ;

- décrire les serres sises section [Cadastre 4] et section « [Cadastre 5] »(SIC) à [Localité 6], et notamment leur état après les dégâts causés par la grêle tombée le 17 août 2022,

- proposer et préconiser toutes solutions techniques possibles en fonction de l'indemnité d'assurance perçue par Monsieur [B],

- chiffrer le coût de la remise en état du groupe de serres selon les différentes solutions techniques,

- procéder à toutes vérifications en diagnostic sur la présence d'amiante,

- se prononcer sur les mesures nécessaires et le coût aux fins de désamiantage,

- donner toutes indications sur les risques sanitaires,

- plus généralement, faire toutes constatations et remarques utiles de nature à éclairer

la religion du tribunal ;

DISONS que l'expert adressera un pré-rapport aux parties avant le dépôt du rapport définitif;

DISONS que toute difficulté sera soumise au juge du contrôle des expertises ;

DISONS que la consignation à valoir sur le montant des frais d'expertise, d'un montant de 1 000 euros, doit être versée à la régie du Tribunal judiciaire de Toulon dans le mois de la présente décision par Monsieur [C] [X], demandeur à la mesure ;

DISONS que l'expert devra déposer son rapport auprès du greffe du juge chargé du contrôle des expertises et le communiquer aux parties dans le délai de deux mois à compter du versement de la consignation, accompagné d'une attestation de mission dûment renseignée ;

DISONS qu'il appartiendra en tant que de besoin aux parties de saisir le tribunal paritaire des baux ruraux après le dépôt du rapport ; »

« DEBOUTONS Monsieur [C] [X] de sa demande de condamnation de Monsieur [B] au titre de la libération des parcelles ; »

« DEBOUTONS Monsieur [P] [B] de sa demande au titre des loyers impayés au 17 août 2022 ; »

« CONDAMNONS Monsieur [C] [X] à débroussailler les parcelles AZ5 et AZ9 dans le délai de quinze jours à compter de la présente décision, sous astreinte de 40 euros par jour de retard ; »

« CONDAMNONS Monsieur [P] [B] aux entiers dépens de l'instance ; »

« CONDAMNONS Monsieur [P] [B] à verser à Monsieur [C] [X] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; »

« RAPPELONS l'exécution provisoire de droit des ordonnances de référé; »

« REJETONS tous autres chefs de demande, plus amples ou contraires »

Par lettre recommandée du 2 juin 2023 reçue le 5 juin 2023, Monsieur [P] [B] a relevé appel de cette ordonnance .

L'affaire a fait l'objet d'un calendrier de procédure et a été fixée au 5 février 2024 pour être plaidée.

Au delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l'espèce des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la cour entend se référer pour l'exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessous.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

Vu les conclusions notifiées le 4 février 2024 par [P] [B] tendant à :

Vu l'article L411-30 du Code rural et de la pêche maritime,

Vu les articles 9, 893 et 894 du Code de Procédure Civile,

Vu l'article 1353 du Code civil,

Vu l'article 1728 du Code civil,

Vu les articles 1240 et 1241 du Code civil,

Vu la jurisprudence applicable,

CONFIRMER l'ordonnance du 19 mai 2023 du Juge des référés près le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de Toulon en ce qu'elle indique « DEBOUTONS Monsieur [C] [X] de sa demande de condamnation de Monsieur [B] au titre de la libération des parcelles ; » « REJETONS tous autres chefs de demande, plus amples ou contraires » s'agissant des demandes de Monsieur [X], et ainsi la confirmer en ce qu'elle a débouté Monsieur [X] de ses demandes de condamner Monsieur [B] à libérer les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 3], de la commune de [Localité 6], de ses véhicules, bateaux, et effets personnels, de le condamner à lui laisser la libre jouissance des parcelles AZ5 ET AZ9 de la commune de [Localité 6], d'assortir ses demandes d'une condamnation sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

CONFIRMER ladite ordonnance en ce qu'elle indique :« CONDAMNONS Monsieur [C] [X] à débroussailler les parcelles AZ5 et AZ9 dans le délai de quinze jours à compter de la présente décision, sous astreinte de 40 euros par jour de retard ; » excepté quant audit montant car le montant de 200 € requis par M [B] est plus adapté à des fins comminatoires vu le risque encouru ;

CONFIRMER ladite ordonnance en ce qu'elle indique dans l'hypothèse où elle ordonnerait une expertise : « DISONS que la consignation à valoir sur le montant des frais d'expertise, d'un montant de 1 000 euros, doit être versée à la régie du Tribunal judiciaire de Toulon dans le mois de la présente décision par Monsieur [C] [X], demandeur à la mesure ; »

INFIRMER ladite ordonnance en ce qu'elle indique :

« CONDAMNONS Monsieur [P] [B] à réparer les dégâts causés par la grêle du 17 août 2022 sur les serres, à hauteur des sommes versées par la compagnie d'assurance »

« ORDONNONS une expertise et COMMETTONS à cet effet Monsieur [Z] [S], expert assermenté inscrit sur la liste de la cour d'appel d'Aix-en- Provence, qui sera autorisé à recourir en cas de nécessité à tout sapiteur de son choix après transmission d'un devis au greffe du service du contrôle des expertises, avec la mission suivante :

-se rendre sur place après avoir convoqué les parties ou leurs conseils ;

-se faire remettre par les parties ou, en cas de besoin, par les tiers, tout document utile à l'accomplissement de sa mission ;

-décrire les serres sises section [Cadastre 4] et section [Cadastre 5] à [Localité 6], et notamment leur état après les dégâts causés par la grêle tombée le 17 août 2022,

-proposer et préconiser toutes solutions techniques possibles en fonction de l'indemnité d'assurance perçue par Monsieur [B],

-chiffrer le coût de la remise en état du groupe de serres selon les différentes solutions techniques,

-procéder à toutes vérifications en diagnostic sur la présence d'amiante,

-se prononcer sur les mesures nécessaires et le coût aux fins de désamiantage,

-donner toutes indications sur les risques sanitaires, Page 28 sur 30

- plus généralement, faire toutes constatations et remarques utiles de nature à éclairer la religion du tribunal ;

DISONS que l'expert adressera un pré-rapport aux parties avant le dépôt du rapport définitif;

DISONS que toute difficulté sera soumise au juge du contrôle des expertises ;

DISONS que la consignation à valoir sur le montant des frais d'expertise, d'un montant de 1 000 euros, doit être versée à la régie du Tribunal judiciaire de Toulon dans le mois de la présente décision par Monsieur [C] [X], demandeur à la mesure ;

DISONS que l'expert devra déposer son rapport auprès du greffe du juge chargé du contrôle des expertises et le communiquer aux parties dans le délai de deux mois à compter du versement de la consignation, accompagné d'une attestation de mission dûment renseignée ;

DISONS qu'il appartiendra en tant que de besoin aux parties de saisir le tribunal paritaire des baux ruraux après le dépôt du rapport ; »

« DEBOUTONS Monsieur [P] [B] de sa demande au titre des loyers impayés au 17 août 2022 ; »

« CONDAMNONS Monsieur [P] [B] aux entiers dépens de l'instance ;

CONDAMNONS Monsieur [P] [B] à verser à Monsieur [C] [X] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. »

« REJETONS tous autres chefs de demande, plus amples ou contraires » s'agissant des demandes de Monsieur [B],

Et statuant à nouveau :

SE DECLARER INCOMPETENT pour statuer sur les demandes de Monsieur [X] qui se heurtent à une contestation sérieuse ;

DECLARER les demandes de Monsieur [X] irrecevables ;

RENVOYER Monsieur [X] à mieux se pourvoir au fond ;

DEBOUTER Monsieur [X] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions;

CONDAMNER Monsieur [X] à payer à Monsieur [B] la somme de 3 959 euros au titre des loyers impayés au 17 août 2022 avec intérêts à compter du 5 janvier 2023 au taux légal puis au taux légal majoré ;

CONDAMNER Monsieur [X] à entretenir les lieux loués à Monsieur [B], et notamment à les débroussailler, et d'avoir à en justifier par communication d'une pièce probante, et cela sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de 8 jours suivant la signification de la décision à intervenir compte tenu du risque encouru et de l'inertie fautive de Monsieur [X] pourtant déjà alerté ;

CONDAMNER Monsieur [X] à payer à Monsieur [B] au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile la somme de 2 000 euros correspondant à la première instance et celle de 2 000 euros correspondant à l'appel ;

Le CONDAMNER aux entiers dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais d'expertise.

Monsieur [B] fait valoir en substance : que les demandes de Monsieur [X] se heurtent à une contestation sérieuse et le Juge des référés dont la compétence est ici limitée par les articles 893 et 894 du Code de Procédure Civile ne saurait y faire droit.

Monsieur [X] doit a minima être renvoyé à mieux se pourvoir au fond, eu égard à l'incompétence du Juge des référés pour statuer sur ses demandes, son action étant irrecevable pour chacun de ses chefs de demandes.

Monsieur [B] considère en effet que les conditions d'application de l'article L.411-30 II du Code rural et de la pêche maritime qui fondent la demande de Monsieur [X] de condamnation du concluant à reconstruire et remettre en état les serres, à hauteur des sommes versées par la compagnie d'assurance, ne sont pas réunies ; qu'en tout cas le preneur n'en rapporte pas la preuve.

Il relève que Monsieur [X] ne prend pas la peine de prouver qu'il remplit les conditions nécessaires à l'application du texte, et notamment l'existence d'une destruction qui compromet gravement l'équilibre économique de l'exploitation.

Rien ne prouve selon lui que l'exploitation aurait été à l'équilibre auparavant et il est même permis d'en douter puisque Monsieur [X] a un an de retard de paiement des loyers .

La finalité de l'article est pourtant de permettre au preneur de retrouver son équilibre économique dans l'exploitation du bien loué s'il l'a perdu. Monsieur [X] n'apporte pas la preuve de ses allégations alors que c'est sur lui que repose la charge de la preuve en sa qualité de demandeur, en application de l'article 9 du Code de Procédure Civile.

Il ajoute que pour les mêmes raisons, le trouble manifestement illicite n'est pas caractérisé car M [X] ne prouve pas remplir les conditions nécessaires à l'application de l'article dont il se prévaut en indiquant qu'il serait illégitimement inappliqué en l'espèce.

Le bailleur soutient en effet que le montant d'indemnisation qu'il a perçue de son assureur est faible et ne lui permettra pas de reconstruire la même superficie de serres mais tout au plus une reconstruction à hauteur de 160 m² et avec les deux côtés des serres ouverts, pour 60 789 euros selon le devis qu'il a demandé, ce qui ne permettra pas une exploitation des lieux rentable. Si tel n'est pas le cas, il serait abusif d'exiger de Monsieur [B] la reconstruction car comme exposé précédemment, la finalité de l'article est de permettre au preneur de retrouver son équilibre économique dans l'exploitation du bien loué s'il l'a perdu.

La reconstruction ne permet effectivement pas le maintien d'une exploitation rentable, rendant la demande adverse abusive eu égard à la jurisprudence applicable, point sur lequel il n'a pas été statué eu égard à la motivation retenue.

C'est pourquoi Monsieur [B] a fait sommation à Monsieur [X] d'avoir à communiquer une attestation émanant d'un expert-comptable ou tout autre justificatif probant prouvant la superficie nécessaire pour qu'il soit à son seuil de rentabilité dans le cadre de l'exploitation des lieux loués objets du présent litige (pièce n° 7).

Il ne serait en effet pas légitime de contraindre Monsieur [B] à reconstruire si cela ne permet pas de rendre l'exploitation rentable.

Il appartient donc à Monsieur [B] de prouver d'une part qu'il remplit les critères énoncés par l'article précité , à savoir que l'exploitation était rentable jusqu'alors et que c'est la destruction des serres qui a compromis cet équilibre, et d'autre part que la reconstruction à hauteur de l'indemnisation de l'assurance, pour 160 m², permettrait de retrouver cet équilibre.

A défaut, ses demandes ne pourront qu'être rejetées, et considérées comme abusives ; Monsieur [B] ne saurait reconstruire dans ces conditions.

Monsieur [X] n'a pas déféré à la sommation qui lui a été faite d'avoir à communiquer une attestation émanant d'un expert-comptable ou tout autre justificatif probant prouvant la superficie nécessaire pour qu'il soit à son seuil de rentabilité dans le cadre de l'exploitation des lieux loués objets du présent litige (pièce n° 7).

En réponse, Monsieur [X] s'est borné à soutenir qu'au regard de la jurisprudence, la destruction de deux serres sur trois compromet l'équilibre économique.

Il ne démontre toujours pas qu'il était à l'équilibre avant ni que la reconstruction dans la limite du montant d'indemnisation de l'assurance permettrait une exploitation rentable.

Enfin, les obligations de Monsieur [B], retraité, si tant est qu'elles existent ici, ne sauraient faire peser sur lui une charge trop lourde à défaut de quoi les règles propres à l'imprévision auront à s'appliquer.

Il estime en outre que l'ordonnance a satisfait à la demande d'expertise sous des motifs illégitimes.

En effet, elle précise qu'il conviendrait de l'ordonner « afin de favoriser la réalisation de travaux permettant la reprise de l'activité de Monsieur [X] compte tenu des sommes versées par l'assurance de Monsieur [B], et d'autre part, de la décision éclairée que devront prendre les parties quant à leur éventuelle prise en charge de travaux supplémentaires ».

A aucun moment donc le Juge des référés n'indique que ladite expertise serait nécessaire et de surcroît, il se fonde sur une éventuelle prise en charge de travaux supplémentaires alors qu'aucune obligation de la sorte n'existe.

La juridiction a ainsi manifestement omis de se prononcer concernant les trois arguments mis en exergue par Monsieur [B], d'une part, l'absence de preuve que les conditions visées par le texte relatif à la reconstruction seraient réunies ; d'autre part, un abus de droit, rappelant qu'il revenait à Monsieur [X] s'il niait cet abus, de démontrer que reconstruire une toute petite surface à hauteur du montant versé par l'assurance lui permettrait de disposer d'une superficie suffisante pour que son exploitation soit rentable, ce qui n'est manifestement pas le cas ; et enfin la théorie de l'imprévision.

Sur le rejet de sa demande de paiement d'un arriéré de loyer existant à la date du sinistre, le concluant fait valoir que le décompte qu' il communique est le suivant :

Le 22.11.2017 : virement de Monsieur [C] [X] de 2.500 euros ;

Le 30.10.2018 : virement de Monsieur [C] [X] de 2.500 euros ;

Le règlement est ainsi fait pour la période du 01 11 2017 au 31 10 2018.

Le 24.10.2019 : virement de Monsieur [C] [X] de 5.000 euros ;

Le règlement est ainsi fait pour la période du 01 11 2018 au 31 10 2019.

Le 27.10.2020 : virement de Monsieur [C] [X] de 5.000 euros ;

Le règlement est ainsi fait pour la période du 01 11 2019 au 31 10 2020

Le 27.10.2021 : virement de Monsieur [C] [X] de 5.000 euros ;

Le règlement est ainsi fait pour la période du 01 11 2020 au 31 10 2021.

Il existe donc un impayé pour la période comprise entre le 31 octobre 2021 et le 17 août 2022, le loyer étant payable d'avance. Le non paiement des loyers dont est responsable Monsieur [X] constitue une violation de ses obligations illégales et cause préjudice à Monsieur [B] ; il constitue par conséquent un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser.

Sur la condamnation à débroussailler , il fait valoir que cette obligation pèse sur le preneur qui ne peut invoquer une exception d'inexécution pour s'y soustraire.

Sur la présence d'un bateau et de véhicules sur les lieux loués, il fait valoir que M [X] ne rapporte pas la preuve de ses allégations alors que pourtant, il en a la charge. Il relève que le PV de constat communiqué par l'intimé ne mentionne pas la présence de ces éléments, alors que Monsieur [X] qui a fait venir un huissier

pour dresser constat n'aurait pas manqué de les lui montrer s'ils avaient été là, et si cela l'avait gêné.

Enfin , il considère que l'extension de la mission d'expertise à l'évaluation d'une perte d'exploitation et au coût d'un désamiantage total constituent des demandes nouvelles, aux motifs notamment que rien ne prouve qu'un désamiantage soit nécessaire, raison pour laquelle cette mission n'a pas lieu d'être, et que M [X] n'a pas demandé l'indemnisation d' une prétendue perte d'exploitation. Plus encore, il s'est toujours refusé à communiquer ses éléments comptables lorsqu'il lui a été demandé de démontrer qu'il remplirait le critère de l'équilibre économique existant.

Vu les conclusions de [C] [X] du 5 février 2024  tendant à

Vu les articles 142, 145, 893 et 894 du Code de procédure civile,

Vu l'article L.131-1 du Code des procédures civiles d'exécution,

Vu les articles 1719 3°, 1720 et 1723 du Code civil,

Vu les articles L.411-1, L.411-30 et L.415-3 du Code rural et de la pêche maritime,

CONFIRMER la décision dont appel en ce qu'elle a :

' Condamné Monsieur [P] [B] à réparer les dégâts causés par la grêle du 17 août 2022 sur les serres, à hauteur des sommes versées par sa compagnie d'assurance ;

' Ordonné une expertise et commis à cet effet Monsieur [Z] [S], expert assermenté inscrit sur la liste de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, qui sera autorisé à recourir en cas de nécessité à tout sapiteur de son choix après transmission d'un devis au greffe du service du contrôle des expertises, avec la mission suivante :

'se rendre sur place après avoir convoqué les parties ou leurs conseils ;

'se faire remettre par les parties ou, en cas de besoin, par les tiers, tout document utile à l'accomplissement de sa mission ;

'décrire les serres sises section [Cadastre 4] et section [Cadastre 5] à [Localité 6], et notamment leur état après les dégâts causés par la grêle tombée le 17 août 2022,

'proposer et préconiser toutes solutions techniques possibles en fonction de l'indemnité d'assurance perçue par Monsieur [B],

'chiffrer le coût de la remise en état du groupe de serres selon les différentes solutions techniques,

'procéder à toutes vérifications en diagnostics sur la présence d'amiante,

'se prononcer sur les mesures nécessaires et le coût aux fins de désamiantage,

'donner toutes indications sur les risques sanitaires,

'plus généralement, faire toutes constatations et remarques utiles de nature à éclairer la religion du tribunal ;

' Débouté Monsieur [P] [B] de sa demande au titre des loyers impayés au 17 août 2022 ;

' Condamné Monsieur [P] [B] aux entiers dépens de l'instance ;

' Condamné Monsieur [P] [B] à verser à Monsieur [C] [X] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

REFORMER la décision dont appel en ce qu'elle a :

' Débouté Monsieur [C] [X] de sa demande de condamnation de Monsieur [B] au titre de la libération des parcelles ;

' Condamné Monsieur [C] [X] à débroussailler les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 3] dans le délai de quinze jours à compter de la présente décision, sous astreinte de 40 euros par jour de retard.

Et, statuant à nouveau :

CONDAMNER Monsieur [B] à reconstruire et remettre en l'état les serres à hauteur des sommes versées par la compagnie d'assurance,

CONDAMNER Monsieur [B] à libérer les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 3] de la commune de [Localité 6], de ses véhicules, bateaux et autres effets personnels,

Le CONDAMNER à laisser à Monsieur [X] la libre jouissance des parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 3] sur la commune de [Localité 6],

CONDAMNER Monsieur [B] à une astreinte de 200 € par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir,

JUGER que l'expert désigné devra également chiffrer les préjudices de tous ordres consécutifs au sinistre du 17 août 2022 et notamment au regard de la perte d'exploitation en résultant ;

JUGER que l'expert désigné devra intégrer dans le chiffrage du coût de la remise en état du groupe de serres, le coût d'un désamiantage total des ouvrages ;

Le CONDAMNER aux entiers dépens d'instance ainsi qu'à la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'intimé réplique que :

'L'existence d'une éventuelle contestation sérieuse de nature à justifier le rejet des demandes est un moyen qui touche le fond du débat et non une exception d'incompétence.

' En l'espèce, le concluant se prévaut d'un trouble manifestement illicite dans l'exercice de son activité et sollicite la remise en état des serres, de sorte que l' existence de contestations fussent telles sérieuses n'est pas de nature à rendre incompétent le juge des référés. C'est d'ailleurs le sens de sa décision s'agissant de la remise en état des serres :

' S'agissant de la demande d'expertise, là encore l'existence d'une contestation sérieuse n'a aucune incidence puisqu'il suffit de démontrer un intérêt légitime.

' le concluant est exploitant agricole et produit à ce titre de la spiruline. Il est titulaire d'un bail rural, conclu le 1er novembre 2017 pour une durée de neuf années et qui porte sur un ensemble de serres de type Abran situées sur les parcelles cadastrées Section [Cadastre 4] et [Cadastre 3] d'une superficie de 6.084 m², situées sur la Commune de [Localité 6]. Le groupe de serres est constitué de 8 chapelles avec une longueur d'environ 70 mètres, et d'une largeur de 6 mètres de large d' une superficie totale de 3.200 m². Le montant du fermage a été fixé à la somme de 5.000 euros par an.

' Ces installations sont assurées par le bailleur, conformément à l'article L.415-3 du Code rural et de la pêche maritime.

' Le 17 août 2022, l'exploitation de Monsieur [X] a subi des épisodes de grêle.

' Ces événements climatiques ont gravement endommagé le groupe de serres. Les dégâts se situent essentiellement au niveau de la toiture des serres. Le 7 septembre 2022, une rencontre a eu lieu sur place entre Monsieur [B] et Monsieur [X]

Monsieur [B] s'est opposé à toute réparation et envisageait de mettre un terme au bail et de détruire les serres. Aucun accord amiable n'a été trouvé entre les parties.

Monsieur [X] a donc adressé une lettre recommandée à Monsieur [B] lui demandant de revenir sur sa décision et de réparer les dégradations causées par les intempéries, en vain. M [X] a renouvelé la même démarche par l'intermédiaire de son conseil de nouveau sans succès

' Or, Les conditions de l'article L.411-30 II du Code rural et de la pêche maritime sont remplies qui imposent au bailleur , si le preneur le demande, de reconstruire le ou les biens détruits en totalité ou partiellement par cas fortuit, lorsque cette destruction compromet gravement l'équilibre économique de l'exploitation.

' En l'espèce, les conditions sont réunies

-La destruction partielle des serres par cas fortuit.La grêle est un cas de force majeure, extérieur, imprévisible et irrésistible. Lors des épisodes de grêle du 17 août 2022, 80 % des verres des toitures ont été cassés. Des fragments de verres sont restés suspendus, empêchant tous accès aux serres. Mais la structure des serres est intacte. Le procès-verbal de constat produit fait état d'une destruction partielle. Les pignons Est et Ouest des serres ont été épargnés par la grêle.La destruction totale ou partielle, signifie que le bien ne peut pas être conservé sans dépense excessive et qu'il est impropre à l'usage auquel il était destiné

-L'équilibre économique de l'exploitation est compromis. Seul 20% des serres de l'exploitation sont intacts. La Cour de cassation considère que la destruction de deux serres sur trois compromet gravement l'équilibre économique de l'exploitation (Civ. 3ème, 19 février 1997).

Outre la destruction des serres, Monsieur [X] a subi la perte de son matériel à savoir :

- Les bâches des bassins de production,

- Les bâches d'ombrage des bassins,

- Le système de pompes de circulation,

- Les tables de filtration,

- Le déshydrateur pour spiruline,

- La balance électronique,

Depuis le 17 août 2022, Monsieur [X] n'a pas pu reprendre l'exercice de son activité. Son exploitation est en péril, du fait de l'absence d'activité économique depuis plus d'un an et demi. En l'espèce, le seul fait que Monsieur [X] soit dans l'impossibilité d'utiliser son outil de travail et est ainsi privé de son exploitation et de tout revenu démontre qu'il est gravement compromis à l'équilibre économique de l'exploitation.

En outre, Monsieur [X] a perdu son stock de spiruline (100 kg) prêt à la vente.

-Malgré ses obligations en tant que bailleur, et les demandes du preneur, Monsieur [B] s' est opposé catégoriquement à la reconstruction des serres dans la limite de l'indemnité reçue de son assureur au motif que Monsieur [X] ne démontrerait pas que son exploitation avant sinistre était rentable.

Or, l'appelant vient ajouter là une condition à la loi puisqu'il est uniquement question d'équilibre économique.

A la demande du preneur, le bailleur est tenu de reconstruire à concurrence des sommes versées par les compagnies d'assurance, si le preneur en fait la demande. Ainsi, si le bien compris dans le bail est détruit en partie ou en totalité par cas fortuit, le bailleur ne pourra pas demander la résiliation du bail rural (Cass. 3ème Civ. 18 mars 1980).

Seul le preneur peut demander la résiliation du bail rural, dès lors que la destruction compromet gravement l'équilibre économique de l'exploitation et que le bien n'est pas reconstruit (Cass. 3ème Civ. 24 mars 2004, n°02-14.977).

-Les sommes versées par la compagnie d'assurance :

En premier lieu, le bailleur est tenu de faire toutes les réparations nécessaires, pendant la durée du bail (article 1720 du Code civil).

Par application de l'article L.411-30 II, Monsieur [B] est tenu de reconstruire les serres, à concurrence des sommes versées par les compagnies d'assurance.

A ce jour, il n'a donné aucune réponse à la demande du preneur de lui communiquer les déclarations faites auprès de la compagnie d'assurance ainsi que leur réponse et les indemnités perçues.

En vertu de l'article L.415-3 du Code rural et de la pêche maritime, il est supposé que Monsieur [B] ait souscrit une assurance pour les serres.

' Sur l'absence de contestation sérieuse, M [B] a bien perçu une indemnité de son assurance au titre du sinistre d'un montant de 73.600 euros et il ne conteste pas non plus au travers de ses écritures que cette indemnité doit nécessairement être employée à la reconstruction totale ou partielle des serres louées. La destruction est bel et bien partielle et est liée à un cas fortuit. Enfin il ne peut être sérieusement contesté que Monsieur [X], depuis le 17 août 2022, n'est plus en mesure d'exploiter et qu'il se trouve à ce jour privé de tous revenus compte tenu de l'attentisme de son bailleur. Dès lors, il n' existe pas de contestation sérieuse.

' En outre, l'article 894 du Code de procédure civile trouve application, même en présence d'une contestation sérieuse et en l'espèce, le trouble manifestement illicite est établi par le non-respect de la part de Monsieur [B] en tant que bailleur des dispositions de l'article L 411-30 du Code rural, alors qu'il a perçu, il y a de très nombreux mois, une indemnité de 73.600 euros de son assurance, ou du moins qu'il sait qu'il peut compter sur cette indemnité; Que le trouble manifestement illicite est révélé par la situation dans laquelle se trouve Monsieur [X], dépourvu de toute exploitation, et donc de toute forme de revenus.

' Monsieur [B], contraint de reconnaître qu'il a perçu une indemnisation, prétend s'opposer aux demandes de Monsieur [X] aux motifs que l'indemnité perçue ne permettrait pas une reconstruction totale des biens loués. Or, L'assignation de Monsieur [B] est particulièrement claire, ainsi d'ailleurs que les dispositions de l'article L 411-30.

' Le bailleur est tenu, si le preneur le demande, de reconstruire à due concurrence des sommes versées par les compagnies d'assurance, ce bâtiment ou un bâtiment équivalent.

Monsieur [X] n'est pas responsable des garanties souscrites par Monsieur [B] auprès de la compagnie d'assurance qui s'avèrent manifestement inférieures au coût de réparation des serres louées.

Enfin, on ne peut que douter des devis produits par Monsieur [B] dans la mesure où l'entreprise consultée par ce dernier n'est très certainement pas allée voir les lieux.

' L'existence d'un trouble manifestement illicite est ainsi parfaitement démontrée.

' Au cours des opérations d'expertise, il a été contradictoirement constaté la présence importante d'amiante sur les lieux. Il est bien évident que la remise en état des serres nécessite impérativement un désamiantage et donc l'évaluation des frais que cela suppose.

Le déblayage ne peut se faire en l'occurrence sans désamiantage préalable.

La demande du concluant est non seulement recevable mais également parfaitement fondée.

' Sur le non-respect des termes du bail par le bailleur et la libération des parcelles : Les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 3] ont été données à bail à Monsieur [X]. Ce dernier dispose de la libre jouissance de ces parcelles jusqu'au 1er novembre 2026. Malgré l'existence de ce bail, Monsieur [B] occupe ces deux parcelles et y entrepose ses véhicules, camion, bateaux et remorques (pièce 7)

Le preneur lui a donc adressé une lettre recommandée lui demandant de libérer les parcelles de tous effets personnels lui appartenant. Il s'avère que cette lettre n'a reçu aucun écho.

En vertu d'un bail et a fortiori d'un bail rural, le bailleur est tenu d'une obligation de jouissance paisible à l'égard de son preneur en application de l'article 1719 3° du Code civil.

En application de l'article 1723 le bailleur ne peut changer la forme de la chose louée. Le preneur ne peut plus disposer librement de ces parcelles et en conséquence, exercer convenablement son activité. Cette demande est fondée sur le trouble manifestement illicite et le preneur n'a pas à prouver être gêné par la présence de bateau et véhicules propriété des consorts [B] sur les lieux loués.

Au visa de l'article 1719 du Code civil, le bailleur est tenu de livrer au preneur la chose louée et de prouver qu'il s'est libéré entièrement de cette obligation.

L'occupation partielle des consorts [B] d'une partie des biens loués constitue donc vis- à-vis de Monsieur [X] un trouble manifestement illicite.

' Or, Monsieur [B] ne contestait pas en première instance être propriétaire de ces véhicules et du bateau mais exposait que ces derniers ne gênaient pas le concluant dans le cadre de son exploitation.

' Ainsi, il convient de réformer la décision dont appel en ce que le premier juge a estimé que le concluant ne rapportait pas la preuve que lesdits véhicules appartenaient à Monsieur [B] et a rejeté la demande de libération de la parcelle.

' L'expertise est justifiée car Monsieur [B] produit aux débats des devis établis de façon non contradictoires pour tenter de démontrer qu'en fait l'indemnité perçue ne pourrait plus être utilement employée et en conserver le bénéfice.

' En outre, Monsieur [X] a fait établir un rapport officiel de repérage d'amiante aux termes duquel il apparaîtrait que les installations présentent de l'amiante dans des proportions relativement importantes (pièce n°8).

Dès lors, il appartient à l'expert désigné de faire toutes constatations utiles sur le terrain en fonction du rapport officiel de repérage.

Ainsi, il est bien évident que le concluant justifiait d'un motif légitime à voir organiser une telle expertise.

' Le concluant sollicite par ailleurs un complément pour la mission confiée à l'expert désigné, car le préjudice financier découlant de la cessation de son activité depuis le sinistre est particulièrement important et doit faire l'objet d'une évaluation au contradictoire de la partie adverse par l'expert désigné.

Il sollicite également que le chiffrage du coût de la remise en état du groupe de serres prenne en considération le coût d'un désamiantage total des ouvrages. Il ne s'agit pas de demandes nouvelles

' Sur le règlement du fermage de l'année 2022 :

Monsieur [B] sollicitait la somme de 3.959 euros correspondant à la période antérieure au 17 août 2022. Cette demande est des plus étonnantes dans la mesure où Monsieur [X] n'a jamais pu exploiter le bien à compter du 17 août 2022. La production de spiruline sur l'année est réalisée en très grande partie pendant les mois de juillet-août en raison des températures élevées favorisant cette plante.

Le preneur peut, comme tout créancier, en application de l'article 1219 du Code civil, refuser d'exécuter son obligation alors même que celle-ci est exigible si le bailleur n'exécute pas la sienne, notamment en termes d'entretien et de réparation du bien loué. Il considère que les manquements du bailleur à ses obligations sont suffisamment graves pour justifier l'exception d'inexécution soulevée par le concluant.

' Sur le débroussaillage, Il appartient donc bien au propriétaire des parcelles qui les encombre par les véhicules qu'il y stationne de procéder au débroussaillage. En tout état de cause, le concluant indique être allé au-delà des obligations qui lui incombaient en procédant à des opérations de débroussaillage avant l'été.

MOTIVATION :

l'article 893 du code de procédure civile dispose que : « Dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal paritaire peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend ».

A ce stade , il convient de préciser que le moyen tiré de l'existence d'une contestation sérieuse ne constitue pas une exception de procédure mais un moyen de nature à faire obstacle aux pouvoirs du juge des référés.

L'article 894 du même code dispose également que : « Le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ».

A cet égard, constitue un trouble manifestement illicite la violation évidente d'une règle de droit résultant d'un fait matériel ou juridique.

Sur la reconstruction des serres :

Il ressort des dispositions de l 'article L.411-30 du Code rural et de la pêche maritime que :

« I.-Lorsque la totalité des biens compris dans le bail sont détruits intégralement par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit.

II.-Lorsqu'un bien compris dans le bail est détruit, en partie ou en totalité, par cas fortuit et que cette destruction compromet gravement l'équilibre économique de l'exploitation, le bailleur est tenu, si le preneur le demande, de reconstruire, à due concurrence des sommes versées par les compagnies d'assurance, ce bâtiment ou un bâtiment équivalent.

Si la dépense excède le montant des sommes ainsi versées, le bailleur peut prendre à sa charge la totalité des frais engagés par la reconstruction et proposer au preneur une augmentation du prix du bail. Dans le cas où le preneur n'accepte pas l'augmentation proposée, le tribunal paritaire des baux ruraux, sur saisine de la partie la plus diligente, fixe le nouveau montant du bail.

III.-Dans le cas où le preneur participe au financement des dépenses de reconstruction, il est fait application des dispositions des articles L. 411-69, L. 411-70 et L. 411-71. Si le bien n'est pas reconstruit, le preneur peut demander la résiliation du bail. »

En l'espèce, il ressort des pièces versées aux débats que les serres constituaient bien l'essentiel des parcelles délivrées à M [X] dans le cadre du bail à ferme conclu avec M [B], nécessaire à son exploitation de culture de spiruline.

Il est acquis aux débats que les dommages sur les serres résultent d'un cas fortuit, en l'espèce l' orage de grêle du 17 août 2022.

Le procès-verbal de constat d'huissier du 12 octobre 2022, qui laisse apparaître l'ampleur des dégâts, fait état de la destruction d'environ 80 % des verres de toiture. En revanche, la structure métallique des serres n'a été que peu touchée et les côtés ont moins souffert Des morceaux de verres sont encore en suspension, d'autres jonchent le sol , rendant les serres inexploitables et même inaccessibles, compte tenu des risques de blessures.

Ces serres étant l'unique outil de production de M [X], il ne peut être sérieusement contesté que leur destruction partielle compromet gravement et nécessairement l'équilibre économique de son exploitation , la production de spiruline n'étant plus possible dans des serres qui ne remplissent plus leur fonction et qui n'ont pas été déblayées des débris de verre qui les encombrent.

Monsieur [B] justifie avoir d'ores et déjà perçu la somme de 60 800 euros de son assureur. Il sera en outre indemnisé de 12 800 euros de frais de déblais sur justificatifs.

Toutefois, il ressort des devis recueillis par M [B] que, déduction faite du coût des opérations de déblaiement et du montant de la franchise d'assurance, le solde de l'indemnité perçue ne permettrait pas de reconstruire la même superficie de serres, de sorte que se pose la question de la rentabilité future de l'exploitation agricole de Monsieur [X], après exécution des travaux de reconstruction partielle dans la limite de l'indemnité d'assurance , s'il ne peut plus cultiver la même surface sous serres.

Pour autant, la démonstration de la rentabilité de son exploitation à la date de survenue du cas fortuit n'est pas une condition posée par l'article L 411-30 précité, de sorte qu'il ne peut être reproché à M [X] de ne pas fournir une attestation de son comptable ou d' autres documents de nature à justifier de la rentabilité de son entreprise agricole.

Dans le même temps, l'interrogation du bailleur sur la capacité du preneur à maintenir durablement une activité suffisante, sur le fonds rural objet du bail, pour lui permettre de poursuivre son exploitation et, ainsi, faire face au paiement du fermage est une préoccupation légitime qui exclut le trouble manifestement illicite , alors que la destruction des serres n'est pas le fait du preneur et résulte d'un cas fortuit.

Dès lors, il apparaît que la condamnation de Monsieur [P] [B] à réparer les dégâts causés sur les serres par la grêle du 17 août 2022 , à hauteur des sommes versées par sa compagnie d'assurance, excédait les pouvoirs du juge des référés, alors qu'une incertitude pèse toujours sur l'ampleur des travaux rendus possibles dans la limite de l'indemnité perçue ou à percevoir par M [B].

L'ordonnance sera en conséquence infirmée de ce chef et la cour dira n'y avoir lieu à référé sur ce point.

Sur la demande d'expertise ;

L'expertise ordonnée par le premier juge en application de l'article 145 du code de procédure civile se justifie par la nécessité d' obtenir un chiffrage précis du coût des travaux de reconstruction des serres en y incluant le coût des travaux de déblaiement et de désamiantage éventuel de l'ensemble, puisque M [X] établit, par sa pièce 8, le repérage d'amiante dans des plaques de fibrociment. Il s'agit également d'établir, au plus proche de la réalité, la superficie qui sera celle des serres réparables dans la limite de l'indemnité d'assurance.

En l'état, il n' y a pas lieu d'étendre la mission de l'expert à la détermination de tous les préjudices subis par M [X] et notamment de son préjudice d'exploitation, la mission confiée à l'expert étant circonscrite à la détermination des différentes solutions techniques de reconstruction envisageables en fonction de l'indemnité d'assurance perçue par Monsieur [B], leur coût, la vérification du diagnostic sur la présence d' amiante et le chiffrage des mesures de désamiantage.

Dans ces conditions, l'évaluation du préjudice d'exploitation de M [X] relève d'une nouvelle expertise qui excède la compétence de l'expert désigné.

Sur la demande de libération des parcelles par M [B] :

Il ne ressort pas des pièces produites par M [X] que M [B] aurait entreposé sur les parcelles louées, des bateaux et véhicules , de sorte que la cour confirme le rejet de la demande d'injonction sous astreinte, adressée au bailleur, de libérer les lieux loués.

Sur les demandes reconventionnelles de M [B] :

' Le paiement d'un arriéré de loyer :

Le montant annuel du loyer était de 5.000 euros, payable le 1er novembre de chaque année, en vertu du contrat de bail à ferme conclu le 1er novembre 2017 entre les parties qui a force obligatoire, Monsieur [X] reste redevable de la somme de 5.000 euros pour la période de novembre 2021 à novembre 2022, selon le décompte produit par le bailleur

Monsieur [B] limitant sa demande au règlement du prorata pour la période du 31 octobre 2021 au 17 août 2022, il est ainsi justifié d' un arriéré d'un montant de 3.959 euros (= 289 jours / 365 X 5000), pour la période antérieure au sinistre auquel M [X] ne peut opposer l' exception d'inexécution , puisque, avant la survenue du sinistre, le bailleur avait bien rempli son obligation de délivrance. Cette somme étant incontestable, il convient de condamner à titre provisionnel M [X] à payer à M [B] la somme de 3959 euros.

' le débroussaillage des parcelles :

Opération d'entretien courant, le débroussaillage incombe au preneur qui ne peut exciper de l'impossibilité d'utiliser les serres, par suite de leur destruction partielle par cas fortuit, pour se soustraire à l' obligation de débroussailler leurs abords, étant donné le risque incendie en période sèche.

C'est donc à juste titre que le premier juge a ordonné à M [X] de débroussailler les parcelles louées, dans le délai de 15 jours à compter de sa décision et ce sous astreinte de 40 euros par jour de retard.

Sur les demandes annexes :

Compte tenu de l'issue du litige M [X] est condamné aux dépens de première instance et d'appel.

En revanche, compte tenu de la position respective des parties, l'équité ne justifie pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme l'ordonnance de référé en ce qu'elle a

' condamné Monsieur [P] [B] à réparer les dégâts causés par la grêle du 17 août 2022 sur les serres , à hauteur des sommes versées par sa compagnie d'assurance,

' débouté Monsieur [P] [B] de sa demande de condamnation au titre des loyers impayés au 17 août 2022,

' condamné Monsieur [P] [B] aux entiers dépens de l'instance et à verser à Monsieur [C] [X] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

La confirme pour le surplus de ses dispositions

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de condamnation de Monsieur [P] [B] à réparer les dégâts causés sur les serres par la grêle,

Condamne Monsieur [C] [X] à payer à Monsieur [P] [B], à titre provisionnel, la somme de 3959 euros montant du loyer dû au 17 août 2022,

Dit que la mission de l'expert judiciaire désigné par le juge des référés est complétée en ce qu'il lui est demandé d'évaluer le coût d'un désamiantage total des serres,

Déboute Monsieur [C] [X] de sa demande d'extension de la mission de l'expert au chiffrage des préjudices de tous ordres qu'il a subis depuis le sinistre, notamment de sa perte d'exploitation,

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions contraires ou plus amples,

Condamne Monsieur [C] [X] aux dépens de première instance et d'appel,

Déboute les parties de leurs demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 23/07435
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;23.07435 ?
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