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02/04/2024 | FRANCE | N°24/00036

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-11 ho, 02 avril 2024, 24/00036


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Hospitalisation sans consentement

1-11 HO





ORDONNANCE

DU 02 AVRIL 2024



N° 2024/36







Rôle N° RG 24/00036 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BMY7U







[W] [X]





C/



MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

MONSIEUR LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER [5]

[N] [P]





















Copie adressée :

par téléco

pie le :

02 Avril 2024

à :

-Ministère Public

-Le patient

-Le directeur

-L'avocat

-Le préfet

-Le curateur/tuteur



par LRAR

- Le tiers









Décision déférée à la Cour :



Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en d...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Hospitalisation sans consentement

1-11 HO

ORDONNANCE

DU 02 AVRIL 2024

N° 2024/36

Rôle N° RG 24/00036 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BMY7U

[W] [X]

C/

MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

MONSIEUR LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER [5]

[N] [P]

Copie adressée :

par télécopie le :

02 Avril 2024

à :

-Ministère Public

-Le patient

-Le directeur

-L'avocat

-Le préfet

-Le curateur/tuteur

par LRAR

- Le tiers

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 15 Mars 2024 enregistrée au répertoire général sous le n°24/294.

APPELANTE

Madame [W] [X]

née le 11 Mai 1981 à [Localité 6] (13), demeurant [Adresse 2]

Actuellement au CENTRE HOSPITALIER [5], sis [Adresse 1];

assistée de Maître Camille MANIGLIER, avocat inscrit au barreau d'Aix-en-Provence, avocat commis d'office;

INTIMES :

MONSIEUR LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER [5], sis [Adresse 1]

non comparant;

Madame [N] [P]

demeurant [Adresse 2]

non comparante;

PARTIE JOINTE:

MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE, demeurant [Adresse 4]

non comparant ayant déposé des réquisitions écrites;

*-*-*-*-*

DÉBATS

L'affaire a été débattue le 02 Avril 2024, en audience publique, devant M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller, délégué par ordonnance du premier président, en application des dispositions de l'article L.3211-12-4 du code de la santé publique,

Greffier lors des débats : Mme Carla D'AGOSTINO,

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Avril 2024.

ORDONNANCE

Réputée contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 02 Avril 2024 à 16h14,

Signée par M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller, et Mme Carla D'AGOSTINO, greffier présent lors du prononcé.

SUR QUOI,

Selon la procédure figurant au dossier, Mme [W] [X] a fait l'objet d'une mesure d'hopitalisation sous contrainte le 19 août 2023 sur décision du directeur du centre hospitalier [5] de [Localité 6], en urgence à la demande de sa mère, Mme [N] [P] , conformément aux dispositions de l'article L3212-3 du code de la santé publique, en raison d'une altération progressive de son état psychique dans le cadre d'une rupture de soins marqué par un contact bizarre, des attitudes d'écoute, un discours décousu et un ralentissement psychomoteur, outre une absence de reconnaissance des troubles. Selon décision du directeur du centre hospitalier [5] en date du 31 mars 2023, Mme [X] a bénéficié d'un programme de soins à compter du 4 avril 2023.

Par décision du directeur du centre hospitalier [5] en date du 6 mars 2024, Mme [X] a fait l'objet d'une réintégration en hospitalisation complète, effective le jour même, sur la base d'un certificat médical du Docteur [T] [I] daté du même jour. La praticienne souligne que la patiente a été hospitalisée en urgence à [Localité 3] en région parisienne à la suite d'une décompensation psychotique en mode délirant dans le cadre d'un voyage pathologique, précisant que des avis de recherche avaient été lancés dès le 22 janvier 2024. Elle relève lors de l'examen un état délirant envahissant, Mme [X] étant convaincue d'avoir une autre identité, un comportement incurique et agressif envers le personnel et les autres patients. Le médecin insiste sur le déni des troubles et la prise de traitement sujette à négociation constante. Elle préconise le maintien de la mesure d'hospitalisation sous la forme complète.

Dans son avis du 14 mars 2024, le Docteur [I] fait état de la persistance d'un état délirant envahissant en dépit de la reprise d'un traitement psychotrope. Elle souligne que la patiente revendique une autre identité et adopte un comportement inadapté (agressif et incurique) en lien direct avec des idées délirantes de persécution et de mégalomanie. Elle estime nécessaire la poursuite de l'hospitalisation contrainte sous la forme complète.

Par ordonnance rendue le 15 mars 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Marseille, saisi dans le cadre du contrôle obligatoire prévu aux articles L3211-12-1 et suivants du même code, a dit qu'en l'état, la mesure de soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète restait fondée.

Par courriel adressé au greffe de la cour le 22 mars 2024 à 14 heures 30, Mme [W] [X] a interjeté appel de la décision précitée.

Le ministère public a conclu par écrit en date du 29 mars 2024 à la confirmation de la décision querellée, conclusions dont il a été fait lecture à l'audience par le président.

Dans son certificat de situation du 28 mars 2024, le Docteur [I] note l'amélioration progressive de l'état psychique de Mme [X] depuis sa réintégration, marquée par un contact et un sommeil de meilleure qualité. La praticienne relève toutefois la persistance d'idées de persécution et de préjudice essentiellement centrées sur la mère de l'intéressée et l'absence d'adhésion aux soins. Elle préconise la poursuite de l'hospitalisation contrainte sous la forme complète.

Entendu, Mme [X] ne s'est pas opposée à la publicité de l'audience et a déclaré:

'La première fois, je ne supportais pas d'être en CMP. Je prefère être suivie par un psychiatre privé. Je suis déjà suivie par le docteur [R]. C'est un psychiatre privé. C'est la raison pour laquelle j'ai interrompu les soins. Je suis allée en région parisienne, j'ai rencontré quelqu'un et j'ai passé du temps avec cette personne. Je n'ai pas mon numéro de portable. Je m'en occuperai dès ma sortie. Je ne peux pas répondre aux appels. J'ai perdu ma carte bleue. Sans mon numéro de portable, je ne peux pas récupérer mon compte bancaire. Je suis tombée en panne d'essence. Il y a eu une recherche inquiétante. J'ai été mise à [Localité 3]. J'ai arrêté les soins car je ne souhaitais pas aller au CMP. Le docteur [Y] ne me convenait pas. Je ne suis pas agressive, c'est faux. Je n'ai jamais été agressive avec personne. Je romance un peu c'est vrai. Je suis écrivain. Je prépare la sortie d'un film. Je romance les faits autour de moi. Non je n'ai pas des idées de persécution, c'est terminé. Justem:ent c'est terminé, cela fait 3 jours que je me réentends bien avec ma mère. J'ai décidé de prendre des médicaments qu'on m'a prescrit définitivement. En espérant que cela ne soit pas trop contraignant.Je ne suis pas agressive, je ne veux pas qu'il y ait de doutes. J'ai décidé d'adhérer aux soins. Je souhaite voir un psychiatre privé. Je veux recommencer une vie paisible.J'en peux plus des hospitalisations. Je veux reprendre une vie. J'ai vécu pendant longtemps heureuse. J'ai une maison, je suis propriétaire, je n'ai pas de soucis financiers. Je veux revenir à cette vie.'

Maître Camille MANIGLIER, avocate de Mme [X], n'a formulé aucune observation sur la régularité de la procédure et a souligné que la patiente souhaitait simplement poursuivre les soins dans un cadre privé.

Mme [N] [P], bien que régulièrement convoquée, n'a pas comparu.

Le directeur du centre hospitalier [5], régulièrement convoqué, n'était ni présent, ni représenté.

MOTIFS

1) Sur la forme

Selon les dispositions de l'article R3211-18 du code de la santé publique, 'L'ordonnance est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel ou son délégué, dans un délai de dix jours à compter de sa notification.

Le ministère public peut, dans tous les cas, interjeter appel dans le même délai.'

Aux termes des dispositions de l'article R3211-19 du même code, 'Le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel. La déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l'heure.

Le greffier de la cour d'appel avise sur-le-champ le greffier du tribunal judiciaire qui lui transmet sans délai le dossier.

Le greffier de la cour d'appel fait connaître par tout moyen la date et l'heure de l'audience aux parties, à leurs avocats et, lorsqu'ils ne sont pas parties, au tiers qui a demandé l'admission en soins et au directeur d'établissement. Les deux derniers alinéas de l'article R. 3211-13 sont applicables.'

En l'espèce, l'ordonnance querellée a été rendue le 15 mars 2024. Mme [X] a adressé au greffe de la cour une déclaration d'appel par mail du 22 mars 2024 à 14h30. Dès lors, son recours sera déclaré recevable.

2) Sur le fond

L'article L3212-1 du code de la santé publique dispose que : 'I.-Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l'article L. 3211-2-1.

II.-Le directeur de l'établissement prononce la décision d'admission :

1° Soit lorsqu'il a été saisi d'une demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l'existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celui-ci, à l'exclusion des personnels soignants exerçant dans l'établissement prenant en charge la personne malade. Lorsqu'elle remplit les conditions prévues au présent alinéa, la personne chargée, à l'égard d'un majeur protégé, d'une mesure de protection juridique à la personne peut faire une demande de soins pour celui-ci.

La forme et le contenu de cette demande sont fixés par décret en Conseil d'Etat.

La décision d'admission est accompagnée de deux certificats médicaux circonstanciés datant de moins de quinze jours, attestant que les conditions prévues aux 1° et 2° du I du présent article sont réunies.

Le premier certificat médical ne peut être établi que par un médecin n'exerçant pas dans l'établissement accueillant le malade ; il constate l'état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Il doit être confirmé par un certificat d'un second médecin qui peut exercer dans l'établissement accueillant le malade. Les deux médecins ne peuvent être parents ou alliés, au quatrième degré inclusivement, ni entre eux, ni du directeur de l'établissement mentionné à l'article L. 3222-1 qui prononce la décision d'admission, ni de la personne ayant demandé les soins ou de la personne faisant l'objet de ces soins ;

2° Soit lorsqu'il s'avère impossible d'obtenir une demande dans les conditions prévues au 1° du présent II et qu'il existe, à la date d'admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un certificat médical établi dans les conditions prévues au troisième alinéa du même 1°. Ce certificat constate l'état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Le médecin qui établit ce certificat ne peut exercer dans l'établissement accueillant la personne malade ; il ne peut en outre être parent ou allié, jusqu'au quatrième degré inclusivement, ni avec le directeur de cet établissement ni avec la personne malade.

Dans ce cas, le directeur de l'établissement d'accueil informe, dans un délai de vingt-quatre heures sauf difficultés particulières, la famille de la personne qui fait l'objet de soins et, le cas échéant, la personne chargée de la protection juridique de l'intéressé ou, à défaut, toute personne justifiant de l'existence de relations avec la personne malade antérieures à l'admission en soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celle-ci.

Lorsque l'admission a été prononcée en application du présent 2°, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts.'

Aux termes des dispositions de l'article L3212-3 du code de la santé publique, 'En cas d'urgence, lorsqu'il existe un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade, le directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 peut, à titre exceptionnel, prononcer à la demande d'un tiers l'admission en soins psychiatriques d'une personne malade au vu d'un seul certificat médical émanant, le cas échéant, d'un médecin exerçant dans l'établissement. Dans ce cas, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts.

Préalablement à l'admission, le directeur de l'établissement d'accueil vérifie que la demande de soins a été établie conformément au 1° du II de l'article L. 3212-1 et s'assure de l'identité de la personne malade et de celle qui demande les soins. Si la demande est formulée pour un majeur protégé par la personne chargée d'une mesure de protection juridique à la personne, celle-ci doit fournir à l'appui de sa demande le mandat de protection future visé par le greffier ou un extrait du jugement instaurant la mesure de protection.'

En l'espèce, si l'avis médical du Docteur [I] en date du 28 mars dernier, et donc contemporain de l'audience, pointe l'amélioration de l'état de Mme [X], il relève également la persistance d'idées de persécution et une absence d'adhésion aux soins. A l'aune de ces éléments, la praticienne préconise le maintien de l'hospitalisation contrainte sous la forme complète.

Les conditions fixées par les articles L3212-1 du code de la santé publique sont donc toujours réunies.

En conséquence, la décision du premier juge qui a autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète doit à ce jour, être confirmée, au regard de la gravité de la pathologie et de la fragilité de l' état de santé de Mme [W] [X], décrites par les médecins, de la nécessité de lui prodiguer des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante et de l'impossibilité pour l'intéressée de consentir aux soins.

Les dépens seront laissés à la charge du Trésor public en application de l'article R 93-2° du code de procédure pénale.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision réputée contradictoire, rendue en dernier ressort,

Déclarons recevable mais non fondé l'appel formé par Mme [W] [X],

Confirmons la décision déférée rendue le 15 Mars 2024 par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE.

Laissons les dépens à la charge du trésor public.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-11 ho
Numéro d'arrêt : 24/00036
Date de la décision : 02/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 09/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-02;24.00036 ?
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