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21/03/2024 | FRANCE | N°23/11474

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 21 mars 2024, 23/11474


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 21 MARS 2024

MM

N° 2024/ 111









Rôle N° RG 23/11474 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BL3WN







[BM] [EI]





C/



[O], [UH] [LH]

[UK] [G]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SELAS ALIAS AVOCATS ASSOCIES



SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN







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Décision déférée à la Cour :



Sur saisine de la Cour suite à l'arrêt n° 725 F-D rendu par la Cour de Cassation en date du 29 Juin 2023, enregistré sous le numéro de pourvoi J 21-22.218 qui a cassé et annulé l'arrêt n° 339 rendu le 01 Juillet 2021 par la Chambre 1.5 de la Cour d'Appel D'AIX EN PROVENCE, ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 21 MARS 2024

MM

N° 2024/ 111

Rôle N° RG 23/11474 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BL3WN

[BM] [EI]

C/

[O], [UH] [LH]

[UK] [G]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SELAS ALIAS AVOCATS ASSOCIES

SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN

Décision déférée à la Cour :

Sur saisine de la Cour suite à l'arrêt n° 725 F-D rendu par la Cour de Cassation en date du 29 Juin 2023, enregistré sous le numéro de pourvoi J 21-22.218 qui a cassé et annulé l'arrêt n° 339 rendu le 01 Juillet 2021 par la Chambre 1.5 de la Cour d'Appel D'AIX EN PROVENCE, enregistré au répertoire général sous le n° 18/18336, sur appel d'un jugement du Tribunal de grande instance DE NICE du 22 Octobre 2018, enregistré au répertoire général sous le numéro 18/01628.

DEMANDERESSE A LA SAISINE APRES RENVOI CASSATION

Madame [BM] [EI]

demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Pascal ALIAS de la SELAS ALIAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Philippe CAMPS, avocat au barreau de NICE, plaidant

DEFENDEURS A LA SAISINE APRES RENVOI CASSATION

Madame [O], [UH] [LH] veuve [G], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'héritière de [ML] [G]

demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Olivier FAUCHEUR, avocat au barreau de NICE, plaidant

Monsieur [UK] [G] agissant en son nom personnel et en sa qualité d'héritier de feu Monsieur [ML] [G]

demeurant [Adresse 5]

non comparant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 23 Janvier 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Marc MAGNON, Président , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Président

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Mars 2024.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Mars 2024,

Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET PROCÉDURE :

Mme [BM] [EI] est propriétaire d'un appartement au premier étage de la copropriété [Adresse 7] située [Adresse 5]. Les époux [G]/[LH] étaient propriétaires de l'appartement situé immédiatement au-dessus, au deuxième étage. En juin 2017, des infiltrations d'eau en provenance de cet appartement ont affecté celui de Mme [BM] [EI].

Le 19 septembre 2017, le cabinet Polyexpert, mandaté par l'assureur Pacifica, a constaté les désordres et mis en demeure les époux [G]/[LH] de remédier à la fuite intervenue dans leur salle de bain. Les démarches postérieures de Mme [BM] [EI] et du syndic de copropriété ainsi que la saisine du conciliateur de justice du tribunal judiciaire de Nice seraient demeurées vaines selon Madame [EI] .

Se plaignant également de nuisances sonores tant diurnes que nocturnes (cris, hurlements, musique forte, bruits de talons), Mme [EI] a saisi le conseil syndical et l'assemblée générale des copropriétaires qui a rappelé au point 12 de sa réunion du 1er décembre 2017 que les cris, hurlements, musique forte et toute forme de tapage sont interdits de jour comme de nuit.

Estimant que la situation n'avait pas évolué, Mme [BM] [EI] a finalement fait assigner le 4 avril 2018 les époux [G]/[LH] devant le tribunal judiciaire de Nice, pour obtenir paiement de dommages-intérêts à hauteur de 5000 €, pour le dégât des eaux, et de 10 000 €, pour les tapages nocturnes volontaires subis depuis plus de cinq ans.

Les époux [G]/[LH] n'ont pas comparu. Considérant que les faits allégués par la demanderesse étaient établis et constituaient une violation délibérée du règlement de copropriété et de la loi du 10 juillet 1965, le tribunal judiciaire de Nice, par jugement réputé contradictoire du 22 octobre 2018 a :

' condamné solidairement M [ML] [G] et Mme [O] [LH] à payer à Mme [BM] [EI] les sommes de :

*3000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi de juin à décembre 2017, issu du dégât des eaux,

*8000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice issu des tapages nocturnes;

' débouté Mme [BM] [EI] de sa demande en paiement d'une amende de 1000 € pour toute nouvelle infraction constatée par huissier ou trois témoins ;

' condamné solidairement les époux [G]/[LH] à payer à Mme [BM] [EI] la somme de 1000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

' ordonné l'exécution provisoire du jugement ;

' condamné les époux [G]/[LH] aux dépens avec faculté de recouvrement direct.

Ces derniers ont régulièrement relevé appel de cette décision le 21 novembre 2018. [ML] [G] étant décédé le 4 juin 2020, la procédure a été poursuivie par Mme [O] [LH], à titre personnel et en qualité d'héritière de feu [ML] [G], et par [UK] [G], intervenant volontaire à l'instance, en sa qualité d'héritier de [ML] [G].

Ils ont demandé à la cour, selon dernières conclusions signifiées par voie électronique le 30 avril 2021, au visa des articles 32-1, 114, 373 et 648 du code de procédure civile, de:

' à titre liminaire, constater la reprise d'instance par les héritiers de feu [ML] [G],

' annuler l'acte introductif d'instance et déclarer irrecevables les demandes de Mme [BM] [EI] ;

' écarter des débats les attestations de M. [X], Mme [U] et Mme [PY] ;

' infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et débouter Mme [BM] [EI] de l'ensemble de ses demandes ;

' à titre reconventionnel, déclarer abusive la procédure et condamner Mme [BM] [EI] à payer aux consorts [G]/[LH] la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts ;

' sur les demandes incidentes formées par Mme [BM] [EI], dire qu'elle ne démontre aucune faute commise par les époux [G]/[LH], ni l'existence d'un préjudice ;

' en conséquence, la débouter de l'ensemble de ses demandes incidentes ;

' en tout état de cause, condamner Mme [BM] [EI] au paiement d'une indemnité de 5000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

' condamner la même aux dépens avec bénéfice de recouvrement direct.

Au soutien de leur appel, les consorts [G]/[LH] ont fait valoir principalement que l'assignation contrevenait aux dispositions de l'article 648 du code de procédure civile, qu'ils n'ont jamais reçu l'avis de passage, ni la copie adressée par lettre simple et qu'ils n'ont été destinataires que des conclusions trois jours avant l'audience, que ces circonstances font grief en ce qu'ils n'ont pu utilement comparaître en première instance.

Au fond, ils ont soutenu avoir neutralisé la fuite d'eau dès le 8 juillet 2017, par dépose du flexible de la baignoire et mise en place d'un bouchon, que c'est à tort que l'intimée prétend que le sinistre a perduré jusqu'en janvier 2018, que l'assureur Pacifica a indemnisé celle-ci postérieurement aux constatations de son expert en septembre 2017 et qu'aucun élément n'établit la survenance de nouvelles infiltrations.

S'agissant des nuisances sonores, les appelants ont objecté que les attestations émanent de personnes proches de Mme [EI], qu'aucun constat d'huissier n'est produit, que l'intimée ne résidant elle-même dans les lieux que depuis le 1er juin 2017, elle ne peut se prévaloir de cinq années de nuisances, que les témoignages produits par les consorts [G]/[LH] contredisent les attestations de l'intimée, que c'est par vengeance qu'elle leur impute des dégradations sur son véhicule (pneus crevés) ou encore le blocage de l'accès à son garage et qu'en définitive la procédure qu'elle a engagée est abusive.

En réplique [BM] [EI] a demandé à la cour, au visa des articles 544 et 1146 et suivants du code civil devenus 1231, 1231-1 nouveaux, 803 et 907 du code de procédure civile, 8, 9 et 42 de la loi du 10 juillet 1965, de :

vu le règlement de copropriété de l'immeuble [Adresse 7] et notamment son article 2,

' confirmer la décision entreprise sur le principe des condamnations ;

' écarter des débats « le témoignage » de M. [G] ;

' condamner les consorts [G]/[LH] au paiement des sommes de :

*5000 € pour le préjudice issu du dégât des eaux de juin 2017 à janvier 2018,

*15 000 € pour le préjudice résultant des tapages nocturnes volontaires, des divers troubles de voisinage dont des actes de harcèlement et d'intimidation ;

' condamner les consorts [G]/[LH] au paiement d'une amende de 1000 € pour toute nouvelle infraction constatée par huissier ou trois témoins ;

' condamner les consorts [G]/[LH] à payer à Mme [BM] [EI] la somme de 5000€à titre de dommages-intérêts pour les troubles de voisinage subis postérieurement au jugement;

' condamner les mêmes à payer la somme de 5000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

' condamner les consorts [G]/[LH] aux dépens d'appel avec bénéfice de recouvrement direct.

L'ordonnance de clôture est intervenue en cet état de la procédure le 17 mai 2021, jour de l' audience de plaidoiries.

Par arrêt du 1er juillet 2021, la cour d'appel d'Aix en Provence a, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Donné acte à M. [UK] [G] de son intervention volontaire aux débats ;

Déclaré régulière l'assignation introductive d'instance ;

Confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il rejette la demande de Mme [BM] [EI] en paiement d'une amende pour toute nouvelle infraction constatée, et réformant de ce seul chef :

Condamné les consorts [G]/[LH] au paiement d'une amende de 1000 € pour toute nouvelle infraction constatée par huissier ;

Les a déboutés de leur demande en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Les a condamnés à payer à Mme [BM] [EI] la somme de 3500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en appel ;

Condamné les consorts [G]/[LH] aux dépens d'appel avec faculté de recouvrement direct dans les termes prévus à l'article 699 du même code.

[O] [LH] épouse [G] et [UK] [G] se sont pourvus en cassation .

Par arrêt du 29 juin 2023, la cour de cassation a cassé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu par la cour d'appel de céans aux motifs que, lorsque le juge révoque l'ordonnance de clôture, cette décision qui doit être motivée par une cause grave, doit intervenir avant la clôture des débats ou, sinon, s'accompagner d'une réouverture de ceux-ci, de sorte qu'une même décision ne peut simultanément révoquer l'ordonnance de clôture et statuer sur le fond du litige ; que pour confirmer le jugement entrepris, l'arrêt retient que les dernières conclusions de l'intimé ont été signifiées le 6 mai 2021 et que l'ordonnance de clôture est intervenue le 17 mai 2021, au jour de l'audience des débats ; qu'en statuant ainsi, la cour qui a statué au fond après avoir fixé la clôture de l'instruction à la date des débats a violé les articles 16 et 803 du code de procédure civile.

Par déclaration du 7 septembre 2023, [BM] [EI] a saisi la cour d' appel d'Aix en Provence, autrement composée, désignée comme cour de renvoi.

Un avis de fixation à bref délai a été délivré le 19 septembre 2023.

L'avis de fixation et la déclaration de saisine ont été signifiés par procès-verbaux du 26 septembre 2023 remis en l'étude de l'huissier.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 janvier 2024

Au delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l'espèce des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la cour entend se référer pour l'exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessous.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

Vu les conclusions notifiées le 4 janvier 2024 par Madame [LH] veuve [G] agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d' héritière de [ML] [G]. Signifiées à [UK] [G] , par acte remis en l'étude de l'huissier le 18 décembre 2023, aux fins de :

RECEVOIR Mme [O] [LH] veuve [G] agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritière de feu M [ML] [G] en ses conclusions ;

AU FOND,

LA DIRE bien fondée ;

INFIRMER le jugement rendu par la 4ème Chambre Civile du Tribunal de Grande Instance de Nice en date du 22.10.2018 en ce qu'il a :

' Condamné solidairement M. [ML] [G] et Mme [O] [G] à payer à Mme [BM] [EI] les sommes de :

' 3000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du dégât des eaux subi de juin 2017 à décembre 2017,

' 8000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des tapages nocturnes,

' Condamner solidairement M. [ML] [G] et Mme [O] [G] à payer à Mme [BM] [EI] une somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Et statuant a nouveau,

In limine litis,

Vu les articles 114 et 648 du Code de procédure civile,

JUGER que l'acte introductif d'instance ne contient aucune date, mention pourtant prescrite à peine de nullité ;

JUGER que les époux [G] ont subi un grief inhérent à leurs droits de la défense dans la mesure où ceux-ci ont été jugés sans avoir pu comparaître ;

ANNULER l'acte introductif d'instance et DECLARER les demandes de Mme [EI] irrecevables ;

SUR LE FOND,

A titre principal,

Vu les articles 4, 5 et 12 du Code de procédure civile,

Vu la jurisprudence citée,

JUGER qu'aucune relation contractuelle n'est caractérisée entre Mme [EI] et les consorts [G] ;

En conséquence, DEBOUTER Mme [EI] de l'ensemble de ses demandes et notamment celles tendant à l'octroi de dommages et intérêts sur ce fondement ;

A titre subsidiaire,

Vu les pièces versées aux débats,

ECARTER DES DEBATS les attestations de M. [X] et de Mesdames [U] et [PY] (Pièces adverses 16,18 et 19) pour non-respect des dispositions de l'article 202 du Code de procédure civile à défaut de reproduction manuscrite des dispositions de l'article 441-7 du Code Pénal ;

JUGER que les époux [G] n'ont commis aucune faute relative au dégât des eaux dans la mesure où ils ont neutralisé la fuite dès le 8 juillet 2017 ;

JUGER que Mme [BM] [EI] a déjà été indemnisée pour les dégâts subis, par son assurance, et qu'elle ne démontre pas l'existence d'un préjudice supplémentaire ;

JUGER que les nuisances sonores alléguées ne sont prouvées par aucun élément probant si ce n'est des attestations contredites par d'autres attestations ;

JUGER que les autres incriminations et accusations portées à l'encontre des consorts [G] en cause d'appel sont infondées ;

En conséquence,

DEBOUTER Mme [EI] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

A titre reconventionnel,

Vu l'article 32-1 du Code de procédure civile,

DÉCLARER abusive la procédure introduite par Mme [EI] à l'encontre des consorts [G];

CONDAMNER Mme [EI] à verser la somme de 10 000 € à Mme [O] [G] à titre de dommages et intérêts ;

En tout état de cause,

CONDAMNER Mme [EI] au paiement, au profit de Mme [O] [G], de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens d'instance distraits au profit de Me Joseph Magnan, avocat aux offres de droit.

Vu les conclusions notifiées le 28 décembre 2023 par Mme [BM] [EI], signifiées le 18 octobre 2023 à [UK] [G], par acte remis en l'étude de l'huissier, tendant à :

Vu les articles 8, 9 et 42 de la loi du 10 juillet 1965,

Vu les articles 544, 1146 et suivants du Code Civil (devenus 1231, 1231-1 et suivants nouveaux du Code Civil),

Vu le règlement de copropriété de l'immeuble « [Adresse 7] » et notamment son article 2,

Vu l'Arrêt de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence du 1er Juillet 2021,

Vu l'Arrêt de la Cour de Cassation du 29 Juin 2023,

DIRE ET JUGER que les consorts [G] ont délibérément manqué aux obligations contractuelles mises à leur charge par le règlement de copropriété en refusant de mettre un terme aux infiltrations en provenance de leur appartement pendant plus de 6 mois et en multipliant les tapages nocturnes et diurnes depuis plus de cinq ans, soit de 2016 à 2021,

DIRE ET JUGER qu'il en résulte un grave préjudice pour la requérante et son bébé,

CONSTATER les nouveaux troubles de voisinage occasionnés par Madame [G] postérieurement au jugement de première instance,

En l'état, s'entendre la Cour :

CONFIRMER la décision entreprise sur le principe des condamnations,

ÉCARTER des débats le « témoignage » de Monsieur [G],

CONDAMNER les consorts [G] à payer incidemment à Madame [EI]:

' la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts en l'état du préjudice subi du fait du dégât des eaux occasionné de juin 2017 à janvier 2018,

' la somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts en l'état des tapages nocturnes volontaires subis ainsi que de divers troubles de voisinage, dont des actes de harcèlement et d'intimidation,

Y ajoutant :

CONDAMNER les époux [G] à payer à Madame [EI] la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour les troubles de voisinage subis postérieurement à la décision du Premier Juge,

A TITRE SUBSIDIAIRE et si la Cour devait considérer que la responsabilité des époux [G] ne peut être engagée sur le fondement de la responsabilité contractuelle, les condamner à payer les mêmes sommes sur le fondement des articles 1240 et 1241 du Code civil.

DÉBOUTER Madame [G] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

CONDAMNER les Consorts [G] à payer à Madame [EI], la somme de 8.000 € supplémentaires au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Les CONDAMNER aux entiers dépens dont distraction au profit de l'avocat requérant sous sa due affirmation.

Vu les conclusions notifiées par voie électronique, le 30 avril 2021, par [UK] [G] en qualité d'héritier de [ML] [G], intervenant volontaire, dans la procédure enregistrée sous le numéro RG 18/18336, tendant à:

à titre liminaire,

CONSTATER la reprise d'instance par les héritiers de feu [ML] [G],

ANNULER l'acte introductif d'instance et déclarer irrecevables les demandes de Mme [BM] [EI],

ECARTER des débats les attestations de M. [X], Mme [U] et Mme [PY],

INFIRMER le jugement déféré en toutes ses dispositions et débouter Mme [BM] [EI] de l'ensemble de ses demandes ;

à titre reconventionnel,

DECLARER abusive la procédure et condamner Mme [BM] [EI] à payer aux consorts [G]/[LH] la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts ;

sur les demandes incidentes formées par Mme [BM] [EI],

DIRE qu'elle ne démontre aucune faute commise par les époux [G]/[LH], ni l'existence d'un préjudice ;

en conséquence,

LA DEBOUTER de l'ensemble de ses demandes incidentes ;

en tout état de cause,

CONDAMNER Mme [BM] [EI] au paiement d'une indemnité de 5000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNER la même aux dépens avec bénéfice de recouvrement direct.

MOTIVATION :

A titre liminaire, il convient de rappeler que selon les dispositions de l'article 954 alinéas 1 et 2 du code de procédure civile, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée ; que les conclusions comprennent une discussion des moyens et prétentions, ces dernières étant récapitulées sous forme de dispositif.

La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Les demandes de « constater » ou « dire et juger » ou même « juger », lorsqu'elles s'analysent en rappels de moyens, ne constituent pas de telles prétentions et ne saisissent pas la cour qui examinera en revanche les seuls moyens invoqués, dans la discussion, au soutien des prétentions figurant au dispositif des conclusions.

Par ailleurs, selon l'article 634 du code de procédure civile , les parties qui ne formulent pas de moyens nouveaux ou de nouvelles prétentions sont réputées s'en tenir aux moyens et prétentions qu'elles avaient soumis à la juridiction dont la décision a été cassée. Il en est de même de celles qui ne comparaissent pas .

Monsieur [UK] [G], s'il est défaillant devant la cour d'appel d'Aix en Provence désignée comme cour d'appel de renvoi, a comparu devant la cour de céans dont l'arrêt a été cassé, de sorte qu' il est réputé s'en tenir aux prétentions et moyens exposés en son nom dans ses conclusions signifiées par voie électronique le 30 avril 2021 dans la procédure enregistrée sous le numéro RG 18/18336.

La décision rendue sera ainsi réputée contradictoire à son égard.

In limine litis sur la nullité de l'acte introductif d'instance :

[O] [LH] veuve [G] et [UK] [G], ès qualités, ci-après les consorts [G], soulèvent la nullité de l'assignation au visa de l'article 648 du code de procédure civile , aux termes duquel , « Tout acte d'huissier indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs,

1°) Sa date ;

[']

Ces mentions sont prescrites à peine de nullité ».

Selon ces dispositions, la date doit figurer aussi bien sur l'original que sur la copie remise au destinataire, la copie d'un acte d'huissier tenant lieu d'original pour la partie à laquelle elle a été remise ou adressée. La mention de la date est une formalité substantielle exigée à peine de nullité .

Les appelants ajoutent qu' équivaut à une absence de date, la divergence de date entre l'original et la copie et qu'il a été jugé que l'absence de date sur la copie remise au destinataire constitue une cause de nullité, même si l'original est régulier, dès lors que seule la copie tient lieu d'original pour celui qui la reçoit .

Ils rappellent que selon l'article 114 du code de procédure civile, la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour la partie qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.

Ils considèrent que l'assignation délivrée est nulle, car s'il ressort du procès-verbal de signification de l'assignation, en date du 4 avril 2018, qu' en l'absence des époux [G] à leur domicile, un avis de passage aurait été laissé et une copie dudit acte aurait été adressée le jour même par l'huissier, par lettre simple, les époux [G] n'ont jamais reçu ni avis de passage , ni copie adressée par lettre simple, de sorte qu'ils ont été jugés sans qu'ils ne puissent se défendre ; qu'en outre, la copie de l'assignation communiquée par Madame [EI] ne contient aucune date en tête de l'acte , seule apparaît la formule : « l'an deux mille dix huit, et le ».

Les concluants estiment en outre que l'absence de date cause nécessairement un grief, en matière de procédure avec représentation obligatoire, imposant de constituer avocat dans les 15 jours, en même temps qu'elle introduit un doute sur le procédé de signification, les requis n'ayant jamais eu connaissance d'un avis de passage ou d'une copie adressée par lettre simple.

Ils ajoutent que le 17 septembre 2018, les époux [G] se sont vu notifier un acte d'huissier intitulé signification de conclusions et de bordereau de pièces précisant qu'il y serait annexé copie :

' des conclusions établies dans l'affaire [EI]/[G]

' du bordereau de communication et des pièces visées dans le bordereau qui seront produites à l'audience, sans plus de précision sur la juridiction saisie ou sur la date de l'audience à laquelle l'affaire serait appelée, ces informations étant uniquement indiquées sur l'acte conservé à l'étude. En outre, ce procès-verbal de signification faisait mention de manière erronée des dispositions des articles 908 et 909 du code de procédure civile, relatives à l'appel, alors que l'affaire était pendante devant le tribunal de grande instance.

Au delà de cette information de nature à induire en erreur les destinataires de l'acte sur la juridiction saisie, cette notification est intervenue trois jours avant l'audience fixée devant le tribunal, de sorte que les défendeurs auraient été de toute façon hors d'état de faire valoir leur défense, dans un délai aussi bref, s'ils avaient connu la juridiction saisie.

[O] [LH] veuve [G] indique également que s'apercevant que plusieurs courriers ne leur étaient pas parvenus, les époux [G] ont déposé plainte et souscrit un contrat de réexpédition avec la poste.

Enfin, contrairement à ce que soutient Madame [EI], les appelants considèrent que l' assignation qui a été remise aux défendeurs par l'intimée est bien une copie de l'acte comportant, en entête, le tampon de l'huissier et le numéro de dossier de l'étude, de sorte que cette copie devait mentionner la date de l'acte, comme l'original.

Mme [BM] [EI] soutient en substance que les appelants ont opportunément porté plainte pour vol de courrier après le jugement déféré, que l'assignation que les appelants se sont abstenus de retirer auprès de l'huissier instrumentaire comporte la date de sa signification, le 4 avril 2018, et qu'ainsi aucune cause de nullité n'est encourue.

Il convient de rappeler à ce stade les dispositions relatives aux modalités de signification des actes d'huissier applicables au cas d'espèce.

Aux termes de l'article 655 du code de procédure civile : « Si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence.

L'huissier de justice doit relater dans l'acte les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification.

La copie peut être remise à toute personne présente au domicile ou à la résidence du destinataire.

La copie ne peut être laissée qu'à condition que la personne présente l'accepte et déclare ses nom, prénoms et qualité.

L'huissier de justice doit laisser, dans tous ces cas, au domicile ou à la résidence du destinataire, un avis de passage daté l'avertissant de la remise de la copie et mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise. »

L'article 656 du même code ajoute que : « Si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte et s'il résulte des vérifications faites par l'huissier de justice, dont il sera fait mention dans l'acte de signification, que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification est faite à domicile. Dans ce cas, l'huissier de justice laisse au domicile ou à la résidence de celui-ci un avis de passage conforme aux prescriptions du dernier alinéa de l'article 655. Cet avis mentionne, en outre, que la copie de l'acte doit être retirée dans le plus bref délai à l'étude de l'huissier de justice, contre récépissé ou émargement, par l'intéressé ou par toute personne spécialement mandatée.

La copie de l'acte est conservée à l'étude pendant trois mois. Passé ce délai, l'huissier de justice en est déchargé.

L'huissier de justice peut, à la demande du destinataire, transmettre la copie de l'acte à une autre étude où celui-ci pourra le retirer dans les mêmes conditions. »

Selon l'article 658 du même code: « Dans tous les cas prévus aux articles 655 et 656, l'huissier de justice doit aviser l'intéressé de la signification, le jour même ou au plus tard le premier jour ouvrable, par lettre simple comportant les mêmes mentions que l'avis de passage et rappelant, si la copie de l'acte a été déposée en son étude, les dispositions du dernier alinéa de l'article 656. La lettre contient en outre une copie de l'acte de signification.

Il en est de même en cas de signification à domicile élu ou lorsque la signification est faite à une personne morale.

Le cachet de l'huissier est apposé sur l'enveloppe. »

En l'espèce, la lecture du procès-verbal de signification de l'assignation, dressé le 4 avril 2018, tel qu'il figure au dossier du tribunal transmis à la cour, établit que les diligences prescrites par les articles précédemment rappelés, pour parvenir à une signification à personne, ont bien été accomplies, l'acte d'assignation étant finalement déposé en l'étude de l'huissier instrumentaire, après que celui-ci eut vérifié l' exactitude du domicile de [ML] et [O] [G] et constaté leur absence, et celle de toute personne susceptible d'accepter de recevoir l'acte à signifier. Le procès-verbal rend compte de l'accomplissement par l'huissier des formalités de dépôt d'un avis de passage et de l'envoi de la lettre contenant la copie du procès verbal de signification. A cet égard, le vol de correspondances allégué par Madame [G] ne saurait invalider l'accomplissement par l'huissier de ces formalités conformes aux préconisations légales.

L'assignation enrôlée comporte par ailleurs la date du 4 avril 2018, conforme à celle du procès verbal de signification. Peu importe en conséquence qu'une copie officieuse de cet acte introductif d'instance, obtenue par l'intermédiaire de la partie adverse, après l'audience, et non remise par l'huissier à ses destinataires, ne soit pas revêtue de la date de signification.

L'exception de nullité de l'assignation et la demande d'annulation de cet acte sont en conséquence rejetées et l'action de Madame [EI] est recevable.

Au Fond :

À titre principal, Madame [EI] recherche la responsabilité des époux [G] sur le fondement de la responsabilité contractuelle, aux motifs que l'article 2 du règlement de copropriété, qui constitue la loi commune des copropriétaires et définit leurs droits et obligations respectifs, comporte un article 2 indiquant :

«chaque copropriétaire aura le droit de jouir et de disposer des locaux qu'il possédera exclusivement, comme de choses lui appartenant en toute propriété, à condition de ne pas nuire aux droits des propriétaires des autres locaux, de ne rien faire qui puisse compromettre la solidité de la maison et sous les réserves ci-après ».

A titre subsidiaire , elle entend fonder son action sur les dispositions des articles 1240 et 1241 du code civil qui régissent la responsabilité du fait personnel.

Toutefois , dans le corps de ses conclusions , Madame [EI] qualifie à plusieurs reprises les troubles et nuisances subis en provenance de l'appartement des époux [G] de troubles de voisinage renvoyant à la notion jurisprudentielle de troubles anormaux du voisinage, responsabilité civile extra-contractuelle qui, indépendamment de toute faute, permet à la victime de demander réparation de son préjudice au propriétaire de l'immeuble à l'origine du trouble, responsable de plein droit.

Initialement conçue comme une déclinaison de la responsabilité du fait personnel, la théorie des troubles anormaux du voisinage a désormais un fondement autonome, la cour de cassation retenant « le principe suivant lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage » (Civ. 2e, 19 nov. 1986, n° 84-16.379). Il s'agit d'un régime de responsabilité qui ne repose pas sur la preuve d'un comportement fautif de l'auteur du dommage, mais sur le constat de l'existence d'un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage soumis à l'appréciation in concreto des juges du fond.

En l'espèce, c'est sur le terrain du trouble anormal du voisinage, moyen introduit accessoirement dans le débat par l'intimée, que doivent être appréciées les demandes de Madame [EI].

Sur la responsabilité des époux [G] pour avoir tardé à mettre un terme au dégât des eaux en provenance de leur salle de bains, à l'origine d'un trouble anormal du voisinage pour Madame [EI] :

Madame [EI] explique que Mme [G] a été informée dès le mois de juin 2017 d'infiltrations en provenance de sa salle de bains occasionnant des dégâts des eaux dans la chambre de sa fille. Madame [G] a reconnu la cause des désordres en admettant que le problème venait du flexible de douche encastré qui était percé .

Madame [EI] reproche cependant à Madame [G] d'avoir refusé de procéder rapidement à la réparation qui s'imposait, en liant cette dernière au changement de sa baignoire qu'elle a sans cesse repoussé, occasionnant à l'intimée et à son bébé un préjudice, la chambre de l'enfant, fortement dégradée, étant inutilisable pendant six mois .

Les consorts [G] répliquent que contrairement à ce qui est affirmé dans le jugement, les époux [G] ont procédé à une recherche de la fuite dès le 6 juillet 2017 et qu'ayant eu confirmation de l'origine privative de celle-ci et de ce qu'aucune casse ne serait nécessaire, ils ont fait procéder à la neutralisation du flexible de douche à l'origine de cette fuite. Madame [G] en veut pour preuve l'attestation de M [DE], ayant effectué l'intervention, et de M [FM] également présent le jour de la réparation. Dès le 8 juillet 2017, la fuite à l'origine du désordre aurait été neutralisée, ce qui a été porté à la connaissance de l'intimée.

Dès lors, les appelants estiment que c'est à tort que les premiers juges ont retenu que les époux [G], bien qu'alertés des désordres, auraient attendu plus de six mois pour y remédier et auraient refusé de procéder aux travaux nécessaires avant le chantier de rénovation de leur salle de bains.

En l'espèce , il ressort des attestations et factures versées aux débats que la société DOMALU RENOVATION serait intervenue le 6 juillet 2017 chez M et Mme [G], [Adresse 5], pour une recherche de fuite, sans intervention sur la cause du sinistre. Selon la facture du 6 juillet 2017 éditée par cette entreprise, la fuite provenait d'un flexible de douche encastré dans le bâti de la baignoire, percé dans sa partie inférieure. Toutefois, cette entreprise n'a pas procédé à la réparation de la fuite et à la dépose du flexible défectueux.

Il ressort par ailleurs d'un échange de MMS entre Madame [EI] et Madame [G] du 16 juin 2017( pièce 41 de l'appelante) que cette dernière était au courant de l'origine de la fuite dès avant cette date, puisqu'elle écrivait alors « en ce qui concerne le DDE( dégât des eaux) dans la chambre de votre fille, le problème vient de mon flexible de douche « encadré » qui est percé. En attendant la réparation, l'eau est recueillie tous les jours au moyen de récipients. Je n'ai aucune idée de la date de la réparation car je suis tributaire du plombier. Il était prévu de longue date que ma baignoire devait être remplacée par une douche. La rénovation étant conséquente, je ne sais pas à quel moment le plombier pourra se libérer afin de faire ce travail ».

Selon l'attestation versée aux débats par Mme [G] en pièce 43, ce serait son beau-frère, M [DE], qui aurait procédé à une réparation de fortune , « un week-end de début juillet 2017 » en enlevant le flexible percé et en condamnant la sortie d'eau par un bouchon de plombier.

Toutefois, cette attestation tardive datée du 28 novembre 2018 apparaît pour le moins en contradiction avec les affirmations de Mme [G], dans ses différentes correspondances adressées au syndic de l'immeuble, qui indiquait disposer d'une facture( pièce 47 de l'appelante). Or, M [DE], simple particulier, n'a établi aucune facture.

A tout le moins et alors que la déclaration de sinistre de Madame [EI] date du 8 juin 2017, que Madame [G] était au courant de la fuite avant le 16 juin 2017, la mesure palliative consistant à disposer des récipients de récupération d'eau tout en continuant à se servir de la douche jusqu'à sa condamnation, après le 6 juillet 2017, à une date non précisée, constitue une réponse insuffisante qui a contribué à alimenter les infiltrations d'eau vers l'appartement de Madame [EI], plus particulièrement dans la chambre occupée par sa fille.

Il convient d'ajouter que Madame [G] écrivait dans un courrier du 4 octobre 2017 adressé au syndic de l'immeuble, qui lui réclamait le justificatif de réalisation des travaux de réparation de la fuite : « les travaux de transformation de ma salle de bains et, par conséquent, la réparation de la fuite, sont programmés depuis longtemps, mais je suis tributaire de mon plombier ».

Cette déclaration permet par conséquent de mettre en doute la sincérité de l'attestation établie par M [DE] et celle émanant de M [FM] qui aurait aidé ce dernier en juillet 2017.

De fait, les photographies versées aux débats par Madame [EI] montrent des auréoles d'humidité évolutives, sur un pan de mur, cette évolution étant marquée par l' accentuation, au fil du temps, des taches d'humidité, d' un cliché à l'autre, et l'apparition en leur centre de taches noirâtres correspondant à des moisissures.

Il s'agit là manifestement d'un trouble anormal du voisinage qui est à l'origine pour Madame [EI] d'une perturbation des conditions d'occupation de son logement, ayant entraîné la nécessité, pour elle, de faire dormir son bébé dans une autre pièce compte tenu de l'apparition de moisissures, le temps d'assécher le mur et de refaire les embellissements, ce temps étant d'autant plus long que la fuite a été neutralisée avec retard.

Ce préjudice n'a pas été indemnisé par la compagnie d'assurance de Madame [EI] qui lui a versé une somme de 360 euros correspondant uniquement au coût des travaux de réfection des embellissements.

Il est donc acquis que les nuisances consécutives au dégât des eaux ont perduré plusieurs mois, au moins jusqu'en octobre 2017, obligeant l'intimée à vivre avec un enfant en bas âge dans un appartement humide et dégradé, de telle sorte que c'est par une appréciation exacte, que la cour confirme, que le tribunal a fixé à 3000,00 euros l'indemnité réparant le préjudice subi par Madame [EI].

Sur les nuisances sonores et autres comportements imputés aux consorts [G] :

S'agissant des nuisances sonores, Mme [BM] [EI] soutient que Mme [G] n'a eu de cesse de nuire à ses voisins en multipliant les tapages nocturnes depuis de nombreuses années, se déplaçant avec des talons sans précaution, hurlant et se disputant la nuit avec son fils ou son époux. Elle ajoute qu'en ce qui la concerne, les troubles se sont aggravés, l'empêchant de dormir, après que la concluante eut demandé à sa voisine de mettre un terme aux infiltrations. Elle produit les attestations de plusieurs occupants, propriétaires ou locataires, qui ont témoigné de cette situation insupportable. Elle entend en outre démontrer que Madame [G] a fait pression sur des témoins pour les amener à fournir un témoignage en sa faveur ; qu'elle a poursuivi son harcèlement moral en se tenant devant la porte de l'intimée à toute heure du jour ou de la nuit, dans le but de l'intimider ; qu'habitant les lieux depuis 2016 avec sa fille, la concluante a subi un traumatisme psychologique consécutif au fait qu'elle ne pouvait se reposer la nuit , alors qu'elle enchaînait de longues journées d'infirmière libérale, ce qui justifie, selon elle, l'allocation d'une somme de 15000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des divers troubles de voisinage, tapages nocturnes , actes de harcèlement et d'intimidation subis jusqu'à la décision de première instance, outre la somme de 5000 euros en réparation des troubles de voisinage causés postérieurement.

Parmi les attestations versées aux débats par l'intimée, celles de Mme [NP], du 26 octobre 2017, et de Mme [TG] [B], du 20 décembre 2017, sont insuffisamment précises pour être retenues, puisqu'elles n'indiquent pas la provenance des nuisances sonores diurnes et nocturnes constatées par ces deux témoins et leur auteur( cris et hurlements, tapage au sol avec chaussures à talon).

En revanche, les témoins [X], [U], [A] et [PY] confirment les tapages nocturnes et diurnes des consorts [G]/[LH] auprès desquels ils sont intervenus sans succès pour y mettre un terme.

Si Madame [G] demande à la cour d'écarter les attestations de M [X] et de Mesdames [U] et [PY], pour non-respect des dispositions de l'article 202 du Code de procédure civile, à défaut de reproduction manuscrite des dispositions de l'article 441-7 du Code Pénal, indépendamment de cette omission, ces attestations conservent une valeur probante suffisante qui justifie de les examiner.

Madame [U] qui demeure [Adresse 3] atteste, à la date du 7 novembre 2017, entendre « depuis au moins 10 ans des hurlements et cris de Madame [G] demeurant au [Adresse 5], à l'encontre de son fils et de son mari et ce, quotidiennement et aussi la nuit à des heures très tardives », depuis une fenêtre donnant sur [Adresse 6].

Toutefois, par une nouvelle attestation du 27 mars 2019, Madame [U] déclare avoir constaté, depuis un an, une très nette amélioration quant aux cris et hurlements de Mme [G].

Madame [W] [PY], jadis locataire au [Adresse 5], atteste le 10 novembre 2017 « avoir déjà eu affaire avec Mme [G] résidente de l'immeuble qui se disputait très souvent avec son fils à 3 heure du matin ». A chaque fois , elle montait leur faire savoir qu'il était tard, mais « Madame [G] n'en faisait qu'à sa tête ».

M [CA] [X] demeurant également [Adresse 5] atteste, le 12 novembre 2017, que « Mme [G] ainsi que les membres de sa famille font tous les soirs du tapage nocturne et très souvent du tapage diurne » . Ce témoin déclare avoir « constaté personnellement plusieurs tapages nocturnes et être allé taper à la porte de cette famille pour signifier son mécontentement ». Il indique que les raisons de ces cris perpétuels sont simples . « Le fils de Mme [G] est déscolarisé depuis un an , sort, rentre tard et passe son temps à jouer à la console ».

Monsieur [P] [Y] atteste, le 11 février 2019, être propriétaire d'un deux pièces voisin de l'appartement de M et Mme [G], appartement occupé par sa fille qui lui a rapporté que « durant de nombreuses années, Mme [G] a fortement perturbé le calme et la quiétude l'immeuble par des nuisances sonores diurnes et nocturnes intempestives et répétées » ; que certes , elle a contribué à résoudre des problèmes ce caves inondées , mais « s'est plus ou moins servi de cette opportunité pour lui faire signer ainsi qu'à son épouse une attestation comme quoi elle était altruiste, honnête et intègre , alors qu'au regard de ses  frasques de voisinage, il s'est avéré au contraire qu'elle avait généré « un climat suspicieux et anxiogène au sein de la copropriété ».

Ces attestations sont suffisamment précises et circonstanciées pour rendre compte de faits de tapage nocturne en provenance de l'appartement occupé par le couple [G], et corroborent la déclaration de main courante et la plainte déposées par Madame [EI] les 19 octobre et 13 novembre 2017, auprès des services de police, ainsi que les deux courriers des 13 décembre 2017 et 18 janvier 2018 de son assureur de protection juridique adressés à Mme [O] [G] pour lui demander d' adopter un comportement plus respectueux du voisinage.

L' existence d'un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage imputable à la famille [G] est par ailleurs confirmée par Madame [T] [D], gestionnaire de l'immeuble du [Adresse 5], qui atteste que « lors d'une réunion du conseil syndical du 9 octobre 2017, à laquelle elle assistait, Mme [EI] a évoqué le sujet des bruits nocturnes provenant de chez M et Mme [G] », ajoutant, « Ceci a été débattu dans le calme et la courtoisie de toutes les parties. M [G] semblait quant à lui penaud et désolé ».

Un rappel a été aussi effectué lors de l'assemblée générale des copropriétaires du 1er décembre 2017.

Enfin Mme [O] [G] n'a pas comparu à la tentative de conciliation sollicitée par l'intimée ainsi qu'il ressort de l'attestation du conciliateur de justice en date du 5 janvier 2018.

A l'inverse, Madame [G] produit plusieurs attestations d' habitants ou anciens habitants de l'immeuble en sa faveur. Au delà des attestations de témoins de moralité qui rendent compte de son dévouement auprès de son mari malade et de son fils et de son investissement au sein de la copropriété, plusieurs témoins écartent l'existence de troubles de voisinage émanant de la famille [G].

Les attestations de [N] [L] , [E] [H] et [HV] [TD], établies en 2023, font état de relations de bon voisinage avec Mme [G] et de l'absence de nuisances sonores de sa part. Toutefois, ces témoins sont de nouveaux résidents de l'immeuble du [Adresse 5] et n'étaient pas présents au cours de la période examinée par le tribunal.

Madame [AW] propriétaire depuis 2006 d'un appartement qu'elle loue, situé au même étage que celui de la famille [G], atteste n'avoir jamais été alertée par ses locataires sur l'existence de nuisances dans l'immeuble, quelles qu'elles soient.

Monsieur [S] [VO], demeurant [Adresse 2] et [Adresse 6], voisin de Mme [U], critique le comportement de cette dernière et atteste n'avoir « jamais entendu Mme [G] crier, hurler depuis de nombreuses années ».

Monsieur [J] [BE] qui demeure [Adresse 4], depuis plus de deux ans à la date du 30 novembre 2018, atteste occuper un appartement dont les fenêtres donnent sur [Adresse 6] en face de l'appartement de la famille [G] et n'avoir « jamais été dérangé par des cris ou par d'autres nuisances sonores »

Madame [M] [R], demeurant [Adresse 3], déclare avoir de bonnes relations avec Mme [G] et ne pas avoir personnellement à se plaindre de nuisances sonores , ses fenêtres étant orientées du côté opposé à [Adresse 6].

Madame [Z] [V], demeurant [Adresse 1] dans un logement dont la porte d'entrée se situe à 15 mètres des fenêtres de la famille [G], atteste, à la date du 24 novembre 2018, ne jamais avoir été dérangée par une quelconque nuisance sonore, « que ce soit de jour comme de nuit, été comme hiver, mais avoir au contraire pu bénéficier de la belle sonorité du violon émanant de la chambre de leur fils , élève depuis 10 ans du conservatoire de musique de [Localité 8] ».

Monsieur [F] [GR] atteste, le 28 janvier 2019, avoir habité au [Adresse 5] durant environ quatre ans où il avait comme voisin très proche, au deuxième étage, la famille [G] avec laquelle il n'a « jamais eu de soucis au niveau du bruit que ce soit le jour ou la nuit ». Il ajoute qu'il avait de très bons rapports relationnels avec eux et que cette famille a toujours été très gentille avec lui.

Toutefois, ce témoin ne précise pas à quelle date il a quitté l'immeuble.

Madame [IZ] [I], ancienne propriétaire et résidente de l'immeuble du [Adresse 5], pendant au moins 10 ans, d'un logement, depuis vendu, situé au 2ème étage à côté de celui de la famille [G], atteste, à la date du 17 janvier 2019, n'avoir jamais eu de problèmes de voisinage avec la famille [G] durant toutes ces années. Elle ajoute : « c'était une famille discrète, avec un fils timide. Ils recevaient peu. Je n'ai même pas le souvenir qu'ils aient fait des fêtes de famille avec beaucoup d'invités. Ma chambre à coucher était contre leur appartement et c'était tellement silencieux que je ne suis pas en mesure de vous dire s'il y avait un salon, une cuisine ou une chambre à côté. Ils n'ont jamais été agressifs envers moi, et je ne

les ai jamais vus agressifs envers d'autres personnes.... ».

Comme le précédent, ce témoin ne précise pas à quelle date il a quitté l'immeuble.

Ainsi, ces témoignages émanant soit de personnes qui n'habitent pas l'immeuble, soit de personnes qui l'ont quitté à une époque indéterminée ou qui sont de nouveaux résidents arrivés après la période des faits examinés par le tribunal, ne sont pas de nature à remettre en cause les comportements et nuisances dénoncés par Madame [EI] et dont elle rapporte la preuve.

Mme [BM] [EI] justifie par deux attestations de Madame [XX] , psychologue clinicienne, faire l'objet d'une « thérapie individuelle visant à apaiser ses angoisses dues à des désagréments de voisinage » et avoir consulté cette praticienne pour sa fille [C], dans le cadre d'une prise en charge pour « angoisses nocturnes liées à des nuisances sonores de la part du voisinage ». Elle est par ailleurs suivie en consultation par Le Docteur [KD] [K] depuis décembre 2021, sans qu'il soit toutefois possible d'affirmer que ce suivi se rattache aux faits dénoncés.

Sur la persistance de comportements constitutifs de troubles anormaux du voisinage, postérieurs à la décision querellée, il ressort des pièces versées aux débats que le 7 mai 2019, Madame [EI] a déclaré aux services de police la présence inquiétante de Mme [O] [G] devant la porte de son appartement, de jour comme de nuit. Toutefois, si des photographies diurnes et nocturnes sont versées aux débats , il apparaît que la présence de Madame [G] avec un Ipad visait à photographier le digicode avec caméra électronique installé par Madame [EI] sur sa porte d'entrée, constitutif d'un dispositif de vidéo-surveillance irrégulier, selon la CNIL, dénoncé par Mme [G] car il avait pour effet de filmer les résidents empruntant la cage d'escaliers de l'immeuble.

Si le 2 janvier 2019, Madame [G] a stationné son véhicule devant le garage de Madame [EI], stationnement particulièrement gênant pour l'intimée exerçant la profession d'infirmière libérale, ce fait isolé ne relève pas d'une persistance des troubles de voisinage précédemment dénoncés.

Dans la nuit du 28 au 29 décembre 2018 et dans celle du 4 au 5 janvier 2019, les quatre pneus du véhicule de Mme [BM] [EI] ont été lacérés par des coups de couteau, ce qui l'a conduit à déposer plainte le 15 janvier 2019. Toutefois aucune preuve ne permet d'imputer ces faits à Mme [G], à son époux ou à leur fils.

Enfin, si le 16 février 2021, Mme [O] [G] a sollicité « la révocation » de l'intimée de son mandat de membre du conseil syndical, cette proposition relève de l'exercice par un copropriétaire de son droit de soumettre une résolution à l'assemblée générale des copropriétaires et ne constitue pas un trouble anormal de voisinage.

La persistance de troubles anormaux du voisinage sur l'année 2019 et au delà du jugement frappé d'appel n'est en conséquence pas établie.

Madame [EI] faisant démarrer l'apparition des tapages diurnes et nocturnes de son entrée dans son appartement le 1er juin 2017( sa plainte en pièce 13) et les faits dénoncés ayant perduré jusque courant 2018, l'indemnité réparant le préjudice subi par Madame [EI], exactement appréciée par le premier juge à hauteur de la somme de 8000,00 euros, sera confirmée, rien ne justifiant une indemnisation complémentaire.

Compte tenu de l'issue du litige, les consorts [G] sont déboutés de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Sur les demandes annexes:

Madame [G] , tant à titre personnel qu'en qualité d'héritière de [ML] [G], et [UK] [G] , en qualité d'héritier de [ML] [G], supporteront la charge des dépens de première instance et d'appel.

Il apparaît inéquitable , eu égard aux circonstances de la cause et à la position des parties de laisser à la charge de [BM] [EI] les frais occasionnés par la procédure et non compris dans les dépens .

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, réputé contradictoire, et en dernier ressort,

Rejette l'exception de nullité de l'assignation soulevée par Madame [O] [LH] veuve [G],

Déclare recevables des demandes de Madame [BM] [EI],

Reçoit l'intervention volontaire de [UK] [G], en qualité d'héritier de [ML] [G],

Déboute les consorts [G] de leur demande tendant à voir écarter des débats les attestations [X], [U] et [PY],

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant

Déboute [O] [LH] veuve [G] et [UK] [G] de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Les condamne aux dépens d'appel,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne [O] [LH] veuve [G] et [UK] [G] à payer à [BM] [EI] la somme de 5000,00 euros au titre des frais non compris dans les dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 23/11474
Date de la décision : 21/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-21;23.11474 ?
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