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19/03/2024 | FRANCE | N°22/09994

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 2-2, 19 mars 2024, 22/09994


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-2



ARRÊT AU FOND

DU 19 MARS 2024



N° 2024/117









Rôle N° RG 22/09994 -

N° Portalis DBVB-V-B7G-

BJXMN







[O] [V]



C/



PARQUET GENERAL

































Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Anthony CAVITTA





Décision déférée à l

a Cour :



Jugement du Tribunal Judiciaire de Marseille en date du 12 mai 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 20/05662





APPELANTE



Madame [O] [V]

née le 23 avril 1985 à [Localité 6] (ALGERIE),

demeurant [Adresse 1]



représentée par Me Anthony CAVITTA, avocat au barreau de MARSEILLE,



INTIME



PARQUET G...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-2

ARRÊT AU FOND

DU 19 MARS 2024

N° 2024/117

Rôle N° RG 22/09994 -

N° Portalis DBVB-V-B7G-

BJXMN

[O] [V]

C/

PARQUET GENERAL

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Anthony CAVITTA

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal Judiciaire de Marseille en date du 12 mai 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 20/05662

APPELANTE

Madame [O] [V]

née le 23 avril 1985 à [Localité 6] (ALGERIE),

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Anthony CAVITTA, avocat au barreau de MARSEILLE,

INTIME

PARQUET GENERAL,

comparant en la personne de Madame Valérie TAVERNIER, Avocat général

*-*-*-*-*

Ministère public

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 01 février 2024 en chambre du conseil. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Jean-Marc BAÏSSUS, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Jean-Marc BAÏSSUS, Président

Madame Michèle CUTAJAR, Conseiller

Madame Hélène PERRET, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Jessica FREITAS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 19 mars 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 mars 2024.

Signé par Monsieur Jean-Marc BAÏSSUS, Président et Madame Jessica FREITAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [O] [V], se disant née le 23 avril 1985 à [Localité 6] (Algérie), s'est vu opposer par décision du directeur des services de greffe du tribunal d'instance d'Avignon en date du 05 juin 2018 un refus de délivrance d'un certificat de nationalité française.

Elle s'est également vue opposer une décision de rejet en date du 02 octobre 2019 après recours hiérarchique formé devant le ministère de la Justice.

Par acte du 19 juin 2020, Mme [V] a fait assigner le procureur de la République devant le tribunal judiciaire de Marseille aux fins de voir annuler les décisions précédentes et ordonner la délivrance d'un certificat de nationalité française à son profit.

Par jugement rendu le 12 mai 2022, le tribunal judiciaire de Marseille a notamment débouté Mme [V] et a constaté son extranéité, au motif que les actes de naissance algériens produits n'étaient pas établis en conformité avec la législation algérienne en vigueur.

Mme [V] a interjeté appel de cette décision le 12 juillet 2022.

Dans le dernier état de ses conclusions, enregistrées le 12 décembre 2022, et auxquelles il est expressément fait renvoi pour un exposé plus ample de ses moyens et prétentions, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, Mme [V] demande à la cour de :

- déclarer recevable l'appel interjeté par Mme [V],

- réformer le jugement du tribunal judiciaire de Marseille en date du 12 mai 2022,

- annuler la décision de refus de délivrance d'un certificat de nationalité française en date du 5 juin 2018 et le rejet du recours gracieux de la requérante en date du 2 octobre 2019,

- constater la nationalité française de Mme [V] au regard tant de sa filiation paternelle que maternelle,

- ordonner la délivrance d'un certificat de nationalité française à Mme [V],

- condamner l'Etat aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître BRUNA-ROSSO en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- condamner l'Etat à payer la somme de 960 euros à Mme [V] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [V] fait en effet notamment valoir que :

- elle ne peut être tenue pour responsable de ce que l'administration algérienne lui a établi plusieurs actes de naissance différents ; qu'il ne s'agit que d'erreurs de forme ; que son acte de naissance est parfaitement conforme à la loi algérienne ; qu'il a été dressé durant un jour ouvrable en Algérie ; que la déclaration de sa naissance auprès de l'état civil a été faite par l'hôpital dans lequel elle est née ;

- sa demande de nationalité française était fondée tant sur sa filiation paternelle que maternelle ;

- une rectification de l'acte de naissance de sa mère concernant le nom de ses parents a été enregistrée par décision du Procureur de la République de [Localité 5] ; que la mention de cette rectification est portée sur l'acte de naissance de sa mère ;

- l'état civil algérien n'était pas tenu dans les années 1920 avec autant de rigueur qu'aujourd'hui ; que cela explique les approximations dans l'année de naissance des grands-parents maternels ;

- elle produit la copie intégrale de l'acte de mariage de ses grands-parents paternels ;

- la possession d'état de français de ses parents depuis leur naissance, après l'indépendance de l'Algérie et jusqu'à aujourd'hui fait présumer la qualité de français de statut civil de droit commun ; qu'ils étaient mineurs au moment de l'indépendance et n'ont pu souscrire à une quelconque déclaration.

Dans le dernier état de ses conclusions, enregistrées le 22 décembre 2022, et auxquelles il est expressément fait renvoi pour un exposé plus ample de ses moyens et prétentions, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, le Procureur Général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence demande à la cour de :

- dire que la procédure est régulière au regard de l'article 1043 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Marseille du 12 mai 2022,

- ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil,

- condamner Mme [V] aux entiers dépens.

Le Procureur Général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence fait en effet notamment valoir que :

- l'acte de naissance de l'appelante n'est pas conforme à la loi algérienne en ce qu'il ne présente pas toutes les mentions obligatoires ; que les copies présentant des mentions différentes de cet acte de naissance le rendent dépourvu de tout caractère probant ;

- l'appelante se contente de produire un extrait du registre des actes de mariage s'agissant de ses grands-parents paternels ; que la filiation de ses parents à l'égard de leurs ascendants ne peut être démontrée que par un acte de mariage antérieur à leur naissance ;

- il existe de nombreuses incohérences sur les actes d'état civil produits pour attester de la filiation de la mère de l'appelante ;

- l'appelante ne rapporte pas la preuve de la souscription d'une déclaration recognitive de nationalité par ses parents ; qu'elle ne se prévaut d'aucun jugement ni décret d'admission au statut de droit commun s'agissant de ses parents ; qu'il est surprenant que son père soit titulaire d'une carte nationale d'identité alors qu'il n'est pas de nationalité française et qu'il s'est vu refuser la délivrance d'un certificat de nationalité française ; qu'elle ne démontre pas que son père ou sa mère ait joui de façon constante de la possession d'état de Français ; qu'elle ne dispose quant à elle d'aucun élément de possession d'état de Française.

L'affaire a été appelée à l'audience du jeudi 25 janvier 2024, date à laquelle l'ordonnance de clôture a été rendue.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la régularité de la procédure

Aux termes de l'article 1043 du code de procédure civile, dans sa version applicable à l'instance, dans toutes les instances où s'elève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l'assignation est déposée au ministère de la justice qui en délivre recépissé. En l'espèce, le ministère de la justice a délivré ce recépissé le 3 octobre 2022. La condition de l'article 1043 du code de procédure civile est ainsi respectée. La procédure est donc régulière.

Sur la demande de délivrance d'un certificat de nationalité française

Mme [V] sollicite de la cour d'ordonner la délivrance d'un certificat de nationalité française. Cependant, la cour n'a pas le pouvoir d'en ordonner la délivrance. Cette demande est donc irrecevable.

Dès lors, la cour statuera uniquement sur la demande, par ailleurs formée par Mme [V], de voir juger qu'elle est de nationalité française, étant précisé qu'à supposer cette demande accueillie, la délivrance d'un certificat de nationalité française serait alors de droit.

Sur l'action déclaratoire de nationalité française

Sur le fond

Madame [O] [V], se disant née le 23 avril 1985 à [Localité 6] (Algérie), revendique la nationalité française par filiation sur le fondement de l'article 18 du code civil, pour être l'enfant de M. [Z] [V], né le 8 juin 1949 à [Localité 2] (Maroc), et de Mme [L] [K], née le 11 août 1949 à [Localité 3] (Maroc), mariés le 21 juillet 1975 à [Localité 6] (Algérie).

Son action a été introduite à la suite d'un refus de délivrance d'un certificat de nationalité française qui lui a été opposé le 5 juin 2018 par le greffier en chef du tribunal judiciaire d'Avignon au motif que l'acte de naissance présenté aurait été dressé un vendredi, et que les actes d'état civil présentés comportent des incohérences.

Son recours gracieux ayant été rejeté le 2 octobre 2019, Mme [V] a saisi le tribunal judiciaire de Marseille, qui a rejeté sa demande par jugement 12 mai 2022.

En application de l'article 30 alinéa 1er du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de Français lorsqu'il n'est pas déjà titulaire d'un certificat de nationalité délivré à son nom conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du meme code.

La situation de Mme [V] est régie par les dispositions de1'article 18 du code civil, aux termes duquel est français l'enfant dont 1'un des parents au moins est français. Ainsi la nationalité française de l'enfant doit résulter de la nationalité française du parent duquel il la tiendrait d'une part et, d'autre part, d'un lien de filiation légalement établi à l'égard de celui-ci, au moyen d'actes d'état civil probants au sens de l'article 47 du code civil. En outre, afin de satisfaire aux exigences de l'article 20-1 du code civil, ce lien de filiation doit être intervenu pendant la minorité de la partie demanderesse pour avoir des effets sur la nationalité.

1. Sur l'état civil de Mme [V]

Aux termes de l'article 47 du code civil en effet, tout acte de 1'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de1'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégu1ier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.

Enfin, nul ne peut revendiquer à quelque titre que ce soit, la nationalité française, s'il ne dispose d'un état civil fiable et certain.

Il y a lieu de relever que la totalité des actes d'état civil versés aux débats, dont les actes de naissance de Mme [V] sont produits en simple photocopie. Ce défaut de production d'originaux ou de copies certifiées conformes selon les règles applicables suffirait à justifier le débouté pour ce seul motif, les documents versés etant exempts de toutes garanties d'intégrité et d'authenticité et la cour ne pouvant en conséquence s'assurer de l'authenticité des états civils revendiqués. Ceci étant posé, le ministère public ne s'est pas fondé sur cette argumentation.

Mme [V] produit pour justifier de son état civil:

- la photocopie d'une copie intégrale delivrée le 14 mars 2018 par l'officier d'état civil de la commune de [Localité 6] (Algerie) d'un acte de naissance n° 01773 du 23 avril 1985 qui indique que [O] [V] est née le 23 avril 1985 à l3h30 à [Localité 6] de [Z], né le 8 juin 1949 à [Localité 2] (Maroc), employé à Sonelec et de [K] [L], née le 11 août 1949 à [Localité 3] (Maroc), sans profession; l'acte a été dresseé le 24 avril 1985 à 10h20 sur déclaration faite par "l'hôpital"; y figure en mention complémentaire l'indication d'un mariage le 3 decembre 2014 avec [R] [N] à [Localité 4]; le nom de l'officier d'état civil qui a recueilli la déclaration est omis,

- la photocopie d'une copie intégrale délivrée le 25 fevrier 2020 par l'officier de l'état civil de la commune de [Localité 6] (Algerie) d'un acte de naissance n° 01773 du 23 avril 1985 qui indique que [O] [V] est née le 23 avril 1985 à 13h30 à [Localité 6] de [Z] (sans nom de famille), âgé de 36 ans, sans indication du lieu de naissance, employeur Sonelec et de [K] [L], âgée de 36 ans, sans indication du lieu de naissance, sans profession ; l'acte a été dressé le 24 avril 1985 à 10h20 sur declaration faite par "l'hôpital n°1474/1985-04-24"; l'officier d'état civil rédacteur est indiqué comme étant [W] [M]; figure en mention complémentaire l'indication d'un mariage le 3 decembre 2014 avec [R] [N] à [Localité 4].

Force est de constater un certain nombre de discordances entre ces deux copies de ce qui est censé être le même acte:

- la date et le lieu de naissance des parents figure dans la première copie, tandis que la seconde ne comporte que leur âge de 36 ans (d'ailleurs inexact puisqu'ils étaient tous deux âgés de 35 ans),

- l'omission du nom de l'officier d'état civil ayant recueilli la déclaration dans la première copie,

- l'identité du déclarant est simplement "l'hôpital" dans la première copie, tandis que dans la seconde la mention est suivie d'une référence et d'une date,

- seul l'acte du 25 février 2020 comporte le code barre imposé par les dispositions de l'arrêté du 29 décembre 2014 fixant les caractéristiques des documents d'état civil algériens.

Si, comme elle l'indique, Mme [V] ne peut être responsable de ce que l'administration algérienne lui a délivré plusieurs actes de naissance différents, cela n'a pas pour conséquence d'imposer à la juridiction de reconnaître la validité de ces actes.

L'acte délivré le 14 mars 2018 comporte des irrégularités telles que ce document ne peut être considéré comme probant. Spécialement, et contrairement à ce que fait plaider Mme [V], l'omission du nom de l'officier d'état civil rédacteur de l'acte de naissance est absent, et cela constitue un vice de fond et non de simple forme.

L'acte délivré le 25 février 2020 l'est sur un formulaire E. C. 7 qui comporte pour les parents la mention "agé de" et non celle de "né le", et ne comporte pas d'espace pour indiquer le lieu de naissance des parents. Ceci peut expliquer la discordance relevée ci-dessus sur la question de la date et du lieu de naissance des parents.

Subsiste nénamoins pour ce second acte l'irrégularité concernant l'indication du nom du déclarant, puisque la mention "l'hôpital" suivie ou non d'une référence ne correspond nullement aux exigences de l'article 62 de l'ordonnance algérienne 70-30 du 19 février 1970 relative à l'état civil qui impose la mention de l'identité du déclarant, personne physique, comme le rappelle d'ailleurs le formulaire. La production de ce qui est présenté comme un extrait du registre des naissance de l'hôpital de [Localité 6], lui aussi sous la forme d'une photocopie, n'a aucune valeur probatoire propre, mais ne peut que venir consolider les indications défaillantes de la copie de l'acte de naissance délivré le 25 février 2020.

Ceci étant dit, la cour considère que cette copie est suffisamment régulière pour considérer que les faits qui y sont déclarés correspondent à la réalité, et que Mme [V] dispose d'un état civil fiable et certain au sens des dispositions de l'article 47 du code civil.

2. Sur la nationalité française des parents de Mme [V]

S'agissant de M. [Z] [V], le ministère public produit un acte de notification de refus de certificat de nationalité française délivré le 13 juillet 2006. Mme [V] n'apporte aucun élément probant qui permette de penser que cette décision de refus ait été contestée. Ceci relativise donc ce que l'appelante qualifie de "grossière erreur" en ce que l'auteur de la décision du 5 juin 2018 aurait omis de prendre en compte la nationalité de M. [V].

S'agissant des deux parents, tous deux d'ailleurs nés au Maroc, Mme [V] n'apporte pas la preuve de ce qu'ils ressortaient l'un ou l'autre du statut de droit commun en Algérie, ni que l'un de leurs ascendants aurait été admis à la qualité de citoyen français. Il faut en déduire que les parents de Mme [V] relevaient donc du statut civil de droit local. Dès lors s'appliquent les dispositions des articles 32-1 et 32-2 qui se sont substitués aux dispositions de l'ordonnance n°62-825 du 21 juillet 1962 et de la loi n°66-945 du 20 décembre 1966, selon lesquelles les personnes originaires d'Algérie de statut civil de droit local ont perdu la nationalité française le ler janvier 1963, faute d'avoir souscrit la déclaration recognitive prévue par les articles 2 de l'ordonnance du 21 juillet 1962 et ler de la loi du 20 décembre 1966 precités, sauf si une autre nationalité ne leur a pas été conférée postérieurement à cette date.

En l'espèce, Mme [V] démontre qu'elle est titulaire d'un passeport algérien. En revanche, elle ne fait nullement la preuve de ce qu'une déclaration recognitive aurait été souscrite pour le compte de ses parents avant le 1er janvier 1963. Le fait qu'ils aient été mineurs au jour de l'indépendance de l'Algérie est sans incidence, la déclaration devant alors être faite par leurs ascendants. Enfin, Mme [V] prétend pas que l'un de ses autres ascendants aurait été titulaire de la nationalité française.

Si les parents de l'appelante ont pu disposer d'éléments de possession d'état sous la forme de pièces d'identité ou de cartes d'électeur, ceci ne modifie en rien l'observation qui vient d'être faite.

Mme [V] revendique subsidiairement l'application des dispositions de l'article 32-2 du code civil. Or ce texte ne concerne que les personnes nées en Algérie, alors que ses parents sont nés au Maroc.

Elle se fonde encore sur les dispositions de l'article 30-2 du code civil. Mais ce texte impose la preuve d'une double possession d'état de français, tant pour l'intéressé que pour ses parents. En l'occurrence, Mme [V] ne produit aucun élément de possession d'état de française, étant précisé qu'une carte vitale n'établit que le droit à des prestations sociales en France, ce qui n'est pas réservé aux citoyens français mais à toute personne en situation de séjour régulier.

L'appelante verse enfin aux débats la pièce d'identité de son frère [P], tandis que son frère [T] n'est titulaire que d'un certificat de résidence algérien. Ces éléments ne font nullement la preuve de la nationalité française de Mme [V], ni de la possession d'état de citoyen français.

Au regard de ces éléments, il y a lieu de débouter Mme [V] de 1'ensemble de ses demandes et de juger qu'elle n'est pas française.

Sur la mention prévue à l'article 28 du code civil

Aux termes de l'article 28 du code civil, mention sera portée, en marge de l'acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l'acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintegration dans cette nationalité. Il sera fait de même mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française et des décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité.

En conséquence, cette mention sera en l'espèce ordonnée.

Sur les demandes accessoires

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Mme [V], qui succombe, supportera la charge des dépens.

Par voie de conséquence, il n'y a pas lieu de faire droit à la condamnation de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article 700 du même code.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe :

DIT la procédure régulière au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile,

JUGE irrecevable la demande tendant à voir ordonner la délivrance d'un certificat de nationalité française

JUGE que Madame [O] [V], née le 23 avril 1985 à [Localité 6] (Algérie) n'est pas de nationalité française,

CONFIRME le jugement frappé d'appel en toutes ses dispositions

ORDONNE la mention prévue par l'article 28 du code civil, 1059 du code de procédure civile et le décret n° 65-422 du 1er juin 1965 portant création d'un service central de l'état civil auprès du ministère des affaires étrangères.

CONDAMNE Mme [O] [V] aux dépens, la déboute de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que Maître Marine BRUNA-ROSSO, avocat, pourra exercer à l'encontre de Mme [O] [V] le droit prévu par l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 2-2
Numéro d'arrêt : 22/09994
Date de la décision : 19/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-19;22.09994 ?
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