La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/03/2024 | FRANCE | N°22/00267

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-6, 15 mars 2024, 22/00267


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6



ARRÊT AU FOND

DU 15 MARS 2024



N° 2024/ 091













Rôle N° RG 22/00267 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BIUW2







[H] [U]





C/



S.A.S. PACA ASCENSEURS SERVICES 83





















Copie exécutoire délivrée

le :15/03/2024

à :



Me Stéphane MAMOU, avocat au barreau de TOULON



Me Muriel OUD

IN, avocat au barreau de MARSEILLE









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 13 Décembre 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 20/00127.





APPELANT



Monsieur [H] [U], demeurant [Adresse 3] - [Locali...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6

ARRÊT AU FOND

DU 15 MARS 2024

N° 2024/ 091

Rôle N° RG 22/00267 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BIUW2

[H] [U]

C/

S.A.S. PACA ASCENSEURS SERVICES 83

Copie exécutoire délivrée

le :15/03/2024

à :

Me Stéphane MAMOU, avocat au barreau de TOULON

Me Muriel OUDIN, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 13 Décembre 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 20/00127.

APPELANT

Monsieur [H] [U], demeurant [Adresse 3] - [Localité 1]

représenté par Me Stéphane MAMOU, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

S.A.S. PACA ASCENSEURS SERVICES, demeurant [Adresse 4] - [Localité 2]

représentée par Me Muriel OUDIN, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été appelée le 16 Janvier 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

La Cour était composée de :

Monsieur Philippe SILVAN, Président de chambre

Madame Estelle de REVEL, Conseiller

Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Mars 2024.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Mars 2024,

Signé par Monsieur Philippe SILVAN, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

M. [H] [U] a été engagé par la société PACA Ascenseurs services par contrat de travail à durée déterminée du 11 février 2011, renouvelé le 14 février 2011. La relation s'est ensuite poursuivie dans le cadre d'une relation à durée indéterminée.

Il a démissionné par lettre datée du 19 décembre 2019 dans les termes suivants:

' par la présente, je vous prie de bien vouloir noter ma démission à réception du courrier. J'effectuerai mon préavis de 1 mois prévu par la convention collective, du 14 janvier 2020 au 14 février 2020 inclus date à laquelle je serai libre de tout engagement'

Estimant avoir été contraint à démissionner suite à des manoeuvres de son employeur, M. [U] a saisi le Conseil des Prud'hommes le 27 février 2020 aux fins de requalification de la rupture en licenciement nul, et à défaut sans cause réelle ni sérieuse et condamnation de l'employeur au paiement de diverses sommes.

Par jugement du 13 décembre 2021, le conseil de prud'hommes de Toulon a débouté Monsieur [H] [U] de l'ensemble de ses demandes et a laissé les dépens à la charge de chacune des parties.

M. [U] a relevé appel du jugement le 7 Janvier 2022.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 31 mars 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé détaillé des moyens, M. [U] demande à la cour de :

'INFIRMER le Jugement du Conseil des Prud'hommes de Toulon en date du 13 décembre 2021, en ce qu'il a :

Dit que la démission de Monsieur [U] est valide et sans équivoque,

Débouté Monsieur [U] de l'ensemble de ses demandes,

Laissé les dépens à la charge de la partie qui succombe,

Et en ce qu'il n'a pas fait droit à toutes les demandes suivantes du salarié

ET LA COUR Y AJOUTANT ET STATUANT A NOUVEAU :

JUGER que la lettre de rupture de Monsieur [H] [U] en date du 14 Janvier 2020 est équivoque et doit être requalifiée en licenciement nul et en toute hypothèse sans cause réelle ni sérieuse,

ORDONNER LA REQUALIFICATION de la lettre de rupture de Monsieur [U] [H] en date du 14 Janvier 2020 en licenciement nul et en toute hypothèse sans cause réelle et sérieuse et abusif,

JUGER la rupture du contrat de travail de Monsieur [H] [U] abusive aux torts de l'employeur,

ORDONNER que la rupture du contrat de travail de Monsieur [H] [U] aura les mêmes effets qu'un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse et abusif,

CONDAMNER la Société PACA ASCENSEURS à payer à Monsieur [H] [U] la somme de 16 845.36 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive, et licenciement nul ou sans cause réelle ni sérieuse,

CONDAMNER la Société PACA ASCENSEURS à payer à Monsieur [U] [H] la somme de 4 693.89 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

CONDAMNER la Société PACA ASCENSEURS à payer à Monsieur [U] la somme de 14 123.25 € à titre d'indemnité de préavis, outre la somme de 1 412.33 € à titre de congés payés sur préavis,

CONDAMNER la Société PACA ASCENSEURS à payer à Monsieur [U] la somme de 4 211.34 € à titre d'indemnité de préavis, outre la somme de 421.13 € à titre de congés payés sur préavis,

CONDAMNER la Société PACA ASCENSEURS à payer à Monsieur [U] la somme de 1 023.36 € à titre d'indemnité de congés payés,

CONDAMNER la Société PACA ASCENSEURS à payer à Monsieur [U] la somme de 400.00 € à titre de rappels d'heures supplémentaires pour le mois de décembre 2019, outre 40.00 € à titre de congés payés sur ces rappels,

CONDAMNER la Société PACA ASCENSEURS à payer à Monsieur [U] la somme de 302.72 € à titre de rappels de salaires et à titre de restitution sur les retenues de la fiche de paie du mois de janvier 2020 / grands déplacements,

CONDAMNER la Société PACA ASCENSEURS à payer à Monsieur [U] la somme de 2 000.00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

CONDAMNER la Société PACA ASCENSEURS aux entiers dépens du procès, distraits au profit de Maître Stéphane MAMOU, Avocat aux Offres de Droits,

A titre Subsidiaire, si la Cour n'était pas suffisamment éclairée sur l'auteur des écritures,

SUBSIDIAIREMENT ET AVANT DIRE DROIT :

ORDONNER avant dire droit une expertise graphologique judiciaire pour comparer et vérifier l'écriture et la signature du Président de la Société PACA ASCENSEURS, Monsieur [Y] [O], et notamment les pièces 3 et 12 du salarié, avec l'ensemble des pièces du dossier,

JUGER que l'expert devra comparer l'écriture de Monsieur [U] [H] d'une part, et de Monsieur [Y] [O] d'autre part, avec les mentions manuscrites figurant sur les pièces produites par les parties

JUGER que l'expert se fera remettre l'intégralité des pièces produites par les parties ainsi que toutes pièces utiles à sa mission,

JUGER que la Société PACA ASCENSEURS devra faire l'avance des frais d'expertise et l'y condamner au besoin.'

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 23 mai 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé détaillé des moyens, la société demande à la cour de :

A TITRE PRINCIPAL

CONFIRMER Ie jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Toulon le 13 décembre 2021 en qu'il a :

DIT que la démission de M. [U] est valide et sans équivoque ;

DEBOUTE M. [U] de l'ensemble de ses demandes ;

DEBOUTE la SARL PACA ASCENSEURS SERVICES de ses demandes reconventionnelle ;

DIT n'y avoir lieu a exécution provisoire ;

LAISSE les dépens a la charge de la partie qui succombe.

DEBOUTER Monsieur [H] [U] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

DEBOUTER Monsieur [H] [U] de sa demande d'expertise ainsi que de sa demande de voir la Société PACA ASCENSEUR SERVICES faire l'avance voire supporte des frais d'expertise.

CONDAMNER Monsieur [H] [U] a verser à la société PACA

ASCENSEURS SERVICES la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

CONDAMNER Monsieur [H] [U] aux entiers dépens de l'instance.'

L'ordonnance de clôture est en date du 22 décembre 2023.

M. [U] a déposé de nouvelles conclusions le 22 décembre 2023 et une nouvelle pièce, n°25.

Par conclusions du 29 décembre 2023, la société PACA Ascenseurs Services demande à la cour de rejeter les conclusions récapitulatives de l'appelant et la pièce n°25.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la révocation de l'ordonnance de clôture

L'article 803 du code de procédure civile dispose que l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.

En l'espèce, le dépôt par M. [U] de dernières conclusions au fond le 22 décembre 2023 et d'une pièce n°25 sont postérieures à l'ordonnance de clôture, dès lors que celle-ci a été notifiée aux parties le 22 décembre 2023 à 10h49 alors que les conclusions l'ont été le même jour à 12h52.

La cour relève que le 14 novembre 2023, les parties avaient été informées de la date de clôture et de l'audience.

M. [U] ne sollicite pas la révocation de la clôture et ne fait valoir aucune cause grave depuis qu'elle a été rendue pour justifier une éventuelle révocation.

La cour observe que la pièce litigieuse n°25 consiste en une ordonnance de non lieu rendue par le juge d'instruction du tribunal judiciaire de Toulon le 22 septembre 2023, suite à la constitution de partie civile de la société PACA Ascenseurs Services pour des faits d'escroquerie, d'altération frauduleuse de la vérité dans un écrit et d'usage de faux en écritures. L'ordonnance de non lieu n'apporte pas d'élément nouveau quant au différend existant entre les parties puisqu'elle ne suffit pas à établir que le gérant a effectivement exercé des pressions et des menaces de plaintes sur la personne de M. [U] antérieurement ou concomitamment à sa démission, lesquelles auraient eu pour conséquence de vicier sa volonté.

En cet état, il n'y a pas lieu de révoquer l'ordonnance de clôture et par conséquent les conclusions notifiées postérieurement à celle-ci, de même que les pièces postérieures, en l'occurrence la pièce 25 de l'appelant, doivent être déclarés irrecevables.

Sur l'exécution du contrat de travail

La cour relève que dans la partie discussion de ses conclusions, M. [U] réclame la condamnation de la société PACA Ascenseurs Service au paiement de la somme de 400 euros au titre des rappels d'astreinte de décembre 2019, sans que cette demande ne figure au dispositif de ses écritures.

En application de l'article 954 du code de procédure civile, il convient de dire que la cour n'a pas à répondre à cette demande n'en étant pas saisie.

1/ Sur les heures supplémentaires

M. [U] soutient avoir effectué des heures supplémentaires au mois de décembre 2019 et sollicite à ce titre la somme de 400 euros outre congés payés afférents.

La société PACA Ascenseurs Service s'oppose à la demande faisant valoir que le salarié n'indique pas le nombre d'heures supplémentaires qu'il estime avoir accompli, ni les heures, jours et date de celles-ci et se cantonne à réclamer un quantum de rappel de salaire sans lui permettre d'y répondre.

Il indique par ailleurs que M. [U] ne lui a jamais adressé de demande en paiement, ni aucune réclamation pendant la durée contractuelle et n'a jamais contesté les salaires versés.

L'article L.3171-4 du code du travail dispose qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, à l'appui de sa demande, M. [U] ne produit aucun élément, ni décompte, ni planning de travail des heures qu'il aurait effectuées, ni tableau récapitulatif du nombre d'heures de travail accomplies. Il se borne à réclamer un rappel de salaire, sans même indiquer le nombre d'heures de travail que cela a représenté.

Ce faisant, faute d'apporter des éléments au soutien de ses prétentions, conformément à l'article 6 du code de procédure civile, qui doivent au demeurant être suffisamment précis quant aux heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées et dont il demande le paiement pour permettre à l'employeur d'y répondre utilement, sa demande doit être rejetée.

2/ Sur les retenues sur salaire

M. [U] sollicite la condamnation de la société PACA Ascenseurs Services au paiement d'une somme de 302,72 euros à titre de rappel de salaire et de restitution sur les retenues de la fiche de paie du mois de janvier 2020/ grands déplacements.

La société PACA Ascenseurs Services conteste la demande soutenant tout d'abord que l'appelant ne fait valoir aucun moyen de droit, ni de fait au soutien de celle-ci. Il fait valoir à toutes fins que la retenue sur salaire querellée d'un montant de 302,72 euros en janvier 2020 s'explique par le fait qu'un versement indu avait été réalisé en décembre 2019 d'une indemnité au titre des grands déplacements à laquelle le salarié n'avait pas droit aux termes de son contrat de travail.

Il ressort des explications de l'intimée, non autrement contestées, et du contrat de travail ne stipulant pas d'indemnité de grand déplacement, qu'une somme de 302,72 euros a été indûment versée au salarié en décembre 2019 et qu'elle a fait l'objet d'une retenue le mois suivant par l'employeur.

Le salarié ne faisant valoir aucun moyen de droit ou de fait pour justifier sa demande en restitution, il convient de confirmer le jugement l'ayant débouté de sa demande.

Sur la rupture du contrat de travail

Moyens des parties :

M. [U] soutient que sa démission est équivoque faisant valoir qu'il a subi des pressions de son employeur, consistant en des menaces de plaintes pour détournements ou malversations à son encontre, mais aussi à l'encontre de ses frères, également salariés de la société, et qu'il a été placé dans l'obligation de signer une lettre préétablie par son employeur et datée du 19 décembre 2019.

Il soutient que l'éviction concomitante de ses deux autres frères (le 3e a été licencié) rend équivoque leur démission, dont la sienne.

Il se fonde sur un rapport graphologique dont il ressort que la lettre de démission de son frère [S] et la sienne proviennent du même ordinateur, de la même imprimante appartenant à l'employeur au siège situé aux [Localité 2], selon le même modèle, et que les mentions manuscrites ajoutées sur les deux lettres, des dates, proviennent du gérant de la société.

Il ajoute qu'une plainte avec constitution de partie civile a été déposée par l'employeur à son encontre après la démission et était précédée de menaces de dénonciations, ce qui a rendu son consentement vicié.

Il estime en conséquence qu'il est établi que sa démission a été préparée par son employeur et ne résulte pas de sa volonté délibérée de quitter l'entreprise, ceci étant conforté par le courrier qu'il a adressé à son employeur le 14 février 2020 contestant sa démission et l'entretien organisé préalablement pour qu'il démissionne.

En réplique, la société PACA Ascenseurs Services soutient que la démission de M. [U] est claire et non équivoque et qu'il ne rapporte pas la preuve de menaces ou de contraintes de sa part, de sorte qu'il a donné sa démission de façon libre et éclairée, ce qui est confirmé par M. [Z], directeur général de la société, présent au moment de la remise de sa démission par le salarié.

L'employeur fait valoir que M. [U] a remis sa démission le 19 décembre 2019 et a accompli son préavis sans incident et sans protestation jusqu'au 14 février 2020, date à laquelle il a contesté sa démission prétextant que son employeur l'aurait menacé s'il refusait de démissionner, sur fond d'accusations de malversations, ce qu'il ne démontre pas, procédant par simples allégations, tout en reconnaissant avoir rédigé la lettre de démission. Il conteste l'existence d'un entretien préalable à la démission sur fond de menace.

Il critique les attestations produites et notamment celle de M. [F] [G] qui ne comporte pas les mentions prescrites par l'article 202 du code de procédure civile et ne contient pas de faits auxquels il aurait personnellement assisté, ni sa pièce d'identité permettant de vérifier celle-ci.

Réponse de la cour

Il est rappelé que la démission ne se présume pas et qu'elle ne peut résulter que d'une manifestation de volonté claire et non équivoque du salarié de mettre un terme à la relation de travail ; elle n'est pas soumise à des conditions de forme particulières.

Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de la démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission.

En l'espèce, il n'est pas contesté que le salarié a remis la lettre de démission en mains propres contre décharge au gérant de la SARL PACA Ascenseurs Services le 19 décembre 2019.

Ce n'est que le 14 février 2020, soit plus d'un mois et demi après, et alors qu'il a exécuté son préavis sans difficulté, que le salarié a adressé à l'employeur un nouveau courrier intitulé ' dénonciation de la démission sous la contrainte', affirmant 'l'avoir rédigé par mes propres soins sous la pression et à cause de votre demande à travers mon responsable travaux mon grand frère [S] [U]. Je n'ai eu aucune convocation ou appel téléphonique de votre part pour me prévenir de cette décision et je ne comprends pas pourquoi vous avez voulu que je démissionne. En aucun cas, je voulais quitter votre société après 9 années de bons et loyaux services. Vous avez demandé à mon frère d'ouvrir une société et qu'il me fasse travailler avec lui. Vous m'avez appelé en me traitant de voleur car des outils ont été volés alors que je n'ai rien à voir avec ce vol et vous m'avez menacé que vous me déduirez du solde de tout compte. J'estime que ce n'est pas une démission (...) Je n'ai pas démissionné de mon plein gré'.

Après examen des pièces versées aux débats par les parties, il ressort que l'attestation de M. [G] indiquant que M. [U] n'avait aucune intention de partir de la société du fait de ses 17 ans d'ancienneté et qu'il s'y plaisait, ne permet pas de retenir un comportement fautif de l'employeur à l'origine de la démission présentée par M. [U].

Ainsi, la cour relève que M. [G] n'a été témoin d'aucune situation au cours de laquelle l'employeur aurait usé de menaces de plaintes ou de violence à l'encontre de M. [U] dans le but d'obtenir sa démission.

Les mentions manuscrites figurant sur un modèle de lettre de démission au nom de M. [H] [U] et attribuées au gérant selon le rapport d'expertise de Mme [T], ne démontrent pas davantage que ce document ait été communiqué par l'employeur dans le cadre de pressions ou de menaces exercées.

S'il est exact que la signature figurant au bas de la lettre de démission consiste en un trait, rien ne permet de l'attribuer à M. [Y], président de la société; la cour relevant en tout état de cause, que dans son courrier de contestation de sa démission, le salarié ne discute cependant pas en être le rédacteur et au contraire l'affirme clairement.

Le fait que le frère de l'appelant, M. [S] [U], également salarié de la société, ait démissionné le même jour ne permet pas non plus de conférer un caractère équivoque à cette démission, ni d'ailleurs le licenciement contemporain de leur autre frère, [B] [U], survenu le 30 mars 2020, soit trois mois plus tard, dont il ressort de la lettre de licenciement produite aux débats qu'il était motivé par un motif disciplinaire tiré de mentions erronées sur les feuilles de pointage, donc sans lien avec la rupture de l'appelant.

L'existence d'un entretien avec l'employeur qui aurait précédé la démission querellée et la préparation du courrier de démission à cette occasion ne ressort d'aucune pièce produite par le salarié.

Enfin, la saisine par M. [U] du conseil de prud'hommes de Toulon pendant l'exécution de son préavis ne suffit pas non plus à établir la matérialité des pressions alléguées et qu'en de telles circonstances, il n'avait pas réellement exprimé de volonté de mettre fin à la relation contractuelle.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que le caractère équivoque de la démission n'est pas rapporté par le salarié.

Le jugement est par conséquent confirmé y compris en ce qu'il a rejeté les demandes financières subséquentes à une requalification en licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse.

Sur les autres demandes

Au vu de la situation économique des parties, l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SARL Provence Alpes Côte d'Azur ascenseurs.

Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, M. [U] succombant en ses prétentions, supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

La COUR, Statuant publiquement et contradictoirement,

DIT n'y avoir lieu à révocation de l'ordonnance de clôture;

DECLARE irrecevables les conclusions notifiées par M.[H] [U] le 22 décembre 2023 et sa pièce 25

CONFIRME le jugement entrepris,

DEBOUTE la SARL Provence Alpes Côte d'Azur ascenseurs de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [H] [U] aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-6
Numéro d'arrêt : 22/00267
Date de la décision : 15/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-15;22.00267 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award