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14/03/2024 | FRANCE | N°20/04218

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 14 mars 2024, 20/04218


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2024

AC

N° 2024/ 95









Rôle N° RG 20/04218 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BFY2S







[F] [N]

[P] [G] épouse [N]





C/



[B] [I] épouse [K]

[A] [I] épouse [T]

[M] [W]

[V] [R] épouse [W]

S.A.R.L. CABINET ARRAGON











Copie exécutoire délivrée

le :

à :



la SELARL SARAGA-BROSSAT RACH

EL



SCP [J] TOLLINCHI - CORINNE PERRET-VIGNERON



SCP JACQUIER & ASSOCIES



Me Martine CLARAMUNT-AGOSTA





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal Judiciaire de TOULON en date du 03 Mars 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00747.





...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2024

AC

N° 2024/ 95

Rôle N° RG 20/04218 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BFY2S

[F] [N]

[P] [G] épouse [N]

C/

[B] [I] épouse [K]

[A] [I] épouse [T]

[M] [W]

[V] [R] épouse [W]

S.A.R.L. CABINET ARRAGON

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

la SELARL SARAGA-BROSSAT RACHEL

SCP [J] TOLLINCHI - CORINNE PERRET-VIGNERON

SCP JACQUIER & ASSOCIES

Me Martine CLARAMUNT-AGOSTA

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal Judiciaire de TOULON en date du 03 Mars 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00747.

APPELANTS

Monsieur [F] [N]

demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Rachel SARAGA-BROSSAT de la SELARL SARAGA-BROSSAT RACHEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Alexis KIEFFER de l'ASSOCIATION KIEFFER LECOLIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de TOULON, plaidant

Madame [P] [G] épouse [N]

demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Rachel SARAGA-BROSSAT de la SELARL SARAGA-BROSSAT RACHEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Alexis KIEFFER de l'ASSOCIATION KIEFFER LECOLIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de TOULON, plaidant

INTIMES

Madame [B] [I] épouse [K]

demeurant [Adresse 1]

représentée par la SCP CHARLES TOLLINCHI - CORINNE PERRET-VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Nicolas MASSUCO de la SELARL CABINET DEGRYSE ET MASSUCO, avocat au barreau de TOULON, plaidant

Madame [A] [I] épouse [T]

demeurant [Adresse 3]

représentée par la SCP CHARLES TOLLINCHI - CORINNE PERRET-VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Nicolas MASSUCO de la SELARL CABINET DEGRYSE ET MASSUCO, avocat au barreau de TOULON, plaidant

Monsieur [M] [W]

demeurant [Adresse 15]

représenté par Me Martine CLARAMUNT-AGOSTA, avocat au barreau de TOULON

Madame [V] [R] épouse [W]

demeurant [Adresse 15]

représentée par Me Martine CLARAMUNT-AGOSTA, avocat au barreau de TOULON

S.A.R.L. CABINET ARRAGON, dont le siège social est [Adresse 2], agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités audit siège

représentée par Me Mathieu JACQUIER de la SCP JACQUIER & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Caroline CALPAXIDES, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 16 Janvier 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Président

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2024,

Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

[B] [I] épouse [K] et [A] [I] épouse [T] sont propriétaires de diverses parcelles à [Localité 12] dont une parcelle de terrain à usage de chemin cadastrée section [Cadastre 9], pour les avoir recueillies de la succession de leurs parents [O] [U] épouse [I] et [J] [I].

Suivant acte authentique du 04 décembre 1975 [F] [N] et [P] [G] épouse [N] d'une part et les époux [E] d'autre part ont acquis indivisément la propriété de la parcelle de terrain cadastrée [Cadastre 11] sur la commune de [Localité 12].

Par acte authentique du 23 janvier 1997, cette parcelle a fait l'objet d'un détachement en plusieurs parcelles, l'une d'elle demeurant indivise.

[F] [N] et [P] [G] épouse [N] sont désormais propriétaires des parcelles [Cadastre 8] et [Cadastre 7], en indivision par moitié avec [M] [W] et [V] [R] épouse [W], suite à la vente [E]-[W] intervenue le 28 juillet 2000.

La parcelle section [Cadastre 7] est composée d'une bande de terre sur laquelle se situe une partie du chemin reliant les fonds à la voie publique, l'autre partie du chemin étant située sur la parcelle [Cadastre 9] des consorts [I].

Les consorts [I] ont fait réaliser des travaux d'aménagement du chemin situé pour partie sur la parcelle [Cadastre 7], dans le cadre de l'aménagement en lotissement de leurs parcelles, confiés à la Sarl Cabinet Arragon en 2012.

Se plaignant de désordres consécutifs à la réalisation des travaux, [F] [N] et [P] [G] épouse [N] ont obtenu par ordonnance de référé du 6 avril 2012 la désignation d'un expert judiciaire et la condamnation des consorts [I] sous astreinte à effectuer des travaux de remise en état de la parcelle [Cadastre 7] (reconstituer le fossé situé à l'Ouest de la parcelle [Cadastre 7], supprimer les compteurs d'eau et/ou d' électricité installés sur la parcelle [Cadastre 7], réinstaller la buse du canal de Provence, supprimer les bouches à clé installées sur la parcelle [Cadastre 7], supprimer le candélabre d'éclairage installé sur la parcelle [Cadastre 7], démolir les bordures en ciment installées sur la parcelle [Cadastre 7]) décision qui a été exécutée selon le constat d'huissier établi le 9 mars 2017.

Suivant acte d'huissier délivré le 12 janvier 2017, [B] [I] épouse [K] et [A] [I] épouse [T] ont fait assigner [F] [N] et [P] [G] épouse [N], [M] [W], [V] [R] épouse [W], la Sarl Cabinet Arragon devant le tribunal de grande instance de Toulon aux fins d'obtenir l'autorisation d'effectuer des travaux sur la parcelle [Cadastre 7].

Par jugement du 3 mars 2020 le tribunal judiciaire de Toulon a considéré qu'il existe une servitude de passage au bénéfice des consorts [I] sur la parcelle [Cadastre 7] [N]-[W], que le litige porte en réalité sur la conformité ou non des travaux diligentés aux dispositions de l'article 697 du code civil et l'existence éventuelle d'une aggravation de la servitude de passage au sens de l'article 702 suivant, et a dès lors :

- autorisé Mesdames [I] à réaliser les travaux de réinstallation des compteurs d'eau et/ou d'électricité, de suppression de la buse du canal de Provence, d'installation de bouches à clés, d'un candélabre d'éclairage et de réinstallation des bordures en ciment, sur la parcelle [Cadastre 7] sises lieudit [Localité 14] à [Localité 12],

- condamné les époux [N] à payer à Mesdames [I] la somme totale de 35000 euros, soit 17500 euros à chacune en indemnisation de leur préjudice moral et financier,

- débouté les époux [N] de l'intégralité de leurs prétentions, en ce compris de l'article 700 du CPC, - condamné in solidum les époux [N] à payer aux époux [W] la somme de 2500 euros chacun en indemnisation de leur préjudice moral,

- condamné in solidum les époux [N] à payer au titre de l'article 700 du CPC aux époux [I] la somme totale de 3000 euros, aux époux [W] celle de 2000 euros ainsi qu'aux entiers dépens d'instance,

- et ordonné l'exécution provisoire

Par acte du 20 mars 2020 [F] [N] et [P] [N] ont interjeté appel de la décision.

Par conclusions notifiées le 8 janvier 2024 les appelants demandent à la cour de :

- RÉVOQUER l'ordonnance de clôture et ADMETTRE les présentes conclusions,

- À défaut, ESSARTER les conclusions et pièces produites par les dames [I] le 29 décembre 2023 soit l'avant-veille de la clôture rendant impossible une réplique utile avant son prononcé,

SUR LE FOND :

- INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il autorise Mesdames [I] à réaliser les travaux de réinstallation des compteurs d'eau et/ou d'électricité, de suppression de la buse du canal de Provence, d'installation de bouches à clés, d'un candélabre d'éclairage et de réinstallation des bordures en ciment, sur la parcelle [Cadastre 7] sise lieudit [Localité 14] à [Localité 12], condamné les époux [N] à payer à Mesdames [I] la somme totale de 35000 euros, soit 17500 euros à chacune en indemnisation de leur préjudice moral et financier, débouté les époux [N] de l'intégralité de leurs prétentions, en ce compris de l'article 700 du CPC, condamné in solidum les époux [N] à payer aux époux [W] la somme de 2500 euros chacun en indemnisation de leur préjudice moral, condamné in solidum les époux [N] à payer au titre de l'article 700 du CPC aux époux [I] la somme totale de 3000 euros, aux époux [W] celle de 2000 euros ainsi qu'aux entiers dépens d'instance, et ordonné l'exécution provisoire.

Et, statuant à nouveau :

- DÉBOUTER Madame [T] née [I] [A] et Madame [K] née [I] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- DÉBOUTER Madame [T] née [I] [A] et Madame [K] née [I] de leur appel incident,

- DIRE ET JUGER qu'elles ne bénéficient pas du droit de passage consenti par les époux [N] à M. [I] [J] sur la parcelle désormais cadastrée [Cadastre 7], par acte du 20 juillet 1976.

- DIRE ET JUGER les époux [N] recevables en leurs demandes reconventionnelles

- FAIRE DÉFENSE à Madame [T] née [I] [A] et Madame [K] née [I] ainsi que tous usagers de leur chef de faire usage du chemin situé sur la parcelle cadastrée [Cadastre 7] propriété des époux [N], sous astreinte de 500 € par infraction constatée.

- DÉBOUTER Monsieur [W] [M] et Madame [R] [V] de toutes demandes formulées contre les époux [N]

- DÉBOUTER Monsieur [W] [M] et Madame [R] [V] de leur appel incident

- DÉBOUTER toute partie à la procédure de toute demande formulée contre les époux [N]

- CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Madame [T] née [I] [A] et Madame [K] née [I] de leur demande d'autorisation à réaliser le recouvrement du fossé situé à l'Ouest de la parcelle [Cadastre 7] et débouté les mêmes de leur demande d'indemnisation de leur prétendu préjudice matériel.

- CONDAMNER in solidum Madame [T] née [I] [A] et Madame [K] née [I] à payer aux époux [N] une somme de 25.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.

- CONDAMNER tout succombant au paiement de la somme de 7500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Au soutien de leurs prétentions, ils font valoir :

-que le premier juge a considéré à tort qu'en dépit de la légère différence de rédaction entre les deux constitutions de servitudes, l'intention commune des parties était de se consentir des servitudes de passage réciproques sur leurs fonds respectifs,

- qu'ils contestent avoir reconnu l'existence d'une telle servitude de passage au bénéfice des consorts [I] dans des courriers préalables à l'instance ;

- que la concession de droit de passage dont se prévalent les dames [I] est ainsi rédigée dans les actes authentiques des 31/5, 18/6, 24/6 et 20/7/1976  :' De leur côté, M. et Mme [E] et M. et Mme [N] Cèdent à M. [I], M. et Mme [L] et M. et Mme [X] et M. [Y], le droit de passage le plus étendu pour piétons, bêtes et véhicules de toute sorte ainsi que la pose de toutes canalisations aériennes ou souterraines, sur une bande de terre longeant le confront ouest de la parcelle cadastrée section [Cadastre 11] de un are quarante huit centiares. Cette servitude sise à [Localité 12], lieudit [Localité 14], GREVERA la parcelle de terrain cadastrée section [Cadastre 11] pour quarante sept ares quatre vingt centiares '.

- que le droit cédé bénéficie à une personne, M. [I], et non à un fonds.

- que dans ce cas il est admis qu'il ne s'agit pas d'un droit réel,

- qu'il est donc constant que la commune intention des parties était qu'il ne soit pas consenti à M. [I] une servitude réelle de passage mais un droit personnel

- que ceci résulte de la rédaction différente du droit de passage consenti inversement par M.[I] aux concluants dans l'acte, qui mentionne expressément un droit attaché à la propriété de la parcelle profitant aux ayants droits du bénéficiaire ;

- qu'il n'est pas démontré que l'intention des parties était de désenclaver la parcelle [I] ;

- si la servitude de passage devait être reconnue, les appelants soutiennent :

- qu'il n'est pas établi que les travaux d'amélioration du revêtement, des abords et de l'éclairage du chemin, comme des réseaux électriques et de collecte des eaux usées sont conformes à l'entretien par amélioration de la servitude initialement consentie, notamment par l'amélioration portée à la circulation des véhicules ainsi qu'au réseau d'évacuation des eaux ;

- que les travaux envisagés n'ont pas pour effet d'améliorer leur propre fonds, les seuls réalisés ayant intéressé le mur de clôture endommagé ;

- que le comblement du fossé n'est pas nécessaire car le fossé est exclu de l'assiette de la servitude

- que la suppression des compteurs d'eau et d'électricité et de la buse du canal de Provence sont sans rapport avec les dispositions de l'article 697 du code civil car inutile à la conservation de la servitude de passage ;

- que l'installation d'un candélabre est inutile pour ces mêmes fins ;

- sur la demande reconventionnelle, qu'ils sont recevables à solliciter l'interdiction d'utiliser le chemin en l'absence des époux [W] co indivisaires, en raison de la violation de leur droit de propriété ;

- que la condamnation indemnitaire prononcée par le premier Juge contre les époux [N] apparaît donc totalement infondée, en son principe comme en son quantum ;

- que les travaux réalisés illégalement par les dames [I] génèrent un préjudice par perte de végétalisation sur la parcelle [Cadastre 6], aggravation du passage, à des vitesses plus élevées ;

Par conclusions notifiées par voie électronique le 29 décembre 2023 [B] [I] épouse [K], [A] [I] épouse [T] demandent à la cour de :

CONFIRMER le jugement du Tribunal Judiciaire de Toulon du 3 mars 2020 en ce qu'il a : Autorisé Madame [B] [K] née [I] et Madame [A] [T] née [I] à réaliser les travaux suivants sur la parcelle [Cadastre 7], [Adresse 4] :

- Réinstallation des compteurs d'eau et/ou d'électricité,

- Suppression de la buse du Canal de Provence,

- Installation de bouche à clé,

- Installation d'un candélabre d'éclairage,

- Réinstallation des bordures en ciment.

Retenu la responsabilité des époux [N] dans le préjudice subi par les consorts [T]/[K].

Condamné in solidum Monsieur [F] [N] et Madame [P] [G] épouse [N] à payer à Madame [B] [K] née [I] et Madame [A] [T] née [I] la somme totale de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamné in solidum Monsieur [F] [N] et Madame [P] [G] épouse [N] aux entiers dépens d'instance, distraits au profit de Maître Nicolas MASSUCO.

REFORMER le jugement du Tribunal Judiciaire de Toulon du 3 mars 2020 en ce qu'il a :

Limité le montant des condamnations à l'encontre de Monsieur [F] [N] et Madame [P] [G] épouse [N] à payer à Madame [B] [K] née [I] et Madame [A] [T] née [I] la somme totale de 35.000 euros soit 17.500 euros chacune en indemnisation de leur préjudicie moral et financier.

Débouté Madame [B] [K] née [I] et Madame [A] [T] née [I] de leur demande d'autorisation à réaliser des travaux sur le fossé situé à l'Ouest de la parcelle [Cadastre 7].

Débouté Madame [B] [K] née [I] et Madame [A] [T] née [I] de leur demande d'indemnisation de leur préjudice matériel,

Débouté Madame [B] [K] née [I] et Madame [A] [T] née [I] de l'ensemble de leurs prétentions à l'égard de la SARL ARRAGON,

Condamné Madame [B] [K] née [I] et Madame [A] [T] née [I] à payer à la SARL ARRAGON la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

STATUANT À NOUVEAU

A TITRE PRINCIPAL

DIRE ET JUGER que le fonds de Mesdames [T] et [K] bénéficie d'une servitude de passage sur la parcelle de l'indivision [N], [W] et [R].

AUTORISER Mesdames [T] et [K] à réaliser les travaux d'amélioration sur la parcelle [Cadastre 7] et notamment :

- Recouvrir le fossé situé à l'Ouest de la parcelle [Cadastre 7].

- Remettre les compteurs d'eau et/ou d'électricité installés sur la parcelle [Cadastre 7].

- Supprimer la buse du canal de Provence.

- Installer les bouches à clés sur la parcelle [Cadastre 7].

- Installer un candélabre d'éclairage sur la parcelle [Cadastre 7].

- Remettre les bordures en ciment installées sur la parcelle [Cadastre 7].

CONDAMNER les époux [N] à verser à Madame [K] et à Madame [T] la somme de 30.000 €, au titre des travaux de démolition et reconstruction.

CONDAMNER les époux [N] à verser à Madame [T] la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts.

CONDAMNER les époux [N] à verser à Madame [K] la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts.

A TITRE SUBSIDIAIRE,

DIRE ET JUGER que la responsabilité civile décennale de la société ARRAGON est engagée du fait de ses nombreuses fautes.

DIRE ET JUGER que l'ouvrage réalisé est impropre à sa destination.

CONDAMNER la société ARRAGON à indemniser Mesdames [T] et [K] au titre des travaux de démolition et reconstruction à hauteur de 30.000 €.

CONDAMNER la société ARRAGON à verser à Madame [T] la somme de 50.000€ au titre des dommages et intérêts.

CONDAMNER la société ARRAGON à verser à Madame [K] la somme de 50.000€ à titre de dommages et intérêts.

CONDAMNER la société ARRAGON à relever et garantir Madame [T] et Madame [K] de toute condamnation prononcée à leur encontre.

A TITRE TRÈS SUBSIDIAIRE,

DIRE ET JUGER que la responsabilité contractuelle de la société ARRAGON est engagée du fait de ses nombreuses fautes.

DIRE ET JUGER que l'ouvrage réalisé est impropre à sa destination.

CONDAMNER la société ARRAGON à indemniser Mesdames [T] et [K] au titre des travaux de démolition et reconstruction à hauteur de 30.000 €.

CONDAMNER la société ARRAGON à verser à Madame [T] la somme de 50.000€ au titre des dommages et intérêts.

CONDAMNER la société ARRAGON à verser à Madame [K] la somme de 50.000€ à titre de dommages et intérêts.

CONDAMNER la société ARRAGON à relever et garantir Madame [T] et Madame [K] de toute condamnation prononcée à leur encontre.

EN TOUTE HYPOTHÈSE

DÉCLARER irrecevable les demandes formulées par les époux [N] à l'encontre des consorts [T]/[K].

DÉBOUTER les époux [N] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.

DÉBOUTER la société ARRAGON de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

CONDAMNER solidairement les époux [N] et la société ARRAGON à verser à Mesdames [T] et [K] la somme de 7.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

CONDAMNER solidairement les époux [N] et la société ARRAGON aux entiers dépens distraits pour ceux d'appel au profit de Me Karine TOLLINCHI, avocat, sur son offre de droit.

Les intimées répliquent:

- que la parcelle [Cadastre 7] est en indivision entre 4 propriétaires,

- qu'en application de l'article 815-2 du code civil les demandes formulées par les époux [N] sont irrecevables en ce qu'elles nécessitaient l'accord d'au moins deux tiers des indivisaires.

- qu'il est admis que l'action en suppression d'ouvrage réalisé par le locataire dans un local commercial indivis excède la limite des actes conservatoires ;

- qu'à la lecture de l'acte de constitution de servitude du 31 mai 1976, les travaux réalisés par les consorts [I] ne mettaient pas en péril l'existence des droits des coindivisaires de la parcelle [Cadastre 7] ;

- que la servitude de passage établie entre les consorts [T] et [K] et l'indivision [N] et [W], résulte d'un acte dressé le 31 mai 1976 par Maître [Z], notaire à [Localité 13], intitulé « renonciation à servitudes et constitution de servitudes » ;

- que dans le courrier de 20 juillet 2010 les appelants reconnaissaient l'acte de servitude ;

- que l'article 686 du Code civil interdit purement et simplement qu'une servitude soit établie au profit d'une personne ;

- que la lecture de l'acte du 31 mai 1976 démontre qu'une omission s'est créée entre la partie relative aux actes pour lesquels le fonds [I] était fonds servant et la partie relative aux actes pour lesquels le fonds [I] était fonds dominant ;

- que la réciprocité dans la rédaction de l'acte était une condition essentielle,

- qu'aucune dégradation n'a été effectuée lors de la réalisation des travaux mais bien au contraire des améliorations permettant d'user du chemin par la pose d'un candélabre, la mise en place d'une bordure en ciment ou du branchement au canal de Provence ;

- que la facture du 20 octobre 2015 de l'entreprise Sotal démontre que le mur des appelants a été remis en état ;

- que les travaux sollicités constituent des améliorations techniques permettant de rendre l'ouvrage conforme aux normes techniques en vigueur ;

- que les époux [N] ont été à l'origine de la destruction de l'ensemble des ouvrages réalisés par les consorts [T] et [K], leur occasionnant un préjudice certain ;

- que le cabinet Arragon en tant que maître d''uvre est responsable de l'erreur d'implantation du mur par la suite détruit,

- qu'il aurait également dû s'assurer de l'accord expresse de l'ensemble des intervenants et des propriétés impactées par les travaux

Par conclusions notifiées le 14 octobre 2020 [M] [W] et [V] [R] épouse [W], intimés, demandent à la cour de :

DÉBOUTER les époux [N] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

CONFIRMER le jugement rendu en date du 03 mars 2020 par le Tribunal Judiciaire de Toulon,

REFORMER le jugement rendu en date du 03 mars 2020 par le Tribunal Judiciaire de Toulon, en ce qu'il a Limité le montant des condamnations à l'encontre de Monsieur [F] [N] et Madame [P] [G] épouse [N] à payer in solidum à Monsieur [M] [W] et à Madame [V] [R] épouse [W] la somme de 2.500,00 euros chacun en indemnisation de leur préjudice moral ;

Limité le montant des condamnations de Monsieur [F] [N] et Madame [P] [G] épouse [N] à payer à Monsieur [M] [W] et Madame [V] [R] épouse [W] la somme totale de 2.000,00 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

STATUANT À NOUVEAU :

DÉBOUTER Monsieur [F] [N] et Madame [P] [G] épouse [N] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

CONDAMNER solidairement les époux [N], à verser à Monsieur [M] [W] une somme de 5.000,00 € à titre de dommages et intérêts ;

CONDAMNER solidairement les époux [N], à verser à Madame [V] [R] une somme de 5.000,00 € à titre de dommages et intérêts ;

CONDAMNER solidairement les époux [N], ou tout autre succombant, à verser à Monsieur [M] [W] une somme de 3.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; en indemnisation des frais irrépétibles exposés en première instance ;

CONDAMNER solidairement les époux [N], ou tout autre succombant, à verser à Madame [V] [R] une somme de 3.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; en indemnisation des frais irrépétibles exposés en première instance ;

Y AJOUTANT :

CONDAMNER solidairement les époux [N], ou tout autre succombant, à verser à Monsieur [M] [W] une somme de 3.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; en indemnisation des frais irrépétibles exposés en procédure d'appel ;

CONDAMNER solidairement les époux [N], ou tout autre succombant, à verser à Madame [V] [R] une somme de 3.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; en indemnisation des frais irrépétibles exposés en procédure d'appel ;

CONDAMNER les époux [N], ou tout autre succombant, aux entiers dépens de la procédure d'appel distraits au profit de Maître Christian BERGER, avocat sur son offre de droits.

Ils soutiennent :

- que la réalité de l'existence d'une servitude de passage grevant la parcelle [Cadastre 7] est clairement établie par les actes produits en première instance et notamment en l'acte authentique du 31 mai 1976

- que la parcelle Section [Cadastre 7], d'une contenance de 168 m² sur laquelle se situe le litige, est une bande de terre sur laquelle se situe l'assiette d'un chemin reliant les terrains du secteur à la voie publique ;

- que depuis le 28 juillet 2000 les quatre propriétaires de l'indivision portant sur la parcelle [Cadastre 7] sont les suivants : Monsieur [F] [N] et Madame [P] [G] épouse [N] ; Monsieur [M] [W] et sa compagne Madame [V] [R] ;

- que les travaux d'amélioration et d'aménagement du chemin sur la parcelle [Cadastre 7] ont parfaitement respecté les prescriptions de l'article 697 du Code Civil ;

- que le titulaire de la servitude puisse réaliser toutes sortes de travaux d'installation, d'aménagement ou d'entretien sur le fonds servant, sans que le propriétaire de ce dernier puisse s'y opposer ;

- que les époux [N] n'avaient pas qualité pour agir seuls et qu'ils subissent un préjudice au titre de la démolition des ouvrages réalisés en 2012 ;

Par conclusions notifiées le 15 juillet 2020 la Sarl Cabinet Arragon demande à la cour de :

Con'rmer la décision attaquée, notamment concernant les demandes à l'encontre du cabinet ARRAGON,

Rejeter l'ensemble des demandes et prétentions à l'encontre du Cabinet ARRAGON.

Condamner tous succombants à payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Et dire que, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, Maître Mathieu JACQUIER pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans en avoir reçu provision.

Elle réplique :

- que les travaux réalisés ont amélioré le fonds [N] et l'utilisation de la servitude,

- qu'elle a rempli sa mission de manière satisfaisante ;

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 2 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

sur les demandes au titre de la servitude de passage

* sur l'existence de la servitude de passage imposée sur le fonds [Cadastre 7]

L'article 686 du Code civil dispose qu'il est permis aux propriétaires d'établir sur leurs propriétés, ou en faveur de leurs propriétés, telles servitudes que bon leur semble, pourvu néanmoins que les services établis ne soient imposés ni à la personne, ni en faveur de la personne, mais seulement à un fonds et pour un fonds, et pourvu que ces services n'aient d'ailleurs rien de contraire à l'ordre public.

Il résulte sans équivoque de cette disposition légale qu'une servitude est un droit réel, entendue comme une contrainte imposée sur un propriétaire d'un bien pour l'utilisation d'un espace foncier appartenant à un autre propriétaire, et ce indépendamment de la personnalisation de l'usage de ce droit.

En l'espèce, l'acte authentique litigieux intitulé «renonciation à servitudes et constitution de servitudes» des 31 mai, 18 juin, 24 juin et 20 juillet 1976 mentionne ceci : ' II- Constitution de servitudes Par ces présentes, Monsieur [[J]] [I] cède à M. et Mme [L], M. et Mme [X], M. [Y] et M. et Mme [E] et M. et Mme [N], pour eux, leurs ayants-droits ou successeurs, à perpétuité, le droit de passage le plus étendu (...)sur une bande de terre longeant le confront Est de sa propriété cadastrée section [Cadastre 10] (') . De leur côté, M. et Mme [E] [auteurs des époux [W]] et M. et Mme [N], cèdent à M. [I], M. et Mme [L], M. et Mme [X] et M. [Y], le droit de passage le plus étendu pour piétons, bêtes et véhicules de toutes sortes, ainsi que la pose de toutes canalisations aériennes ou souterraines, sur une bande de terre longeant le confront ouest de la parcelle cadastrée section [Cadastre 11] (') Cette servitude sise à [Localité 12] Lieudit [Localité 14] grèvera la parcelle de terrain cadastrée section [Cadastre 11] pour quarante sept ares quatre vingt centiares (...) '

L'intention des parties, indépendamment du titre donné à la rubrique litigieuse, doit être entendue comme la volonté d'organiser l'accès à leurs fonds réciproques au moyen de servitudes de passage délimitées dans l'espace indépendamment de l'identité des usagers. Il ne peut être contesté en effet que le texte sus mentionné autorise et organise les modalités du passage sur le fonds anciennement cadastré [Cadastre 11] en y incluant la pose de canalisations, cette disposition ne pouvant de fait être entendue comme étant strictement limitée à l'identité des utilisateurs telle que mentionnée dans l'acte mais renvoie au contraire à une organisation pérenne du passage.

Les appelants ne peuvent pas par ailleurs nier la connaissance du caractère réciproque et perpétuel de la servitude de passage supportée par leur fonds, compte tenu des termes du courrier du notaire Me [C] en date du 4 mai 2010 leur exposant la consistance de ce droit attaché au fonds et non à la personne de M.[I] père des appelantes.

De la même manière que le titre attaché à la rubrique n'est en effet pas suffisant en soi pour caractériser l'existence de la servitude de passage, qui seule résulte de l'intention des parties, l'absence de mention du caractère perpétuel est insuffisant à remettre en cause la nature du droit de passage consenti sur la parcelle litigieuse.

Cette absence doit être entendue comme un oubli de rédaction, compte tenu de la volonté clairement exprimée entre les parties à l'acte de céder le droit de passage « le plus étendu pour piétons, bêtes et véhicules de toutes sortes, ainsi que la pose de toutes canalisations aériennes ou souterraines, sur une bande de terre longeant le confront ouest de la parcelle cadastrée section [Cadastre 11] », ces termes exprimant sans équivoque un usage perpétuel.

Au surplus les appelants ont formellement adhéré à cette interprétation par l'intermédiaire de leur conseil puisque la correspondance du 20 juillet 2010 envoyée par ce dernier mentionne que « il m'apparaît que si la parcelle [I] bénéficie bien d'une servitude de passage sur le fonds [N] (') les termes de votre courrier du 4 mai 2010 sont parfaitement établis et fondés juridiquement ». Ce n'est que par suite du projet de construction d'un lotissement sur le fonds [I] que les appelants ont reconsidéré leur position sur la consistance de la servitude de passage imposée à leur fonds.

En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties, il convient en conséquence de confirmer la décision déférée sur cette question de l'existence d'une servitude de passage sur le fonds [Cadastre 7] au profit du fonds appartenant aux cons'urs [I].

S'agissant de la demande d'interdiction d'utilisation du passage formulée par les appelants, il sera rappelé que l'article 815-2 du code civil dispose que tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d'urgence. Il est admis également que tout indivisaire pour assurer la protection de ses droits indivis peut agir seul en justice.

En l'espèce en leur qualité de co-indivisaires de la parcelle litigieuse [F] [N] et [P] [G] épouse [N] sont recevables à défendre seuls leur droit de propriété. Pour autant compte tenu de l'existence de la servitude de passage sur la parcelle [Cadastre 7], leur demande doit être déclarée non fondée puisqu'elle s'oppose au droit réel consenti sur cette parcelle.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il les a déclarés irrecevables mais leur demande sera rejetée sur le fond.

* sur les travaux à réaliser sur l'assiette de la servitude de passage

L'article 697 du code civil prévoit que celui auquel est due une servitude a droit de faire tous les ouvrages nécessaires pour en user et pour la conserver. Il en résulte que le titulaire de la servitude peut réaliser toutes sortes de travaux d'installation, d'aménagement ou d'entretien sur le fonds servant, sans que le propriétaire de ce dernier puisse s'y opposer. En revanche, les ouvrages ne doivent pas transformer l'usage de la servitude, par exemple en l'aggravant.

La condition de nécessité visée par l'article 697 s'apprécie in concreto par référence à l'objet du droit consenti et de l'usage de la servitude. Les travaux d'amélioration peuvent être assimilés à des travaux nécessaires à l'usage et entretien sur le fonds servant, à condition de respecter le cadre de la servitude en question.

À cet égard, l'article 702 suivant précise que celui qui a un droit de servitude ne peut en user que suivant son titre, sans pouvoir faire, ni dans le fonds qui doit la servitude, ni dans le fonds à qui elle est due, de changement qui aggrave la condition du premier.

En l'espèce [B] [I] épouse [K], [A] [I] épouse [T] bénéficient d'un permis d'aménager leur fonds par la création d'un lotissement comprenant 8 lots constructibles. L'implantation de ce projet d'habitat entraîne nécessairement un afflux de passage de nouveaux riverains sur l'assiette de la servitude de passage litigieuse.

À cet égard les intimées souhaitent réaliser divers travaux :

- Recouvrir le fossé situé à l'Ouest de la parcelle [Cadastre 7].

- Remettre les compteurs d'eau et/ou d'électricité installés sur la parcelle [Cadastre 7].

- Supprimer la buse du canal de Provence.

- Installer les bouches à clés sur la parcelle [Cadastre 7].

- Installer un candélabre d'éclairage sur la parcelle [Cadastre 7].

- Remettre les bordures en ciment installées sur la parcelle [Cadastre 7].

Il résulte du procès verbal de constat d'huissier du 31 août 2010 que les abords immédiats du chemin d'accès au lotissement sont en bon état, mais que les bas côtés sont composés de fossés de terre. Si le revêtement de la voie est un enrobé en parfait état, poste qui ne fait pas partie des travaux sollicités, les deux fossés qui bordent la voie sont envahis de végétation tandis qu'un caisson situé à l'entrée de la voie litigieuse supporte un montage hydraulique peu protégé et fissuré.

Les photographies versées aux débats démontrent également que la voie se prolonge sans protection jusqu'aux abords immédiats des propriétés avoisinantes et qu'il n'existe pas d'éclairage.

Le courriel du 26 février 2015 adressé par la société du canal de Provence aux intimées mentionne pour sa part que la borne d'irrigation du canal de Provence, précédemment hors sol et désormais enterrée sous l'enrobé par suite des travaux initialement réalisés par les cons'urs [I], ne peut être remise dans son état originel « pour des raisons évidentes de sécurité ». Les travaux réalisés en 2012 par la partie intimée, ayant notamment conduit à enterrer la borne d'irrigation auparavant installée à l'air libre sur l'assiette de la servitude de passage, ont donc permis d'améliorer son utilisation pour des raisons de sécurité.

Enfin à l'exception de la position exprimée par les appelants, il résulte de la note du 3 février 2012 et du 5 mai 2012 du cabinet Arragon, et des termes exprimés par les propriétaires indivisaires de la parcelle litigieuse que les travaux envisagés sont de nature à améliorer la servitude de passage en la conservant dans un état d'usage conforme à son utilité.

En conséquence la cour retient que les intimées démontrent que les travaux envisagés sont de nature à permettre la conservation de la servitude de passage au sens de la loi en ce qu'ils sont rendus nécessaires pour préserver l'utilisation du passage dans des conditions de sécurité des usagers et des propriétés avoisinantes.

S'agissant de l'étendue des travaux sollicités, il sera retenu que les intimées ne démontrent pas que le fossé soit compris dans l'assiette de la servitude de passage, comme cela a été relevé par le premier juge.

En conséquence, la cour confirme le jugement entrepris sur ce point en ce compris sur l'autorisation de réaliser les travaux et sur leurs consistances.

Sur la demande indemnitaire présentée par [F] [N] et [P] [G] épouse [N]

L'article 1240 du code civil énonce que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Les appelants soutiennent que les travaux réalisés leur occasionnent des nuisances au titre des chutes d'arbres, des difficultés d'accès, de la destruction de tuyaux, et que la procédure est en conséquence abusive.

La cour relève que cette demande formulée en première instance n'est accompagnée d'aucun élément objectif permettant de caractériser les nuisances, ou l'impossibilité d'accéder à leur fonds de nature à rendre la procédure abusive. Ce d'autant qu'il résulte des pièces produites aux débats et des développements ci-dessus que les intimées disposent d'une autorisation de réaliser un lotissement, que les travaux vont au contraire améliorer l'environnement, l'utilisation de l'eau de canal de Provence, la sécurité des abords et l'accès à leur propriété.

La demande sera rejetée, et le jugement confirmé sur ce point.

Sur les demandes présentées par [B] [I] épouse [K], [A] [I] épouse [T]

[B] [I] épouse [K] et [A] [I] épouse [T] sollicitent l'indemnisation de leur préjudice matériel au titre de la destruction des ouvrages réalisés en 2012. Au même titre qu'en première instance, elles ne produisent aucun élément objectif permettant d'une part de chiffrer ce préjudice. Elles ne démontrent pas par ailleurs la faute commise par les appelants à l'occasion de la demande de démolition des ouvrages puisque cet événement résulte d'une décision de justice devenue définitive. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

S'agissant de la demande au titre du préjudice moral, la cour relève que les appelants ont remis en cause leur propre reconnaissance de l'existence de la servitude de passage en raison du projet de réalisation du lotissement, alors même que ce projet a été autorisé et non contesté en justice, que les travaux projetés ne sont pas de nature à réduire l'utilisation de leur propriété mais au contraire à en conforter l'accès et embellir l'environnement général.

Pour ces raisons, la cour confirme le principe de l'indemnisation du préjudice moral subi par [B] [I] épouse [K], [A] [I] épouse [T], mais également son montant puisqu'aucun élément nouveau n'est produit pour le considérer comme insuffisant.

Compte tenu de la solution du litige la demande d'appel en garantie formée à l'encontre du cabinet Arragon est non fondée, le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les demandes indemnitaires des époux [W]

Le préjudice soutenu par les époux [W] est fondé à la fois sur l'intervention seule des époux [N] sur une parcelle dont ils sont co-indivisaires et sur la démolition des précédents travaux qui selon eux profitent à l'ensemble des indivisaires.

La cour retient d'une part que les époux [N] ont été déclarés recevables en leur qualité de co-indivisaires à défendre seuls leur droit de propriété tandis que la démolition des ouvrages résulte d'une précédente décision de justice.

Il en résulte que les époux [W] échouent à caractériser la faute commise par les appelants à leur encontre et partant le préjudice en résultant.

Il conviendra en conséquence d'infirmer le jugement sur ce point et de les débouter de leur demande indemnitaire.

sur les demandes accessoires

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement entrepris dans ses dispositions concernant les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

[F] [N] et [P] [G] épouse [N] qui succombent sur la plupart de leurs prétentions seront condamnées aux frais irrépétibles qu'il est inéquitable de laisser à la charge de [B] [I] épouse [K] et [A] [I] épouse [T].

La demande formée au titre des frais irrépétibles par les époux [W] qui succombent dans leur appel incident sera rejetée.

[B] [I] épouse [K] et [A] [I] épouse [T] seront également condamnées aux frais irrépétibles qu'il est inéquitable de laisser à la Sarl Cabinet Arragon.

La distraction des dépens sera autorisée au profit de Maître Karine TOLLINCHI, Maître Mathieu JACQUIER, Maître Christian BERGER.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Ordonne la révocation de l'ordonnance de clôture du 2 janvier 2024,

Fixe la clôture des débats au 16 janvier 2024,

Infirme le jugement en ce qu'il a déclaré [F] [N] et [P] [G] épouse [N] irrecevables en leur demande d'interdiction de passage sur la parcelle [Cadastre 7], et en ce qu'il a condamné [F] [N] et [P] [G] épouse [N] à verser à [M] [W] et [V] [R] épouse [W] la somme de 2.500 euros, en ce qu'il a rejeté l'appel en garantie contre le cabinet Arragon ;

Statuant à nouveau,

Déclare [F] [N] et [P] [G] épouse [N] recevables en leur demande aux fins d'interdiction de passage sur la parcelle [Cadastre 7],

Les déboute de cette demande ;

Rejette la demande indemnitaire présentée par [M] [W] et [V] [R] épouse [W],

Confirme le jugement pour le surplus ;

Y ajoutant ;

Condamne [F] [N] et [P] [G] épouse [N] aux entiers dépens ;

Autorise leurs distractions au profit de Maître Karine TOLLINCHI, Maître Mathieu JACQUIER, Maître Christian BERGER ;

Condamne [F] [N] et [P] [G] épouse [N] à verser 6.000 euros à [B] [I] épouse [K] et [A] [I] épouse [T] au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

Condamne [B] [I] épouse [K] et [A] [I] épouse [T] à verser à la Sarl Cabinet Arragon la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute [M] [W] et [V] [R] épouse [W] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 20/04218
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;20.04218 ?
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