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14/03/2024 | FRANCE | N°19/19960

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 14 mars 2024, 19/19960


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2024

mm

N° 2024/ 89













N° RG 19/19960 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFLXJ







[R] [E]





C/



SARL FOCH IMMOBILIER



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SELARL JULIEN SALOMON



Me Thimothée JOLY





r>














Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance de NICE en date du 20 Novembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 1118002829.



APPELANTE



Madame [R] [E]

demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Julien SALOMON de la SELARL JULIEN SALOMON, avocat au barreau de NICE





INTIM...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2024

mm

N° 2024/ 89

N° RG 19/19960 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFLXJ

[R] [E]

C/

SARL FOCH IMMOBILIER

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SELARL JULIEN SALOMON

Me Thimothée JOLY

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance de NICE en date du 20 Novembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 1118002829.

APPELANTE

Madame [R] [E]

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Julien SALOMON de la SELARL JULIEN SALOMON, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

SARL FOCH IMMOBILIER dont le siège social est [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

représentée par Me Thimothée JOLY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Cyril SABATIE, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Marc MAGNON, Président, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Président

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2024

Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET PROCÉDURE :

L'ensemb1e immobilier dénommé [Adresse 4], situé [Adresse 3], se compose de deux bâtiments A et B.

L' assemblée générale des copropriétaires réunie le 30 septembre 2009 a notamment adopté une résolution n°14 con'ant à Monsieur [X], architecte, une mission d' économiste de la construction en vue de la réfection des façades du bâtiment B.

Lors de l' assemblée générale du 28 septembre 2011, a été adoptée une résolution n°15 décidant d'effectuer des travaux sur les lots 2B (façades) et 3B (métallerie, gardes corps et vitres) pour un coût total de 276114, 50 euros TTC, con'és à deux entreprises, ainsi qu'une résolution n°16 'xant à 28 234, 25 euros les honoraires de maîtrise d''uvre assurée par 1e cabinet d'architecte [X].

Aux termes de ces résolutions, le début des travaux était prévu le 15 septembre 2012. Autorisation a été donnée au syndic, la société groupe FOCH IMMOBILIER de procéder aux appels de fonds pour travaux en trois fois, les 1er janvier 2012, 1er avril 2012 et 1er juillet 2012.

L'un des copropriétaires a toutefois contesté devant le tribunal de grande instance de Nice , par exploit du 1er décembre 2011, la résolution n°15 au motif que les travaux relatifs au lot 2B n'étaient pas distingués dans le dossier d'ana1yse de l'architecte, Monsieur [X] ne faisant état que des lots 1 et 2. Par jugement du 13 juin 2013, le tribunal a fait droit à sa demande, mais le syndicat des copropriétaires ayant interjeté appel du jugement, un accord est ensuite intervenu avec le copropriétaire opposant.

En dépit de la procédure pendante, le syndic a décidé de faire réaliser les travaux de ravalement des façades du bâtiment B. Lors de l' assemblée générale du 27 septembre 2012, i1 a fait état de ce que la demande préalable de travaux, déposée en mairie 1e 31 juillet 2012, n'avait pas donné lieu à opposition, que les marchés de travaux avaient été signés le 13 septembre 2012 et que le démarrage du chantier était prévu à partir du 15 octobre 2012.

Le choix des couleurs des façades a été entériné lors d'une réunion des membres du conseil syndical qui s'est tenue 1e 25 juillet 2012, mais en l'état des protestations de certains copropriétaires, certains membres du conseil syndical ont estimé nécessaire la convocation d'une assemblée générale pour décider du choix des couleurs. Lors d'une réunion du conseil syndical du 24 novembre 2012, i1 a été décidé de choisir la couleur « 130 foncé » en extérieur et la couleur « 131 - 40% claire » en intérieur des terrasses, ce qui a donné lieu au dépôt, le 04 décembre 2012, d'une seconde déclaration de travaux en mairie.

Le chantier a débuté mi-octobre 2012 et les travaux de ravalement au mois de décembre 2012.

Cependant, par exploit du 25 janvier 2013, divers copropriétaires, se plaignant du non-respect du règlement de copropriété, quant au choix des peintures extérieures et des vitrages des gardes corps, nécessitant selon eux une autorisation de 1'assemblée générale, ont assigné d' heure à heure, par exploit du 25 janvier 2013, le syndicat des copropriétaires [Adresse 4] devant 1e juge des référés du tribunal de grande instance de Nice lequel, par ordonnance rendue 1e 05 février 2013, a prescrit la suspension immédiate des travaux, à compter de la signi'cation de l' ordonnance, et dit que le choix des couleurs sera soumis au vote d'une assemblée générale extraordinaire, laquelle se prononcera selon les conditions de majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965, d'abord sur l'opportunité de changer les couleurs initiales de l'immeuble, puis, dans cette hypothèse, sur les nouvelles couleurs à appliquer.

La société groupe FOCH IMMOBILIER a alors fait cesser les travaux et convoqué une assemblée générale extraordinaire le 14 février 2013. La résolution relative à l'opportunité de changer les couleurs initiales de 1'immeuble n'a pas recueilli la majorité prévue à l' article 26 de la loi du 10 juillet 1965 et a été rejetée.

Par arrêt du 06 juin 2013, la cour a in'rmé l'ordonnance de référé du 05 février 2013 considérant notamment qu'en1'état de la décision prise par l'assemblée générale, le 14 février 2013, le trouble manifestement illicite dénoncé par certains copropriétaires avait cessé, le syndicat s'étant entre-temps exprimé sur le choix des teintes à l'origine du litige.

Lors d'une nouvelle assemblée générale du 29 juillet 2013, les copropriétaires ont adopté une résolution n°13 visant à régulariser les travaux de ravalement des façades du bâtiment B suivant les marchés joints, soit: entreprise Capobat (échafaudages, peintures, reconstitution des bétons armés et maçonneries diverses) pour un coût de 89 263, 46 euros; entreprise Degivry (démontage et remontage des gardes corps, remplacement des gardes corps en verre, ouvrages de métallerie en aluminium pour les couvertines en acrotères et le captage des bandeaux et des balcons) pour un coût de 186 851, 49 euros et le cabinet Chevalier & Triquenot (maîtrise d'oeuvre des travaux) pour un montant de 8 713, 28 euros. L'assemblée générale a également adopté une résolution n° 14-a) à la majorité prévue par 1'artic1e 24 de la loi du 10 juillet 1965 consistant à choisir le coloris des peintures, « 130-ville de [Localité 5] » et « 131-ville de [Localité 5] -40% plus clair », ainsi qu'une r ésolution 14-c) sur le choix foncé du coloris des vitrages. Concernant le surcoût généré par la location des échafaudages du bâtiment B, l' assemblée, aux termes d'une décision n°15, a autorisé le syndic à régler à la société Capobat quatre mois de location et l'a mandaté pour négocier, sur ces bases, auprès de cette entreprise, la limitation à ce montant du surcoût de la location.

Les travaux qui avaient été arrêtés, suite à l'ordonnance de référé rendue le 05 février 2013, ont repris 'n septembre 2013 et une nouvelle déclaration de travaux a été déposée le 23 décembre 2013, sans opposition le 10 janvier 2014.

La société Degivry a été mise en redressement judiciaire le 21 février 2014, puis en liquidation judiciaire le 1er avril 2014, et la société Capobat a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire le 1er septembre 2014. Ces deux entreprises ont dû être remplacées en vue de l'achèvement des travaux, la première par la société Difral, par décision de l'assemblée générale des copropriétaires du 23 avril 2014, et la seconde par la société Stasi, par décision de1'assemblée générale du 19 janvier 2015.

C'est dans ce contexte que par acte du 18 septembre 2018, Madame [R] [E] a assigné la SARL FOCH IMMOBILIER devant le tribunal d'instance de Nice aux fins de la voir condamnée, sous le bénéfice de1'exécution provisoire, à lui payer :

-la somme de 5 900, 00 euros au titre du préjudice de jouissance de son appartement de deux pièces,

-la somme de 4 000, 00 euros au titre du préjudice locatif de son studio,

-la somme de 2 000, 00 euros au titre de 1'artic1e 700 du code de procédure civile outre sa condamnation aux entiers dépens de l'instance.

La SARL FOCH IMMOBILIER a soulevé, à titre principal, l' irrecevabilité des demandes formées à son encontre pour cause de prescription.

A titre subsidiaire, elle a sollicité le rejet de l'ensemb1e des demandes formées à son encontre et, à titre reconventionnel, la condamnation de Madame [E] à lui payer la somme de 2 500, 00 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre la somme de 3 000, 00 euros sur le fondement des dispositions de 1'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par jugement du 20 novembre 2019, le tribunal d' instance de Nice a:

Déclaré irrecevables l'ensemble des demandes formées par [R] [E] à l'encontre de la SARL FOCH IMMOBILIER en raison de l'acquisition de la prescription quinquennale,

Rejeté la demande en paiement de la somme de 2 500, 00 euros formée par la SARL FOCH IMMOBILIER à l'encontre de [R] [E] pour procédure abusive,

Condamné [R] [E] à verser à la SARL FOCH IMMOBILIER la somme de 1 000,00 euros (mille euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné [R] [E] aux entiers dépens de l'instance,

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire

Par déclaration du 31 décembre 2019, [R] [E] a relevé appel de cette décision

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 janvier 2024

Au delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l'espèce des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la cour entend se référer pour l'exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessous.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

Vu les conclusions notifiées le 23 mai 2021 par Madame [R] [E] tendant à

Vu les dispositions de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965,

Vu le règlement de copropriété,

Vu les dispositions de l'article 1240 (nouveau) du Code civil,

Vu le jugement du 20 novembre 2019 rendu par le Tribunal d'instance de NICE,

DIRE ET JUGER l'appel de Madame [R] [E] recevable et bien fondé;

REFORMER le jugement rendu le 20 novembre 2019 par le Tribunal d'instance de NICE en ce qu'il a :

' Déclaré irrecevable l'ensemble des demandes formées par [R] [E] à l'encontre de la S.A.R.L. FOCH IMMOBILIER en raison de l'acquisition de la prescription quinquennale,

' Condamné [R] [E] à verser à la SARL FOCH IMMOBILIER la somme de 1 000.00 euros (mille euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

' Condamné [R] [E] aux entiers dépens de l'instance.

EN CONSEQUENCE :

DIRE ET JUGER que la SARL GROUPE FOCH IMMOBILIER est en faute :

-d'avoir fait débuter les travaux de ravalement de façade sans que l'assemblée générale ait été amenée à statuer sur un élément prépondérant de ceux-ci, à savoir l'éventuelle modification des couleurs et des vitrages,

- d'avoir incité le conseil syndical à prendre lui-même la décision du changement des couleurs

- d'avoir enfin mené sans soin lesdits travaux

- de ne pas avoir fait reprendre les travaux suite à l'assemblée générale du 15 février 2013

- et, de manière générale, pêché par manque de diligence et violation de son obligation de conseil

DIRE ET JUGER que ces fautes sont directement à l'origine de préjudices subis par Madame [E] ;

CONDAMNER la SARL GROUPE FOCH IMMOBILIER à verser à Madame [R] [E] les sommes suivantes :

- 5.900 € au titre du préjudice de jouissance de son appartement de 2 pièces

- 4.000 € au titre du préjudice locatif de son studio

CONDAMNER la SARL GROUPE FOCH IMMOBILIER à verser à Madame [R] [E] la somme de 4.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNER la SARL GROUPE FOCH IMMOBILIER aux entiers dépens de l'instance ;

DEBOUTER la SARL GROUPE FOCH IMMOBILIER de ses demandes et prétentions.

Vu les conclusions notifiées le 15 juin 2020 par la SARL FOCH IMMOBILIER tendant à

Vu l'article 1240, 2224 du Code civil,

Vu l'ancien article 42 de la loi du 10 juillet 1965,

Vu les articles 17 et 18 de la loi du 10 juillet 1965,

Vu le jugement du Tribunal d'Instance de NICE du 20 novembre 2019,

CONFIRMER le jugement du Tribunal d'Instance de NICE du 20 novembre 2019 en ce que le premier juge a :

-Déclaré irrecevable l'ensemble des demandes formées par Madame [R] [E] à l'encontre de la S.A.R.L. FOCH IMMOBILIER en raison de l'acquisition de la prescription quinquennale.

-Condamné Madame [R] [E] à verser à la S.A.R.L. FOCH IMMOBILIER la somme de 1 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

- Condamné Madame [R] [E] aux entiers dépens de l'instance.

REFORMER le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande en paiement de la somme de 2 500 € formée par la S.A.R.L. FOCH IMMOBILIER à l'encontre de Madame [R] [E] pour procédure abusive.

Statuant à nouveau :

CONDAMNER Madame [R] [E] au paiement d'une somme de 2.500 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Si par extraordinaire la Cour devait déclarer recevables les demandes de Madame [R] [E] et statuer sur le fond :

JUGER que la S.A.R.L. FOCH IMMOBILIER n'a commis aucune faute.

JUGER que les préjudices de Madame [R] [E] ne sont pas indemnisables.

JUGER qu'il n'existe pas de lien de causalité avec les fautes alléguées.

DEBOUTER Madame [R] [E] de toutes ses demandes, fins et prétentions.

En tout état de cause :

CONDAMNER Madame [R] [E] au paiement de la somme de 4 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNER Madame [R] [E] aux entiers dépens d'appel.

MOTIVATION :

Sur la prescription de l'action en responsabilité de Madame [E] :

A Hauteur d'appel , comme en première instance , la SARL FOCH IMMOBILIER soutient que l'action introduite par Madame [E] est prescrite, pour les raisons suivantes :

' L'action introduite est une action personnelle soumise au délai de prescription de l'article 2224 du Code civil.

' Cette action doit donc être introduite dans le délai de 5 ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

' Les faits dont se plaint Madame [E] résultent de l'absence de consultation de l'assemblée pour le choix des couleurs de la façade et d'avoir fait débuter le chantier sans ce choix.

' Elle fait également grief au syndic de ne pas avoir faire reprendre le chantier après l'assemblée générale du 14 février 2013.

' Le 14 février 2013, une assemblée générale des copropriétaires a été réunie pour évoquer les difficultés sur le chantier, assemblée au cours de laquelle les copropriétaires ont largement exposé leur point de vue sur la gestion du syndic.

'Les copropriétaires étaient donc informés à cette date des difficultés, des procédures et du problème lié au choix de la couleur du ravalement.

' A l'instar des autres copropriétaires ayant introduit une procédure en 2014, Madame CARVALHO aurait dû introduire son recours dans un délai de 5 ans de cette assemblée générale du 14 février 2013.

' Son action introduite en septembre 2018 s'en trouve donc prescrite.

Madame [E] réplique en faisant valoir les moyens et arguments suivants :

' Le recours initié par Monsieur [T] en annulation de la résolution n°15 adoptée au cours d'assemblée générale du 28 septembre 2011 n'étant pas suspensif, la SARL GROUPE FOCH IMMOBILIER a pris le parti de faire réaliser les travaux de ravalement de façade.

' Au cours de l'assemblée générale du 27 septembre 2012, le syndic à fait un point sur les travaux dans les termes suivants :

"La demande préalable aux travaux a été déposée en mairie le 31 juillet 2012 et il n'a pas été fait d'opposition à cette déclaration par la Mairie de [Localité 5], conformément à l'envoi recommandé avec AR du 16 août 2012.

Les marchés des travaux de façade ont été signés en date du 13 septembre 2012.

La déclaration de chantier dans le cadre de la souscription de l'assurance dommages-ouvrage a été établie le 24 septembre 2012.

Le démarrage des travaux est prévu à partir du 15 octobre prochain.

Les travaux d'étanchéité débuteront le 8 octobre 2012.

Le planning établi par Monsieur [V], Architecte, est annexé au présent

procès-verbal".

Ainsi, à cette date, selon le syndic, les travaux étaient en état d'être réalisés sans obstacle ni retard.

' Les travaux ont effectivement débuté sur le chantier à la date du 17 octobre 2012.

Mais le syndic a manifestement pêché par excès d'optimisme et même violé les obligations d'information et de conseil inhérentes à sa fonction.

En effet, un problème lié aux teintes des façades a vu le jour au début de l'été 2012 et s'est poursuivi de longs mois durant.

Deux options étaient en débats : la 1ère consistant à garder les couleurs existantes, la 2ème consistant à en adopter de nouvelles.

Dans un premier temps, les couleurs des façades avaient été arrêtées au cours d'une réunion du 25 juillet 2012, à laquelle participait un nombre infime de copropriétaires (9 sur 81),

En l'état de multiples protestations émises par des copropriétaires, le conseil syndical a adopté une nouvelle répartition des couleurs au cours de sa réunion du 24 novembre 2012, après une réunion du 16 novembre 2012, en présence du syndic, au cours de laquelle celui-ci était conscient de la nécessité de convoquer une assemblée générale extraordinaire pour statuer sur l'éventuel changement de couleur des façades, peintures et vitrages (et de déposer une nouvelle déclaration préalable en Mairie) ; mais il a incité le conseil syndical, sous la forme d'un ultimatum, à prendre lui-même la décision en agitant l'épouvantail des "conséquences financières que cela générerait pour le compte de la copropriété (coût de l'AGE / retard du planning / dédommagement des entreprises / taux de TVA incertain), soit plusieurs milliers d'euros.

' Une seconde déclaration en mairie a été déposée le 28 novembre 2012, afin de prendre en considération le changement de couleurs adopté par le seul conseil syndical au cours de sa réunion du 24 novembre 2012.

' Le choix effectué par le conseil syndical au sujet des couleurs des façades n'a pas été du goût de nombreux copropriétaires.

Ainsi, 30 d'entre eux, titulaires de la majorité des tantièmes au sein du bâtiment B, se sont prononcés pour le maintien des couleurs existantes; leur liste a été communiquée en son temps au syndic.

Au-delà, d'autres copropriétaires ont reproché l'absence de débat sur la question des couleurs au cours d'une véritable assemblée générale, parfois même par écrit.

' Pour autant, en décembre 2012, les travaux de peinture ont débuté tel que cela ressort d'un procès-verbal de constat d'huissier dressé le 3 janvier 2013 par Maître LIGEARD ainsi que des divers comptes rendus de chantier précités.

' Le choix des vitrages (matière et couleur) a lui aussi été arrêté hors toute décision d'assemblée générale, et mis à exécution au mois de janvier 2013, avec modification de l'existant tel que la cour pourra le constater à l'analyse :

' Au mois de décembre 2012, par l'intermédiaire de leur conseil, Mesdames [J] et [Z], copropriétaires, ont pris la peine d'interpeller le syndic sur divers points et notamment celui de la couleur des façades.

A cette occasion, il a notamment été rappelé que, par application du règlement de copropriété, toute décision relative aux peintures extérieures doit faire l'objet d'un vote en assemblée générale, ce qui n'a pas été effectué en l'espèce.

' Par courrier en date du 14 décembre 2012, le syndic a répliqué que la stipulation visée par ces copropriétaires ne pouvait trouver à s'appliquer puisqu'elle se trouvait incluse dans un article relatif aux parties privatives; ce faisant, le Cabinet GROUPE FOCH IMMOBILIER s'est bien gardé néanmoins de prendre position sur le principe même de la convocation d'une assemblée générale pour statuer sur des modifications aussi importantes que celles de la couleur des façades et des vitrages.

' En l'état de l'évolution des travaux et de la position manifestée par le syndic, divers copropriétaires, parmi ceux qui entendaient s'opposer au changement des couleurs, n'ont eu d'autre choix que de s'adresser à justice dans le cadre d'une action en référé d'heure à heure. Selon ordonnance de référé rendue le 5 février 2013, il a été ordonné au syndicat des copropriétaires de suspendre immédiatement les travaux de ravalement de la façade, et ce sous astreinte.

Le juge des référés a également pris la peine d'indiquer que le choix des couleurs devrait être soumis au vote d'une assemblée générale extraordinaire, laquelle devrait se prononcer selon les conditions de majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965.

' A la suite de cette décision de justice, le Cabinet GROUPE FOCH IMMOBILIER a fait cesser les travaux et a convoqué une assemblée générale, laquelle s'est tenue le 14 février 2013

Au cours de celle-ci, la résolution tendant au changement des couleurs n'a pas obtenu la majorité de l'article 26, induisant que les couleurs d'origine devaient être maintenues.

' Le syndicat a par ailleurs initié un recours en appel à l'encontre de l'ordonnance de référé précitée et, aux termes d'un arrêt rendu le 6 juin 2013, la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence a infirmé l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ; dit n'y avoir lieu à référé en l'état de l'AG tenue suite à l'ordonnance querellée et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ; condamné le syndicat des copropriétaires aux dépens de première instance et d'appel.

' Les travaux de ravalement de façade, arrêtés à la suite de l'ordonnance de référé du 5 février 2013, n'ont effectivement repris que le 30 septembre 2013.

Plus précisément, le procès-verbal de la réunion de chantier du 11 octobre 2013 indique : «reprise du chantier réelle le 3 octobre 2013 ». Ainsi, 8 mois durant, le chantier a été laissé à l'abandon avec, notamment, un échafaudage en place et les protections de chantier en guise de garde-corps.

Madame [E] soutient que, par application des dispositions de l'article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique dite Loi ELAN:

« Sans préjudice de l'application des textes spéciaux fixant des délais plus courts, les actions personnelles nées de l'application de la présente loi entre des copropriétaires, ou entre un copropriétaire et le syndicat, se prescrivent par un délai de dix ans. »

En l'espèce, Madame [E], qui sollicite l'application de l'article 18 de la loi, considère que le seul délai de prescription éventuellement applicable est celui de nature décennale et non quinquennale.

En second lieu, et quel que soit le délai de prescription envisagé, l'appelante estime que celui-ci n'a pu courir à compter du 14 février 2013, comme cela est soutenu par l'ancien syndic, d'autant que la simple communication par la partie adverse du procès-verbal de cette assemblée générale ne suffit pas à justifier que Madame [E] aurait alors connu l' ensemble des faits aujourd'hui reprochés au syndic, dans leur ampleur et sous leur jour véritable et par conséquent les préjudices subis en découlant.

Surtout, s'il est effectivement reproché à l'ancien syndic d'avoir fait poursuivre les travaux avec modification des couleurs des façades sans sollicitation préalable de l'assemblée générale, il lui est également fait grief de ne pas avoir poursuivi ces mêmes travaux dès après l'assemblée générale du 14 février 2013, de sorte que ce second grief ne serait pas couvert par une quelconque prescription.

SUR CE:

Sur la durée de la prescription. Il est de jurisprudence constante que l' action en responsabilité contre le syndic, s'agissant d'une action personnelle, se prescrit selon le délai de droit commun de l'article 2224 du code civil, soit depuis la loi du 2008-561 du 17 juin 2008 par 5 ans.

Selon ce texte, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

En l'espèce, Madame [E] reproche à l'ancien syndic le retard pris dans l'exécution du chantier de ravalement du bâtiment B qu'elle estime être de sa responsabilité dans le fait:

' d'avoir fait débuter les travaux de ravalement de façade sans que l'assemblée générale des copropriétaires ait été appelée à se prononcer sur le changement des couleurs des façades et gardes corps,

' d'avoir incité le conseil syndical à prendre lui même cette décision qui incombait à l'assemblée générale des copropriétaires

' d'avoir mener sans soin lesdits travaux

' de ne pas avoir fait reprendre les travaux suite à l'assemblée générale du 14 février 2013, et, plus généralement, son manque de diligence et son manquement à son obligation de conseil qui aurait dû le conduire à provoquer plus tôt la réunion d'une assemblée générale sur le choix des couleurs, au lieu d' inciter le conseil syndical à prendre seul cette décision.

Or, il apparaît que le 29 juillet 2013, l'assemblée générale à laquelle participait Madame [E], a mandaté le syndic pour reprendre immédiatement les travaux, c'est donc à compter de cette date que courrait le délai de prescription de l'action en responsabilité contre le syndic du fait de ses négligences à l'origine du retard du chantier et du préjudice qui en est résulté pour la demanderesse.

En août 2013, le chantier n'avait toujours pas repris et ne reprendra que le 30 septembre 2013, soit près d'un an après son démarrage et sept mois après l'assemblée du 14 février 2013.

Il s'ensuit qu' à la date d'assignation de la SARL FOCH IMMOBILIER, le 18 septembre 2018, l'action en responsabilité engagée par l'appelante était prescrite, peu important que celle-ci ait pu découvrir , après le 29 juillet 2013, d'autres manquements du syndic susceptibles d'engager également sa responsabilité dans la gestion du chantier de ravalement.

Le jugement sera en conséquence confirmé .

Sur les demandes annexes:

Madame [E], partie perdante, supportera la charge des dépens de l'entière procédure.

L'équité ne justifie pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au bénéfice de la société FOCH IMMOBILIER, à hauteur d'appel. Le jugement est en revanche confirmé sur les frais non compris dans les dépens de première instance.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort.

Confirme le jugement,

Y ajoutant,

Condamne Madame [E] aux dépens d'appel,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile, s'agissant des frais de la société FOCH IMMOBILIER non compris dans les dépens d'appel.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/19960
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;19.19960 ?
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