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14/03/2024 | FRANCE | N°19/19760

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 14 mars 2024, 19/19760


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2024

mm

N° 2024/ 85













N° RG 19/19760 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFLHO







Société [7]





C/



[A] [W]

[R] [C] épouse [W]

[I] [B]

[K] [H] épouse [B]

[A] [L]

[Y] [E] épouse [L]



























Copie exécutoire délivrée

le :
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SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ



Me Emmanuelle CORNE





















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 22 Novembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/03732.



APPELANT



Syndicat des copropriétaires [7] sis [Adress...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2024

mm

N° 2024/ 85

N° RG 19/19760 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFLHO

Société [7]

C/

[A] [W]

[R] [C] épouse [W]

[I] [B]

[K] [H] épouse [B]

[A] [L]

[Y] [E] épouse [L]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ

Me Emmanuelle CORNE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 22 Novembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/03732.

APPELANT

Syndicat des copropriétaires [7] sis [Adresse 4], représenté par son syndic en exercice la SAS EUROPAZUR lui-même poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié [Adresse 1]

représenté par la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Monsieur [A] [W]

demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Emmanuelle CORNE, avocat au barreau de GRASSE

Madame [R] [C] épouse [W]

demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Emmanuelle CORNE, avocat au barreau de GRASSE

Monsieur [I] [B]

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Emmanuelle CORNE, avocat au barreau de GRASSE

Madame [K] [H] épouse [B]

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Emmanuelle CORNE, avocat au barreau de GRASSE

Monsieur [A] [L]

demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Emmanuelle CORNE, avocat au barreau de GRASSE

Madame [Y] [E] épouse [L]

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Emmanuelle CORNE, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Marc MAGNON, Président, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Marc MAGNON, Président

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Audrey CARPENTIER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2024

Signé par Monsieur Marc MAGNON, Président et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DES FAITS ET PROCEDURE :

La copropriété [7] , située [Adresse 4] regroupe 24 villas individuelles et équipements communs de loisirs, dont un terrain de volley, une piscine et 24 bungalow de piscine édifiés sur les parties communes.

L' article 12 du règlement de copropriété dispose que les lots constitués par une villa individuelle ou un bungalow de piscine seront réservés à l'habitation et devront être occupés bourgeoisement par des personnes honorables , de bonne vie et m'urs, à l'exclusion de toute utilisation industrielle, commerciale ou artisanale.

Toutefois, dans les villas individuelles , l'exercice de professions libérales est toléré, à titre d'accessoire à l'habitation, sauf interdictions prévues au cahier des charges ( chapitre C paragraphe 2).

La location en meublé de villas entières est autorisée. En revanche, la transformation de villas en chambres meublées est interdite.

L'article 30 du règlement de copropriété relatif aux « locaux communs réservés à l'administration et à la vie collective de l'ensemble immobilier » dispose que : «  les locaux communs destinés à faciliter l'administration et la vie collective de l'ensemble immobilier pourront se prêter à de nombreuses utilisations , la zone de sports et de loisirs devra cependant conserver sa destination de club privé, réservé aux occupants des villas .

Un règlement d'utilisation sera établi par le syndic assisté du conseil syndical, et soumis à l'approbation de l'assemblée générale des copropriétaires statuant dans les conditions fixées sous l'article 49 » du règlement de copropriété.

L'article 49 du règlement de copropriété prévoit que les décisions relatives à l'administration sont prises à la majorité des voix des copropriétaires présents ou représentés ayant, en vertu du présent règlement, voix délibérative au sujet de la résolution mise aux voix.

Un litige s'est élevé entre les copropriétaires relatif aux modalités d'accès aux équipements de loisirs par les locataires saisonniers des villas.

Par acte en date du 8 août 2017, l'association [6], Monsieur [A] [W] et son épouse Madame [R] [W] née [C], Monsieur [I] [B] et son épouse Madame [K] [B] née [H], Monsieur [A] [L] et son épouse Madame [Y] [L] née [E] ont fait assigner le syndicat des copropriétaires [7] devant le tribunal de grande instance de Grasse.

En l'état de leurs conclusions récapitulatives, ils ont demandé au tribunal de :

' constater que la première convocation en date du 11 mai 2017 à l'AGS du 18 mai 2017 était irrégulière ;

' constater que la seconde convocation en date du 12 mai 2017 à l'AGS du 6 juin 2017 est elle aussi irrégulière en ce qu'elle ne contient ni pièces obligatoires, ni projet de résolution ;

' constater l'absence de majorité nécessaire lors de l'adoption des résolutions n°5 et n° 6, laquelle nécessitait l'unanimité des copropriétaires et a minima les majorités des articles 26 de la loi du 10 juillet 1967 et 57 du règlement de copropriété du syndicat des copropriétaires [7] ;

' constater la modification du règlement de copropriété du syndicat des copropriétaires [7], notamment dans la jouissance et l'usage des parties communes constituées par les équipements de sports et de loisirs ;

' Constater que les résolutions n°5 et n°6 de l' AGS du 6 juin 2017 portent une atteinte manifeste à la liberté d'association en conditionnant l'accès aux parties et équipements communs à l'adhésion à ladite association ;

' constater que seuls les membres du bureau du Club [7] ont personnellement interdit les accès aux équipements de sports et de loisirs de la copropriété et ont personnellement fait appel aux sociétés privées de sécurité, ladite association n'ayant pas acquis la personnalité juridique avant le 8 juillet 2017 ;

En conséquence,

' Annuler les résolutions n°5 et n° 6 adoptées lors de l'assemblée générale spéciale du 6 juin 2017 ;

' Condamner les membres du bureau du club privé [7] au paiement des interventions des sociétés privées de sécurité ;

' Condamner les membres du bureau du Club Privé [7] à payer aux requérants un montant à parfaire qui ne saurait être inférieur à 20 000,00 euros en dédommagement des annulations des réservations de leurs locataires ;

' Condamner le syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic, le cabinet Europazur SAS, aux entiers dépens.

Les demandeurs ont fait valoir en substance que :

' L'association [6] est recevable à agir afin d'obtenir une indemnisation ;

' les délibérations dont l'annulation est demandée ont clairement pour objectif de priver d'accès aux équipements collectifs de sport et de loisirs les invités et locataires saisonniers de certains copropriétaires. Ces délibérations contreviennent au règlement de copropriété;

' l'article 12 du règlement de copropriété autorise expressément la location en meublé de villas entières. La location saisonnière est donc autorisée ;

' la convocation de l'assemblée est irrégulière, le conseil syndical n'ayant pas sollicité du syndic une telle convocation ;

' la majorité prévue par l'article 57 du règlement de copropriété n'a pas été atteinte. De plus, la modification adoptée ne pouvait l'être qu' à la majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965, voire à l'unanimité ;

' le règlement intérieur du Club Privé [7] porte gravement atteinte au règlement de copropriété, notamment son article 1er qui régit l'accès aux installations ;

' conditionner l'accès aux parties et équipements communs à l'adhésion à une association porte atteinte à la liberté d'association ;

' Aucune stipulation du règlement de copropriété n'impose la création d'une personne morale distincte du syndicat des copropriétaires ;

' Les membres du bureau de l'association Club Privé [7] sont intervenus de leur propre initiative avant l'insertion au journal officiel de la création de l'association ; ils doivent donc être condamnés à couvrir les frais d'annulation des locations.

Le syndicat des copropriétaires [7] a demandé au tribunal de :

' constater le défaut de qualité à agir de l'association [6] ;

' Dire et juger que les demandes de l'association [6] sont irrecevables ;

Au fond,

' Débouter Monsieur [A] [W] et son épouse Madame [R] [W] ; Monsieur [I] [B] et son épouse Madame [K] [B], Monsieur [A] [L] et son épouse Madame [Y] [L] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions et condamner chacun au paiement d'une somme de 3000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; condamner l'association [6] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence [7] la somme de 3000,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

' Condamner solidairement les demandeurs aux entiers dépens dont distraction aux offres de droit au profit de Maître Marcel Benhamou, avocat au barreau de Nice.

Le syndicat des copropriétaires a fait valoir, en substance, les moyens de défense suivants :

' Les deux délibérations dont l'annulation est demandée avaient pour objectif de faire respecter le règlement de copropriété.

' L'association [6] n'a pas qualité à agir, car en application de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, seuls les copropriétaires peuvent contester les délibérations d'assemblée générale.

' Ce n'est pas le conseil syndical qui a décidé de convoquer l'assemblée générale extraordinaire, mais le syndic de sa propre initiative.

' En application de l'article 21 de la loi du 10 juillet 1965, le conseil syndical a bien le pouvoir d'initiative et d'assistance du syndic.

' La convocation à l'assemblée est conforme aux dispositions des articles 10 et 11 du décret du 17 mars 1967.

' Le règlement de copropriété prévoit expressément l'existence d'un club privé de sports et de loisirs et d'un règlement d'utilisation. Cette possibilité est devenue nécessité face à l'abus croissant de certains copropriétaires qui louent leur villa de manière intensive, exerçant une véritable activité commerciale.

' Le règlement de copropriété ne permet la location qu'à la condition qu'elle soit à usage d'habitation, et non à usage commercial. La rotation intensive des locations de courte durée n'est pas conforme à la destination de la résidence, nuit à la jouissance paisible des occupants permanents et contrevient à la clause d'habitation bourgeoise de l'article 12 du règlement de copropriété.

' Les résolutions attaquées n'ont donc pas pour objet de modifier le règlement de copropriété , mais bien de l'appliquer pour préserver la destination de l'immeuble ; elles ont donc été adoptées à la majorité requise.

' La liberté d'association est respectée, l'article 1er du règlement intérieur stipulant que l'accès aux installations est réservé aux membres de l'association, aux occupants permanents des villas et aux locataires à l'année.

' Il ne peut être fait droit aux demandes formées contre les membres du club privé qui ne sont pas parties à la procédure.

Par jugement du 22 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Grasse a :

Jugé irrecevables pour défaut de qualité à agir les demandes de l'association [6] tendant à l'annulation des résolutions n°s 5 et 6 adoptées lors de l'assemblée générale des copropriétaires [7] tenue le 6 juin 2017 ;

Annulé les résolutions n°s 5 et 6 adoptées lors de l'assemblée générale des copropriétaires [7] tenue le 6 juin 2017 ;

Jugé irrecevables les demandes formées à l'encontre des membres du bureau du club privé [7] ;

Condamné le syndicat des copropriétaires [7] à payer la somme globale de 2000,00 euros à Monsieur [A] [W] et son épouse Madame [R] [W], Monsieur [I] [B] et son épouse Madame [K] [B], Monsieur [A] [L] et son épouse Madame [Y] [L].

Condamné le syndicat des copropriétaires [7] aux entiers dépens.

Par déclaration du 26 décembre 2019, le syndicat des copropriétaires [7] a relevé appel de ce jugement.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 janvier 2024.

Au delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l'espèce des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la cour entend se référer pour l'exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessous.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

Vu les conclusions notifiées le 16 mars 2020 par le syndicat des copropriétaires tendant à :

' Voir réformer partiellement le jugement du 22 novembre 2019 en ce qu'il a annulé les résolutions 5 et 6 de l'assemblée générale du 6 juin 2017,

Pour le surplus, confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Condamner solidairement l'ensemble des intimés à payer chacun au syndicat des copropriétaires de la résidence [7] la somme de 1500,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner solidairement Monsieur [A] [W], Madame [R] [C], épouse [W], Monsieur [I] [B], Madame [K] [H], épouse [B], Monsieur [A] [L] et Madame [Y] [E] , épouse [L], aux entiers dépens ceux d'appel dont distraction aux offres de droit au profit de la SCP Cohen Guedj Montero Daval-Guedj.

Vu les conclusions notifiées le 8 juin 2020 par [A] [W] , [R] [W], [I] [B], [K] [B], [A] [L] et [Y] [L] tendant à :

Débouter le syndicat des copropriétaires de son appel à l'encontre du jugement déféré ;

Condamner le syndicat des copropriétaires au paiement d'une indemnité de 5000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Le condamner aux dépens.

MOTIVATION :

A hauteur d'appel , le syndicat des copropriétaires conclut sur la régularité de la convocation à l'assemblée générale spéciale du 6 juin 2017. Toutefois, ce moyen n'est plus dans le débat puisque les intimés ne remettent pas en cause le jugement en ce qu'il a rejeté leur moyen soutenu en première instance et tiré de l'irrégularité de la convocation à l'assemblée générale du 6 juin 2017.

En second lieu , le syndicat des copropriétaires soutient que les résolutions 5 et 6 de l'assemblée générale du 6 juin 2017 ont été votées à la majorité requise de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965, car il s'agissait de rappeler une disposition existante du règlement de copropriété qui prévoyait un club privé de sport et de loisirs et la prohibition de la location saisonnière des villas pour de courtes durées.

Le syndicat rappelle en effet que si la location des villas est possible , elle ne l'est, en application du règlement de copropriété, que pour l'usage d'habitation à l'exclusion d'un usage commercial . Les locataires doivent en conséquence y résider et non pas y séjourner. Il considère que les locations saisonnières de courte durée sont contraires à la destination de la copropriété et notamment à l'article 12 du règlement intérieur qui prévoit que les lots constitués par une villa ou un bungalow sont destinés à l'habitation et doivent être occupés bourgeoisement, à l'exclusion de toute activité commerciale, artisanale ou industrielle. Le syndicat fait valoir que la rotation de courtes périodes de locations n 'est pas compatible avec la destination d'un immeuble à usage d'habitation, le règlement de copropriété traduisant le souci d'avoir des occupants stables.

Il ajoute que les résolutions attaquées n'ont nullement vocation à priver les copropriétaires de l'accès aux équipements communs , mais uniquement « à conserver la destination de club privé, réservé aux occupants des villas » conformément aux dispositions de l'article 30 du règlement de copropriété , et, en conséquence, la destination d'occupation bourgeoise de la résidence [7] et de sa zone de sports et de loisirs.

Le syndicat ajoute que selon l'article 30 un règlement d'utilisation de la zone de sports et de loisirs devait être établi par le syndic assisté du conseil syndical et soumis à l'approbation de l'assemblée générale des copropriétaires statuant dans les conditions fixées sous l' article 49 du règlement de copropriété, soit « à la majorité des voix des copropriétaires présents ou représentés ayant , en vertu du présent règlement, voix délibérative au sujet de la résolution mise aux voix ».

Enfin , il estime que les résolutions contestées ne portent pas atteinte à la liberté d'association.

Les intimés répliquent en substance que :

' la résolution numéro 5 a approuvé les statuts de l'association Club [7] qui prévoient notamment que l'association a pour objet la gestion de l'accès aux installations sportives, de loisirs et de détente de la copropriété , et que les copropriétaires et les représentants légaux des SCI copropriétaires en sont membres de droit ;

' cette résolution porte atteinte à la liberté d'association ;

' le montant de la cotisation est imputé d'office par le syndic sur les appels de fonds de tous les copropriétaires sans que préalablement il leur soit demandé s'ils souhaitent ou non adhérer ou confirmer leur adhésion ;

' le caractère forcé de cette adhésion conditionne l'accès aux installations sportives et de loisirs et la perte de la qualité de membre de l'association a pour conséquence l'exclusion des installations sportives du club ;

' l'article 30 du règlement de copropriété emploie l' expression de club privé pour définir la destination de la zone de sports et de loisirs , par opposition avec l'utilisation plus large prévue pour les autres locaux communs, sans pour autant envisager la création d'un club privé ;

' l' adoption de la résolution 5 procède d'une violation des dispositions d'ordre public des articles 14 et 18 de la loi du 10 juillet 1965, en ce que l'approbation des statuts d'une association est étrangère à l'objet du syndicat et que cette résolution a pour effet de transférer à un tiers la gestion de l'accès aux équipements de sports et loisirs, alors que l'administration des parties communes incombe au syndic ;

' l'approbation du règlement intérieur de l'association Club [7], objet de la résolution n° 6, a pour conséquence d'interdire l'accès aux installations sportives et de loisirs aux copropriétaires ' non adhérents' de l'association , aux occupants non permanents des villas , aux locataires saisonniers et à ceux dont le bail serait inférieur à l'année, sans pour autant dispenser les copropriétaires concernés de leur participation aux charges générées par les installations sportives et de loisirs ;

' elle a également pour effet de subordonner cet accès, en l'absence du copropriétaire «  adhérent » ou locataire à l'année, pour les membres de leur famille autres que conjoints et enfants ainsi que leurs amis , au seul bon vouloir du bureau de l'association qui dispose d'un délai de 3 jours pour répondre ; de subordonner leur utilisation à des fins festives toujours au seul bon vouloir et pouvoir discrétionnaire du bureau de l'association ; de limiter le droit d'utiliser la piscine avec des amis , ce droit n'étant prévu qu'occasionnellement ;

' il s'agit donc incontestablement d'une modification substantielle des dispositions du règlement de copropriété;

' ces limitations affectent les conditions de jouissance des parties privatives requérant dès lors l'unanimité , puisqu'elles imposent aux copropriétaires de ne pouvoir louer ou échanger normalement leur résidence pendant leurs propres vacances , faute pour les locataires de pouvoir bénéficier de l'accès à la piscine et aux installations sportives et de loisirs, et de ne pouvoir consentir que des locations supérieures à 1 an, alors qu'aucune restriction n'est prévue dans le règlement de copropriété ;

' l'argumentation du syndicat sur la prohibition des locations de courte durée ou des échanges de maisons, au regard de la destination de l'immeuble , est hors sujet, puisque le litige porte sur la régularité, au regard des dispositions de la loi du 10 juillet 1965, d'une résolution modifiant incontestablement les dispositions du règlement de copropriété et les conditions de jouissance des parties communes ;

' le syndicat ne rapporte pas la preuve de nuisances liées à des locations saisonnières , ni leur caractère intensif et ne produit aucune réclamation qui aurait été adressée au syndic :

' le règlement intérieur du club privé [7] ne peut en aucun cas être assimilé à un simple règlement d'utilisation prévu par l' article 30 du règlement de copropriété, et constitue une modification substantielle du règlement de copropriété.

SUR CE :

Il ressort des dispositions de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965 que sont prises à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix, les décisions concernant la modification, ou éventuellement l'établissement, du règlement de copropriété dans la mesure où il concerne la jouissance, l'usage et l'administration des parties communes.

En l'espèce, l'article 1er III du règlement de copropriété de la résidence [7] fait figurer dans les espaces réservés à l'usage commun, la piscine et l'aménagement de différents terrains de jeux.

L'article 6 du règlement confirme que les aires de jeux et la piscine sont des parties communes à tous les copropriétaires sans exception.

L'article 12 du règlement prévoit que les villas individuelles et bungalows de piscine sont réservés à l'habitation et devront être occupés bourgeoisement, par des personnes honorables, de bonne vie et m'urs, à l'exclusion de toute utilisation industrielle, commerciale ou artisanale. La location en meublé de villas entières est autorisée . En revanche, la transformation de villas en chambres meublées est interdite.

L'article 30 relatif aux locaux communs réservés à l'administration et à la vie collective de l'ensemble immobilier précise que les locaux communs destinés à faciliter l'administration et la vie collective de l'ensemble immobilier pourront se prêter à de nombreuses utilisations. La zone de sports et de loisirs devra cependant conserver sa destination de club privé, réservé aux occupants des villas. Un règlement d'utilisation sera établi par le syndic assisté du conseil syndical, et soumis à l'approbation de l'assemblée générale des copropriétaires statuant dans les conditions fixées par l'article 49 ci-après.

Comme l'a retenu exactement le premier juge, les clauses restrictives doivent être interprétées strictement.

Or, la location meublée des villas étant expressément autorisée, sans restriction liée à la durée de location, le règlement de copropriété ne saurait être interprété comme prohibant les locations saisonnières. Par ailleurs, aucune clause de ce règlement ne réserve l'accès aux espaces communs de sports et de loisirs à certaines catégories d'occupants des villas. En effet , l'article 30 n'établit aucune distinction selon le titre d'occupation des villas ( copropriétaire occupant, locataire ou occupant bénéficiaire d'une autorisation d'occupation délivrée par le copropriétaire). Il s'ensuit que ne peuvent être exclus, sur la base du règlement de copropriété existant, les locataires saisonniers et ceux bénéficiaires d'un contrat de location d'une durée inférieure à un an.

Il s' avère que lors de l'assemblée générale spéciale du 6 juin 2017 ont été adoptées les résolutions suivantes :

N°5 « Demande de MME [N], M [F], M ET MME [T] , M [M], MME [S], M [Z] selon courrier joint en annexe de la convocation : autorisation de création d'une association statuts de l'association club [7] joint en annexe.

Majorité nécessaire: article 25 et à défaut article 25-1 nouveau( c'est à dire article 24 si le tiers des voix des copropriétaires est recueilli).

Décision :

L'assemblée générale, après en avoir pris connaissance des statuts de l'association Club [7] ( joint en annexe à la convocation-6 pages de 16 articles), approuve l'ensemble des articles des statuts en leurs formes et contenus.

Vote(nt) POUR: 14 copropriétaire(s) totalisant 5841/ 10000 tantièmes.

Vote(nt) CONTRE: 7 copropriétaire(s) totalisant 2953/10000 tantièmes.

Ont voté contre : [G] [D](310), [G] ou [X](358), [W] [A](364), [B] [I] (603), [U] [J] (358), [L] [A](391), [X] [O] (569),

RÉSOLUTION ADOPTÉE À LA MAJORITÉ DES VOIX DE TOUS LES COPROPRIÉTAIRES . »

N°6 «Demande de MME [N], M [F], M ET MME [T] , M [M], M [S], M [Z], selon courrier joint en annexe de la convocation : Autorisation d'adoption du règlement d'utilisation d'utilisation des équipements du club privé [7] ( Formulation non conforme à l'article 10 (du décret) du 17 mars 1967 renforcé par la loi ALUR de 2014).

Majorité nécessaire: Article 25 et à défaut 25-1 nouveau ( c'est à dire article 24 si le tiers des voix des copropriétaires est recueilli).

Décision :

L'assemblée générale, après en avoir pris connaissance du règlement intérieur de l'association CLUB [7](joint en annexe à la convocation-5 pages de IV TITRES) approuve l'ensemble des titres , articles du règlement en leurs formes et contenus.

L'assemblée générale valide l'entrée en vigueur de ce règlement et autorise son application à compter du 15 juin 2017.

Vot(ent) POUR : 14 copropriétaires totalisant 5841/10000 tantièmes.

Vot(ent) CONTRE : 7 copropriétaires totalisant 2953/10000 tantièmes.

Ont voté contre [G] [D](310), [G] ou [X](358), [W] [A](364), [B] [I] (603), [U] [J] (358), [L] [A](391), [X] [O] (569).

RÉSOLUTION ADOPTÉE À LA MAJORITÉ DES VOIX DE TOUS LES COPROPRIÉTAIRES . »

Si ces résolutions n'emportent pas modification expresse du règlement de copropriété, elles ont cependant pour effet et pour but de restreindre l'accès et l' usage des installations sportives et de loisirs en les réservant aux seuls copropriétaires membres de droit de l'association, aux occupants permanents des villas et aux locataires à l'année dûment déclarés auprès du syndic, comme l'indique l'article 1er du règlement intérieur de l'association Club [7] qui exclut en revanche expressément l'accès aux installations sportives et de loisirs aux locataires saisonniers ou d'une durée inférieure à un an.

Ces restrictions d'accès, contraires aux dispositions du règlement de copropriété, plus précisément aux articles 12 et 30 qui autorisent la location meublée de villas entières et réservent l'accès aux installations sportives et de loisirs, aux occupants des villas , sans restriction, nécessitaient par conséquent une modification du règlement de copropriété et un vote à la majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965 1er alinéa, dans la mesure où elles portaient sur la jouissance, l'usage et l'administration de parties communes.

Or, il ressort du procès verbal d'assemblée générale du 6 juin 2017 que ces résolutions ont été votées à la majorité de l'article 25 de la loi , alors que leur adoption impliquait un vote de la majorité des membres du syndicat représentant au moins deux tiers des voix.

L'adoption de ces deux résolutions à une majorité autre que celle de l'article 26 de la loi justifie leur annulation et la confirmation du jugement .

Il convient d'ajouter qu'un règlement d'utilisation des espaces sportifs et de loisirs soumis au vote des copropriétaires en application de l'article 30 du règlement de copropriété, sans création d'une association sportive, aurait nécessité, de la même façon, un vote à la majorité qualifié de l'article 26 en cas de modification des conditions d'accès à ces installations, telles qu'elles résultent des dispositions combinées des articles 12 et 30 dudit règlement.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Le Syndicat des copropriétaires de la résidence [7], représenté par son syndic en exercice , partie perdante est condamné aux dépens de première instance et d'appel en application de l'article 696 du code de procédure civile .

Compte tenu des circonstances de la cause, l'équité justifie la confirmation du jugement sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande également de condamner le Syndicat des copropriétaires de la résidence [7] à payer aux intimés, ensemble, une somme de 5000,00 euros, au titre des frais non compris dans les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour , statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,

Dans les limites de l' effet dévolutif de l'appel,

Confirme le jugement,

Y ajoutant,

Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence [7] aux dépens d'appel,

Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence [7] à payer à [A] [W] , [R] [W], [I] [B], [K] [B], [A] [L] et [Y] [L] une somme globale de 5000,00 euros au titre des frais non compris dans les dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/19760
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;19.19760 ?
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