La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/07/2023 | FRANCE | N°23/00842

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 06 juillet 2023, 23/00842


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 06 JUILLET 2023

lv

N°2023/ 273













Rôle N° RG 23/00842 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BKUCU







[X] [K] épouse [H]





C/



[I] [B]

[W] [O] épouse [P] [E]

[N] [P] [E]



























Copie exécutoire délivrée le :

à :



Me Jocelyne-Elda LE BRETTON
<

br>

SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ





Décision déférée à la Cour :



Ordonnance du Juge de la mise en état de Grasse en date du 16 Décembre 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 22/01518.





APPELANTE



Madame [X] [K] épouse [H]

demeurant [Adresse 5] - [Localité 13]



représenté...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 06 JUILLET 2023

lv

N°2023/ 273

Rôle N° RG 23/00842 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BKUCU

[X] [K] épouse [H]

C/

[I] [B]

[W] [O] épouse [P] [E]

[N] [P] [E]

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me Jocelyne-Elda LE BRETTON

SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du Juge de la mise en état de Grasse en date du 16 Décembre 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 22/01518.

APPELANTE

Madame [X] [K] épouse [H]

demeurant [Adresse 5] - [Localité 13]

représentée par Me Jocelyne-Elda LE BRETTON, avocat au barreau de NICE,

plaidant

INTIMES

Monsieur [I] [B]

demeurant [Adresse 6] - [Localité 1]

représenté par la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Michel DRAILLARD de la SELARL DRAILLARD MICHEL, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Muriel MANENT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

Madame [W] [O] épouse [P] [E]

demeurant [Adresse 4] - [Localité 13]

représentée par la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Michel DRAILLARD de la SELARL DRAILLARD MICHEL, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Muriel MANENT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

Monsieur [N] [P] [E]

demeurant [Adresse 4] - [Localité 13]

représenté par la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Michel DRAILLARD de la SELARL DRAILLARD MICHEL, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Muriel MANENT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Mai 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fon ction de Président de chambre et Madame Aude PONCET, Conseillère, chargés du rapport.

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fon ction de Président de chambre a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fon ction de Président de chambre

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Madame Aude PONCET, Vice Président placé

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Juillet 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Juillet 2023.

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fon ction de Président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Mme [X] [K] épouse [H] est propriétaire indivise, avec son époux M. [C] [H], d'une parcelle cadastrée section BI [Cadastre 11] sise à [Localité 13].

Elle est également seule propriétaire de la parcelle contiguë cadastrée section BI [Cadastre 10].

Par actes en date du 10 mars 2022, Mme [X] [H] a fait assigner M. [N] [P] [E], Mme [W] [O] épouse [P] [E] et M. [I] [B] devant le tribunal judiciaire de Grasse aux fins notamment que soit constaté l'état d'enclavement de sa parcelle BI [Cadastre 10], d'ordonner son désenclavement par le chemin privé existant sur les parcelles BI [Cadastre 7], BI [Cadastre 2] et BI [Cadastre 3] (anciennement BI [Cadastre 8]), sur une longueur d'environ 32 mètres, comme l'avait retenu l'expert judiciaire [U] en son rapport du 10 janvier 2003 outre la condamnation sous astreinte de M. [N] [P] [E] à retirer le grillage qu'il a mis en place le long de la parcelle BI[Cadastre 10] sur le côté donnant sur l'ancienne voie de distribution et sur le côté entre les parcelles BI [Cadastre 10] et BI [Cadastre 9].

M. [N] [P] [E], Mme [W] [O] épouse [P] [E] et M. [I] [B] ont saisi le juge de la mise en état d'un incident tendant au prononcé de l'irrecevabilité des demandes de Mme [X] [H] comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée.

Par ordonnance en date du 16 décembre 2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Grasse a:

- déclaré irrecevable, comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 2 décembre 2003, la demande de Mme [X] [K] épouse [H] visant à voir ' ordonner le désenclavement de la parcelle BI [Cadastre 10] par le chemin privé existant sur les parcelles BI [Cadastre 7], BI [Cadastre 2] et BI [Cadastre 3] (anciennement BI [Cadastre 8]), sur une longueur d'environ 32 mètres, comme l'avait retenu l'expert judiciaire [U] en son rapport du 10 janvier 2003 '

- déclaré recevable la demande de Mme [X] [K] épouse [H] visant à voir ' condamner M. [N] [P] [E], sous astreinte journalière de 500 € à compter de la décision à intervenir, à retirer le grillage qu'il a mis en place le long de la parcelle BI [Cadastre 10] sur le côté de l'ancienne voie de distribution et sur le côté entre les parcelles BI [Cadastre 10] et BI [Cadastre 9],'

- débouté chacune des parties du surplus de ses demandes,

- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état du 25 mai 2023 à 9heures,

- fait injonction à M. [N] [P] [E], Mme [W] [O] épouse [P] [E] et M. [I] [B] de conclure avant le 15 février 2023,

- condamné Mme [X] [K] épouse [H] aux dépens de l'incident,

- débouté chacune des parties de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 11 janvier 2023, Mme [X] [K] épouse [H] a interjeté appel de cette ordonnance.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 17 avril 2023, Mme [X] [K] épouse [H] demande à la cour de:

Au visa des articles 682, 683 alinéa 2 du code civil, du rapport de M. [M] [U] en date du 10 janvier 2003, du refus du service de l'urbanisme de la commune de [Localité 13] en date du 29 juin 2021 opposé à la demande de déclaration préalable DP 006 161 21C 004, des articles 514, 750-1-3°, 54, 56, 752 du code de procédure civile, L 212-5-1 du code de l'organisation judiciaire, 1240 du code civil,

- déclarer Mme [X] [K] épouse [H] recevable et bien fondée en son appel et y faisant droit,

- infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Grasse en date du 16 décembre 2022 en ce qu'il a déclaré irrecevable, comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 2 décembre 2003, la demande de Mme [X] [K] épouse [H] visant à voir ' ordonner le désenclavement de la parcelle BI [Cadastre 10] par le chemin privé existant sur les parcelles BI [Cadastre 7], BI [Cadastre 2] et BI [Cadastre 3] (anciennement BI [Cadastre 8]), sur une longueur d'environ 32 mètres, comme l'avait retenu l'expert judiciaire [U] en son rapport du 10 janvier 2003 '

- déclarer recevable la demande de Mme [X] [K] épouse [H] visant à voir ' ordonner le désenclavement de la parcelle BI [Cadastre 10] par le chemin privé existant sur les parcelles BI [Cadastre 7], BI [Cadastre 2] et BI [Cadastre 3] (anciennement BI [Cadastre 8]), sur une longueur d'environ 32 mètres, comme l'avait retenu l'expert judiciaire [U] en son rapport du 10 janvier 2003 '

- confirmer la décision du 16 décembre 2022 en ce qu'elle a déclaré recevable comme ne se heurtant pas à l'autorité de la chose jugée la demande de Mme [X] [K] épouse [H] visant à voir ' condamner M. [N] [P] [E], sous astreinte journalière de 500 € à compter de la décision à intervenir, à retirer le grillage qu'il a mis en place le long de la parcelle BI [Cadastre 10] sur le côté de l'ancienne voie de distribution et sur le côté entre les parcelles BI [Cadastre 10] et BI [Cadastre 9],'

- déclarer toutefois que le tribunal judiciaire de Grasse est toujours saisi au fond de cette dernière demande,

- débouter les intimés de leur demande d'évocation de l'entier litige afin qu'il soit statué sur le tout,

- débouter M. [N] [P] [E], Mme [W] [O] épouse [P] [E] et M. [I] [B] de leurs entières prétentions,

- condamner solidairement M. [N] [P] [E], Mme [W] [O] épouse [P] [E] et M. [I] [B] à payer à Mme [X] [K] épouse [H] les sommes de:

* [Cadastre 7].000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

* 15.000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral et financier,

* 10.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- déclarer qu'en application des articles 56 et 752 du code de procédure civile, Mme [H] s'oppose à ce que la procédure se déroule sans audience en application de L 212-5-1 du code de l'organisation judiciaire,

- condamner solidairement M. [N] [P] [E], Mme [W] [O] épouse [P] [E] et M. [I] [B] aux entiers dépens de l'instance.

Elle fait grief au premier juge d'avoir retenu que la demande en désenclavement de la parcelle BI [Cadastre 10] se heurtait à l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de cette cour en date du 2 décembre 2003 alors que:

- la présente procédure est motivée par des éléments nouveaux qui ne lui permettent pas de désenclaver sa propriété en passant par la parcelle commune aux époux [H], la BI [Cadastre 11],

- la cour d'appel, dans son arrêt du 2 décembre 2003, a en effet arbitrairement jugé que le problème de l'autorisation administrative ' serait aisément levé' et n'a pas suivi les recommandations de l'expert [U],

- cette cour s'est méprise dès lors qu'elle justifie s'être vue opposer une notification de refus d'autorisation en date du 29 juin 2021 pour la création d'une voie sur la parcelle BI [Cadastre 11], confirmant ce que pressentait M. [U],

- ce refus administratif constitue un événement postérieur à l'arrêt susvisé, venant modifier la situation antérieurement reconnue en justice, de nature à écarter l'autorité de la chose jugée,

- l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque la demande est fondée sur une cause différente de celle qui a donné lieu au jugement ou lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice,

- en l'espèce, l'autorisation administrative devait être une simple formalité selon cette cour, l'élément nouveau étant le refus opposé au projet de création de l'accès, de sorte qu'il est dûment établi que l'accès à la parcelle BI [Cadastre 10] par la parcelle BI [Cadastre 11] est impossible contrairement à ce qui avait été retenu dans l'arrêt du 2 décembre 2003.

Elle s'oppose par ailleurs à la demande d'évocation de l'entier litige laquelle se heurte à une difficulté sérieuse en ce que les intimés ont conclu au fond le 9 février 2023 sur sa demande de condamnation de M. [P] [E] à retirer le grillage le long de la parcelle BI [Cadastre 10] devant tribunal judiciaire de Grasse qui doit encore trancher sur ce point.

Elle sollicite en revanche la confirmation de l'ordonnance querellée en ce qu'elle a déclaré recevable une telle demande comme ne se heurtant pas à l'autorité de la chose jugée attachée à l'ordonnance de référé du 21 novembre 2018 et de l'arrêt confirmatif du 12 décembre 2019, s'agissant de décisions provisoires qui n'ont pas, au fond, autorité de la chose jugée.

M. [N] [P] [E], Mme [W] [O] épouse [P] [E] et M. [I] [B], suivant leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 13 avril 2023, demandent à la cour de:

- confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Grasse en date du 16 décembre 2022 en ce qu'il a déclaré irrecevable, comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 2 décembre 2003, la demande de Mme [X] [K] épouse [H] visant à voir ' ordonner le désenclavement de la parcelle BI [Cadastre 10] par le chemin privé existant sur les parcelles BI [Cadastre 7], BI [Cadastre 2] et BI [Cadastre 3] (anciennement BI [Cadastre 8]), sur une longueur d'environ 32 mètres, comme l'avait retenu l'expert judiciaire [U] en son rapport du 10 janvier 2003 ',

- confirmer encore la même ordonnance en qu'elle a condamné Mme [X] [K] épouse [H] aux dépens de l'incident,

- réformer l'ordonnance du 16 décembre 2022 en ce qu'elle a déclaré recevable la demande de Mme [X] [K] épouse [H] visant à voir ' condamner M. [N] [P] [E], sous astreinte journalière de 500 € à compter de la décision à intervenir, à retirer le grillage qu'il a mis en place le long de la parcelle BI [Cadastre 10] sur le côté de l'ancienne voie de distribution et sur le côté entre les parcelles BI [Cadastre 10] et BI [Cadastre 9],'

- réformer encore la même ordonnance en ce qu'elle a débouté les concluants de leurs autres demandes,

Evoquant l'entier litige et statuant sur le tout,

- débouter Mme [H] de l'ensemble de ses demandes comme étant irrecevables et subsidiairement mal fondées,

- reconventionnellement condamner Mme [H] au paiement des sommes suivantes:

* 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour acharnement judiciaire,

* 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour violation de domicile répétée, soit directement, soit par personnes interposées,

* 20.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens d'appel.

Ils concluent à l'irrecevabilité de la demande de désenclavement présentée par l'appelante comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée attachée aux précédentes décisions, qu'il incombe en effet aux parties de présenter, dès l'instance relative à la première demande, l'ensemble des moyens qu'elles estiment de nature à fonder leurs demandes ou à justifier le rejet des prétentions adverses et qu'en l'occurrence, sous couvert d'un prétendu événement postérieur, Mme [H] tente en réalité à faire juger à nouveau ce qui a été jugé de manière définitive dans les précédentes instances. Ils relèvent que Mme [H] souhaite un passage sur la propriété [O] ( leur auteur) qui lui a été refusé définitivement, les deux moyens qu'elles invoquent, le désenclavement d'une part et, le retrait du grillage d'autre part, tendant aux mêmes fins, à savoir un passage sur la propriété [O].

Ils soulignent que les éléments développés par l'appelante à l'appui de sa demande révèlent qu'il n'existe aucun événement postérieur puisque la décision était déjà connue en 2003 lors du dépôt du rapport d'expertise sur la base duquel l'arrêt de cette cour a été rendu le 2 décembre 2003, que c'est en toute connaissance de la difficulté pour aménager une sortie de véhicules sur la voie publique que la cour a néanmoins retenu que l'enclavement de la parcelle BI [Cadastre 10] devait être résolu par un passage sur la parcelle BI [Cadastre 11], de sorte que le refus matérialisé par l'administration n'est que la suite logique de la situation connue dès 2003.

Ils estiment, en outre, que la demande de Mme [H] relative à l'enlèvement du grillage se heurte également à l'autorité de la chose jugée, en ce que cette prétention tend aux mêmes fins à savoir un passage sur la propriété [O].

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 9 mai 2023.

MOTIFS

Sur la demande de la demande de Mme [H] tendant à voir ordonner le désenclavement de la parcelle BI [Cadastre 10] par le chemin privé existant entre les parcelles BI [Cadastre 7], BI [Cadastre 2] et BI [Cadastre 3]

En application de l'article 1355 du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même; que la demande soit fondée sur la même cause; que la demande soit entre les mêmes parties, et formées par elles et contre elles en la même qualité.

En vertu de l'article 480 du code de procédure civile, le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche.

Il convient toutefois de rappeler que l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation reconnue en justice.

En l'espèce, Mme [H] a introduit la présente procédure, invoquant l'état d'enclavement de la parcelle BI [Cadastre 10] lui appartenant et sollicitant que soit ordonné son désenclavement par le chemin privé existant sur les parcelles BI [Cadastre 7], BI [Cadastre 2] et BI [Cadastre 3] (anciennement BI [Cadastre 8]), sur une longueur d'environ 32 mètres, comme l'avait retenu l'expert judiciaire [U] en son rapport du 10 janvier 2003.

Il n'est pas contesté que par assignation en date du 18 mai 1993, Mme [H] a assigné ses différents voisins et notamment les consorts [O] aux fins que soit constaté l'état d'enclave de sa parcelle BI45 et obtenir un passage par la propriété [O].

Le tribunal de grande instance de Grasse, par jugement du 28 septembre 1999, a dit que la parcelle BI [Cadastre 10], propriété de Mme [H], n'était pas enclavée en ce qu'elle disposait d'un accès à la voie publique par le biais de la parcelle BI [Cadastre 11], appartenant aux époux [H].

La cour d'appel d'Aix-en-Provence, par arrêt du 10 avril 2001, a:

- constaté que la parcelle BI [Cadastre 10] était un bien propre à Mme [H] alors que la parcelle BI [Cadastre 11] appartenait en indivision aux époux [H], de telle sorte que l'existence d'un accès à la parcelle BI [Cadastre 11] sur la voie publique ne donnait pas, ipso facto, un même accès à la parcelle BI [Cadastre 10], laquelle est effectivement enclavée,

- ordonné une expertise judiciaire confiée à M. [M] [U].

Dans son arrêt du 2 décembre 2003, cette même cour a:

' Vu l'arrêt du 10 avril 2001,

Vu le rapport d'expertise de M. [U],

Dit que le désenclavement de la parcelle BI [Cadastre 10] sise à [Localité 12], propriété de Mme [X] [K] épouse [H], sera réalisée au travers de la parcelle BI [Cadastre 11] appartenant en copropriété indivise aux époux [H] (....)'.

Le pourvoi en cassation inscrit par Mme [H] à l'encontre cet arrêt a fait l'objet d'une ordonnance de déchéance en date du 2 janvier 2014. Cet arrêt est donc définitif.

L'appelante soutient que l'autorité de la chose jugée ne peut lui être opposée et que sa nouvelle demande en désenclavement est justifiée, au motif de la survenance d'un élément nouveau, à savoir la notification d'un arrêté municipal en date du 29 juin 2021 portant opposition à la déclaration préalable relative à la création d'une voie d'accès sur la parcelle BI [Cadastre 11] avec modification de la clôture existante et création d'un portail pour véhicule permettant la desserte de la parcelle BI [Cadastre 10].

Elle considère qu'en l'état de ce refus administratif, le désenclavement de la parcelle BI [Cadastre 10] au travers de la parcelle BI [Cadastre 11], telle qu'ordonnée par l'arrêt du 2 décembre 2003, est impossible et qu'il convient d'ordonner le désenclavement par le chemin qu'elle propose ( au travers de la propriété des intimés), conformément à ce que préconisait déjà à l'époque l'expert [U].

Or un tel élément ne constitue pas un événement postérieur modifiant la situation antérieurement reconnue en justice, dès lors que:

- il ressort du rapport d'expertise judiciaire que M. [U] avait retenu comme solutions possibles, l'une passant par la propriété des intimés, à savoir le passage revendiqué par Mme [H] et l'autre au travers de la parcelle BI [Cadastre 11],

- concernant cette dernière solution, M.[U] avait indiqué que cela impliquait 'un certain nombre d'aménagements tout à fait réalisables mais dommageables au fonds traversé; de plus pour des raisons d'autorisation administrative indispensable, nous estimons devoir rejeter ce projet', expliquant que 'le danger présenté par l'ouverture d'un débouché supplémentaire sur la voie publique le fera refuser par l'administration',

- la cour de céans, dans son arrêt du 2 décembre 2003, a ordonné le désenclavement de la parcelle BI [Cadastre 10] par la parcelle BI [Cadastre 11], en parfaite connaissance de la difficulté soulevée par l'expert [U] pour aménager une sortie de véhicules sur la voie publique et du risque d'un refus d'autorisation administrative.

Le refus matérialisé par l'administration communale du 29 juin 2021 n'est donc que la suite d'une situation connue dès 2003 lorsque cette cour a rendu sa décision.

Au demeurant, il y a lieu d'observer qu'à la lecture de l'arrêté litigieux, le dossier accompagnant la déclaration préalable déposée par les époux [H] n'était manifestement pas complet en ce que l'étude de perméabilité démontrant l'aptitude des sols à l'infiltration n'a pas été fournie et que le projet ne propose pas de compensation face aux 96 m² de surface nouvellement imperméabilisés.

Il ressort du courrier adressé par la commune de [Localité 13] au conseil des intimés le 3 avril 2023 précisant que l'architecte des époux [H] avait été informé de la nécessité de compléter leur dossier, ce qui n'a jamais été fait, de sorte qu'il ne peut être utilement soutenu que le désenclavement de la parcelle BI [Cadastre 10] au travers de la parcelle BI [Cadastre 11] ne peut être réalisé.

L'ordonnance entreprise en ce qu'elle a dit irrecevable, comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 2 décembre 2003, la demande de Mme [X] [K] épouse [H] visant à voir ' ordonner le désenclavement de la parcelle BI [Cadastre 10] par le chemin privé existant sur les parcelles BI [Cadastre 7], BI [Cadastre 2] et BI [Cadastre 3] (anciennement BI [Cadastre 8]), sur une longueur d'environ 32 mètres, comme l'avait retenu l'expert judiciaire [U] en son rapport du 10 janvier 2003 ', ne peut, en conséquence, qu'être confirmée.

Sur la recevabilité de la demande de condamnation sous astreinte de M. [N] [P] [E] à retirer le grillage qu'il a mis en place le long de la parcelle BI45 sur le côté donnant sur l'ancienne voie de distribution et sur le côté entre les parcelles BI [Cadastre 10] et BI [Cadastre 9]

Les intimés opposent à Mme [H] l'irrecevabilité de cette demande comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée attachée à l'ordonnance de référé du 21 novembre 2018, confirmée par un arrêt de cette cour du 12 décembre 2019.

L'article 488 du code de procédure civile dispose que l'ordonnance de référé n'a pas au principal autorité de la chose jugée.

C'est donc à juste titre que le premier juge a retenu qu'une telle demande était recevable.

Sur les autres demandes

- sur les demandes reconventionnelles présentées par les intimés:

Ces derniers sollicitent la condamnation de Mme [H] à leur payer des dommages et intérêts pour acharnement judiciaire et violation de domicile répétée soit directement ou par personnes interposées. Ces demandes ont été rejetées par le juge de la mise en état au motif qu'il ne s'agit pas de demandes de provision que celui-ci peut accorder en vertu de l'article 789 du code de procédure civile.

En cause d'appel, les intimés ne développement aucune critique quant au rejet de leurs prétentions qui a été parfaitement apprécié par le premier juge.

Ils demandent par ailleurs à la cour d'évoquer le litige en son entier mais sans motiver, ni expliquer une telle demande qui ne sera pas accueillie.

- sur les demandes présentées par l'appelante:

Celle-ci sollicite des dommages et intérêts pour procédure abusive et pour préjudice moral et financier. De telles demandes ne constituent pas des demandes de provisions et ne peuvent qu'entrer en voie de rejet.

L'ordonnance sera également confirmée sur ce point.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Grasse déférée en toutes ses dispositions,

Y ajoutant

Condamne Mme [X] [K] épouse [H] à payer à M. [N] [P] [E], Mme [W] [O] épouse [P] [E] et M. [I] [B] la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [X] [K] épouse [H] aux dépens de la procédure d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 23/00842
Date de la décision : 06/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-06;23.00842 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award