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16/06/2023 | FRANCE | N°23/00081

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-11 ho, 16 juin 2023, 23/00081


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Hospitalisation sans consentement

1-11 HO





ORDONNANCE

DU 16 JUIN 2023



N° 2023/0081







Rôle N° RG 23/00081 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLNPJ







[I] [N]





C/



LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER [4]

[G] [R]

LA PROCUREURE GENERALE PRES LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENC





















copie délivrée :

par courriel

le : 16

Juin 2023

- au Ministère Public

- jld.ho.Marseille

-Le patient

-Le directeur

-L'avocat

-Le préfet

- Le tiers









Décision déférée à la Cour :



Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 26 Mai 2023 enregistrée a...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Hospitalisation sans consentement

1-11 HO

ORDONNANCE

DU 16 JUIN 2023

N° 2023/0081

Rôle N° RG 23/00081 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLNPJ

[I] [N]

C/

LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER [4]

[G] [R]

LA PROCUREURE GENERALE PRES LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENC

copie délivrée :

par courriel

le : 16 Juin 2023

- au Ministère Public

- jld.ho.Marseille

-Le patient

-Le directeur

-L'avocat

-Le préfet

- Le tiers

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 26 Mai 2023 enregistrée au répertoire général sous le n°23/05485.

APPELANT

Monsieur [I] [N]

né le 14 octobre 1957 à [Localité 5], demeurant [Adresse 2] actuellement hospitalisé au centre hospitalier [4] à [Localité 5]

comparant en personne, assisté de Me Silvio ROSSI ARNAUD, avocat au barreau de Marseille , avocat choisi, substitué par Me Muriel PIQUET, avocat au barreau de Marseille

INTIME

Monsieur LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER [4]

[Adresse 1]

non comparant

TIERS

Madame [G] [R]

[Adresse 3]

non comparante

PARTIE JOINTE

Madame LA PROCUREURE GENERALE PRES LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

Cour d'appel d'Aix-en-Provence. [Adresse 6]

non comparante, ayant déposé des réquisitions écrites dont il a été donné connaissance aux parties présentes à l'audience

*-*-*-*-*

DÉBATS

L'affaire a été débattue le 15 Juin 2023, en audience non publique, devant Madame Catherine LEROI, Conseiller, déléguée par ordonnance du premier président, en application des dispositions de l'article L.3211-12-4 du code de la santé publique,

Greffière lors des débats : Madame Michèle LELONG,

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Juin 2023.

ORDONNANCE

Réputée contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 16 Juin 2023.

Signée par Madame Catherine LEROI, Conseillère et Madame Michèle LELONG, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire,

**************

PROCÉDURE ET MOYENS

Selon la procédure figurant au dossier, Mme [I] [N] a fait l'objet d'une admission en urgence en soins psychiatriques et en hospitalisation complète au sein du centre hospitalier [7] le 18 mai 2023 à la demande d'un tiers dans le cadre de l'article L3212-3 du code de la santé publique, au vu d'un certificat médical daté du même jour du docteur [W] indiquant que la patiente a été amenée par les pompiers, après constatation par des amis d'une exaltation de l'humeur avec agitation et de propos incohérents, et relevant une humeur très exaltée, un discours logorrhéique difficilement interruptible, des idées de grandeur au premier plan, de nombreux coqs à l'âne, le déni de tout trouble, ces troubles rendant impossible le consentement de la patiente et l'état mental imposant des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante, avec un risque grave d'atteinte à l'intégrité de la patiente.

Le 24 mai 2023, Mme [I] [N] a été transférée à l'hôpital de [4] à [Localité 5].

Par ordonnance rendue le 26 mai 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Marseille, saisi dans le cadre du contrôle obligatoire prévu aux articles L3211-12-1 et suivants du même code, a dit maintenir la mesure de soins psychiatriques de l'intéressée. Cette ordonnance a été notifiée le 30 mai 2023 à Mme [N].

Par déclaration datée du 5 juin 2023 adressée et réceptionnée le même jour au greffe de la chambre de l'urgence, Mme [I] [N] a interjeté appel de la décision précitée.

Le ministère public a conclu par écrit en date du 12 juin 2023 à la confirmation de la décision querellée.

Le greffe de la cour d'appel a reçu le 14 juin 2023 l'avis médical établi le même jour par le Dr [S] notant une évolution très discrète de l'état de Mme [I] [N] depuis son arrivée dans le service, la persistance d'une accélération psychique, associée à une logorrhée difficilement interruptible et des persévérations idéiques, un discours mégalomaniaque avec une rigidité de la pensée et un hermétisme légèrement réduit, une grande labilité émotionnelle associée une sensibilité majeure au moindre stimulus environnemental ; il relève que les échanges restent en grande partie conflictuels, que la reconnaissance des troubles est inexistante, avec une perpétuelle opposition aux soins proposés, acceptés de manière aléatoire et résignée et que l'alliance thérapeutique n'est pas encore acquise et conclut en conséquence à la poursuite des soins sous contrainte.

A l'audience du 15 juin 2023, l'appelante a été entendue et a déclaré :

' Le 18 mai, je voulais prendre un bain puis sortir et je me suis retrouvée en camisole. J'étais coincée dans l'immeuble, j'ai appelé des amis dont un ex- associé de mon mari avec lequel je joue aux cartes ; il m'a dit que je devais prendre mon traitement mais je n'ai pas de traitement. Seulement le Lexomyl, depuis que j'ai eu un hématome au cerveau suite à une chute, le 10 avril 2022, ça a commencé comme ça et c'est devenu un enfer. J'étais très fatiguée. Je vis seule. Ça fait 14 ans que je suis séparée.

Ma fille, depuis qu'elle a trouvé un nouveau mec, elle dit que je suis folle. J'étais très heureuse, je voulais publier car j'écris : elle m'a dit que j'étais folle de croire cela ; mon traitement, c'est un cauchemar. Ils m'avaient mise à l'isolement, je me suis évadée hier parce que je croyais que j'allais mourir. On m'avait dit que la porte de l'hôpital était ouverte. J'ai pris un taxi pour sortir. J'ai calculé mon coup. Après être allée chez mon avocat, je suis allée à la Timone, ils n'ont pas voulu me garder, m'ont amenée à [7], et à [7], ils m'ont ramenée à [4]. Aujourd'hui, je suis en fauteuil roulant parce que je suis fatiguée. Le chef de service me donnait 2 minutes pour prendre mon médicament sinon c'était une piqûre. Toute ma vie, j'ai travaillé en pédopsychiatrie. Ces médecins, elles ne comprennent rien, elles ont trente ans comme ma fille. Une logorrhée, c'est pas ça. Je suis orthophoniste. J'ai des traitements chevalins. Je ne suis pas malade. Ils me shootent. Ils m'ont fait prendre un truc qui m'empêche de parler.

Je ne veux pas y retourner; je vais y mourir, je reçois des menaces de mort. Ce soir, je n'irai pas à l'hôpital'.

Son avocat, se référant à ses conclusions déposées à l'audience et visées par le greffier , sollicite l'infirmation de la décision déférée et la mainlevée immédiate de la mesure d'hospitalisation sous contrainte.

Il soulève plusieurs moyens tenant :

- au défaut de justification de la délégation de signature de la personne ayant signé les décisions d'admission et de maintien en hospitalisation complète ainsi que la requête ayant saisi le juge des libertés et de la détention ;

- au défaut de justification de la notification des certificats médicaux et des décisions dans les meilleurs délais, sous peine d'empêcher la personne hospitalisée de faire valoir ses droits : en l'occurrence, les décisions auraient été soumises à la signature de Mme [N] le 23 mai 2023 soit avec un retard de 5 et 3 jours, son état de santé permettant une notification antérieure ;

- les certificats médicaux doivent être circonstanciés, le simple énoncé de la pathologie et de l'existence d'un risque grave ne suffisant pas : en l'occurrence, le certificat médical initial ne motive ni l'urgence, ni l'existence d'un risque grave d'atteinte à l'intégrité de la personne ;

- aux termes de l'article L 3211- 12- 4 du code de la santé publique, l'avis d'un psychiatre doit être adressé à la juridiction d'appel au plus tard 48 heures avant l'audience, ce qui n'est pas le cas, l'avis ayant été adressé 24 heures seulement avant l'audience : cela n'a pas permis de contredire cet avis en consultant un psychiatre extérieur à l'hôpital, ce qui cause grief à Mme [N],

- au défaut d'examen somatique prévu par l'article L 3211-2-2 du code de la santé publique alors que cela aurait été utile pour évacuer toute suspicion de maladie neurologique suite à la chute subie en 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'appel interjeté dans le délai de 10 jours prévu par les articles R 3211-18 et R 3211-19 du code de la santé publique, apparaît recevable.

Le juge des libertés et de la détention de Marseille a été saisi le 24 mai 2023 par une requête du directeur du centre hospitalier [7] d'une demande de contrôle de plein droit de la mesure d'hospitalisation sous contrainte dont Mme [I] [N] faisait l'objet depuis le 18 mai 2023 ; cette requête porte le tampon et la signature de Mme [L] [D], responsable du service des admissions de l'hôpital.

Il résulte des articles L 3211-12-1, R 3211-7 et R 3211-10 du code de la santé publique qu'à peine d'irrecevabilité, la requête adressée au juge des libertés et de la détention est signée par le directeur d'établissement ou le représentant de l'Etat dans le département, ayant qualité pour le saisir.

En l'occurrence, il ne résulte pas des pièces du dossier que Mme [D], qui n'est pas le directeur de l'hôpital, avait qualité, le cas échéant au titre d'une délégation de signature, pour saisir le juge des libertés et de la détention.

Il convient donc d'accueillir la fin de non recevoir soulevée par l'intéressée pour la première fois en cause d'appel , celle-ci pouvant être invoquée en tout état de cause, sans qu'il soit nécessaire que le directeur de l'hôpital soit représenté à l'audience.

La décision déférée sera en conséquence infirmée ; la demande du directeur de l'hôpital de maintien de la mesure d'hospitalisation sans consentement de Mme [I] [N] sera déclarée irrecevable et il sera mis fin à cette mesure.

Les dépens seront laissés à la charge du Trésor public en application de l'article R 93-2° du code de procédure pénale.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision réputée contradictoire,

Infirmons la décision déférée rendue le 26 mai 2023 par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE et statuant à nouveau ;

Déclarons irrecevable la requête du directeur du centre hospitalier [7] tendant au maintien de la mesure d'hospitalisation sans consentement de Mme [I] [N] ;

Mettons fin à la mesure d'hospitalisation sans consentement de Mme [I] [N] ;

Laissons les dépens à la charge du Trésor public.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-11 ho
Numéro d'arrêt : 23/00081
Date de la décision : 16/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-16;23.00081 ?
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