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15/06/2023 | FRANCE | N°22/14351

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-3, 15 juin 2023, 22/14351


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-3



ARRÊT

DU 15 JUIN 2023



N° 2023/173



Rôle N° RG 22/14351 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKHS5







Société GROUPEMENT FRANCAIS DE CAUTTION (GFC)





C/



[P] [T]

[V] [T] NÉE [Y] épouse [T]









Copie exécutoire délivrée

le :



à :



Me Joseph MAGNAN



Me Jean-Philippe FOURMEAUX











Décision défér

ée à la Cour :



Ordonnance du Président du tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN en date du 12 Octobre 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 22/04480.





APPELANTE



GROUPEMENT FRANCAIS DE CAUTION (GFC) prise en la personne de son représentant légal en exercice domi...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-3

ARRÊT

DU 15 JUIN 2023

N° 2023/173

Rôle N° RG 22/14351 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKHS5

Société GROUPEMENT FRANCAIS DE CAUTTION (GFC)

C/

[P] [T]

[V] [T] NÉE [Y] épouse [T]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Joseph MAGNAN

Me Jean-Philippe FOURMEAUX

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du Président du tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN en date du 12 Octobre 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 22/04480.

APPELANTE

GROUPEMENT FRANCAIS DE CAUTION (GFC) prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 5] - [Localité 4]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée et plaidée par Me Bertrand DE BELVAL, avocat au barreau de LYON

INTIMES

Monsieur [P] [T]

demeurant [Adresse 1] - [Localité 6]

représenté par Me Jean-Philippe FOURMEAUX de la SELARL CABINET FOURMEAUX-LAMBERT ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN plaidé par Me Hélène AUBERT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

Madame [V] [T] NÉE [Y] épouse [T]

demeurant [Adresse 1] - [Localité 6]

représentée par Me Jean-Philippe FOURMEAUX de la SELARL CABINET FOURMEAUX-LAMBERT ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN plaidé par Me Hélène AUBERT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Avril 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Florence TANGUY, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente

Madame Béatrice MARS, Conseillère

Madame Florence TANGUY, Conseillère (rapporteure)

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Angéline PLACERES.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Juin 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 15 Juin 2023,

Signé par Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente et Madame Angéline PLACERES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

M. [P] [T] et son épouse, Mme [V] [Y], ont signé le 10 octobre 2019 un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans avec la société Constructions Yves Zara pour l'édification d'une maison, au prix de 188 750 euros, sur le terrain dont ils sont propriétaires à [Localité 6], [Adresse 3], cadastré section AO n°[Cadastre 2] d'une contenance de 960 m². Ce contrat a donné lieu, par la suite, à sept avenants en plus-values et moins-values pour des prestations modificatives qui ont réduit le prix de la construction à la somme de 186 957,82 euros. Le maître d'ouvrage s'est réservé la réalisation de travaux d'un montant de 39'000 euros décrits dans la notice descriptive annexée au contrat de construction.

Aux termes du contrat, l'achèvement des travaux était prévu dans le délai de 12 mois à compter de l'ouverture du chantier, la déclaration d'ouverture de chantier étant en date du 25 mai 2020.

Le permis de construire délivré au précédent propriétaire du terrain, le 30 juillet 2018, sous le numéro PC 083 061 18 F0071, a été transféré à M. [P] [T], suivant arrêté du 2 décembre 2019 et la société Constructions Yves Zara a déposé une demande de permis de construire modificatif qui a été délivré le 12 décembre 2019.

La société Constructions Yves Zara a souscrit une garantie de livraison auprès de la société Groupement français de caution (GFC) ainsi qu'une assurance dommages-ouvrage auprès de la Smabtp.

Ayant constaté des malfaçons et non-conformités, M. et Mme [T] ont obtenu la désignation d'un expert judiciaire par ordonnance de référé du président du tribunal judiciaire de Draguignan du 29 décembre 2021, au contradictoire de Me [L], désigné en tant que liquidateur judiciaire de la société Constructions Yves Zara suivant jugement du tribunal de commerce de Fréjus du 25 octobre 2021, et de la société GFC.

Par ordonnance de référé du 14 septembre 2022, la mission de l'expert a été étendue et les opérations d'expertise ont été déclarées communes et opposables à la Smabtp.

Le 24 juin 2022, M. et Mme [T] ont assigné en référé la société GFC afin qu'elle soit condamnée à désigner sous sa responsabilité la personne qui terminera les travaux de construction. Ils ont formé une demande de provision de 25 230 euros à valoir sur les pénalités de retard arrêtées au 30 juin 2022.

Par ordonnance de référé du 12 octobre 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Draguignan a notamment':

-condamné la société d'assurance mutuelle le Groupement français de caution, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, passé un délai de 15 jours suivant signification de l'ordonnance, à désigner sous sa responsabilité la personne qui terminera les travaux de construction de la maison de M. [P] [T] et Mme [V] [Y] épouse [T] située sur leur terrain cadastré section AO n°[Cadastre 2][Adresse 3] à [Localité 6]';

-s'est réservé la liquidation de l'astreinte';

-condamné la société d'assurance mutuelle le Groupement français de caution à payer à M. [P] [T] et Mme [V] [Y] épouse [T] la somme provisionnelle de 29 664 euros à valoir au titre des pénalités de retard pour la période du 26 mai 2021 au 14 septembre 2022';

-condamné la société d'assurance mutuelle le Groupement français de caution à payer à M. [P] [T] et Mme [V] [Y] épouse [T] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

-condamné la société d'assurance mutuelle le Groupement français de caution aux dépens.

Par déclaration du 27 octobre 2022, la société GFC a relevé appel de cette ordonnance de référé.

Par conclusions remises au greffe le 7 mars 2023, et auxquelles il y a lieu de se référer, elle demande à la cour :

-vu l'article L.231-6 du CCH,

-vu l'article 1792 du code civil,

-d'infirmer l'ordonnance dont appel en toutes ses dispositions attaquées,

-statuant à nouveau,

-sur la désignation d'une personne chargée de réaliser les travaux,

-de juger qu'il avait été désigné la société CMT préalablement à l'ordonnance du 12 octobre 2022, puisque la désignation officielle date du 30 août 2022, ladite désignation figurait en tant que pièce n°6 des conclusions pour l'audience du 14 septembre 2022,

-de juger n'y avoir lieu à statuer, ce point ayant été vidé de sa substance,

-de juger irrecevable en tant que de besoin la demande, et à tout le moins infondée,

-sur les pénalités,

-de constater que l'expert judiciaire a conclu à la démolition de la maison compte tenu des désordres graves et des non conformités substantielles,

-de juger que le GFC ne pouvait pas reprendre les travaux, et que sa position de ne pas les reprendre était justifiée,

-de juger irrecevable la demande en tant qu'il existe des contestations sérieuses tant sur le principe, les dates retenues, l'imputabilité, l'exécution des travaux,

-de débouter à tout le moins les époux [T] de toutes leurs demandes,

-subsidiairement,

-d'ordonner un sursis à statuer tant que le rapport d'expertise n'a pas établi,

-en tout état de cause,

-de condamner les consorts [T] à payer au GFC la somme de 2 500 euros sur le fondement

de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Par conclusions remises au greffe le 31 mars 2023, et auxquelles il y a lieu de se référer, M. et Mme [T] demandent à la cour :

-vu les dispositions de l'article 835 du code de procédure civile,

-vu les dispositions de l'article L.231-6 du code de la construction et de l'habitation,

-vu les dispositions de l'article R.231-14 du code de la construction et de l'habitation,

-de confirmer l'ordonnance de référé prononcée le 12 octobre 2022 en ce qu'elle a :

*débouté la société d'assurance mutuelle Groupement français de caution GFC de sa demande avant dire-droit,

*condamné la société d'assurance mutuelle le Groupement français de caution, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de 15 jours suivant la signification de l'ordonnance, à désigner sous sa responsabilité, la personne qui terminera les travaux de construction de la maison de M. [P] [T] et Mme [V] [Y] épouse [T] située sur leur terrain cadastré section AO n° [Cadastre 2], [Adresse 3] à [Localité 6].

*s'est réservé la liquidation de l'astreinte,

*condamné la société d'assurance mutuelle le Groupement français de caution à payer à M. [P] [T] et Mme [V] [Y] épouse [T] la somme provisionnelle de 29 664 euros à valoir au titre des pénalités de retard pour la période du 26 mai 2021 au 14 septembre 2022,

*condamné la société d'assurance mutuelle le Groupement français de caution à payer à M. [P] [T] et Mme [V] [Y] épouse [T] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens,

-y ajoutant,

-de condamner la société d'assurance mutuelle le Groupement français de caution sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de 15 jours suivant la signification de l'ordonnance du 12 octobre 2022 à désigner sous sa responsabilité la personne qui terminera les travaux de construction de la maison de M. [P] [T] et Mme [V] [Y] épouse [T] située sur leur terrain cadastré section AO n°[Cadastre 2] [Adresse 3] à [Localité 6], et de justifier de l'acceptation de sa désignation par la société CMT désignée par la société GFC suivant

courrier du 30 août 2022,

-de condamner la société d'assurance mutuelle le Groupement français de caution à payer à M. [P] [T] et Mme [V] [Y] épouse [T] la somme provisionnelle de

42 875,66 euros au titre des pénalités de retard pour la période du 26 mai 2021 au 14 avril 2023,

-de condamner la société d'assurance mutuelle le Groupement français de caution à payer à M. [P] [T] et Mme [V] [Y] épouse [T] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 avril 2023.

Motifs':

L'article L.231-6 du code de la construction et de l'habitation dispose que':

-la garantie de livraison couvre le maître de l'ouvrage, à compter de la date d'ouverture du chantier, contre les risques d'inexécution ou de mauvaise exécution des travaux prévus au contrat, à prix et délais convenus';

-(...) en cas de défaillance du constructeur, le garant prend à sa charge :

a) Le coût des dépassements du prix convenu dès lors qu'ils sont nécessaires à l'achèvement de la construction, la garantie apportée à ce titre pouvant être assortie d'une franchise n'excédant pas 5 % du prix convenu,

b) Les conséquences du fait du constructeur ayant abouti à un paiement anticipé ou à un supplément de prix,

c) Les pénalités forfaitaires prévues au contrat en cas de retard de livraison excédant trente jours, le montant et le seuil minimum de ces pénalités étant fixés par décret';

-(...) faute pour le constructeur ou l'administrateur de procéder à l'achèvement de la construction, le garant doit désigner sous sa responsabilité la personne qui terminera les travaux.

La société Constructions Yves Zara a été placée en liquidation judiciaire, et le liquidateur, maître [L], a résilié le contrat de construction par courrier recommandé avec accusé de réception du 17 mars 2022.

La société GFC fait valoir qu'elle a désigné le cabinet CMT comme personne qui terminera les travaux et qu'elle en a informé M. et Mme [T] par courrier du 30 août 2022 mais elle ne rapporte pas la preuve que la personne désignée ait accepté sa désignation. L'ordonnance de référé sera donc confirmée en ce qu'elle a condamné sous astreinte la société GFC à désigner la personne qui terminera les travaux de construction de la maison de M. et Mme [T].

La société GFC critique l'ordonnance de référé en ce qu'elle l'a condamnée à payer une provision à valoir sur les pénalités de retard. Elle soutient qu'elle n'est pas tenue que de l'achèvement des travaux alors qu'en l'occurrence l'expert judiciaire conclut à la nécessité de démolir et reconstruire l'immeuble en raison des non-conformités et des malfaçons. Elle ajoute qu'elle n'est tenue qu'aux retards de livraison consécutifs à la liquidation judiciaire de la société Constructions Yves Zara et non aux retards du constructeur dans l'exécution des travaux durant le chantier. Elle soutient ainsi que seuls le constructeur et l'assureur dommages-ouvrage doivent répondre du retard et de la reconstruction de l'immeuble. Elle prétend enfin que l'expertise et la période de crise sanitaire Covid 19, les difficultés de livraison de matériaux ont suspendu l'application des pénalités de retard et elle se prévaut de jours d'intempérie. Elle argue que le devenir de l'opération de construction et son achèvement seraient compromis en raison de la nécessité de démolir et de reconstruire avec un nouveau permis de construire.

En application de l'article L.231-6 du code de la construction et de l'habitation, la garantie de livraison couvre le maître de l'ouvrage, à compter de la date d'ouverture du chantier, contre les risques d'inexécution ou de mauvaise exécution des travaux prévus au contrat, à prix et

délais convenus. Or, il ressort du rapport d'expertise que les travaux sont affectés de non-conformités et de malfaçons de nature décennale qui doivent, par conséquent, être couvertes par le garant de livraison, sans préjudice de son recours contre l'assureur dommages-ouvrage pour les désordres de nature décennale.

L'article L.231-6 du code de la construction et de l'habitation dispose qu'en cas de défaillance du constructeur, le garant prend à sa charge les pénalités forfaitaires prévues au contrat en cas de retard de livraison excédant trente jours, le montant et le seuil minimum de ces pénalités étant fixés par décret ».

La société GFC ne peut donc soutenir qu'elle ne couvre pas les pénalités de retard encourues dans le cadre de l'exécution du chantier jusqu'à la mise en liquidation judiciaire de la société Constructions Yves Zara.

Les intempéries, les cas de force majeure et les cas fortuits étant les seules causes légitimes de retard conformément aux dispositions de l'article L.231-3 du code de la construction et de l'habitation, l'expertise n'exonère pas la GFC de payer les pénalités de retard.

En outre la société GFC ne justifie pas des jours d'intempéries qu'elle invoque et aucun texte n'a prorogé le délai de livraison en raison de la crise sanitaire.

Le contrat de construction de maison individuelle, qui reprend les dispositions de l'article R.231-14 du code de la construction et de l'habitation prévoit qu'en cas de retard dans la livraison, le constructeur devra au maître de l'ouvrage une indemnité égale à 1/3000è du prix convenu fixé au contrat par jour de retard.

La date d'achèvement de la maison étant prévue contractuellement au 25 mai 2021, il sera alloué à M. et Mme [T] une provision de 42 875,66 euros pour la période du 26 mai 2021 au 14 avril 2023.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. et Mme [T] les frais irrépétibles qu'ils ont exposés.

Par ces motifs':

Confirme l'ordonnance de référé déférée en toutes ses dispositions';

Y ajoutant';

Condamne la société Groupement français de caution (GFC) à payer à M. [P] [T] et Mme [V] [Y] épouse [T] la somme de 13 211,66 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation des pénalités contractuelles de retard du 15 septembre 2022 au 14 avril 2023 (42 875,66 - 29 664)';

Condamne la société Groupement français de caution (GFC) à payer à M. [P] [T] et Mme [V] [Y] épouse [T] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamne la société Groupement français de caution aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés contre lui conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-3
Numéro d'arrêt : 22/14351
Date de la décision : 15/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-15;22.14351 ?
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