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25/05/2023 | FRANCE | N°19/19263

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 25 mai 2023, 19/19263


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 25 MAI 2023

ph

N° 2023/ 214



Rôle N° RG 19/19263 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFKAQ







[M], [D], [S] [C]





C/



[P] [U]

[E] [G]

[N] [U] épouse [G]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES



LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE

































Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 11 Décembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/06647.





APPELANTE



Madame [M], [D], [S] [C]

demeurant [Adresse 15]



représentée par Me Agnès ER...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 25 MAI 2023

ph

N° 2023/ 214

Rôle N° RG 19/19263 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFKAQ

[M], [D], [S] [C]

C/

[P] [U]

[E] [G]

[N] [U] épouse [G]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES

LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 11 Décembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/06647.

APPELANTE

Madame [M], [D], [S] [C]

demeurant [Adresse 15]

représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Anissa SBAI BAALBAKI, avocat au barreau de NICE

INTIMES

Monsieur [P] [U]

demeurant [Adresse 6]

représenté par la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me David PERCHE de la SCP OLIVIER DE FASSIO- DAVID PERCHE, avocat au barreau de NICE

Monsieur [E] [G]

demeurant [Adresse 16]

représenté par la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me David PERCHE de la SCP OLIVIER DE FASSIO- DAVID PERCHE, avocat au barreau de NICE

Madame [N] [U] épouse [G]

demeurant [Adresse 16]

représentée par la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me David PERCHE de la SCP OLIVIER DE FASSIO- DAVID PERCHE, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 09 Février 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Patricia HOARAU, Conseiller , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM, Vice Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Avril 2023. Le délibéré à été prorogé au 25 Mai 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Mai 2023,

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

Mme [M] [C] est propriétaire sur la commune de [Localité 17] de plusieurs parcelles, dont celles cadastrées section C numéros [Cadastre 11], [Cadastre 4] et [Cadastre 5], qui sont contiguës à la propriété de M. [P] [U] cadastrée section C numéros [Cadastre 12], [Cadastre 1], [Cadastre 2] et [Cadastre 3], dont M. [E] [G] et Mme [N] [U] épouse [G] sont locataires.

Un litige s'est élevé entre les parties concernant les limites séparatives des propriétés respectives et M. [L] [H] a été désigné en qualité d'expert afin de fixer les limites divisoires. Il a déposé son rapport le 17 mai 2001.

Un protocole d'accord a été régularisé entre Mme [M] [C] et M. [P] [U] le 6 septembre 2002, homologué par le tribunal d'instance de Menton par jugement du 22 octobre 2002, auquel les parties ont acquiescé.

Mme [M] [C] a saisi le juge des référés pour faire cesser des empiètements de M. [P] [U], M. [E] [G] et Mme [N] [U] épouse [G] sur sa propriété et par ordonnance de référé du 22 décembre 2015, le président du tribunal de grande instance de Nice a dit n'y avoir lieu à référé en l'absence de trouble manifestement illicite, renvoyé la partie la plus diligence à saisir la juridiction du fond, débouté les défendeurs de leur demande reconventionnelle.

Par exploit d'huissier du 10 novembre 2016, M. [U] et M. et Mme [G] ont assigné Mme [C] devant le tribunal de grande instance de Nice aux fins de dire valable et de plein effet le protocole d'accord du 6 septembre 2002.

Par jugement du 11 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Nice a statué ainsi :

- constate l'existence d'une transaction signée entre les parties,

- constate que la transaction intervenue selon le protocole d'accord du 6 septembre 2002 homologué par la décision du tribunal d'Instance de Menton du 22 octobre 2002 a autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'elle tranche,

- ordonne l'exécution de la transaction en ce que :

"ARTICLE 1 :

La limite des deux fonds [C]-[U] est celle préconisée par l'Expert dans son rapport, annexe 5 repérée par les lettres F, G, H, I, dont acte.

ARTICLE 2 :

La propriété de Monsieur [U] jouxte le chemin communal de [Localité 17].

Pour permettre à Monsieur [U] un accès plus aisé à ses parcelles sur lesquelles est édifiée une construction à usage d'habitation, Mademoiselle [C] consent à lui céder le terrain qui se trouve immédiatement contigu et en dessous de son habitation jusqu'à la route, sans empiètement sur le reste de la propriété de Mademoiselle [C].

Ce détachement de parcelle de la propriété de Mademoiselle [C] qu'elle consent à céder à Monsieur [U] moyennant un prix de cession de 457,35 euros, devra faire l'objet d'un arpentage par un géomètre pour en délimiter la surface exacte.

Il est expressément convenu entre les parties qu'avec l'accord de Mademoiselle [C], les travaux d'édification d'une rampe d'accès partant de la route communale passant par la propriété de Mademoiselle [C] pour regagner la propriété de Monsieur [U] ont été accomplis pour le compte de Monsieur [U] par Monsieur [G] et ce avec l'accord de Mademoiselle [C]. dont acte

ARTICLE 3 :

En contre partie de cette cession, Monsieur [U] renonce irrévocablement à se prévaloir du passage piétonnier sinueux emprunté par Monsieur et Madame [G], et qui coupe en son milieu la propriété de Mademoiselle [C]. dont acte

ARTICLE 4 : CLAUSE DE CONFIDENTIALITE

Pour la cession du terrain à détacher de la propriété de Mademoiselle [C], les parties désignent Maître [W] [T], Notaire associée à [Adresse 14], pour régulariser l'acte par acte authentique et publication auprès de la conservation des hypothèques. dont acte".

- dit que M. [P] [U] est propriétaire de deux parcelles de terres sises à [Localité 17] (06), lieudit [Localité 18], cadastrées :

- section C N° [Cadastre 8] d'une contenance de 2 ares et 13 centiares, issue de la division de la parcelle cadastrée section C N° [Cadastre 5] d'une contenance de 6 ares et 83 centiares,

- section C N° [Cadastre 10] d'une contenance de 2 ares et 06 centiares, issue de la division de la parcelle cadastrée section C N° [Cadastre 4] d'une contenance de 9 ares et 14 centiares,

- déboute M. [P] [U], M. [E] [G] et Mme [N] [G] née [U] de leur demande tendant à voir condamner Mme [M] [C] à signer la déclaration d'intention d'aliéner à adresser à la SAFER et le projet d'acte notarié dressé par Me [J] [R],

- ordonne la publication du jugement à intervenir au bureau de la conservation des hypothèques compétent par la partie la plus diligente,

- dit qu'il appartiendra à la partie la plus diligente de solliciter les modifications nécessaires auprès des services du cadastre,

- rejette la demande de Mme [M] [C] de voir mettre en place une clôture séparative entre les deux fonds mitoyens,

- rejette la demande de Mme [M] [C] de voir condamner M. [P] [U] et M. [E] [G] et Madame [N] [G] à la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice financier et moral,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- déboute M. [P] [U], M. [E] [G] et Mme [N] [G] née [U] de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- déboute M. [P] [U], M. [E] [G] et Mme [N] [G] née [U] de leur demande au titre des dépens de condamnation de Mme [M] [C] au paiement des frais de constat d'huissier réalisés par Me [Y],

- condamne Mme [M] [C] aux dépens.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu :

- que les termes du protocole du 6 septembre 2002 sont précis, non équivoques, quant à la notion de contestation requise par les dispositions de l'article 2044 du code civil,

- que l'article 2 du protocole stipule que « mademoiselle [C] consent à lui céder le terrain qui se trouve immédiatement contigu et en dessous de son habitation jusqu'à la route sans empiètement sur le reste de la propriété de mademoiselle [C] », précision faite qu'un géomètre devra réaliser un arpentage pour en délimiter la surface exacte, que le protocole comporte les signatures de Mme [C] et de M. [U], que les parties se sont donc entendues sur la surface cédée par Mme [C] à M. [U], ce dernier s'engageant à ne plus traverser la propriété de Mme [C],

- que le protocole ne comporte aucune échéance tant en ce qui concerne le paiement du prix de cession du terrain, ou la réalisation du document d'arpentage, qu'il n'est pas mentionné de sanction en cas de non-respect, que par ailleurs sont versés aux débats une esquisse de modification parcellaire du 9 mai 2012 et un extrait cadastral l'avalisant du 10 mai 2012,

- que le jugement du tribunal d'instance de Menton du 22 octobre 2002 homologue bien le protocole d'accord dans sa totalité,

- sur la demande de condamnation de Mme [C] à signer la déclaration d'intention d'aliéner à adresser à la SAFER et le projet d'acte notarié dressé par Me [J] [R], que le projet d'acte notarié est incomplet,

- que les dispositions de l'article 1583 sur la vente ne sont pas d'ordre public et que les parties peuvent y déroger, que le protocole d'accord n'évoque pas de date de transfert de propriété, ni de réserves, que l'établissement de l'acte notarié à venir est décrit comme une simple régularisation, qu'il y a lieu de considérer qu'au vu du protocole d'accord il y a eu transfert de propriété et que la surface retenue doit être celle enregistrée au cadastre le 10 mai 2012 suite à l'esquisse par le géomètre à la demande de Mme [C] et signé par elle.

Par déclaration du 18 décembre 2019, Mme [C] a relevé appel de ce jugement.

Dans ses conclusions d'appelante déposées et notifiées sur le RPVA le 16 mars 2020, Mme [C] demande à la cour :

- d'infirmer le jugement appelé,

Vu les articles 545 et 1240 du code civil (ancien article 1382 du code civil),

- de dire et juger l'article 2044 du code civil inapplicable au protocole d'accord du 6 septembre 2002, qui n'est pas une transaction,

- de débouter M. [P] [U] et les époux [N] et [E] [G] de toutes leurs demandes, fins et conclusions tant de première instance qu'en cause d'appel,

Reconventionnellement,

- de condamner les consorts [U]-[G] à mettre en place à leurs frais exclusifs la clôture séparative entre les deux fonds mitoyens [C] et [U], conformément au jugement de bornage du 22 octobre 2002 et du plan de bornage de M. [B] géomètre-expert, dressé le 14 juin 2016,

- dire que cette condamnation sera assortie d'une astreinte de 200 euros par jour de retard qui commencera à courir un mois après la signification de la décision à intervenir,

- de condamner les consorts [U]-[G] au paiement de la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice financier et moral subi,

- de condamner solidairement M. [P] [U] et les époux [N] et [E] [A] au paiement de la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Me Agnès Ermeneux de la SCP Ermeneux - Arnaud-Cauchi et associés sous sa due affirmation de droit.

Mme [C] fait valoir en substance :

- que le tribunal d'instance qui dispose d'une compétence d'attribution pour les bornages judiciaires, a acté l'accord des parties sur le rapport d'expertise de M. [H] tel qu'il a fixé les limites séparatives des propriétés concernées, et rien d'autre,

- que pour le reste, à savoir le droit de passage au profit de la propriété [U]-[G], il s'agit d'un protocole d'accord à une vente qui n'a jamais été régularisée pendant plus de douze ans,

- que ce protocole n'est pas un protocole transactionnel comme retenu à tort par le premier juge, que l'article 2044 n'a pas été visé, qu'aucune des deux conditions à savoir une contestation née ou à naître et l'existence de concessions réciproques, ne sont remplies, car il n'existait aucun litige entre l'ancien propriétaire [V] et Mme [C] concernant une prétendue servitude de passage et qu'il n'y a pas de contrepartie, que le prix symbolique prévu dans le protocole n'a jamais été payé,

- que le protocole n'indique pas les parcelles concernées par la servitude de passage, ni la surface de la parcelle à détacher et à vendre, ni l'emprise et l'assiette précise,

- que la Cour de cassation a statué notamment en matière de transaction en ce sens que « la transaction, qui ne met fin au litige que sous réserve de son exécution, ne peut être opposée par l'une des parties que si elle en a respecté les conditions »,

- que par le jugement contesté, elle se trouve dépossédée de 419 mètres de sa propriété, par une division parcellaire qu'elle n'a pas demandée, pour laquelle elle n'a jamais été convoquée par le géomètre-expert saisi à la seule initiative des consorts [U]-[G] et en dehors de son contradictoire,

- qu'elle n'entend pas revenir sur le droit de passage qu'elle leur a accordé en 2002, à la condition que les [G]-[U] s'en tiennent à cette seule destination, sans empiètement d'aucune autre nature,

- que les [G]-[U] ont envahi sa propriété en s'emparant de l'autorisation de passage accordée en 2002, en transformant la servitude de passage en véritable décharge publique, qu'il s'agit d'un trouble anormal de voisinage, que la direction départementale de l'équipement a dressé un procès-verbal d'infraction le 16 septembre 2015 à la suite de nouvelles constructions illégales érigées par les [G],

- qu'elle a largement démontré les atteintes répétées à sa propriété depuis 2014.

Dans leurs conclusions d'intimés déposées et notifiées par le RPVA le 26 mai 2020, M. [E] [G], M. [P] [U] et Mme [N] [U] épouse [G] demandent à la cour :

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement,

En conséquence,

- de débouter Mme [M] [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- de condamner Mme [M] [C] à leur régler la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, ceux d'appels distraits au profit de Me Pierre Yves Imperatore, membre de la SELARL Lexavoué Aix-en-Provence, avocats associés, aux offres de droit.

M. [E] [G], M. [P] [U] et Mme [N] [U] épouse [G] soutiennent pour l'essentiel :

- que le protocole du 06 septembre 2002, homologué par jugement du tribunal d'instance de Menton du 22 octobre 2002 et acquiescé par les parties, a autorité de la chose jugée en dernier ressort et Mme [C] ne justifie d'aucun motif légal, erreur sur la personne, dol ou violence, pour rescinder cette transaction, qui de surcroît, ne peut pas être attaquée pour une erreur de droit ou encore pour cause de lésion,

- qu'en conséquence, la parcelle objet du litige, sur laquelle s'emplace le passage, est propriété de M. [U] et non pas de Madame [C] en vertu du protocole, qu'il ne s'agit donc pas d'une prétendue tolérance de passage à laquelle elle aurait mis fin en 2014 tel qu'a tenté de le faire croire abusivement Madame [C] devant le juge des référés,

- qu'il est faux de soutenir que le protocole n'a pas été suivi d'exécution, qu'il n'y a pas de défaillance de leur part,

- qu'en 2012, la division parcellaire, objet du protocole, a été effectuée par l'expert-géomètre [B], que Mme [C] en a fait elle-même la demande puisque c'est elle qui transfère ses droits immobiliers à M. [U] suivant demande de propriétaire du 22 avril 2012 comportant sa signature, qu'un document d'arpentage a été établi par l'expert-géomètre et signé par M. [U] et Mme [C] le 21 avril .2012, que le tout, comportant le formulaire de modification parcellaire, a été déposé au centre des impôts fonciers les 9 et 10 mai 2012,

- que ces documents comportent sans contestation possible la signature de Mme [C], laquelle ne saurait donc aujourd'hui en contester le caractère contradictoire, et démontrent la réalisation de démarches confortant la volonté des parties déterminée dans le protocole d'accord du 06 septembre 2002,

- que les allégations adverses et production par l'appelante du plan de bornage dressé par M. [B] en 2016 (pièce adverse n°21) ne remettent en aucun cas en cause la volonté des parties telle que déterminée dans le protocole du 06 septembre 2002,

- qu'il résulte de ce document d'arpentage que :

- les parcelles cadastrées section C n°[Cadastre 4] d'une contenance de 6a et 83ca et n°[Cadastre 5] d'une contenance de 9a et 14 ca, lieudit « [Localité 18] », sises à [Localité 17], initialement propriété de Mme [C], ont été divisées en quatre parcelles lieudit « [Localité 18] » sises à [Localité 17] cadastrées section C n°[Cadastre 7] d'une contenance de 4a et 70 ca, n°[Cadastre 8] d'une contenance de 2a et 13 ca, n°[Cadastre 9] d'une contenance de 7a et 08 ca et n°[Cadastre 10] d'une contenance de 2a et 06 ca,

- que les parcelles lieudit « [Localité 18] » sises à [Localité 17] cadastrées section C n°[Cadastre 8] et n°[Cadastre 10] sont propriété de M. [U], tandis que celles cadastrées section C n°[Cadastre 7] et n°[Cadastre 9] demeurent propriété de Mme [C].

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 24 janvier 2023.

L'arrêt sera contradictoire puisque toutes les parties sont représentées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'étendue de la saisine de la cour

Aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Il est constaté que le dispositif des conclusions de l'appelante comporte une demande de « constater » qui ne constitue manifestement pas une prétention, si bien que la cour qui ne l'a pas reprise dans l'exposé du litige, n'en est pas saisie.

Mme [C] se plaint d'atteintes à sa propriété par les intimés, lesquels opposent un protocole signé le 6 septembre 2002.

Sur la portée du protocole du 6 septembre 2002

Les parties s'opposent sur :

- sa valeur de transaction ou pas,

- son contenu : simple bornage ou transfert de propriété,

- son caractère toujours exécutoire ou pas.

Selon les dispositions de l'article 2044 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat doit être rédigé par écrit.

Les articles 2052 et 2053 énoncent que les transactions ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort, qu'elles ne peuvent être attaquées pour cause d'erreur de droit, ni pour cause de lésion. Néanmoins, une transaction peut être rescindée lorsqu'il y a erreur dans la personne ou sur l'objet de la contestation. Elle peut l'être dans tous les cas où il y a dol ou violence.

En l'espèce, Mme [C] conteste en premier lieu la valeur de transaction du protocole d'accord signé le 6 septembre 2002.

Aux termes de ce protocole d'accord signé par Mme [C] et M. [P] [U], il est énoncé un problème de bornage des propriétés de Mme [C] acquises le 22 octobre 1998 cadastrées section C n° [Cadastre 11], [Cadastre 4] et [Cadastre 5], avec la propriété de M. [J] [V] qui les a cédées à M. [P] [U] le 21 juin 1999, ainsi qu'un problème de servitude de passage grevant les parcelles acquises par Mme [C] au profit de M. [P] [U], serpentant et coupant en son milieu la propriété de Mme [C], contestée par Mme [C]. Il y est exposé qu'un rapport d'expertise judiciaire a été déposé par M. [H] le 17 mai 2001, préconisant une limite séparative repérée par les points F à I d'une annexe 5.

Il y est indiqué que les parties n'ont aucune observation à formuler sur cette préconisation de l'expert quant au bornage et souhaitant se concilier sur la servitude afin d'éviter un contentieux, ont décidé d'établir le protocole d'accord soumis à l'homologation du tribunal d'instance de Menton, s'agissant de la cession par Mme [C], du terrain qui se trouve immédiatement et en dessous de son habitation jusqu'à la route, sans empiètement sur le reste de sa propriété, moyennant un prix de cession de 457,35 euros, qui devra faire l'objet d'un arpentage par un géomètre pour en délimiter la surface exacte, qu'il est expressément convenu qu'avec l'accord de Mme [C], les travaux d'édification d'une rampe d'accès partant de la route communale passant par la propriété de Mme [C] pour regagner la propriété de M. [U] ont été accomplis pour le compte de M. [U] par M. [G] avec l'accord de Mme [C].

Il y est précisé que pour la cession du terrain à détacher de la propriété de Mme [C], les parties désignent Me [W] [T], notaire associé à [Localité 13], pour régulariser l'acte par acte authentique et publication auprès de la conservation des hypothèques.

Il en ressort que l'objet de ce protocole d'accord est précis, non équivoque et comporte des concessions réciproques relativement à la servitude revendiquée par M. [P] [U] sur la propriété de Mme [C], à laquelle il renonce en contrepartie de la cession d'une partie de terrain, dont l'emplacement est déterminable, avec référence à la rampe d'accès en cours d'édification, le prix est déterminé et la régularisation par un acte authentique prévue.

Ce protocole remplit ainsi les conditions pour constituer une transaction dans les termes prévus par l'article 2044 du code civil, peu important le fait que l'accord ne fasse pas expressément référence audit article. Le caractère symbolique du prix tel qu'allégué par Mme [C] n'est pas de nature à modifier cette appréciation, au regard des concessions clairement exposées dans le protocole. L'absence de précision quant à la superficie cédée ne constitue pas un obstacle à la qualification de transaction, dès lors que le protocole renvoie à l'établissement d'un document d'arpentage et d'un acte authentique.

Ce protocole a d'ailleurs été soumis à l'homologation du tribunal d'instance de Menton, qui par jugement du 22 octobre 2002 l'a homologué en même temps qu'un autre accord entre Mme [C] et un tiers, jugement auquel les parties ont acquiescé le 5 novembre 2002.

Mme [C] conteste en deuxième lieu le contenu de ce protocole, en estimant qu'il se limite au bornage des propriétés respectives.

Cependant la lecture de ce protocole conduit à conclure, sans aucun doute possible qu'il tend à régler à la fois le bornage des propriétés respectives et le problème lié à la revendication d'une servitude de passage sur la propriété de Mme [C] et le choix des parties d'y remédier par les concessions réciproques contenues dans ledit protocole.

Mme [C] conteste enfin le caractère toujours exécutoire de ce protocole, qu'elle estime caduc faute d'avoir été exécuté par la signature d'un acte authentique.

Il est produit un document intitulé « Modification du parcellaire cadastral » retraçant un changement de limite de propriété, établi par la SARL cabinet [B] géomètre-expert, précisant le nom des parties avant la modification « Mme [C] » et le nom des parties après la modification « Mme [C] et M. [U] », signé par Mme [C] le 22 avril 2012.

Ce document a été transmis au centre des impôts le 9 mai 2012, qui l'a vérifié le 10 mai 2012.

En revanche aucun acte notarié n'est intervenu, les parties s'en rejetant mutuellement la responsabilité et depuis octobre 2014, Mme [C] reproche aux [U]-[G] des empiètements sur sa propriété, en se prévalant de la caducité du protocole d'accord, faute d'établissement de l'acte notarié, de règlement du prix, d'établissement d'un document d'arpentage pour le détachement de parcelle.

Il est constaté que le protocole d'accord ne stipule aucun délai pour son exécution, si bien que la non-exécution ne constitue pas une cause de caducité de la transaction, qui conserve son autorité de la chose jugée entre les parties.

Mme [C] dans le cadre de la présente procédure, ne conteste pas sa signature sur ce document intitulé « Modification du parcellaire cadastral ».

Il importe peu de savoir laquelle des deux parties devait saisir le notaire afin de consacrer le transfert de propriété des parcelles après détachement de parcelles tel que relaté dans le document d'arpentage.

Le règlement du prix stipulé dans le protocole d'accord étant lié au transfert de propriété, il ne peut être reproché à M. [U] de ne pas avoir réglé le prix faute d'établissement de l'acte notarié.

En conséquence, le jugement appelé sera confirmé en ce qu'il a constaté l'existence d'une transaction signée entre les parties, constaté que cette transaction a autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'elle tranche, et a ordonné l'exécution de la transaction selon les modalités précisées.

Sur les autres demandes de Mme [C]

Estimant être victime de violations de son droit de propriété par les [U]-[G], Mme [C] sollicite la condamnation des consorts [U]-[G] à mettre en place à leurs frais exclusifs la clôture séparative entre les deux fonds mitoyens [C] et [U], ainsi que l'indemnisation de son préjudice.

Selon l'article 1382 devenu 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause préjudice à autrui, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

Il ressort des développements ci-dessus que les [U]-[G] tiennent leur droit de passage sur la propriété de Mme [C], du protocole d'accord du 6 septembre 2002, qui ne leur a pas encore été cédée pour la partie concernée, comme convenu dans le protocole d'accord.

Il n'est pas démontré que les [U]-[G] excèderaient leurs droits issus de ce protocole d'accord, ni que la violation des règles d'urbanisme pointée dans des courriers adressés par la direction départementale de l'équipement au procureur de la République, le 15 juillet 1999 concernant M. [V] auteur de M. [U] pour non-respect du permis de construire, et le 2 octobre 2015 pour travaux réalisés sans autorisation administrative préalable, présente un lien de causalité avec le préjudice dont elle réclame réparation pour violation de son droit de propriété, ou encore caractériserait un trouble anormal de voisinage.

Mme [C] sera donc déboutée à la fois de sa demande concernant la pose d'une clôture séparative entre les deux fonds mitoyens, qui aurait pour effet de contrevenir au protocole d'accord du 6 septembre 2002 et de sa demande de dommages et intérêts et le jugement appelé sera confirmé sur ces points.

Sur les demandes accessoires

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement.

Il convient de condamner Mme [C] aux dépens en cause d'appel, qui seront distraits au profit de Me Pierre Yves Imperatore, qui le réclame, ainsi qu'aux frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions appelées ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [M] [C] aux dépens d'appel, qui seront distraits au profit de Me Pierre Yves Imperatore ;

Condamne Mme [M] [C] à verser à M. [P] [U] et M. [E] [G] et Mme [N] [U] épouse [G] la somme de 3 000 euros (trois mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/19263
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;19.19263 ?
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