COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-3
ARRÊT AU FOND
DU 25 MAI 2023
N° 2023/147
Rôle N° RG 19/18579 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFIFA
SARL IMPERIAL 83
C/
[O] [J]
S.A. PROMOGIM
S.C.I. MÉDITERRANÉE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Sonia OULED-CHEIKH
Me Jean-françois JOURDAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 04 Novembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 19/07998.
APPELANTE
SARL IMPERIAL 83, domiciliée [Adresse 3]
représentée par Me Sonia OULED-CHEIKH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
plaidant par Me Thierry MUNOS, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMÉS
Monsieur [O] [J] ès qualité de mandataire liquidateur de la S.A.S ENTREPRISE GENERALE DE BÂTIMENT MANDOLOCIENNE (EGBM),
demeurant [Adresse 1]
défaillant
S.A PROMOGIM prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 2]
représentée par Me Jean-françois JOURDAN de la SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Laurent LACAZE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Benoît LAMBERT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
S.C.I. MÉDITERRANÉE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 2]
représentée par Me Jean-françois JOURDAN de la SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Laurent LACAZE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Benoît LAMBERT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 10 Mars 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente (rapporteure)
Madame Béatrice MARS, Conseillère
Madame Florence TANGUY, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Angéline PLACERES.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2023.
ARRÊT
Défaut,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2023,
Signé par Madame Béatrice MARS, Conseillère, pour la Présidente régulièrement empêchée et Madame Angéline PLACERES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
La SCI Méditerranée, dont la gérante est la SA Promogim, a entrepris la réalisation d'un programme immobilier, dénommé [Adresse 5]).
Selon marché signé le 27 novembre 2017, le lot "gros oeuvre a été attribué à la société EGBM.
Le 5 février 2018, le maître d'ouvrage, la SCI Méditerranée, l'entreprise EGBM et le fournisseur Imperial 83 ont signé une " convention de délégation de paiement à un fournisseur " à hauteur de 93.100 euros HT.
Le 1er juin 2018, la société EGBM a commandé une grue automotrice MK 88 à la société Imperial 83.
La grue a été installée sur le chantier de la Villa [Localité 4] et a été utilisée par la société EGBM dans le cadre de son forfait.
Le 12 mars 2019, le tribunal de commerce de Cannes a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de l'entreprise EGBM.
Par acte d'huissier du 9 avril 2019, la société Imperial 83 a fait assigner la SCI Méditerranée et la société Promogim devant le juge des référés du tribunal de commerce d'Antibes aux fins d'obtenir leur condamnation au paiement de la somme provisionnelle de 98.428,70 euros au titre de ses factures.
Par ordonnance du 3 juin 2019, le juge des référés du tribunal de commerce d'Antibes a condamné solidairement la société Promogim et la SCI Méditerranée au paiement d'une somme provisionnelle de 98.428,70 euros, outre les dépens et les frais irrépétibles.
Appel a été interjeté par la SCI Méditerranée et la société Promogim.
Autorisées par ordonnance sur requête du 25 juin 2019, la SA Promogim et la SCI Méditerranée ont fait assigner à jour fixe, le 5 juillet 2019, la SARL Imperial 83 et Me [O] [J], en qualité de liquidateur judiciaire de la société EGBM, aux fins notamment d'obtenir le remboursement des sommes perçues en exécution de l'ordonnance de référé du 3 juin 2019.
*
Vu le jugement en date du 4 novembre 2019 par lequel le tribunal de grande instance de Marseille a :
- rejeté les exceptions d'incompétence soulevées par la SC immobilière Méditerranée et la SAS Promogim,
- condamné la société Imperial 83 à rembourser à la SCI immobilière Méditerranée toutes les sommes perçues en exécution de l'ordonnance de référé rendue par le tribunal de commerce d'Antibes le 3 juin 2019,
- débouté la société Imperial 83 de ses demandes,
- condamné la société Imperial 83 à payer à la SCI immobilière Méditerranée la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté les autres demandes formulées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Imperial 83 aux dépens ;
Vu l'appel relevé le 5 décembre 2019 par la SARL Imperial 83 ;
Vu les dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 8 février 2023, par lesquelles la SARL Imperial 83 demande à la cour de :
Vu l'article 101 du code de procédure civile,
Vu le contrat de délégation de paiement
Vu l'article 1336 et l'article 1339 du code civil,
Vu les articles 1871 et 1872-1 du code civil
Vu l'article 1873 du code civil
Réformer le jugement entrepris.
En conséquence,
In limine litis :
- se déclarer incompétent et se dessaisir au profit du tribunal de commerce d'Antibes,
Au fond :
- condamner la société immobilière Méditerranée au paiement de la somme principale de 98.428,70 euros,
- condamner la société immobilière Méditerranée au paiement de la somme de 10.000,00 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la résistance abusive,
- condamner la société Promogim à garantir le paiement de toutes les condamnations prononcées à l'encontre de la société immobilière Méditerranée ;
En tout état de cause :
- condamner la société immobilière Méditerranée au paiement de la somme de 5.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société Promogim et la société immobilière Méditerranée au paiement de la somme de 5.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner avec solidarité la société Promogim et la société de construction vente immobilière Méditerranée aux entiers dépens d'instance ;
Vu les dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 24 mars 2020, par lesquelles la SA Promogim et la SCI Méditerranée demandent à la cour de :
Vu l'article I336 (anciennement 12 75) et I832 et suivants du code civil,
Vu les dispositions de la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975 et en particulier de son article 1
Vu les dispositions des articles 90 et 488 du code de procédure civile,
Vu les dispositions des articles L. 211-I et suivants du code de la construction et de l'habitation,
Vu les dispositions de l'article L. I10-I du code de commerce,
Vu les dispositions de l'article 239 ter du code général des impôts,
Vu la délégation de paiement régularisée le 5 février 2019,
Vu l'ordonnance de référé rendue le 3 juin 2019
In limine litis, sur la confirmation du jugement entrepris s'agissant de la compétence matérielle et territoriale du tribunal de grande instance de Marseille :
- dire et juger que le fait de maintenir une exception d'incompétence au profit du tribunal de commerce d'Antibes n'a plus d'intérêt pour la société Imperial 83, puisqu'en application des dispositions de l'article 90 du code de procédure civile, la cour, juge d'appel de la juridiction au profit duquel l'incompétence est soulevée, devra, en tout état de cause statuer au fond,
- dire et juger qu'une société civile de construction vente est civile de par sa forme et son objet d'une part et que son régime fiscal ne peut lui conférer la moindre commercialité, puisqu'en application du principe de la transparence fiscale il dépend de celui de ses associés,
- dire et juger que le fait que la SCI Méditerranée soit gérée par une société commerciale et que la délégation de paiement litigieuse ait été signée par un préposé de sa gérante ne suffit pas à caractériser la commercialité de celle-ci,
- dire et juger que la convention de délégation de paiement ne comporte aucune clause attributive de compétence et qu'en outre cette dernière aurait été inopposable à la SCI Méditerranée qui n'a pas la qualité de commerçante,
- dire et juger qu'en l'état de la nature civile de l'une des demanderesses et du siège social de l'une des défenderesses, le tribunal de grande instance de Marseille était compétent tant matériellement que territorialement pour connaître du présent litige,
- dire et juger qu'en l'absence d'autorité de la chose jugée au principal de l'ordonnance de référé rendue le 3 juin 2019 par le tribunal de commerce d'Antibes, les sociétés SAS Promogim et SCI Méditerranée sont recevables à voir dire et juger qu'elles ne sont pas débitrices de la société Imperial 83, à obtenir la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la condamnation de la société Imperial 83 au remboursement de toute somme pouvant avoir été versé en exécution de cette ordonnance et à voir la société Imperial 83 déboutée de l'ensemble de ses demandes,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Imperial 83 de l'exception d'incompétence soulevée dans le cadre de ses écritures, ainsi que des fins de non-recevoir tirées de la prétendue absence de prétentions formées par les société SAS Promogim et SCI Méditerranée ;
Au fond :
- dire et juger que la société Promogim n'est que la gérante de la SCI Méditerranée et qu'elle ne s'est pas contractuellement engagée envers les société EGBM et Imperial 83 et qu'aucun solidarité expresse ou présumée ne saurait exister entre les société Promogim et SCI Méditerranée à l'égard de la société EGBM,
- dire et juger que la société Promogim ne pouvait être actionnée en paiement sur le fondement des dispositions de l'article L.211-2 du code de la construction et de l'habitation, faute d'obtention préalable d'un titre par la société Imperial 83 antérieurement à l'introduction de l'instance contre l'associé,
- dire et juger qu'en tout état de cause, que la responsabilité de la société Promogim SA en tant qu'associée était limitée à 1% de la dette en application des dispositions de l'article L. 211-2 du code de la construction et de l'habitation,
- dire et juger que la SCI Méditerranée a procédé à une déclaration au passif de la société EGBM le 17 mai 2017 au titre du surcoût de l'intervention en régie d'une société tierce ayant assuré l'achèvement des travaux laissés en l'état, aux pénalités de retard et aux malfaçons de la défaillance de cette dernière et qu'elle n'était redevable d'aucune somme à son égard ainsi que le démontre par ailleurs le DGD définitif qui a été notifié au liquidateur,
- dire et juger que les relations contractuelles entre la SCI Méditerranée et la société Imperial 83 sont exclusivement régies par les stipulations de la convention tripartite de délégation de paiement,
- dire et juger qu'en l'état de l'inapplicabilité des dispositions de la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975, la convention de délégation de paiements pouvait valablement prévoir, en application des dispositions de l'article 1336 alinéa 2 du code civil, la possibilité pour le délégué de se prévaloir des exceptions tirées des rapport entre déléguant et délégataire ou entre délégué et déléguant,
- dire et juger que la société Imperial 83 ne démontre aucunement que les stipulations contractuelles conditionnant l'existence et l'exigibilité d'une éventuelle créance à l'égard du maître de l'ouvrage, la SCI Méditerranée ont été respectées,
- dire et juger, en particulier, que la société Imperial 83 se contente de produire de simples factures qu'elle s'est constituée à elle-même et que ces dernières n'étaient pas jointes aux factures de situation de la société EGBM, ne comportent pas le cachet de la société EGBM avec la mention " bon pour règlement de la somme de '..Euros HT ", n'ont pas été visées expressément par le maître d''uvre qui n'a pas attesté que les produits facturés ont été approvisionnés et/ou mis en 'uvre sur le chantier et enfin ne comportent pas le cachet et la signature du maître d''uvre précédée de la mention spéciale " Approvisionnement réalisé, bon pour paiement ",
- dire et juger, en particulier, que la société Imperial 83 ne démontre pas que la SCI Méditerranée était débitrice de la société EGBM à la date de la demande en paiement formée au visa de la convention de délégation de paiement et qu'au contraire, la SCI Méditerranée démontre que c'est la société EGBM qui était débitrice,
- dire et juger que les conditions propres à la mise en 'uvre de la délégation de paiement signée le 5 février 2013, par la SCI Méditerranée, la société Imperial 83 et la société EGBM, ne sont pas réunies,
- dire et juger, en conséquence, que la société Imperial 83 ne peut se prévaloir ni à l'égard de la SCI Méditerranée ni à l'égard de la société Promogim d'aucune créance au titre des locations accordées à la société EGBM,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Imperial 83 à rembourser à la SCI Méditerranée et/ou la société Promogim toutes les sommes qu'elle aurait perçues en exécution de l'ordonnance de référé rendue le 3 juin 2019 ainsi que de l'ensembles des frais inhérents aux mesures d'exécution entreprises,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Imperial 83 de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,
- débouter la société Imperial 83 de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles en cause d'appel,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Imperial 83 à payer à la SCI Méditerranée la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens,
- condamner la société Imperial 83 à payer à la SCI Méditerranée et la SA Promogim, chacune, la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles en cause d'appel, outre les entiers dépens ;
Vu la signification de la déclaration d'appel et les conclusions d'appelante à M. [O] [J], pris en qualité de liquidateur de la société EGBM, suivant acte d'huissier en date du 19 mars 2020 établi dans les formes de l'article 658 du code de procédure civile ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 10 février 2023 ;
SUR CE, LA COUR
Sur la compétence
L'appelante soutient que les moyens humains et matériels de la SCI Méditerranée sont ceux de la société Promogim et qu'elle n'a aucune autonomie ni indépendance. Elle admet que sa nature juridique est civile mais affirme que son exploitation est commerciale. Elle avance le caractère fictif de la société, qui n'est, selon elle, qu'une façade juridique dans un but d'optimisation fiscale.
Les intimées rappellent que la cour d'appel d'Aix-en-Provence est le juge d'appel tant du tribunal de grande instance de Marseille que du tribunal de commerce d'Antibes et qu'elle doit, en tout état de cause, se prononcer sur le fond du dossier en application de l'article 90 alinéa 2 du code de procédure civile. Elles font valoir qu'une SCCV est une société civile par la forme, que son objet n'est ni commercial ni industriel, et que sa gérance par une société commerciale ne modifie pas sa nature. Elles ajoutent que le régime fiscal d'une SCCV ne la prive pas de son caractère civil et conteste la prétendue fictivité alléguée la partie adverse, d'autant que la SCI Méditerranée, créée en 1971, a été le support de centaines de programmes immobiliers.
Aux termes de l'article L 211-1 du code de la construction et de l'habitation, les sociétés civiles dont l'objet est de construire un ou plusieurs immeubles en vue de leur vente en totalité ou par fractions sont régies par les chapitre 1er et II du titre IX du livre III du code civil et par les dispositions du présent chapitre.
Les immeubles construits par elles ne peuvent être attribués, en tout ou en partie, en jouissance ou en propriété, aux associés, en contrepartie de leurs apports, ceci à peine de nullité de l'attribution.
Selon l'article 2 des statuts, la société civile immobilière Méditerranée a pour objet :
- l'acquisition de tous terrains situés dans le sud-est de la France permettant le montage d'opérations de constructions,
- la construction sur ces terrains d'ensembles immobiliers à usage principal d'habitation pour les trois quarts au moins de la superficie,
- la propriété, l'administration et l'exploitation par bail, location ou autrement desdits ensembles immobiliers et de tous autres immeubles, annexes ou accessoires, bâtis ou non bâtis. dont la société pourrait devenir propriétaire ultérieurement par voie d'acquisition, échange, apport ou autrement,
- la division de ces ensembles immobiliers en appartements, pavillons et locaux séparés (commerciaux ou autres),
- la vente par fractions ou en totalité desdits appartements, pavillons et locaux, soit achevés, soit à terme ou en l'état d'achèvement,
- le cautionnement avec ou sans garantie hypothécaire, ayant pour but de permettre la réalisation des constructions entreprises, et généralement, toutes opérations quelconques pouvant se rattacher directement ou indirectement à l'objet ci-dessus, pourvu que ces opérations ne modifient en rien le caractère cil de la société et restent dans les limites permises par l'article 28 de la loi n° 64 278 du 23 Décembre 1964 et par le Titre I de la loi du 16 Juillet 1971 modifiée par la loi n' 72 649 du 11 Juillet 1972, ainsi que dans celles de la loi n° 78.9 du 4 Janvier 1978.
Il ressort de L'extrait K Bis la société civile immobilière Méditerranée a pour activité " acquisition de terrains, construction, vente d'immeubles ".
La gestion de la SCI Méditerranée par une société commerciale et son régime fiscal ne sauraient modifier sa nature et son objet civils.
Il n'est pas davantage établi qu'elle est " une coquille vide " ou une société fictive et qu'elle accomplit, de manière habituelle, des actes de commerce au sens de l'article L 110-1 du code de commerce.
En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement sur le rejet des exceptions de compétence matérielle et territoriale, sauf à rectifier l'erreur matérielle en ce qu'elles ont été soulevées par la SARL Imperial 83, et non par la SCI Méditérranée et la SAS Promogim, étant observé que ces dernières relèvent cette erreur dans leurs écritures ( page 5).
Sur le fond
Conformément à l'autorisation donnée aux parties lors de l'audience des plaidoiries, l'arrêt en date du 14 janvier 2021, rendu dans le cadre de l'appel interjeté par la société Promogim et la SCCV Méditerranée à l'encontre de l'ordonnance de référé en date du 3 juin 2019, a été communiqué à la cour en cours de délibéré. Cette décision a infirmé l'ordonnance précitée.
L'appelante se prévaut d'une créance représentée par douze bons de livraison qui ont fait l'objet de factures. Elle soutient que la SCI Méditerranée, en qualité de déléguée au contrat de délégation de paiement, est tenue au paiement de la créance envers la délégataire et qu'elle ne peut contester sa qualité de débitrice en raison de l'absence d'ordre de paiement de la société EGBM. Elle soutient que la SA Promogim est débitrice solidaire et réitère que cette dernière a mis à la disposition de la SCI Méditerranée ses moyens humains et matériels et a poursuivi son objet social par l'intermédiaire de la SCI.
Les intimées contestent l'existence de la créance alléguée par la SARL Imperial 83 à leur encontre au regard des termes de la convention et de l'insuffisance de preuve constituée par les factures. Elles rappellent que la solidarité ne se présume pas. Elles soulignent que l'appelante n'a pas effectué de déclaration de créance au passif de la société EGBM, que cette dernière a la seule qualité de fournisseur et que, dès lors, les dispositions de la loi du 31 décembre 1975 sont inapplicables de même que la jurisprudence rendue au visa de cette loi concernant l'absence d'ordre de paiement du délégant. Elles soutiennent que les conditions de la délégation de paiement ne sont pas réunies. Elles mettent en exergue que la SCI Méditerranée est créancière de la société EGBM, et non pas redevable à l'égard de celle-ci. Elle ajoute disposer d'un DGD non contesté par le liquidateur.
En vertu de l'article 1336 du code civil,
La délégation est une opération par laquelle une personne, le délégant, obtient d'une autre, le délégué, qu'elle s'oblige envers une troisième, le délégataire, qui l'accepte comme débiteur.
Le délégué ne peut, sauf stipulation contraire, opposer au délégataire aucune exception tirée de ses rapports avec le délégant ou des rapports entre ce dernier et le délégataire.
À titre liminaire, il convient de rappeler que la SCI Méditérranée et la SAS Promogim sont des personnes morales distinctes, dotées d'une forme juridique différente, et immatriculées, chacune, sous un numéro différent au registre du commerce et des sociétés.
La SCI Méditerranée est le maître d'ouvrage de l'opération immobilière, ainsi qu'il ressort notamment de la délégation de paiement qu'elle a signée en cette qualité.
Elle a effectué, par l'intermédiaire de sa gérante, une déclaration de paiement au passif de la société EGBM.
En l'espèce, la 'délégation de paiement à fournisseur' se réfère expressément au contrat de fourniture d'une grue automotrice MK 88 pour un prix de 93 100 euros HT pour 152 heures par mois et indique que la commande est intégralement et exclusivement destinée à la construction de l'ensemble immobilier pour le compte du maître d'ouvrage sur le chantier en objet (Villa [Localité 4]).
Il est mentionné notamment :
- article 1 :
L'entreprise délègue, dans les termes de l'article 1275 du code civil, le maître d'ouvrage, qui l'accepte expressément, au fournisseur pour recevoir le paiement des sommes dues au titre du contrat de fourniture visé ci-dessus à concurrence de la créance exigible de l'entreprise vis-à-vis du maître d'ouvrage.
La présente délégation est acceptée sans novation des obligations contractées par l'entreprise, laquelle reste tenue au paiement de l'intégralité de la créance du fournisseur, le fournisseur conservant le bénéfice de toutes les actions, sûretés et garanties attachées à l'exécution de son contrat de fourniture et à ladite créance.
- article 2 :
De convention expresse entre les parties, le maître d'ouvrage ne procédera au règlement des situations présentées par le fournisseur que sur ordre de l'entreprise.
La facture du fournisseur doit être libellée au nom de l'entreprise, être jointe à la facture de l'entreprise, comporter la position du cachet de l'entreprise et la mention " bon pour règlement de la somme de ' euros HT ".
Les factures du fournisseur ainsi jointes aux situations de paiement de l'entreprise devront être visées expressément par le maître d''uvre qui atteste que les produits facturés ont été approvisionnés et/ou mis en 'uvre sur le chantier du maître d'ouvrage. Il appose son cachet et sa signature précédée de la mention spéciale " approvisionnement réalisé, bon pour paiement ".
Ainsi, les relations entre les parties ne sont pas régies par les dispositions de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance. La SARL Imperial 83 est expressément dénommée " Le Fournisseur " et elle reconnaît dans ses écritures qu'elle n'est pas une entreprise sous-traitante. Son argumentation relative à la sous-traitance est, par suite, inopérante.
La SAS Promogim, gérante de la SCI Méditerranée, n'est pas partie à la convention de délégation de paiement et n'a contracté aucune obligation personnelle à l'égard de la SARL Imperial 83. La signature de M. [E], agissant en qualité de représentant de la SCI Méditerranée, et l'utilisation du Logo Promogim dans certains documents du marché ne sauraient avoir pour effet d'engager la SA Promogim au titre d'un contrat auquel elle est tiers.
En outre, comme l'a relevé la juridiction de première instance, la SA Promogim ne peut être recherchée en tant qu'associée en l'absence d'un titre à l'encontre de la SCI Méditerranée. Par ailleurs, le spremiers juges ont exactement rappelé que la solidarité ne se présume pas.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation à l'encontre de la SA Promogim.
La délégation de paiement prévoit des modalités d'exécution précises pour sa mise en 'uvre.
Or, les factures produites par la SARL Imperial 83, établies par ses soins, ne comportent ni le cachet ni le bon pour règlement de la société EGBM, pas plus qu'elles ne font apparaître le visa du maître d''uvre.
La SARL Imperial 83 ne justifie pas d'une créance exigible, qui plus est au regard de la déclaration de créance de la SCI Méditerranée au passif de la société EGBM et de l'absence de décompte général définitif contesté par le liquidateur.
Il s'infère de ce qui précède que le jugement sera confirmé sur le rejet des demandes de la SARL Imperial 83.
Il sera alloué une indemnité aux sociétés intimées au titre des frais irrépétibles qu'elles ont exposés pour faire valoir leur défense devant la cour.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt de défaut mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement déféré, sauf à rectifier l'erreur matérielle qui affecte le dispositif s'agissant du rejet des exceptions d'incompétence " soulevées par la SCI Méditérranée et la SAS Promogim ", disposition remplacée par " soulevées par la SARL Imperial 83 " ;
Condamne la SARL Imperial 83 à verser à la SCI Méditérranée et la SAS Promogim, la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Rejette toute autre demande ;
Condamne la SARL Imperial 83 aux dépens d'appel.
LA GREFFIÈRE POUR LA PRESIDENTE REGULIEREMENT EMPÊCHÉE, LA CONSEILLERE