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25/05/2023 | FRANCE | N°19/18265

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 25 mai 2023, 19/18265


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 25 MAI 2023

OA

N° 2023/ 203













N° RG 19/18265 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFHJC







SAS CABINET DEVICTOR





C/



[G] [V]

[S] [V] épouse [V]

[T] [P] épouse [P]

Société LE SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L'IMMEUBLE [Adresse 1]



























Copie exécutoire dé

livrée

le :

à :



SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES



Me Chloé GILLIARD



Me Anne Laure GASPERINI

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance de MARSEILLE en date du 11 Octobre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 11 19-960.



APPELANTE...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 25 MAI 2023

OA

N° 2023/ 203

N° RG 19/18265 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFHJC

SAS CABINET DEVICTOR

C/

[G] [V]

[S] [V] épouse [V]

[T] [P] épouse [P]

Société LE SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L'IMMEUBLE [Adresse 1]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES

Me Chloé GILLIARD

Me Anne Laure GASPERINI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance de MARSEILLE en date du 11 Octobre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 11 19-960.

APPELANTE

SAS CABINET DEVICTOR, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social sis, [Adresse 2]

représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

INTIMES

Monsieur [G] [V]

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Chloé GILLIARD, avocat au barreau de MARSEILLE

Madame [S] [J] épouse [V]

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Chloé GILLIARD, avocat au barreau de MARSEILLE

Madame [T] [W] épouse [P]

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Chloé GILLIARD, avocat au barreau de MARSEILLE

LE SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L'IMMEUBLE [Adresse 1], représentée par son Syndic en exercice, la SAS CABINET DE VICTOR, elle-même prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social sis [Adresse 2]

représenté par Me Anne Laure GASPERINI, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Olivier ABRAM, Vice Président placé chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fonction de président de chambre

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM, Vice Président placé

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Mai 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Mai 2023

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fonction de président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

Les époux [J]/[V] ont acquis en 2012 les lots n°8 et 20 de l'immeuble en copropriété situé [Adresse 1] ; Mme [T] [W] épouse [P] est propriétaire des lots n° 7 et 17 dans ce même immeuble depuis 1997. Le règlement de copropriété originaire de 1971 a fait l'objet d'une modification en 1995 postérieurement à l'assemblée générale du 4 février 1993 portant création des lots n° 23 à 25.

Se prévalant d'une erreur à leur détriment dans la répartition des millièmes de copropriété consécutive à cette modification, les époux [J]/[V] et Mme [T] [P] ont sollicité auprès de la SAS Cabinet Devictor, syndic en exercice, remboursement d'une partie de leurs charges de copropriété.

Les démarches amiables n'ayant pas abouti, les époux [J]/[V] et Mme [T] [P] ont fait assigner le syndicat des copropriétaires et le syndic à titre personnel en remboursement de charges indues et paiement de dommages-intérêts. Le syndic a opposé principalement la prescription de l'action ; le syndicat a conclu en cas de condamnation à la garantie de la SAS Cabinet De victor.

Selon jugement contradictoire du 11 octobre 2019, le tribunal d'instance de Marseille a :

'déclaré irrecevable l'appel en garantie du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] à [Localité 3] à l'encontre de la SAS Cabinet De victor ;

'déclaré recevable l'appel en garantie du même syndicat à l'encontre de la SAS Cabinet Devictor concernant sa gestion du 1er janvier 2017 au jour de l'audience ;

'déclaré irrecevables les demandes des époux [J]/[V] et de Mme [T] [P] à l'encontre du syndicat des copropriétaires relatives aux années 2008 au 4 mars 2014 ;

'déclaré recevables les demandes des époux [J]/[V] et de Mme [T] [P] à l'encontre du même syndicat pour la période postérieure au 5 mars 2014 ;

'déclaré irrecevable l'action formée contre la SAS Cabinet Devictor pour une période antérieure au 5 mars 2009 ;

'déclaré recevable l'action formée contre la même pour la période postérieure au 5 mars 2009;

'condamné la SAS Cabinet Devictor et le syndicat des copropriétaires à payer à Mme [T] [P] la somme de 784,77 € concernant les années 2017 et 2018 ;

'condamné la SAS Cabinet Devictor et le syndicat des copropriétaires à payer aux époux [J]/[V] la somme de 499,94 € correspondant aux années 2017 et 2018 ;

'condamné la SAS Cabinet Devictor à payer à Mme [T] [P] la somme de 2299,80 €;

'condamné la SAS Cabinet Devictor à payer aux époux [J]/[V] la somme de 1049,29 €;

'débouté les époux [J]/[V] et Mme [T] [P] de leur demande en paiement de dommages-intérêts ;

'condamné la SAS Cabinet Devictor et le syndicat des copropriétaires à leur payer la somme de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

'condamné la même aux dépens ;

'ordonné l'exécution provisoire du jugement ;

'débouté les parties du surplus de leurs demandes.

La SAS Cabinet Devictor a régulièrement relevé appel de cette décision le 29 novembre 2019 et demande à la cour selon dernières conclusions signifiées par voie électronique le 7 mars 2013 de:

vu l'article L 110-4 du code de commerce,

vu l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965,

vu les procès-verbaux d'assemblées générales de 2004 à 2019 donnant quitus au syndic de sa gestion,

'prononcer la caducité de l'appel ;

'en tout état de cause, réformer le jugement déféré ;

'déclarer irrecevables comme prescrites les demandes des copropriétaires [J]/[V] et [T] [P] et du syndicat des copropriétaires formées à l'encontre de la SAS Cabinet De victor;

'au surplus, déclarer irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires à l'encontre du syndic Cabinet Devictor, l'assemblée générale des copropriétaires lui ayant donné quitus de sa gestion ;

vu l'article 11 de la loi du 10 juillet 1965,

vu la délibération de l'assemblée générale du 4 février 1993,

'débouter les copropriétaires [J]/[V] et [T] [P] ainsi que le syndicat des copropriétaires de l'intégralité de leurs demandes ;

vu les articles 1240 et 1992 du Code civil,

'débouter les mêmes de leur demande à l'encontre du syndic Cabinet Devictor;

'à titre subsidiaire, limiter des condamnations de la SAS Cabinet Devictor à l'égard de Mme [T] [P] à la somme de 633,27 € au titre des années 2014 à 2017 et à l'égard des époux [J]/[V] à la somme de 464,44 € au titre des années 2014 à 2017 ;

' condamner les époux [J]/[V] et Mme [T] [P] au paiement d'une indemnité de 4000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

' condamner les mêmes aux dépens avec bénéfice de recouvrement direct.

Au soutien de son appel, la SAS Cabinet Devictor fait valoir principalement que le différend résulte d'une erreur du notaire [L] commise lors de la publication du règlement de copropriété modifié, que les copropriétaires [J]/[V] et [T] [P] veulent s'en prévaloir 24 ans plus tard à leur seul profit et au détriment de la copropriété, que leurs demandes sont prescrites et mal fondées en ce qu'ils ont donné régulièrement quitus à la SAS Cabinet Devictor et n'établissent aucune faute à son encontre, que la répartition des charges pour les lots n°1à 22 a bien été établie selon le règlement initial de 1971 et qu'à tout le moins les condamnations prononcées par le tribunal doivent être réduites.

Selon dernières conclusions en réplique signifiées par voie électronique le 6 mai 2020, les époux [J]/[V] et Mme [T] [P] demandent à la cour de :

'réformer le jugement déféré en ce qu'il :

*déclare irrecevable l'appel en garantie du syndicat des copropriétaires à l'encontre de la SAS Cabinet Devictor,

*déclare irrecevable l'action des époux [J]/[V] et de Mme [T] [P] à l'encontre du syndicat des copropriétaires pour la période postérieure au 5 mars 2014,

*déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

'statuant à nouveau, condamner la SAS Cabinet Devictor et le syndicat des copropriétaires à payer les sommes de 1549,23 € aux époux [J]/[V] et 3347,74 € à Mme [T] [P] avec intérêts au taux légal respectivement à compter du 12 novembre 2018 et 20 novembre 2018

'condamner les mêmes au paiement de celle de 2000 € à titre de dommages-intérêts

'condamner la SAS Cabinet Devictor et le syndicat des copropriétaires à payer la somme de 2500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

'condamner les mêmes aux dépens d'appel.

Les époux [J]/[V] et Mme [T] [P] soutiennent principalement que depuis la modification des millièmes de copropriété intervenue en 1995, l'appelant a procédé à une répartition erronée des charges de copropriété, que cette erreur a été admise par le syndic dans son courrier du 13 juillet 2018, que si les appels de charges ont été modifiés en janvier 2019, la SAS appelante n'a pas rectifié les appels antérieurs, que la prescription courant à compter de chaque appel de fonds ils sont recevables à agir au visa de l'article 2222 du code civil, que le quitus donné par l'assemblée générale n'exonère en rien le syndic d'une faute à l'égard d'un copropriétaire, que l'assemblée générale du 4 février 1993 a décidé à l'unanimité d'une nouvelle répartition des charges et de la création de nouveaux lots, que cette résolution n'a jamais été contestée et que la SAS Cabinet Devictor ne pouvait d'autant moins l'ignorer qu'elle est intervenue comme agent immobilier lors de l'acquisition des époux [J]/[V].

Le syndicat des copropriétaires a constitué avocat mais n'a pas conclu ni déposé de pièces.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue en cet état de la procédure le 7 mars 2023.

MOTIFS de la DECISION

Sur la procédure :

Au dispositif de leurs conclusions, les époux [J]/[V] et Mme [T] [P] développent un argumentaire selon lequel : « à aucun moment il n'est indiqué dans les conclusions quels sont les chefs de jugement critiqués, si bien que les intimés ne savent pas exactement ce que demande l'appelante. Le litige n'est donc pas déterminé. Il y a donc lieu de prononcer la caducité de l'appel ». Cet argumentaire figurant curieusement au dispositif en méconnaissance de l'article 954 du code de procédure civile est manifestement irrecevable. En effet, la déclaration d'appel visant les chefs de jugement critiqués a été régulièrement dénoncée aux copropriétaires intimés et à leur conseil et aucune disposition procédurale n'impose qu'ils soient repris dans les premières conclusions de l'appelante. Ce chef de demande est rejeté.

S'agissant de la recevabilité de la demande, le premier juge a très exactement considéré que le quitus donné par l'assemblée générale au syndic privait seul le syndicat du droit d'agir à son encontre mais non pas les copropriétaires pris individuellement selon les principes gouvernant la responsabilité délictuelle de droit commun, les copropriétaires ayant la qualité de tiers à l'égard du syndic dès lors que le mandat ne lie que ce dernier et le syndicat. En revanche, l'action se prescrit par cinq ans ainsi qu'il ressort de l'article 2224 du code civil ; en l'état d'une assignation en date du 5 mars 2019, les réclamations antérieures au 5 mars 2014 sont prescrites.

La loi ELAN du 23 novembre 2018 a étendu le délai quinquennal de l'article 2224 du code civil aux actions personnelles relatives à la copropriété visées à l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 organisant la copropriété des immeubles bâtis ; cependant cette réduction du délai n'est pas rétroactive en lecture de l'article 2222 du même code qui prévoit : « en cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ».

En lecture de ces dispositions, les demandes formées contre le syndicat ne sont pas prescrites.

Au fond :

Il est constant que les appels de charges et régularisations annuelles opérés par la SAS Cabinet Devictor ont été réalisés en méconnaissance du règlement de copropriété initial de 1971 et de son modificatif de 1995 ; l'appelante ne le conteste pas réellement en lecture de son courrier du 13 novembre 2018 adressé à M. [G] [V] et contrairement à ses dires, elle ne pouvait ignorer la modification de la répartition des charges adoptée par l'assemblée générale du 4 février 1993. C'est donc à bon droit que le premier juge a retenu la faute du syndic professionnel dont le trop-perçu de charges constitue les conséquences dommageables.

Ce dernier prétend qu'un millième de charges aurait été omis par les intimés dans leurs réclamations indemnitaires ; cependant la SAS Cabinet Devictor qui n'a jamais contesté les décomptes figurant en pièces n°5 et 6 de leur dossier ni dans leur courrier du 20 novembre 2018 (cf pièce n°9) n'établit pas d'incidence comptable tirée de cette erreur prétendue.

En conséquence le jugement est confirmé, sauf à limiter à 945,73 € la condamnation à paiement prononcée contre le syndic et au profit de Mme [T] [P] au regard de la prescription de l'action délictuelle évoquée ci-dessus.

Sur les demandes annexes :

Les époux [J]/[V] et Mme [T] [P] réclament paiement de l'intérêt au taux légal à compter de mises en demeure des 12 et 20 novembre 2018 sans produire les avis d'envoi et accusés de réception ; en conséquence cet intérêt ne peut être appliqué qu'à compter de l'assignation introductive d'instance.

Aux termes de l'article 1231-6 du code civil, en matière de paiement de sommes d'argent le préjudice issu du retard est réparé par l'allocation de l'intérêt au taux légal et il appartient au créancier réclamant paiement de sommes complémentaires de justifier d'un préjudice distinct. Cette preuve ne résultant pas de la seule carence de la SAS Cabinet De victor, le rejet de ce chef de demande est confirmé.

Aucune circonstance économique ou d'équité ne contrevient à l'application de l'article 700 procédure civile.

Déboutée de l'essentiel de son recours, la SAS Cabinet Devictor est condamnée aux dépens d'appel en application de l'article 696 du même code.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Dit n'y avoir lieu à caducité de l'appel ;

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il déclare recevable l'action formée contre la SAS Cabinet Devictor pour une période postérieure au 5 mars 2009 et la condamne à payer à Mme [T] [P] la somme de 2299,80 € ;

Et réformant de ces seuls chefs :

Déclare prescrites à l'encontre de la SAS Cabinet Devictor les demandes indemnitaires de Mme [T] [P] postérieures au 5 mars 2014 ;

Condamne la SAS Cabinet Devictor à lui payer la somme de 945,73 € ;

Ajoutant au jugement :

Dit que les condamnations pécuniaires porteront intérêt au taux légal à compter de l'assignation;

Condamne la SAS Cabinet Devictor à payer aux époux [J]/[V] et à Mme [T] [P] ensemble la somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en appel ;

Condamne la même aux dépens d'appel.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/18265
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;19.18265 ?
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