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17/05/2023 | FRANCE | N°20/02318

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 17 mai 2023, 20/02318


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 17 MAI 2023

PH

N° 2023/ 192













N° RG 20/02318 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BFTJH







[X] [P]

[E] [G] épouse [P]





C/



Syndic. de copro. VILLA BELLE ROSE



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH



Me Alexandra MASSON BETTATI



























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 10 Décembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/03229.



APPELANTS



Monsieur [X] [P]

demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Joseph MAGNAN d...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 17 MAI 2023

PH

N° 2023/ 192

N° RG 20/02318 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BFTJH

[X] [P]

[E] [G] épouse [P]

C/

Syndic. de copro. VILLA BELLE ROSE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH

Me Alexandra MASSON BETTATI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 10 Décembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/03229.

APPELANTS

Monsieur [X] [P]

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Laurent CINELLI de la SARL CINERSY, avocat au barreau de NICE substituée par Me Florence PAULUS, avocat au barreau de NICE

Madame [E] [G] épouse [P]

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Laurent CINELLI de la SARL CINERSY, avocat au barreau de NICE substituée par Me Florence PAULUS, avocat au barreau de NICE

INTIME

Syndicat des copropriétaires VILLA BELLE ROSE, sis [Adresse 2], agissant poursuites et diligences en la personne de son syndic en exercice y domicilié en cette qualité

représenté par Me Alexandra MASSON BETTATI, avocat au barreau de NICE substitué par Me Thibauld MASSON, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Patricia HOARAU, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre,

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM,Vice Président placé

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Mai 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Mai 2023

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller , faisant fonction de Président de chambre, et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

M. [X] [P] et Mme [E] [G] épouse [P] sont propriétaires d'un bien immobilier sis [Adresse 1] et [Adresse 3], mitoyen de l'ensemble immobilier dénommé Villa belle rose, sis [Adresse 2].

M. et Mme [P] ont entrepris des travaux dans leur propriété, critiqués par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Villa belle rose (ci-après le syndicat des copropriétaires) pour avoir été réalisés sans autorisation administrative et un procès-verbal d'infractions a été établi le 13 avril 2010.

Se plaignant de désordres, le syndicat des copropriétaires a obtenu par ordonnance de référé, la désignation d'un expert judiciaire, M. [F] [I], lequel a déposé son rapport définitif le 26 février 2015.

Par exploit d'huissier du 7 juin 2016, le syndicat des copropriétaires a fait assigner M. et Mme [P] devant le tribunal de grande instance de Nice aux fins d'obtenir l'indemnisation de préjudices, la réalisation de travaux et l'élagage d'arbres.

Le tribunal de grande instance de Nice, a par jugement du 10 décembre 2019 :

- condamné M. et Mme [P] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 6 187,50 euros TTC au titre des travaux de réfection du mur mitoyen et du caniveau,

- dit que M. et Mme [P] devront laisser libre accès à leur propriété à l'effet d'effectuer les travaux du mur mitoyen en amont en leur lieu et place avec autorisation de pénétrer sur leur propriété pour la réalisation des travaux, sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision et ce pendant un délai de six mois au-delà duquel il sera de nouveau statué,

- débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes de condamnation de M. et Mme [P] à réaliser les travaux de réalisation d'un caniveau de récupération des eaux de pluie sous le rôle d'un bureau d'études sous astreinte et à payer les honoraires de tel maitre d''uvre qu'il plaira au tribunal de nommer pour gérer les travaux du mur mitoyen amont, la réalisation du niveau de récupération des eaux de pluies et plus particulièrement contrôler la qualité de la canalisation d'évacuation liée à la récupération des eaux de pluie,

- condamné M. et Mme [P] à procéder à l'élagage des arbres mesurant plus de 2 mètres situés entre 50 centimètres et 2 mètres de la limite séparative et à supprimer la végétation située à moins de 50 centimètres de la limite séparative sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision,

- débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts sur le fondement de la théorie des troubles anormaux de voisinage,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné M. et Mme [P] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. et Mme [P] aux entiers dépens, chacun pour moitié, qui seront distraits au profit de Me Masson-Bettati.

M. et Mme [P] ont relevé appel de ce jugement par deux déclarations successives des 12 et 13 février 2020, la deuxième étant déclarée comme complémentaire.

Les deux instances ont fait l'objet d'une jonction par ordonnance du magistrat de la mise en état du 1er décembre 2020.

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 23 février 2023, M. et Mme [P] demandent à la cour :

Vu les articles 671 et 672 du code civil,

Vu l'article L. 131-2 du code des procédures civiles d'exécution,

Vu le jugement déféré,

- de juger les concluants recevables en leur appel,

- de les juger bien fondés,

- de réformer le jugement en toutes ses dispositions et notamment, en ce qu'il a les condamnés au paiement de la somme de 6 187,50 euros, relative à des travaux déjà réalisés, à l'élagage des arbres et à la suppression des arbrisseaux sous astreinte, également déjà réalisées, et au paiement des frais de procédure,

En conséquence et statuant à nouveau,

- de juger que le sapin situé à moins de 2 mètres de la limite de propriété est en place depuis plus de trente ans et a acquis la prescription trentenaire et que l'élagage ayant été réalisé, la demande est sans objet,

- de débouter le syndicat des copropriétaires de ses demandes d'élagage et de suppression de végétation et en dommages et intérêts,

- de débouter le syndicat des copropriétaires de toutes ses demandes, fins et prétentions en cause d'appel,

- de se déclarer incompétent pour connaitre de la demande en liquidation d'astreinte,

- à défaut, de débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande de liquidation d'astreinte,

- de condamner le syndicat des copropriétaires à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens distrait au profit de Me Joseph Magnan, avocat aux offres de droit.

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 27 février 2023, le syndicat des copropriétaires demande à la cour :

Vu les articles 671 et 672 du code civil,

Vu le rapport d'expertise et les préconisations de monsieur l'expert,

Vu l'arrêt du 15 septembre 2022,

Vu le jugement du 10 décembre 2019 dont appel,

- de rejeter toutes les demandes, fins et prétentions de M. et Mme [P] et confirmer le jugement rendu le 10 décembre 2019 par le tribunal judiciaire de Nice en ce qu'il a :

- condamné M. et Mme [P] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 6 187,50 euros TTC au titre des travaux de réfection du mur mitoyen et du caniveau,

- dit que M. et Mme [P] devront laisser libre accès à leur propriété à l'effet d'effectuer les travaux du mur mitoyen en amont en leur lieu et place avec autorisation de pénétrer sur leur propriété pour la réalisation des travaux, sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision et ce pendant un délai de six mois au-delà duquel il sera de nouveau statué,

- condamné M. et Mme [P] à procéder à l'élagage des arbres mesurant plus de 2 mètres situés entre 50 centimètres et 2 mètres de la limite séparative et à supprimer la végétation située à moins de 50 centimètres de la limite séparative sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision,

- condamné M. et Mme [P] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. et Mme [P] aux entiers dépens, chacun pour moitié, qui seront distraits au profit de Me Masson-Bettati.

En conséquence,

- de condamner solidairement M. et Mme [P] à lui payer la somme de 6 187,50 euros TTC au titre des travaux réparatoires concernant le mur mitoyen en amont et les travaux de réalisation d'un caniveau avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement de première instance,

- de condamner solidairement M. et Mme [P] à lui payer la somme supplémentaire de 987,07 euros correspondant à l'actualisation du devis établi à la somme de 6 187,50 euros TTC en 2018 puis à 7 174,57 euros en 2023 au titre des travaux réparatoires concernant le mur mitoyen en amont et les travaux de réalisation d'un caniveau avec intérêts au taux légal à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- de condamner solidairement M. et Mme [P] à laisser libre accès à leur propriété à l'effet d'effectuer les travaux du mur mitoyen en amont en leur lieu et place avec autorisation de pénétrer sur leur propriété pour la réalisation des travaux sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai de trois mois à compter de la réception intégrale des fonds nécessaires à la réalisation des travaux (7 174,57 euros),

- de condamner solidairement M. et Mme [P] sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter d'un délai d'un mois à compter du jugement du 10 décembre 2019 à procéder à l'élagage des arbres mesurant plus de 2 mètres situés entre 50 cm et 2 mètres de la limite séparation en les rabattant à la hauteur réglementaire de 2 mètres de hauteur, et à la suppression de la végétation située à moins de 50 cm de la limite séparative,

- de juger que cette astreinte continue à courir pour la période du 14 juillet 2020 au jour des présentes écritures (27.02.23 - à parfaire au jour de l'arrêt) et à hauteur de 100 euros par jour, soit un total de 95 800,00 euros (958 jours),

- de liquider l'astreinte relative à l'élagage et la suppression des arbres et arbustes de la propriété de M. et Mme [P] ordonnée par le jugement du tribunal de grande instance de Nice du 10 décembre 2019, à hauteur de 95 800,00 euros du 14 Juillet 2020 au jour des présentes écritures (27.02.23 - à parfaire),

- de condamner solidairement M. et Mme [P] au paiement d'une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la procédure purement et simplement abusive,

- de condamner solidairement M. et Mme [P] au paiement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, distrait au profit de Me Alexandra Masson-Bettati.

Pour les moyens développés au soutien des prétentions, il est expressément référé aux conclusions respectives des parties.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 28 février 2023.

L'arrêt sera contradictoire puisque toutes les parties sont représentées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'étendue de la saisine de la cour

Aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Il est constaté que le dispositif des conclusions des parties comporte des demandes de « juger » qui ne constituent pas toutes des prétentions, mais des moyens, si bien que la cour n'en est pas saisie.

La recevabilité de l'appel n'est pas discutée.

Sur la demande au titre des travaux concernant le mur mitoyen et la réalisation d'un caniveau

Même si aucun fondement textuel n'est allégué à l'appui de cette demande, on comprend que le syndicat des copropriétaires impute les désordres affectant le mur mitoyen aux travaux réalisés sur la propriété de M. et Mme [P] et recherche ainsi la responsabilité délictuelle de M. et Mme [P].

L'expert judiciaire a été désigné en référé pour fournir des éléments techniques sur l'ouvrage qualifié de rampe, l'état du mur mitoyen, la conformité à la réglementation du système d'évacuation des eaux pluviales et usées de l'immeuble des époux [P].

Sur la rampe, l'expert judiciaire qui devait donner son avis sur le point de savoir si cet ouvrage est de nature à causer un préjudice à l'immeuble Villa belle rose ou une atteinte au mur mitoyen, a constaté qu'en pied de rampe, aucun caniveau à grille ne récolte les eaux de pluies, qui par intempérie, dévalent la pente, stagnent au sol tout proche de l'immeuble voisin et finissent par s'infiltrer dans la terre.

L'expert énonce après analyse du mur de façade Ouest limitrophe de l'immeuble Villa belle rose, que les dégradations d'enduit relevées sur le mur semi-enterré résultent principalement de l'ancienneté de la bâtisse et du phénomène classique d'humidité, en notant que ce type de désordre est fréquent dans les bâtiments anciens. Il souligne que l'absence de caniveau en pied de la rampe, pourrait contribuer sous certaines conditions, notamment dans le cas de fortes intempéries, à accentuer la chaîne de causalité des désordres sur le mur de façade Ouest dans sa partie enterrée.

Il en ressort à suffisance que la réalisation d'un caniveau s'impose à la charge de M. et Mme [P] pour éviter l'aggravation de désordres au détriment du syndicat des copropriétaires.

M. et Mme [P] prétendent que la réalisation du caniveau est déjà intervenue et que le premier juge n'en a pas tenu compte. Ils versent aux débats une photographie en pièce n° 6 qui n'a pas date certaine, faisant apparaître une grille d'évacuation. Cependant cette photographie est confirmée par le procès-verbal de constat d'huissier du 5 juin 2020 produit par le syndicat des copropriétaires en page 23, l'huissier ayant constaté une vue sur la courette « avec le pied de la rampe au pied du mur de séparation et sa grille de recueillement à son pied ».

Il doit donc être conclu que M. et Mme [P] démontrent avoir réalisé le caniveau préconisé par l'expert, si bien que le jugement doit être infirmé de ce chef.

S'agissant du mur mitoyen, l'expert judiciaire a constaté l'état de dégradation important du mur mitoyen amont, qu'il impute à l'ancienneté des maçonneries et au manque d'entretien généralisé, ainsi qu'à la démolition du garage (qualifié d'abri voiture) par M. [P]. L'expert conclut que la suppression de l'ancien garage est le dernier maillon de la chaîne de causalité qui a provoqué la déstabilisation des murs limitrophes amont Nord et Est, étant observé que seul le mur Est, est mitoyen avec la copropriété Villa belle rose.

L'expert précise que le mur Est reste le plus fragilisé sur une longueur approximative de 3,40 mètres et représente une réelle menace de basculement, notamment dans la zone où le garage a été démoli. Il préconise la démolition du mur Est à refaire dans son intégralité ainsi que sa clôture pour un coût évalué à 3 000 euros TTC.

M. et Mme [P] contestent devoir assumer le coût de la totalité des travaux de reconstruction du mur ainsi que le montant fixé par le premier juge, sur la base d'un devis produit postérieurement à l'expertise, pour un montant du double de celui retenu par l'expert judiciaire, en violation du principe du contradictoire.

Il convient de tenir compte des autres causes de fragilisation du mur relevées par l'expert, à savoir l'ancienneté et l'absence d'entretien, en observant que s'agissant du mur mitoyen aval l'expert a constaté du côté de la propriété [P], une dégradation du mur mitoyen de nature à confirmer le manque total d'entretien de leur part.

En considération de ces éléments, il convient de retenir un partage de la charge du coût des travaux de démolition et reconstruction du mur mitoyen amont, à hauteur de 85 % pour M. et Mme [P] et 15 % pour le syndicat des copropriétaires.

Quant au coût de réalisation de ce mur, le fait de retenir un devis différent de celui examiné par l'expert ne saurait caractériser une violation du principe de la contradiction, dès lors que ce devis a été soumis à la discussion des parties, et il n'est pas illégitime de solliciter l'actualisation d'un devis établi il y a plusieurs années, afin de fixer l'indemnisation allouée.

S'agissant du système d'évacuation des eaux pluviales et des eaux usées, l'expert judiciaire note que la non-conformité relevée, à savoir l'absence d'évacuation distincte, n'est pas de nature directe à causer un réel préjudice au syndicat des copropriétaires, ou de porter atteinte à la solidité du mur. Il fait des préconisations à titre préventif afin de répondre aux règles de l'art et aux exigences des différentes réglementations, sur la réfection du réseau enterré des eaux pluviales et des eaux usées, sur la création de regards sur le parcours de réseaux en notant que le captage des eaux (caniveau) en pied de la petite rampe, sera canalisé vers le réseau des eaux pluviales existant.

Il s'en déduit que le syndicat des copropriétaires ne peut exiger la réalisation de ces derniers travaux, qui n'ont aucun rapport avec les désordres constatés par l'expert judiciaire.

En considération de l'ensemble de ces éléments et sur la base du devis de la SARL PH. D. Ingénierie le plus récent, soumis à la discussion des parties, daté de janvier 2023, les travaux de démolition et reconstruction du mur mitoyen amont s'élèvent à 3 165 euros hors taxe, et avec les honoraires de consultation des entreprises et de suivi des travaux et la taxe sur la valeur ajoutée de 10 %, à 5 131,50 euros.

Le jugement appelé sera donc infirmé sur ce point et M. et Mme [P] seront condamnés à verser au syndicat des copropriétaires, la somme de 4 361,78 euros au titre des seuls travaux sur le mur mitoyen amont.

En revanche, et dans la mesure où il s'agit d'un mur mitoyen, il y a lieu de confirmer l'astreinte fixée assortissant l'obligation pour M. et Mme [P] de laisser accès à leur propriété pour la réalisation desdits travaux, sauf à modifier le point de départ de cette astreinte tel que réclamé par le syndicat des copropriétaires, ce qui est plus favorable aux appelants, après l'expiration du délai de trois mois à compter de la réception intégrale des fonds par le syndicat des copropriétaires.

Selon les dispositions de l'article 1310 du code civil, la solidarité est légale ou conventionnelle ; elle ne se présume pas.

La jurisprudence admet la solidarité entre les coresponsables d'un même dommage, en qualifiant la condamnation d'in solidum.

Le premier juge n'a pas prononcé la solidarité des condamnations et le syndicat ne sollicite pas l'infirmation du jugement sur ce point, si bien que le jugement appelé doit être confirmé sur l'absence de solidarité.

Selon les dispositions de l'article 1231-7 du code civil, « En toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement.

En cas de confirmation pure et simple par le juge d'appel d'une décision allouant une indemnité en réparation d'un dommage, celle-ci porte de plein droit intérêt au taux légal à compter du jugement de première instance. Dans les autres cas, l'indemnité allouée en appel porte intérêt à compter de la décision d'appel. Le juge d'appel peut toujours déroger aux dispositions du présent alinéa. »

En l'état de l'absence de confirmation pure et simple du jugement appelé, il n'est pas justifié de déroger à ces dispositions et les intérêts courront à compter de la présente décision.

Sur la demande concernant l'élagage

Selon les dispositions des articles 671 et 672 du code civil, « Il n'est permis d'avoir des arbres, arbrisseaux et arbustes près de la limite de la propriété voisine qu'à la distance prescrite par les règlements particuliers actuellement existants, ou par des usages constants et reconnus et, à défaut de règlements et usages, qu'à la distance de deux mètres de la ligne séparative des deux héritages pour les plantations dont la hauteur dépasse deux mètres, et à la distance d'un demi-mètre pour les autres plantations. (') » et « Le voisin peut exiger que les arbres, arbrisseaux et arbustes, plantés à une distance moindre que la distance légale, soient arrachés ou réduits à la hauteur déterminée dans l'article précédent, à moins qu'il n'y ait titre, destination du père de famille ou prescription trentenaire. Si les arbres meurent ou s'ils sont coupés ou arrachés, le voisin ne peut les remplacer qu'en observant les distances légales. »

M. et Mme [P] soutiennent qu'ils ont procédé à l'élagage des arbres et arbrisseaux, que le sapin situé à moins de deux mètres a plus de trente ans, que le lierre ne rentre pas dans les prescriptions de ces articles.

Il est constaté que M. et Mme [P] qui se prévalaient d'un témoignage pourtant non produit en première instance sur l'âge du sapin litigieux, ne produisent aucune pièce de nature à étayer leur affirmation, si ce n'est un courrier de l'architecte des bâtiments de France du 5 novembre 2015, relatif à une demande de leur part concernant l'abattage d'un sapin situé sur leur propriété, dans le champ de visibilité de la « Villa les palmiers » monument historique inscrit le 23 juin 1993, les empêchant d'ouvrir correctement leur portail qui donne sur une avenue très fréquentée, cette demande ayant été accordée sous réserve que l'arbre soit remplacé par un sujet qui présentera un beau volume.

Or, outre que ce courrier ne fournit aucune information sur la date de plantation de ce sapin, le syndicat des copropriétaires démontre par la production d'un procès-verbal de constat d'huissier du 7 novembre 2020, que la propriété de M. et Mme [P] dispose de deux accès et que le portail se situe côté [Adresse 3], si bien qu'il est établi que le sapin évoqué dans le courrier de l'architecte des bâtiments de France concerne un autre sapin, que le sapin litigieux situé à proximité de l'immeuble en copropriété, sis [Adresse 2].

M. et Mme [P] ne peuvent donc pas se prévaloir de la dérogation prévue à l'article 472 du code civil, quant à la distance et hauteur des arbres, arbrisseaux et arbustes.

La mission confiée à l'expert judiciaire avait pour objet d'identifier les végétaux se trouvant en limite des propriétés et ne respectant pas la distance de deux mètres prescrite par l'article 471 du code civil, pour les arbres, arbrisseaux et arbustes d'une hauteur de plus de deux mètres et l'expert a pu constater sur la propriété [P] que les arbres, arbrisseaux et arbustes à moins de deux mètres sont nombreux et la végétation (lierres, etc.) assez abondante, l'ensemble n'étant ni taillé, ni entretenu.

A la lecture des nombreux procès-verbaux de constat d'huissier produits par le syndicat des copropriétaires (des 9 mars 2018, 5 juin 2020, 27 novembre 2020, 9 mars 2021, 4 juin 2021, 31 janvier 2023) et par M. et Mme [P] (13 octobre 2020), il peut être déduit que des élagages sont intervenus, notamment en ce qui concerne le sapin (ou cyprès) dont l'huissier note : « la plupart des branches sont coupées, il est planté à une distance inférieure à 2 m de la clôture. Son tronc martyrisé s'élève sur une hauteur de cinq à six mètres environ à partir du sol naturel du fonds voisin ». Sont également présents :

- un stipe de palmier sans palme semblant mort d'une hauteur de 6 à 7 mètres planté à une distance mesurée avec un appareil DISTO D2 de la marque Leika à 1,93 mètre de distance des deux fonds,

- dans la zone de 50 centimètres, des pousses de laurier-sauce venant contre la clôture grillagée,

- au pied du gros cyprès massacré, trois plants de pittosporum dont le plus haut s'élève à une hauteur de 2 mètres par rapport au sol naturel du fonds voisin,

- un important développement de lierre sur la partie la plus proche du portail, sur le grillage et qui déborde de 40 à 50 centimètres sur le fonds de la copropriété,

- un datura planté à une distance de plus de 50 centimètres et à moins de 2 mètres est dont la hauteur excède légèrement les 2 mètres par rapport au sol naturel du fonds voisin (le 5 juin 2020).

Ainsi il est établi que les prescriptions concernant la taille des arbres, arbustes et arbrisseaux, comprenant le lierre, qui ne doit pas dépasser sur la propriété d'autrui, ne sont pas totalement respectées par M. et Mme [P], bien qu'ils aient procédé à des élagages et des tailles.

Il en ressort que le jugement appelé doit être confirmé en ce qu'il a condamné M. et Mme [P] à procéder à l'élagage des arbres mesurant plus de 2 mètres situés entre 50 centimètres et 2 mètres de la limite séparative et à supprimer la végétation située à moins de 50 centimètres de la limite séparative sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision.

Sur la demande de liquidation de l'astreinte

Le syndicat des copropriétaires se prévaut d'un arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 15 septembre 2022 statuant sur appel contre un jugement du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nice du 19 octobre 2020, qui a :

- infirmé le jugement sauf en ce qu'il a déclarée recevable la contestation de la saisie attribution du 5 juin 2020 et rejeté la mainlevée de cette mesure devenue sans objet,

- débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de liquidation de l'astreinte relative à l'accès à la propriété des époux [P],

- condamné M. et Mme [P] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3 200 euros à titre d'astreinte pour l'élagage des arbres et de la végétation, au 13 juillet 2020 inclus.

Selon les dispositions des articles L. 131-2 et L. 131-3 du code des procédures civiles d'exécution, l'astreinte indépendante des dommages-intérêts, est provisoire ou définitive. Elle est considérée comme provisoire, à moins que le juge n'ait précisé son caractère définitif. Une astreinte définitive ne peut être ordonnée qu'après le prononcé d'une astreinte provisoire et pour une durée que le juge détermine. Si l'une de ces conditions n'a pas été respectée, l'astreinte est liquidée comme une astreinte provisoire. L'astreinte, même définitive, est liquidée par le juge de l'exécution, sauf si le juge qui l'a ordonnée reste saisi de l'affaire ou s'en est expressément réservé le pouvoir.

Il en ressort que la cour statuant sur l'appel d'un jugement ayant fixé une astreinte, n'a pas de compétence pour liquider l'astreinte, quand bien même une liquidation d'astreinte serait déjà intervenue.

La cour sera donc déclarée incompétente pour statuer sur cette demande.

Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts

Il est constant que l'exercice d'une action en justice comprenant l'exercice des voies de recours, constitue un droit, qui ne peut dégénérer en abus que s'il est démontré une volonté de nuire de la partie adverse ou sa mauvaise foi ou une erreur ou négligence blâmable équipollente au dol, ce qui suppose de rapporter la preuve de ce type de faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux, dans les conditions prévues par l'article 1240 du code civil.

En l'espèce le jugement étant partiellement infirmé, aucune mauvaise foi n'est caractérisée.

Le syndicat des copropriétaires sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement sur les dépens et les frais irrépétibles.

M. et Mme [P] étant partiellement accueillis en leur appel, il convient de laisser les dépens à la charge de chacune des parties et de rejeter les demandes formées au titre des frais irrépétibles. De ce fait les demandes de distraction des dépens, n'ont pas d'objet.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement appelé sauf en ce qu'il a :

- condamné M. [X] [P] et Mme [E] [G] épouse [P] à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Villa belle rose sis [Adresse 2], représenté par son syndic, la somme de 6 187,50 euros TTC au titre des travaux de réfection du mur mitoyen et du caniveau,

- fixé à compter de la signification de la décision, le point de départ de l'astreinte assortissant la condamnation de M. [X] [P] et Mme [E] [G] épouse [P] pour laisser libre accès à leur propriété à l'effet d'effectuer les travaux du mur mitoyen en amont en leur lieu et place avec autorisation de pénétrer sur leur propriété pour la réalisation des travaux ;

Statuant à nouveau sur ces points :

Condamne M. [X] [P] et Mme [E] [G] épouse [P] à verser au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Villa belle rose sis [Adresse 2], représenté par son syndic, la somme de 4 361,78 euros (quatre mille trois cent soixante et un euros et soixante-dix-huit centimes) au titre des seuls travaux sur le mur mitoyen amont, outre les intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

Dit que M. [X] [P] et Mme [E] [G] épouse [P] devront laisser libre accès à leur propriété à l'effet d'effectuer les travaux du mur mitoyen en amont en leur lieu et place avec autorisation de pénétrer sur leur propriété pour la réalisation des travaux, sous astreinte de 50 euros (cinquante euros) par jour de retard passé le délai de trois mois à compter de la réception intégrale des fonds par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Villa belle rose sis [Adresse 2], représenté par son syndic ;

Y ajoutant,

Se déclare incompétente pour statuer sur la liquidation de l'astreinte fixée par le jugement du tribunal de grande instance de Nice du 10 décembre 2019 ;

Déboute le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Villa belle rose sis [Adresse 2], représenté par son syndic, de sa demande de dommages et intérêts ;

Laisse les dépens de l'appel à la charge de chacune des parties ;

Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 20/02318
Date de la décision : 17/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-17;20.02318 ?
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