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17/05/2023 | FRANCE | N°19/17778

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 17 mai 2023, 19/17778


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 17 MAI 2023

ph

N° 2023/ 189





N° RG 19/17778 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFF4D





SA GAN ASSURANCES



C/



[O] [I]

[T]

Société MATMUT

Syndicat des copropriétaires [Adresse 8]

SA SOCIETE ANONYME DE DEFENSE ET D'ASSURANCES ANONYME DE DÉFENSE ET D'ASSURANCE



















Copie exécutoire délivrée

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à :

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SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES



Me Etienne DE VILLEPIN



SCP MONCHO - VOISIN-MONCHO



ASSOCIATION DEMES















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 04 Novembre 2019 enregistré au répertoir...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 17 MAI 2023

ph

N° 2023/ 189

N° RG 19/17778 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFF4D

SA GAN ASSURANCES

C/

[O] [I]

[T]

Société MATMUT

Syndicat des copropriétaires [Adresse 8]

SA SOCIETE ANONYME DE DEFENSE ET D'ASSURANCES ANONYME DE DÉFENSE ET D'ASSURANCE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES

Me Etienne DE VILLEPIN

SCP MONCHO - VOISIN-MONCHO

ASSOCIATION DEMES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 04 Novembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/04764.

APPELANTE

SA GAN ASSURANCES, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis, [Adresse 7]

représentée par la SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Danièle CHARRA de la SCP AZURIS AVOCATS, avocat au barreau de GRASSE

INTIMES

Madame [O] [I]

demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

Société d'Assurance Mutuelle MATMUT dont le siège social est [Adresse 4], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

représentée par Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 8], sis [Adresse 6], représenté par son Syndic en exercice, le Cabinet TRIO dont le siège social est [Adresse 2] à [Localité 1], pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités audit siège

représentée par Me Emmanuel VOISIN-MONCHO de la SCP MONCHO - VOISIN-MONCHO, avocat au barreau de GRASSE

SA SOCIETE ANONYME DE DEFENSE ET D'ASSURANCES , dont le siège social est [Adresse 3], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

représentée par Me Julien SALOMON de l'ASSOCIATION DEMES, avocat au barreau de NICE

Monsieur [S][T]

assignation portant signification de la déclaration d'appel à personne le 08.01.20

demeurant [Adresse 5]

défaillant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Patricia HOARAU, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre,

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM,Vice Président placé

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Mai 2023.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Mai 2023

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller , faisant fonction de Président de chambre, et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

Mme [O] [I] assurée auprès de la société Matmut est propriétaire d'un appartement situé au deuxième étage, au sein de la copropriété [Adresse 8] sise [Adresse 5] à [Localité 9], dans lequel elle exerce son activité de chirurgien-dentiste.

Son appartement a subi un dégât des eaux en mai 2012, pour lequel elle a été indemnisée par son assureur à hauteur de la somme de 20 088,46 euros, après expertise d'assurance diligentée à l'initiative de la société Matmut.

A la suite d'un nouveau sinistre dégât des eaux, Mme [I] et la société Matmut ont obtenu par ordonnance de référé du 20 mars 2013, la désignation d'un expert judiciaire, M. [P] [Z], au contradictoire du syndicat des copropriétaires de la communauté immobilière dénommée [Adresse 8] (ci-après le syndicat des copropriétaires), de la société Gan assurances, assureur de la copropriété, de M. [S] [T], locataire de l'appartement sus-jacent situé au troisième étage, de la société Sada assurances, assureur habitation de M. [T].

M. [Z] a déposé son rapport le 20 mars 2015.

Par exploit du 15 septembre 2016, Mme [I] et la société Matmut ont fait assigner en indemnisation de leurs préjudices, le syndicat des copropriétaires, la société Gan assurances, M. [T], la société Sada assurances, devant le tribunal de grande instance de Grasse.

Par jugement du 4 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Grasse a :

- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et la SA Gan assurances à verser à Mme [I] une somme de 12 019,94 euros,

- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et la SA Gan assurances à verser à la société Matmut une somme de 20 088,46 euros,

- condamné la SA Gan assurances à relever et garantir le syndicat des copropriétaires des condamnations prononcées à son encontre au profit de Mme [I] et de la société Matmut,

- débouté Mme [I] et la société Matmut de toutes leurs demandes à l'encontre de M. [T],

- condamné le syndicat des copropriétaires à verser à Mme [I] une somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et la SA Gan assurances à verser à Mme [I] et à la société Matmut une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et la SA Gan assurances à verser à la SA Sada assurances une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et la SA Gan assurances aux entiers dépens de la procédure, en ce compris les frais d'expertise, distraits au profit de Me Guillemette Bigand.

Le tribunal a retenu que la responsabilité du syndicat des copropriétaires est engagée sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, le rapport d'expertise ne mettant pas en évidence une négligence fautive dans l'entretien de la terrasse.

Par déclaration du 21 novembre 2019, la société Gan assurances a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions d'appelant déposées et notifiées par le RPVA le 21 février 2020, la société Gan assurances demande à la cour au visa de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 :

- de réformer la décision entreprise en ce qu'elle a :

- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et la SA Gan assurances à verser à Mme [I] la somme de 12 019,94 euros et à la société Matmut la somme de 20 088,46 euros,

- débouté Mme [I] et la société Matmut de toutes leurs demandes à l'encontre de M. [T],

- de dire et juger qu'il résulte du rapport d'expertise de M. [Z] que la responsabilité de la copropriété [Adresse 8] et l'obligation de son assureur doivent être limitées à 50 %, les 50 % restants devant être mis à la charge de M. [T] et de son assureur Sada, qui seront condamnés à due concurrence,

- de réformer en conséquence la décision entreprise en ce qu'elle a mis à la charge du syndicat des copropriétaires et de son assureur, la totalité des condamnations,

- de dire et juger en toute hypothèse, que l'indemnisation de Mme [I] qui n'a pas discuté les évaluations de l'expert, doit être limitée à la somme de 11 519,94 euros (dont 50 % seulement à sa charge),

- de confirmer la décision entreprise qui n'a prononcé aucune condamnation à son encontre au titre des dommages et intérêts, ne pouvant être jugée responsable du retard dans l'exécution des travaux,

- de statuer ce que de droit sur les indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens en application de l'article 696 du même code, dont distraction au profit de la SCP Ermeneux sur son affirmation de droit en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 25 août 2020, le syndicat des copropriétaires demande à la cour au visa de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 :

- de le recevoir en son appel incident,

- d'infirmer la décision attaquée en ce qu'elle a :

- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et la SA Gan assurances à verser à Mme [I] une somme de 12 019,94 euros,

- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et la SA Gan assurances à verser à la société Matmut une somme de 20 088,46 euros,

- débouté Mme [I] et la société Matmut de toutes leurs demandes à l'encontre de M. [T],

- condamné le syndicat des copropriétaires à verser à Mme [I] une somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et la SA Gan assurances à verser à Mme [I] et à la société Matmut une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et la SA Gan assurances à verser à la SA Sada assurances une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau,

A titre principal :

Vu que le défaut d'entretien de la terrasse est imputable à M. [T],

Vu que le défaut d'entretien est la cause principale du sinistre,

Vu que les travaux préconisés par l'expert judiciaire ont été réalisés depuis le 14 novembre 2016 par le syndicat des copropriétaires,

Vu que le syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic en exercice le Cabinet Trio, a rempli toutes ses obligations,

Vu que le syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic en exercice ne peut voir sa responsabilité retenue, même au titre de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, au vu des éléments objectifs de ce litige, dont, notamment le rapport d'expertise judiciaire [Z],

Vu que le montant des préjudices de Mme [I] devra être ramené à de plus justes proportions,

Vu que l'expert judiciaire a retenu la somme totale de 31 608,40 euros,

Vu que la société Matmut a versé la somme de 20 088,46 euros,

Vu que Mme [I] ne peut prétendre qu'à la somme maximale de 11 519,94 euros,

- de l'exonérer de toute responsabilité,

- de débouter Mme [I] de toutes ses demandes à son encontre, en ce compris les dommages et intérêts pour résistance abusive et l'article 700 du code de procédure civile,

- de la condamner à rembourser les sommes réglées par lui au titre de l'exécution provisoire de la décision de première instance,

- de débouter la société Sada de toutes ses demandes,

A titre subsidiaire :

- de retenir un partage de responsabilité entre le syndicat des copropriétaires d'une part, et M. [T] d'autre part, à hauteur de 50 % chacun,

- de condamner reconventionnellement, la société Gan assurances à le relever et garantir pour sa part de responsabilité, de toutes les demandes de Mme [I] et de la société Matmut en principal, intérêts et accessoires, y compris les dommages et intérêts et l'article 700 du code de procédure civile dans sa totalité, y compris les sommes versées au titre de l'exécution provisoire de la décision de première instance,

A titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour retenait la seule responsabilité de la copropriété et écartait la responsabilité de M. [T] :

- de condamner reconventionnellement, la société Gan assurances à le relever et garantir de toutes les demandes de Mme [I] et de la société Matmut en principal, intérêts et accessoires, y compris les dommages et intérêts et l'article 700 du code de procédure civile dans sa totalité, y compris les sommes versées au titre de l'exécution provisoire de la décision de première instance,

En tout état de cause :

- de confirmer la décision attaquée en ce qu'elle a condamné la société Gan assurances à le relever et garantir des condamnations prononcées à son encontre au profit de Mme [I] et de la société Matmut,

- de condamner reconventionnellement, Mme [I], son assurance la société Matmut et la société Gan assurances à lui payer solidairement la somme de 6 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, de première instance et d'appel, distraits au profit de Me E. Voisin-Moncho, avocat associé, sur son offre de droit.

Par conclusions d'intimée déposées et notifiées par le RPVA le 21 mai 2020, la société Sada assurances demande à la cour :

- de confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 4 novembre 2019 en toutes ses dispositions,

- de débouter la SA Gan assurances de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions telles que présentées à son encontre,

En tant que de besoin,

- de débouter également l'ensemble des autres parties d'éventuelles demandes qui seraient présentées à son encontre,

A titre subsidiaire,

- de dire et juger que les désordres dont se plaint Mme [I] trouvent par ailleurs leur origine dans un défaut d'entretien de son bien par M. [T] et que, par voie de conséquence, les garanties souscrites par ce dernier auprès d'elle ne peuvent être mobilisées,

- de condamner tout succombant à lui verser la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner tout succombant aux entiers dépens de l'instance.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 24 février 2023, Mme [I] et la société Matmut demandent à la cour :

Vu les articles 14 et suivants de la loi du 10 juillet 1965,

Vu l'article 1240 du code civil,

- de les recevoir en leurs conclusions et les dire bien fondées,

A titre principal :

- de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré le syndicat des copropriétaires et la société Gan assurances responsables du préjudice de Mme [I],

- de réformer le jugement en fixant le préjudice dans les conditions suivantes :

- allouer à Mme [I] la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1240 du code civil,

- ordonner la capitalisation des intérêts sur l'ensemble des condamnations sur le fondement de l'article 1343-2 du code civil, à compter de la délivrance de l'assignation initiale du 15 septembre 2016,

A titre subsidiaire, si la juridiction devait envisager la responsabilité de M. [T] :

- de déclarer M. [T] et son assurance Sada responsables solidairement avec le syndicat des copropriétaires et la société Gan assurances des préjudices subis par Mme [I] et détaillés ci-dessus,

- de condamner tout succombant à la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner tout succombant aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire dont distraction au profit de Me Etienne de Villepin.

La déclaration d'appel a été signifiée à M. [T] par acte d'huissier délivré le 15 janvier 2020 à sa personne, ainsi que les conclusions d'appelant par acte d'huissier délivré le 2 mars 2020 également à sa personne.

Pour les moyens développés au soutien des prétentions, il est expressément référé aux conclusions respectives des parties.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 28 février 2023.

L'arrêt non susceptible d'appel sera réputé contradictoire, en application de l'article 474 du code de procédure civile, en l'état de l'absence de constitution d'avocat intervenue pour M. [T], cité à sa personne.

MOTIFS DE LA DECISION

Par l'effet dévolutif de l'appel, la cour est saisie :

- de l'imputabilité des désordres d'infiltrations subis par Mme [I] indemnisés en partie par la société Matmut, discutée par la société Gan assurances et le syndicat des copropriétaires, tandis que la confirmation est poursuivie par Mme [I] et la société Matmut à titre principal, ainsi que par la société Sada,

- du montant des réparations à allouer, discuté par la société Gan assurances et le syndicat des copropriétaires quant à la part devant revenir à Mme [I], tandis que la confirmation est poursuivie par Mme [I] et la société Matmut,

- d'une demande de dommages et intérêts pour résistance abusive dont l'infirmation est poursuivie par Mme [I] et qui est discutée par le syndicat des copropriétaires,

- d'une demande formée par le syndicat des copropriétaires tendant à être relevé et garanti par la société Gan assurances pour toutes les condamnations en principal, intérêts et accessoires, y compris les dommages et intérêts et l'article 700 du code de procédure civile dans sa totalité.

Sur l'origine et la cause des désordres d'infiltrations

Aux termes du rapport d'expertise judiciaire, les désordres d'infiltrations allégués par Mme [I] sont réels, proviennent de la terrasse attenante à l'appartement sus-jacent occupé par M. [T], et leurs causes sont multiples :

- pente insuffisante du carrelage de la terrasse,

- diamètre de l'évacuation insuffisant, l'expert notant que la section des évacuations des eaux pluviales est trop réduite et en partie obstruée par l'enduit des façades,

- absence d'étanchéité sous le seuil de la porte-fenêtre, l'expert ayant constaté que le seuil de la porte-fenêtre du séjour est posé à « sec » sans étanchéité,

- absence d'entretien régulier, l'expert ayant relevé la présence de jardinières et bacs à fleurs avec des chutes de feuilles.

L'expert est d'avis que les travaux nécessaires à entreprendre devront comporter l'agrandissement des évacuations, la modification de la pente du carrelage vers l'évacuation, la mise en place d'une étanchéité sur la totalité de la terrasse.

Il est établi que les travaux préconisés ont été réalisés par le syndicat des copropriétaires selon facture du 14 novembre 2016, ainsi que constaté dans l'ordonnance de référé du 9 janvier 2017, sur saisine de Mme [I] par assignation des 1er et 6 septembre 2016, celle-ci se plaignant de l'absence d'exécution des travaux préconisés dans le rapport de l'expert judiciaire déposé le 20 mars 2015.

L'expert est parvenu à ces conclusions après une mise en eau de la terrasse attenante à l'appartement occupé par M. [T] au troisième étage, et pas au quatrième étage comme mentionné manifestement par erreur à plusieurs reprises, dans le rapport d'expertise.

Il n'est pas débattu que la terrasse constitue une partie commune à jouissance privative et pas une partie privative et relève ainsi des dispositions de l'article 14 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, selon lequel « La collectivité des copropriétaires est constituée en un syndicat qui a la personnalité civile. '. Il a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes. Il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires. »

Le syndicat des copropriétaires oppose principalement que c'est le défaut d'entretien mis en évidence par l'expert judiciaire, qui est seul à l'origine des désordres, et subsidiairement comme son assureur la société Gan assurances, qu'il y a un partage de responsabilité à hauteur de 50 % à la charge du syndicat des copropriétaires et 50 % à la charge de M. [T] pour défaut d'entretien de la terrasse.

Or, il est manifeste à la lecture du rapport d'expertise, qu'il n'est pas établi que le défaut d'entretien est seul à l'origine des désordres, le syndicat des copropriétaires ne produisant pas d'autre élément pour démontrer le contraire. A cet égard les rapports d'expertise d'assurance produits concernant le premier sinistre en mai 2012, s'ils font référence à un défaut d'entretien, sont insuffisants à démontrer que le défaut d'entretien de la terrasse est la cause exclusive des désordres, puisqu'il en ressort au contraire, d'un désaccord sur l'origine de ceux-ci, entre experts d'assurance.

L'expert judiciaire, désigné à la suite d'un nouveau sinistre, a relevé en outre un défaut de conception de la pente de la terrasse, un défaut de conception de la section d'évacuation des eaux pluviales, ainsi qu'une absence d'étanchéité du seuil de la porte-fenêtre, sans préciser la part incombant à chacune de ces causes.

Cependant au regard du caractère majeur des défauts de conception mis en évidence dans le rapport de l'expert judiciaire, et au contraire de l'absence de pièce de nature à étayer des manquements de M. [T] à son obligation d'entretien, ni de constatation précise de l'expert sur ceux-ci, il y a lieu de conclure qu'il n'est pas démontré qu'un défaut d'entretien est imputable à M. [T] comme ayant contribué aux désordres subis.

Partant, le jugement appelé sera confirmé en ce qu'il a condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et son assureur à indemniser les préjudices subis par Mme [I] et la société Matmut, subrogée dans ses droits.

Sur le montant des réparations

L'appel ne porte que sur le montant de l'indemnisation devant revenir à Mme [I] sur la base du montant total du préjudice, que la société Gan assurances et le syndicat des copropriétaires entendent retenir pour 31 608,40 euros conformément à l'avis de l'expert, alors que le premier juge l'a fixé à 32 108,40 euros.

Aux termes du rapport d'expertise judiciaire auquel sont annexés des devis dont les montants sont ainsi vérifiables et ont pu être corrigés, les experts d'assurance ont évalué les dommages à :

- 25 603,83 euros pour le matériel professionnel,

- 2 042,01 euros pour les travaux de peinture, après ajout de l'acompte de 300 euros omis par l'expert,

- 505,90 euros pour les meubles de rangement des instruments, après ajout de l'acompte de 200 euros omis par l'expert,

- 3 956,66 pour la remise en état de l'installation électrique.

Il en ressort que c'est par une bonne appréciation des faits de la cause que le premier juge a fixé le montant des réparations et le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive

L'appel s'agissant de Mme [I] a pour objet d'obtenir une majoration de l'indemnisation allouée par le premier juge sur le fondement de l'article 1240 du code civil pour avoir laissé perdurer les infiltrations pendant quatre ans, et s'agissant du syndicat des copropriétaires, d'obtenir le débouté de la demande de dommages et intérêts et subsidiairement à en être relevé et garanti par son assureur, au motif que le retard dans l'exécution est imputable à son assureur qui a tardé à prendre contact avec le syndic.

Selon les dispositions de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause préjudice à autrui, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer, ce qui impose la triple démonstration d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux.

Le premier juge a retenu un retard fautif dans la réalisation des travaux par le seul syndicat des copropriétaires et pas par la société Gan assurances.

Il ressort des développements ci-dessus qu'une discussion existait sur l'origine des désordres intervenus en premier lieu en mai 2012, entre les experts d'assurance, ce qui a nécessité la mise en place d'une expertise judiciaire lors de l'apparition de nouveaux désordres. Les conclusions de l'expert judiciaire, déposées le 20 mars 2015, ont préconisé des travaux sur les parties communes, relevant de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 et donc du syndicat des copropriétaires, responsable de plein droit, avec ouverture d'une action récursoire s'il établit une cause étrangère, ce qui constitue l'objet du présent litige. L'expert judiciaire y précise que ces « travaux de remise en état et en conformité devront être effectués dans les plus brefs délais » en les évaluant à un montant de 3 565,10 euros, soit un montant relativement modeste.

Les travaux n'ont été réalisés qu'en novembre 2016, dans les suites d'une assignation en référé pour obtenir leur exécution sous astreinte, soit plus d'un an et demi après le dépôt du rapport de l'expert judiciaire, dont les conclusions sont claires quant à l'imputabilité des désordres aux parties communes.

Dès lors, il y a lieu de conclure comme le premier juge, que le syndicat des copropriétaires a fautivement tardé à réaliser les travaux préconisés par l'expert dans les plus brefs délais, et relevant de sa responsabilité de plein droit.

Sur le montant de l'indemnisation, Mme [I] déclare subir les préjudices relevés par l'expert, pendant tout ce temps, ce qui correspond à un préjudice de jouissance entre le dépôt du rapport d'expertise et la réalisation des travaux, qui doit être évalué à hauteur de 1 500 euros comme retenu par le premier juge.

Le syndicat des copropriétaires ne verse aux débats aucune pièce de nature à démontrer une faute de la société Gan assurances dans le retard mis à réaliser les travaux, ce qui induit également la confirmation du jugement appelé de ce chef.

Sur la capitalisation des intérêts

Selon les dispositions de l'article 1231-7 du code civil, « En toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement.

En cas de confirmation pure et simple par le juge d'appel d'une décision allouant une indemnité en réparation d'un dommage, celle-ci porte de plein droit intérêt au taux légal à compter du jugement de première instance. Dans les autres cas, l'indemnité allouée en appel porte intérêt à compter de la décision d'appel. Le juge d'appel peut toujours déroger aux dispositions du présent alinéa. »

L'article 1343-2 du même code énonce que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise.

Le jugement de première instance étant confirmé quant aux montant alloués, les intérêts courent à compter du prononcé de celui-ci, soit le 4 novembre 2019, et il convient de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter dudit jugement, qui fait courir ces intérêts, aucun moyen n'étant allégué, ni aucune pièce n'étant produite pour justifier d'une dérogation aux dispositions précitées.

Sur les demandes accessoires

Il est constaté que la demande du syndicat des copropriétaires tendant au remboursement des sommes réglées en exécution du jugement appelé assorti de l'exécution provisoire, est sans objet.

Le syndicat des copropriétaires, qui demande à être relevé et garanti par la société Gan assurances pour toutes les condamnations, lesquelles comprennent les dépens et les frais irrépétibles, ne développe aucun moyen à l'appui de cette prétention.

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement entrepris sur les dépens, qui comprennent le coût de l'expertise judiciaire, ainsi que sur les frais irrépétibles.

La société Gan assurances, qui succombe dans son appel, sera condamnée aux dépens d'appel, qui seront distraits au profit des conseils du syndicat des copropriétaires d'une part, de Mme [I] et de la société Matmut d'autre part, ainsi qu'au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Ordonne la capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du 4 novembre 2019, sur les sommes allouées par le jugement du 4 novembre 2019 ;

Condamne la société Gan assurances aux dépens d'appel distraits au profit de Me E. Voisin-Moncho et de Me Etienne de Villepin ;

Condamne la société Gan assurances à payer à Mme [O] [I] et la société Matmut la somme de 4 000 euros (quatre mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Gan assurances à payer à la société Sada assurances, la somme de 2 000 euros (deux mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/17778
Date de la décision : 17/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-17;19.17778 ?
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