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16/05/2023 | FRANCE | N°23/00071

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-11 ho, 16 mai 2023, 23/00071


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Hospitalisation sans consentement

1-11 HO





ORDONNANCE

DU 16 MAI 2023



N° 2023/0071







Rôle N° RG 23/00071 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLIKN







[N] [W]





C/



LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER D'[Localité 4]

LE PREFET DES ALPES MARITIMES (ARS)

LA PROCUREURE GENERALE PRES LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENC

















Copie délivrée :

par

courriel

le : 16 Mai 2023

au Ministère Public

- jld-ho-Grasse

-Le patient

-Le directeur

-L'avocat

-Le préfet











Décision déférée à la Cour :



Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de GRASSE en date du 05 mai 202...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Hospitalisation sans consentement

1-11 HO

ORDONNANCE

DU 16 MAI 2023

N° 2023/0071

Rôle N° RG 23/00071 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLIKN

[N] [W]

C/

LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER D'[Localité 4]

LE PREFET DES ALPES MARITIMES (ARS)

LA PROCUREURE GENERALE PRES LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENC

Copie délivrée :

par courriel

le : 16 Mai 2023

au Ministère Public

- jld-ho-Grasse

-Le patient

-Le directeur

-L'avocat

-Le préfet

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de GRASSE en date du 05 mai 2023 enregistrée au répertoire général sous le n°23/00270.

APPELANT

Monsieur [N] [W]

né le 06 Mai 1976 à [Localité 6], demeurant [Adresse 3] actuellement hospitalisé au centre hospitalier d' [Localité 4]

comparant en personne, assisté de Me Laura GRIMALDI, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, commis d'office

INTIMES :

Monsieur LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER D'[Localité 4]

[Adresse 1]

non comparant, ni représenté

Monsieur LE PREFET DES ALPES MARITIMES (ARS)

[Adresse 2]

non comparant, ni représenté

Madame LA PROCUREURE GENERALE PRES LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

Cour d'appel d'Aix-en-Provence. [Adresse 5]

non comparante, ayant déposé des réquisitions écrites dont il a été donné lecture à l'audience

*-*-*-*-*

DÉBATS

L'affaire a été débattue le 16 Mai 2023, en audience publique, devant Madame Catherine LEROI, Présidente, délégué par ordonnance du premier président, en application des dispositions de l'article L.3211-12-4 du code de la santé publique,

Greffier lors des débats : Madame Elodie BAYLE,

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2023.

ORDONNANCE

Réputée contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2023

Signée par Madame Catherine LEROI, Présidente et Madame Elodie BAYLE, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire,

*********

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

M. [N] [W] fait l'objet depuis le 27 février 2023 d'une admission en soins psychiatriques en hospitalisation complète au sein du centre hospitalier d'[Localité 4] dans le cadre de l'article L.3213-1 du code de la santé publique.

Par ordonnance rendue le 10 mars 2023 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de GRASSE et confirmée par décision de cette cour en date du 16 mars 2023, la mesure d'hospitalisation complète sans consentement de M. [N] [W] a été maintenue.

Par ordonnance rendue le 5 mai 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de GRASSE a rejeté la demande de mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète formée par M. [N] [W].

Par déclaration reçue le 9 mai 2023 au greffe de la chambre de l'urgence, M. [N] [W] a interjeté appel de la décision précitée.

Le ministère public a conclu par écrit en date du 10 mai 2023 à la confirmation de la décision querellée.

À l'audience du 16 mai 2023, M. [N] [W] déclare : 'J'ai un hébergement à titre gratuit mais il fallait que ma mère soit d'accord pour que je sorte. J'ai travaillé à Luxembourg pendant 6 ans. Ce que relate ma mère, ce sont des propos qui se sont tenus. J'ai une fille, j'ai divorcé. Des choses graves ont été faites. Je voulais savoir au minimum où était ma fille. Ma mère a abusé lourdement, elle n'a pas voulu me dire où était ma fille. C'est la raison pour laquelle je lui en veux. J'ai un bac + 7. On n'a pas le droit d'utiliser un enfant. L'erreur a été commise par rapport au droit de garde qui m'a été enlevé. Je dois refaire une demande de garde au Luxembourg. J'ai le droit de savoir où est ma fille, c'est un droit européen. Ils ont pris une décision en 4 jours pour m'enlever le droit de garde. Je ne cherche pas à mettre l'enfant en péril. Ma fille a eu 7 ans en avril.

Sur le certificat : le médecin a fait le certificat en 2 minutes. J'ai des convictions qui sont à l'opposé de celles du médecin. Ils ont fait un copier-coller du docteur [H]. Je ne suis pas malade. Je suis quelqu'un de pragmatique, relationnel et logique. Le corps médical n'est jamais remis en cause mais il peut se tromper. Le fait d'avoir dit que je suis d'une autre origine que française ...Moi je ne fais aucun jugement de valeur. Depuis récemment, ma fille est au Portugal. C'est le pays d'origine de mon ex femme.

Je ne suis pas malade et je suis non agressif. Je prends le traitement à l'hôpital car je n'ai pas le choix. Je ne veux pas d'argent, je veux juste voir ma fille. Je ne suis pas vénal et encore moins agressif.

Ma mère m'apporte des vêtements. J'ai vécu en Afrique pendant presque 10 ans . Ma vie est simple. Je suis prof de tennis. Je ne prends pas d'alcool, je ne fume pas pour des raisons de santé. Je refuse les drogues. Quand on dit que quelqu'un a une psychose, il faut démontrer d'où provient la psychose. Je ne suis ni violent ni agressif. Je souhaite retrouver ma liberté individuelle. Je souhaite voir ma fille.

Sur ma mère : J'ai demandé à avoir des photos de ma fille, je ne les ai pas eues. Je ne peux pas être le punching-ball d'un monde qui me persécute. J'ai des amis de différents cultes, de différentes professions. En aucune façon, je n'ai été agressif. On ne peut pas coller une étiquette. Je suis quelqu'un qui a été meurtri. Je réfléchis vite. C'est ma profession qui m'a obligé à réfléchir vite. Je n'ai pas fait de menaces de mort. Je n'ai pas de considération pour ma mère par rapport à tout ce qu'elle a fait par rapport à ma fille J'ai eu des propos qui n'étaient pas sympathiques et je m'en veux. C'est la seule fois où j'ai eu ce genre de propos. Je suis quelqu'un d'honnête et franc. Il y a eu du racisme de la part du docteur [H]. Je suis un citoyen français comme tout le monde avec mes qualités et mes défauts'.

Son avocat, entendu, indique qu'il ne soulève pas d'irrégularité de procédure ; il explique que M. [W] souhaite juste revoir sa fille, qu'il est disposé à reprendre le cours de sa vie sans faire de mal à personne et qu'il trouve l'hospitalisation, trop longue.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application de l'article L.3211-12, le juge des libertés et de la détention dans le ressort duquel se situe l'établissement d'accueil peut être saisi, à tout moment, aux fins d'ordonner, à bref délai, la mainlevée immédiate d'une mesure de soins psychiatriques prononcée en application des chapitres II à IV du présent titre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale, quelle qu'en soit la forme.

Il peut également être saisi aux fins de mainlevée d'une mesure d'isolement ou de contention prise en application du troisième alinéa du II de l'article L. 3222-5-1.

M. [N] [W] a été hospitalisé après une expertise psychiatrique réalisée le 27 février 2023 par le Dr [H] dans le cadre d'une garde à vue pour des faits de menaces de mort réitérées et appels téléphoniques malveillants à l'encontre de sa mère. Cette expertise concluait à une décompensation sur un mode délirant avec une note mégalomaniaque générant des troubles du comportement à l'encontre de son persécuteur désigné, en l'occurrence sa mère.

M. [N] [W] a fait l'objet d'une hospitalisation à temps complet sans son consentement dans les circonstances ci-dessus précisées, les conditions de l'hospitalisation complète étant énumérées par l'article L. 3213-1 du code de la santé publique, qui dispose que le représentant de l'Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil, l'admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public.

Le certificat médical mensuel en date du 27 avril 2023 établi par le Dr [K] fait état d'une amélioration relative de la tachypsychie et de certains éléments maniformes ; il précise toutefois que la pensée systématisée reste focalisée sur la problématique et les difficultés concernant la garde de sa fille, l'intéressé se décrivant comme victime d'incompréhension et d'injustice et relatant des discordes relationnelles avec son ex- compagne et sa mère ; M. [W] nie avoir menacé sa mère de mort mais avoue son hostilité et sa rancune envers elle ; il présente une thymie à tonalité dépressive avec une certaine tristesse et irritabilité et l'adhésion aux soins reste incertaine, du fait du déni des troubles.

Le certificat de situation en date du 15 mai 2023 transmis par le Dr [C] relève un état clinique stationnaire, un débit mental accéléré et un discours trahissant un vécu de persécution centré sur le Dr [H] qui a rédigé le certificat médical en garde à vue ; il précise que M. [W] présente des troubles du jugement sans aucune critique de sa maladie et se trouve dans le déni des motifs de sa garde à vue et de son hospitalisation, qu'il est agnosognosique par rapport à sa pathologie et refuse de continuer son traitement et son suivi en ambulatoire s'il recouvre la liberté ; il conclut à la nécessité d'une surveillance rapprochée de son état clinique et d'un travail de l'adhésion aux soins car il existe un risque imminent d'aggravation des troubles en cas de sortie prématurée et d'arrêt du traitement psychotrope.

Il est constant que s'il appartient aux médecins, aux termes de certificats précis et détaillés, de se prononcer sur l'état clinique du patient et les troubles mentaux à l'origine de la mesure ainsi que sur la nécessité du maintien de la mesure d'hospitalisation, il appartient à l'autorité judiciaire de caractériser si les troubles diagnostiqués et relatés par les psychiatres compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte de façon grave à l'ordre public au vu des éléments qualifiés par le préfet.

En l'espèce, le certificat de situation sus-visé établit la persistance des troubles, à savoir un vécu de persécution ainsi que le déni de la maladie et le refus des soins nécessaires qui justifient le maintien de la mesure d'hospitalisation complète, au regard du risque imminent d'aggravation de ces troubles et de réitération des faits reprochés, en cas d'arrêt du traitement psychotrope.

La teneur circonstanciée des documents médicaux permet de constater que les conditions fixées par les articles L 3213-1 du code de la santé publique sont toujours réunies. Malgré une amélioration de l'humeur, les troubles du comportement présentés par M. [N] [W] nécessitent des soins auxquels il ne peut consentir du fait du déni total des troubles et de la persistance de son discours persécutif et, s'il venait à sortir à bref délai de l'établissement hospitalier, compromettraient la sûreté des personnes ou porteraient atteinte, de façon grave à l'ordre public, par des conduites susceptibles, actuellement, de mettre en danger la vie d'autrui et la sienne.

Il apparaît par ailleurs que les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles sont adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en 'uvre du traitement requis.

En conséquence la décision du premier juge qui a rejeté la requête de M. [N] [W] doit être confirmée.

Les dépens seront laissés à la charge du Trésor public en application de l'article R. 93-2° du code de procédure pénale.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par décision réputée contradictoire.

Déclarons recevable mais non fondé l'appel formé par M. [N] [W].

Confirmons la décision déférée rendue le 05 mai 2023 par le Juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de GRASSE.

Laissons les dépens à la charge du Trésor public.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-11 ho
Numéro d'arrêt : 23/00071
Date de la décision : 16/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-16;23.00071 ?
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