La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/05/2023 | FRANCE | N°21/06133

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 04 mai 2023, 21/06133


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AVANT DIRE DROIT

DU 04 MAI 2023

ph

N° 2023/ 167













Rôle N° RG 21/06133 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHK6I







[P] [V]

[C] [Z]

S.C.I. S.C.I SOGARO





C/



[U] [S]

[X] [O] [S]















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SCP DENIS ASTRUC



SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES





SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON











Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de GRASSE en date du 23 Mars 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 15/01049.





APPELANTS



Monsieur [P] [V]

appelant et intimé

demeurant [Adresse 13]



représenté par Me Den...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AVANT DIRE DROIT

DU 04 MAI 2023

ph

N° 2023/ 167

Rôle N° RG 21/06133 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHK6I

[P] [V]

[C] [Z]

S.C.I. S.C.I SOGARO

C/

[U] [S]

[X] [O] [S]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP DENIS ASTRUC

SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES

SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de GRASSE en date du 23 Mars 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 15/01049.

APPELANTS

Monsieur [P] [V]

appelant et intimé

demeurant [Adresse 13]

représenté par Me Denis ASTRUC de la SCP DENIS ASTRUC, avocat au barreau de GRASSE

Madame [C] [Z], prise en sa qualité de propriétaire indivise des parcelles cadastrées Section AR n° [Cadastre 22] et [Cadastre 10]

appelante et intimée

demeurant [Adresse 11]

représentée par la SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Francois Marie POSTIC, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

S.C.I. SOGARO, prise en sa qualité de propriétaire indivise des parcelles cadastrées Section AR n° [Cadastre 22] et [Cadastre 10], dont le siège social est [Adresse 11], prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité au siège social

appelante et intimée,

représentée par la SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Francois Marie POSTIC, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

INTIMES

Monsieur [U] [S]

demeurant [Adresse 21]

représenté par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Christophe FIORENTINO de la SELARL FIORENTINO, avocat au barreau de GRASSE , plaidant

Monsieur [X] [O] [S]

demeurant [Adresse 14]

représenté par SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Christophe FIORENTINO de la SELARL FIORENTINO, avocat au barreau de GRASSE , plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 28 Février 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Patricia HOARAU, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fonction de président de chambre

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM, Vice Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Mai 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Mai 2023,

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fonction de président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

M. [A] [S] et M. [X] [S] sont propriétaires en vertu d'un acte notarié du 25 octobre 2010, des parcelles cadastrées section AR numéro [Cadastre 17] (maison élevée sur rez-de-chaussée d'un étage et terrain attenant) et de la moitié indivise de la parcelle AR numéro [Cadastre 19] (parcelle de terre à usage d'accès non carrossable), sises [Adresse 13] à [Localité 25].

S'étant plaints d'un état d'enclave, M. [A] [S] et M. [X] [S] ont obtenu par ordonnance de référé du 11 mars 2013, une mesure d'expertise au contradictoire de Mme [R] [V] veuve [Z] et de M. [P] [V], portant sur les parcelles sises à [Adresse 13] à [Localité 25], cadastrées section AR numéros [Cadastre 17], [Cadastre 22], [Cadastre 9] et [Cadastre 10].

L'expert judiciaire [W] [K], a déposé son rapport le 22 juin 2014.

Par exploit d'huissier du 6 février 2015, M. [A] [S] et M. [X] [S] ont assigné Mme [R] [V] veuve [Z] et M. [P] [V] devant le tribunal de grande instance de Grasse.

Par exploit d'huissier du 7 avril 2017, ils ont assigné la SCI Sogaro et Mme [C] [Z] en dénonciation de cette première procédure. Les deux instances ont été jointes.

Enfin, Mme [C] [Z] a été attraite en qualité d'héritière unique de sa mère, Mme [R] [V] veuve [Z], décédée le 6 janvier 2018.

Par jugement du 23 mars 2021, le tribunal judiciaire de Grasse a statué ainsi :

- prononce le rabat de l'ordonnance de clôture du 31 décembre 2020,

- prononce la clôture au 19 janvier 2021, jour de l'audience de plaidoiries,

- rejette la demande de mise hors de cause de la SCI Sogaro et de Mme [C] [Z],

- rejette la demande de sursis à statuer et d'expertise complémentaire,

- déboute MM. [A] [S] et [X] [S] de leur demande en revendication de propriété concernant la parcelle AR [Cadastre 23],

- déboute MM. [A] [S] et [X] [S] de leur demande visant à reconnaitre l'existence d'un chemin vicinal n°[Cadastre 20], cadastré section AR numéros [Cadastre 9], [Cadastre 6], [Cadastre 7] et [Cadastre 5] qui desservirait leur propriété,

- constate l'état d'enclavement du fonds situé à [Localité 25] cadastré section AR numéro [Cadastre 17],

- juge que l'accès au fonds situé à [Localité 25] cadastré section AR numéro [Cadastre 17] se fera par le tracé figurant an plan annexe 12 (solution n° 2) du rapport de [W] [K] en date du 22 juin 2014, sur les parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 9], [Cadastre 6], [Cadastre 10], [Cadastre 7] et [Cadastre 15],

- condamne MM. [A] [S] et [X] [S] à payer à M. [P] [V] une indemnité de 4 730 euros en réparation du dommage causé à son fonds par la création dc cette servitude,

- condamne MM. [A] [S] ct [X] [S] à payer aux propriétaires indivis des parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 22] et [Cadastre 10], au prorata de leurs droits, la somme de 1 320 euros,

- juge que le présent jugement sera publié au service de la publicité foncière par la partie la plus diligente,

- juge que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile,

- juge qu'en considération de la solution adoptée, chacune des parties conservera à sa charge les dépens par elle exposés,

- juge n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire.

Le tribunal a retenu :

- que la mesure d'expertise n'a pas été réalisée au contradictoire de la SCI Sogaro propriétaire indivise des parcelles AR numéros [Cadastre 22] et [Cadastre 10] depuis le 1er avril 2011 et de Mme [C] [Z] propriétaire indivise des mêmes parcelles depuis le 31 janvier 2012, mais elle a été versée aux débats, et elles ont eu le loisir d'en débattre, qu'il s'agit d'une expertise judiciaire, qu'elle est corroborée par d'autres pièces, qu'elle est donc opposable à la SCI Sogaro et à Mme [C] [Z],

- sur la revendication d'une partie de la parcelle AR [Cadastre 15], que MM. [S] ne démontrent pas l'avoir acquise par prescription trentenaire, par une possession publique, non équivoque et à titre de propriétaire,

- que la parcelle cadastrée section AR numéro [Cadastre 17] ne peut être desservie par des véhicules, le sentier existant à partir des parcelles n° AR [Cadastre 22] et [Cadastre 10] ne permettant pas un tel aménagement, que l'expert a proposé deux solutions,

- que la solution n° 1 concerne les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 22], [Cadastre 10], [Cadastre 9] et [Cadastre 8] appartenant respectivement à M. [P] [V] (AR [Cadastre 8] et [Cadastre 9]) et en indivision à la SCI Sogaro et Mme [C] [Z] (AR [Cadastre 22] et [Cadastre 10]), qui a la préférence de M. [P] [V],

- que la solution n° 2 concerne les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 9], [Cadastre 6], [Cadastre 10], [Cadastre 7] et [Cadastre 15] et nécessite le déplacement d'un olivier, qui a la préférence de la SCI Sogaro et de Mme [C] [Z],

- que la solution n° 2 est la moins dommageable,

- qu'il y a lieu de retenir les évaluations de l'expert pour déterminer l'indemnité.

Par déclaration du 25 avril 2021, M. [P] [V] a relevé appel de ce jugement.

Par déclaration du 5 mai 2021, la SCI Sogaro et Mme [C] [Z] ont relevé appel du même jugement.

Par ordonnance du 10 janvier 2022, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des deux instances.

Dans ses conclusions d'appelant déposées et notifiées sur le RPVA le 22 décembre 2022, M. [P] [V] demande à la cour :

A titre principal :

- de débouter M. [A] [S] et M. [X] [S] de leur demande de désenclavement de leur parcelle AR n°[Cadastre 17] par son fonds qui n'est pas celui à partir duquel ladite parcelle a été créée,

A titre subsidiaire :

- de juger que la solution de désenclavement du fonds [S] conforme aux dispositions de l'article 683 du code civil, c'est-à-dire celle qui emprunte le tracé le plus court et le moins dommageable pour les fonds servants, est celle qui correspond à la solution n° 1 privilégiée par l'expert judiciaire passant sur la parcelle AR [Cadastre 9] et sur l'aire commune (parcelles AR [Cadastre 10] et [Cadastre 22]),

- de débouter M. [A] [S], M. [X] [S], la SCI Sogaro et Mme [C] [Z] de toute demande contraire,

- de condamner solidairement M.[A] [S] et M.[X] [S] à lui payer :

*La somme de 7 006,25 euros au titre de l'indemnité de dédommagement en contrepartie de l'instauration du passage correspondant au tracé n°1 (parcelles AR n°[Cadastre 22], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10]),

*Plus subsidiairement, la somme de 75 000 euros au titre de l'indemnité de dédommagement en contrepartie de l'instauration du passage correspondant au tracé n°2 (parcelles AR n°[Cadastre 15], [Cadastre 22], [Cadastre 7], [Cadastre 9], [Cadastre 10]),

A titre accessoire et dans tous les cas :

- de condamner solidairement M. [A] [S] et M. [X] [S] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les condamner solidairement aux dépens, y compris ceux de première instance.

M. [P] [V] fait valoir en substance :

Sur le désenclavement,

- que les consorts [S] sont propriétaires de la moitié indivise de la parcelle AR [Cadastre 19] qui permet l'accès à leur fonds depuis le [Adresse 24] ouvert à la circulation publique, que le désenclavement doit obligatoirement être envisagé sur les fonds à partir desquels les parcelles AR [Cadastre 17] et AR [Cadastre 19] ont été détachées selon l'article 684 du code civil,

- que l'expert a écarté l'application de l'article 684 au motif que l'aménagement de l'accès à partir de la parcelle AR [Cadastre 19] impactait défavorablement les parcelles mitoyennes [Cadastre 18] et [Cadastre 20], que les propriétaires des parcelles [Cadastre 18] et [Cadastre 20] auraient dû être appelés en cause,

- subsidiairement, que le tribunal a commis une double erreur d'analyse au plan factuel et au plan juridique,

- qu'il y a erreur dans la désignation de la parcelle [Cadastre 6],

- que le tribunal a fait une application inexacte de l'article 683 en motivant sa décision sur le caractère prétendument important de l'ouvrage à réaliser pour la solution n° 1, compte tenu de la hauteur du mur séparant l'aire commune du fonds [S], alors que la rampe d'accès est intégralement située sur le fonds dominant, avec une emprise d'environ 60 m² et s'élevant en pente douce jusqu'à l'aire commune située 2 mètres plus haut, et est compatible avec les dispositions du PLU en vigueur, qui ne sont plus celles retranscrites dans le rapport d'expertise,

Sur les indemnités, dans l'hypothèse subsidiaire où la cour écarterait le passage par les parcelles AR [Cadastre 18] et [Cadastre 20],

- qu'il faut appliquer une valeur actualisée de 295 euros par m²,

- qu'il n'est pas d'accord pour considérer comme l'expert, l'application d'un double abattement de 0,50 (parcelles 169, [Cadastre 7], [Cadastre 8] et [Cadastre 15]) et de 0,3 (parcelles [Cadastre 9], [Cadastre 10] et [Cadastre 22]).

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 6 janvier 2022, la société Sogaro et Mme [C] [Z] demandent à la cour :

Vu les dispositions des articles 6 aliéna 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme, 544, 682, 683, 684, 2227, 1873-2 et suivants du code civil, 15, 16 du code de procédure civile,

- de réformer le jugement entrepris et statuant de nouveau,

- de débouter MM. [A] et [X] [S] et M. [P] [V] de toutes leurs fins, demandes et prétentions,

A titre principal,

- de dire et juger que le rapport établi et déposé par M. [K] le 22 juin 2014 leur est inopposable,

- de dire et juger MM. [A] et [X] [S] irrecevables en leur demande de constitution de servitude de passage fondée exclusivement sur le rapport de M. [K] à leur encontre,

Subsidiairement dans le cas où par impossible la cour écarterait l'exception d'inopposabilité du rapport de M. [K],

- de dire et juger que la parcelle AR [Cadastre 17] se trouve en état d'enclave relative suite au partage intervenu le 17 avril 1951,

- de dire et juger que le désenclavement doit être recherché par les parcelles détachées cadastrées AR [Cadastre 20] et [Cadastre 18] depuis le chemin de Blancard dont elles sont limitrophes,

- de dire et juger qu'il n'est en aucun cas établi qu'un passage suffisant ne peut être établi sur les fonds divisés,

- de débouter MM. [A] et [X] [S] de leur demande de désenclavement depuis le [Adresse 13] sur les parcelles AR [Cadastre 10] et [Cadastre 22],

Très subsidiairement dans le cas où par impossible la cour écarterait l'application des dispositions de l'article 684 alinéa 1 du code civil,

- de dire et juger que le tracé n° 1 passant par les parcelles AR [Cadastre 10], [Cadastre 9] et [Cadastre 22] proposé par M. [K], s'il est le plus court, est le plus dommageable,

- de débouter MM. [A] et [X] [S] et M.[V] de leur demande de désenclavement selon le tracé n° 1,

- de dire et juger que le désenclavement de la parcelle AR [Cadastre 17] se fera selon le tracé envisagé par Monsieur [H] (Plan pièce 18/2) par les parcelles AR [Cadastre 9], [Cadastre 7] et [Cadastre 15],

Très très subsidiairement,

- de dire et juger que le désenclavement de la parcelle AR [Cadastre 17] se fera selon le tracé n° 2 proposé par M. [K] par les parcelles AR [Cadastre 10], [Cadastre 9], [Cadastre 22], [Cadastre 7] et [Cadastre 15],

- de condamner MM. [A] et [X] [S] à leur verser la somme de 118 300 euros à titre d'indemnité,

A titre infiniment subsidiaire dans le cas ou par impossible la cour retiendrait le désenclavement selon le tracé n° 1,

- de condamner MM. [A] et [X] [S] à leur verser la somme de 148 200 euros à titre d'indemnité,

En tout état de cause,

- de condamner MM. [A] et [X] [S] à leur verser la somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elles ont été contraintes d'exposer tant en première instance qu'en cause d'appel en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner MM. [A] et [X] [S] aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de Me Jean François Jourdan avocat postulant aux offres de droit.

La société Sogaro et Mme [C] [Z] soutiennent en substance :

- que le tribunal ne pouvait pas retenir que le rapport de M. [K] était corroboré « s'agissant d'enclavement » par d'autres pièces versées aux débats, qu'aucune des pièces produites par les consorts [S], hormis le rapport [K], n'établissaient l'état d'enclave de la parcelle AR [Cadastre 17], qu'en tant que propriétaires indivises des parcelles AR n° [Cadastre 22] et [Cadastre 10] elles sont, au regard des articles 6 alinéa 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme instituant le principe du caractère équitable de la procédure et de l'article 16 du Code de procédure civile instituant le principe du contradictoire et de la jurisprudence prise en leur application, recevables et fondées à demander réformation du jugement rendu le 23 mars 2021 en ce qu'il a statué sur les demandes des consorts [S] au vu et sur le seul fondement du rapport non contradictoire de M. [K] en date du 22 juin 2014.

- que le seul fait que Mme [Z] ait été assignée le 12 novembre 2018 en sa qualité d'héritière de Mme [R] [V]-[Z] n'est pas de nature à lui rendre opposable l'expertise ordonnée le 11 mars 2013 son auteur n'étant pas à cette date propriétaire des parcelles AR [Cadastre 22] et [Cadastre 10] par lesquelles le désenclavement est demandé,

- que le désenclavement de la parcelle AR [Cadastre 17] ne peut, en application des dispositions de l'article 684 du code civil, être demandé que par la parcelle cadastrée AR [Cadastre 20] qui constituait le lot deux du partage du 17 avril 1951 et ce d'autant plus que l'acte de partage prévoyait expressément que les chemins seraient mitoyens « en vue de faciliter l'exploitation de la propriété » et éventuellement par la parcelle AR [Cadastre 18].

- que les consorts [S] ne pouvaient être accueillis en leur demande de désenclavement par d'autres parcelles que celles dont le détachement est seul à l'origine de l'enclave relative de leur parcelle cadastrée AR [Cadastre 17],

- sur l'application des articles 682 et 683 du code civil, que la solution n° 1 présente de nombreux inconvénients par rapport à la solution n° 2,

- que M. [K] déclare de façon parfaitement injustifiée qu'en raison de son caractère indivis la parcelle AR [Cadastre 22] « doit être laissée libre dans sa totalité à l'usage de tous les copropriétaires », alors que le caractère indivis des parcelles AR [Cadastre 10] et [Cadastre 22] est issu de l'acte de partage du 16 octobre 1967 par lequel suite au décès de son mari M. [L] [V], Mme [T] [F] sa veuve a convenu d'un partage de la propriété acquise par son mari entre ses quatre enfants, M. [Y] [V], M. [D] [V], Mme [R] [V] et M. [J] [V], que l'acte ne prévoit aucune affectation particulière ni aucune restriction d'usage, qu'il ne peut donc être soutenu que les parcelles AR [Cadastre 10] et [Cadastre 22] du seul fait qu'elles sont en indivision pour moitié entre les concluantes et M. [V] ne sont d'aucune valeur comme n'étant d'aucun usage alors:

- que d'une part elles sont directement limitrophes des bâtiments d'habitation propriété des concluantes et constituent un espace de vie impérieusement nécessaire à leur jouissance,

- qu'elles ont de tout temps été utilisées par Mme [R] [Z] et M. [V] notamment pour y stationner leurs véhicules et ceux de leurs visiteurs,

- que l'accord de M. [V] pour la solution n° 1 s'emplace dans le cadre d'un conflit familial, pour nuire aux concluantes,

- sur l'indemnité, que le tribunal a écarté le rapport [H] sans analyse motivée, qu'il est incontestable que la constitution d'une servitude sur les parcelles AR [Cadastre 22] et [Cadastre 10] engendrerait des préjudices d'immobilisation, matériels, de nuisances temporaires, de la dépréciation de la propriété.

Dans leurs conclusions d'intimés déposées et notifiées par le RPVA le 8 octobre 2021, M. [X] [S] et M. [U] [S] demandent à la cour :

Vu les articles 682, 683 et 684 du code civil,

A titre principal :

- de confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Grasse le 23 mars 2021 en tant qu'il a :

- jugé le caractère opposable du rapport d'expertise à la SCI Sogaro et à Mme [C] [Z],

- constaté l'état d'enclave de la parcelle cadastrée section AR n° [Cadastre 17],

- fixé le trace de désenclavement a la solution n° 2 préconisée par l'expert [K],

- de réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Grasse en tant qu'il a :

- déterminé la servitude de passage sur les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 9], [Cadastre 6], [Cadastre 10], [Cadastre 7] et [Cadastre 15],

- fixé l'indemnité à la somme de 4 730 euros pour les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 9], [Cadastre 7], [Cadastre 15] et [Cadastre 6] et la somme de 1 320 euros pour les parcelles indivises cadastrées section AR n° [Cadastre 22] et [Cadastre 10],

Et par l'effet dévolutif de l'appel,

- de déterminer la servitude de passage sur les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 22], [Cadastre 7] et [Cadastre 15],

- de fixer l'indemnité à la somme totale de 6 000 euros ventilée ainsi : 4 680 euros pour les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 9], [Cadastre 7], [Cadastre 15] et 1 530 euros pour les parcelles indivises cadastrées section AR n° [Cadastre 22] et [Cadastre 10],

A titre subsidiaire :

- de fixer le tracé de désenclavement à la solution n° 1 préconisée par l'expert [K] et déterminer la servitude de passage sur les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 9], [Cadastre 22], [Cadastre 10] et [Cadastre 8],

- de fixer l'indemnité due par eux à la somme totale de 2 210 euros ventilée ainsi : 680 euros pour les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 8] et n° [Cadastre 9] et 1 530 euros pour les parcelles indivises cadastrées section AR n° [Cadastre 22] et [Cadastre 10],

En tous les cas :

- de condamner les parties appelantes à leur verser, chacune, la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance et par moitié les frais d'expertise.

M. [X] [S] et M. [U] [S] arguent pour l'essentiel :

Sur l'opposabilité du rapport,

- que Mme [C] [Z] est en la cause en tant qu'héritière de Mme [R] [V] veuve [Z] et en cette qualité le rapport d'expertise lui est opposable,

- que Mme [C] [Z] est en la cause en qualité de propriétaire indivise des parcelles AR n° [Cadastre 22] et [Cadastre 10], n'a pas été appelée aux opérations d'expertise, mais a été en mesure de le discuter,

- qu'il en est de même pour la SCI Sogaro,

Sur l'état d'enclave,

- que l'expert a écarté l'application de l'article 684 du code civil, tout en constatant l'existence d'une origine commune des parcelles,

- qu'il est inexact que l'expert n'a pas étudié cette solution, alors que des relevés ont été effectués pour justifier que cette solution soit écartée,

- que l'expert a retenu deux solutions,

- qu'ils préfèrent la solution n° 2,

- que la solution n° 2 est moins onéreuse que la solution n° 1,

- qu'à la lecture du jugement, il apparaît que le tribunal a intégré une parcelle non mentionnée dans le plan ni la liste et que la parcelle [Cadastre 22] est non visée alors qu'elle est bien mentionnée dans les documents, que la servitude de passage s'établira sur les parcelles cadastrées section AR n° [Cadastre 9], [Cadastre 22], [Cadastre 10], [Cadastre 7], [Cadastre 15],

Sur l'indemnité,

- que le montant réclamé par M. [V] pour la solution n° 2 est disproportionné et non justifié, le fonds servant ne constituant ni un jardin, ni une aire de stationnement,

- que pour la solution n° 1, il faut se référer à l'expertise, les demandes de la SCI Sogaro et de Mme [C] [Z] étant exorbitantes, alors que l'expert relève que la solution n° 1 ne concerne essentiellement que la parcelle AR [Cadastre 22], qui est un patecq, espace commun à l'usage de divers.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 14 février 2023.

L'arrêt sera contradictoire puisque toutes les parties sont représentées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'étendue de la saisine de la cour

Aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Il est constaté que le dispositif des conclusions des appelants comporte des demandes de « juger » et « dire et juger », qui ne constituent manifestement pas des prétentions, si bien que la cour n'en est pas saisie.

Sur l'action aux fins de désenclavement

Aux termes de l'article 682 du code civil, le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner.

Selon les dispositions de l'article 16 du code de procédure civile, « Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations. »

Il est constant que le juge ne peut, pour déterminer la condamnation d'une partie, se fonder exclusivement sur un rapport d'expertise y compris judiciaire établi non contradictoirement à l'égard de cette partie qui en soulève l'inopposabilité, sauf à ce que ce rapport ait été régulièrement versé aux débats, soumis à la libre discussion des parties et soit corroboré par d'autres éléments de preuve.

En l'espèce, l'expertise judiciaire ordonnée avait pour objet de fournir tous éléments d'appréciation pour dire si le fonds cadastré AR numéro [Cadastre 17] appartenant à MM. [S] est enclavé, en recherchant s'il dispose d'une issue suffisante pour en assurer la desserte complète vers la voie publique et ses utilisations normales, actuelles ou envisagées, et dans la négative de rechercher les solutions de désenclavement.

L'expertise a été ordonnée le 11 mars 2013 et le rapport déposé le 22 juin 2014, au contradictoire de M. [P] [V] et de Mme [R] [V] veuve [Z].

L'expert judiciaire conclut ainsi :

- le fonds [S] provient d'un plus grand fonds qui incluait les parcelles [Cadastre 20] et [Cadastre 19],

- l'accès par l'aval, chemin de Blancard : il apparaît impossible d'y obtenir une autorisation administrative, et en supposant cela possible, l'impact sur la parcelle [Cadastre 20] constituerait un préjudice tel, qu'il serait insupportable pour le demandeur,

- l'accès par l'aménagement du sentier en contournant les parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 2] n'est pas possible pour lui donner les caractéristiques permettant un usage par véhicules,

- seules deux solutions sont techniquement acceptables, à savoir les solutions 1 et 2 proposées :

- la solution 1 passe par les parcelles cadastrées AR numéros [Cadastre 9], [Cadastre 22], [Cadastre 10] et [Cadastre 8],

- la solution 2 passe par les parcelles cadastrées AR numéros [Cadastre 9], [Cadastre 22], [Cadastre 10], [Cadastre 7] et [Cadastre 15].

L'expert judiciaire après avoir relevé que la solution 2 n'est pas la plus courte et a un coût d'aménagement (déplacement de deux gros oliviers, construction de murets de soutènement contre le garage et contre la parcelle [Cadastre 16]) à ajouter à la dépréciation pour la propriété [V] et à l'indemnité d'acquisition plus élevée, préconise la solution 1 qui « rejoint le chemin communal en passant par les parcelles AR [Cadastre 9] (accord de [V]) et [Cadastre 10] et [Cadastre 22] (partie commune ou patec) ».

A la lecture des actes notariés versés aux débats, à savoir l'acte de partage successoral du 27 septembre 1967 suite au décès de [L] [V] le 5 février 1953, et l'acte d'échange du 20 novembre 1984 intervenu postérieurement au décès de [T] [F] veuve [V] en 1976, ainsi que les actes de vente des 1er avril 2011 et 31 janvier 2012 :

- M. [P] [V] qui vient aux droits de son père [L] [M] [V], est propriétaire en pleine propriété des parcelles cadastrées AR numéros [Cadastre 4], [Cadastre 6], [Cadastre 9], [Cadastre 8] et [Cadastre 15], ainsi que d'un quart indivis de la parcelle cadastrée AR [Cadastre 10], avec [D] [V], [Y] [V] et [R] [V] veuve [Z] dans l'acte d'échange, lequel mentionne également une aire commune reprise au cadastre AR numéros [Cadastre 22] et [Cadastre 10] et précise que la parcelle AR numéro [Cadastre 7] reste indivise entre [L] [V] et [D] [V],

- M. [B] [V] a cédé ses droits indivis sur les parcelles AR numéros [Cadastre 22] et [Cadastre 10] à la SCI Sogaro, en même temps que la pleine propriété des parcelles cadastrées AR [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 12], étant établi par l'acte de partage successoral de 1967 et l'acte d'échange de 1984 (se référant au nouveau cadastre), que les parcelles AR numéros [Cadastre 2] et [Cadastre 3] appartenaient précédemment à [Y] [V],

- Mme [R] [V] veuve [Z] a cédé ses droits, soit un quart en pleine propriété des parcelles cadastrées AR numéros [Cadastre 22] et [Cadastre 10], à Mme [C] [Z], sa fille.

Il en ressort que les parcelles cadastrées AR numéros [Cadastre 22] et [Cadastre 10], qualifiées de partie commune ou patec par l'expert judiciaire, sont en indivision entre M. [P] [V], la SCI Sogaro depuis le 1er avril 2011, Mme [C] [Z] depuis le 31 janvier 2012 et avec ceux venant aux droits de [D] [V].

Il est vérifié que la SCI Sogaro et Mme [C] [Z] n'ont pas été appelées aux opérations d'expertise, qui ont eu lieu au contradictoire de [R] [V] veuve [Z], qui pourtant n'était plus propriétaire de droits sur les parcelles cadastrées section AR numéros [Cadastre 22] et [Cadastre 10], depuis le 31 janvier 2012.

En outre, les parcelles cadastrées AR numéros [Cadastre 22] et [Cadastre 10] sont en indivision avec ceux venant aux droits de [D] [V], de même que la parcelle cadastrée AR numéro [Cadastre 7] est en indivision entre M. [P] [V] et ceux venant aux droits de [D] [V]. Or ce ou ces derniers n'ont pas été appelés en la cause.

Se pose ainsi et en premier lieu, la question de la recevabilité de la demande de MM [S] tendant au désenclavement de la parcelle cadastrée AR numéro [Cadastre 17], à défaut d'avoir assigné l'ensemble des propriétaires concernés, question qui n'a été soulevée par aucune des parties.

Il convient donc d'ordonner la réouverture des débats aux fins de susciter les observations des parties sur ce moyen d'irrecevabilité soulevé d'office.

Les dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS

Avant dire droit,

Ordonne la réouverture des débats aux fins de susciter les observations des parties sur le moyen d'irrecevabilité soulevé d'office tiré de l'absence d'appel en cause de l'ensemble des propriétaires concernés par l'action en désenclavement de la parcelle cadastrée AR numéro [Cadastre 17] sise [Adresse 13] à [Localité 25], engagée par M. [A] [S] et M. [X] [S] ;

Renvoie l'affaire à l'audience du 28 Novembre 2023 à 14h15 salle 5 PALAIS MONCLAR avec une nouvelle clôture au 14 Novembre 2023 ;

Reserve les dépens.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 21/06133
Date de la décision : 04/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-04;21.06133 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award