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04/05/2023 | FRANCE | N°18/00626

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 04 mai 2023, 18/00626


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 04 MAI 2023

lv



N° 2023/ 154













Rôle N° RG 18/00626 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BBYQF







SARL BOULANGERIE FLORENE





C/



[U] [S]

[I] [T]

Syndic. de copro. [Adresse 1]

E.U.R.L. PHARMACIE CORNUEL





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me

FONTAINE

Me MBENGUE

Me PARRACONE













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE en date du 12 Septembre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 15/02363.





APPELANTE



SARL BOULANGERIE FLORENE prise en la personne de son représent...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 04 MAI 2023

lv

N° 2023/ 154

Rôle N° RG 18/00626 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BBYQF

SARL BOULANGERIE FLORENE

C/

[U] [S]

[I] [T]

Syndic. de copro. [Adresse 1]

E.U.R.L. PHARMACIE CORNUEL

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me FONTAINE

Me MBENGUE

Me PARRACONE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE en date du 12 Septembre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 15/02363.

APPELANTE

SARL BOULANGERIE FLORENE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

sise [Adresse 1]

représentée et assistée par Me Elodie FONTAINE de la SELAS B & F, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Maître [U] [S] en sa qualité d'administrateur judiciaire, demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Alioune MBENGUE, avocat au barreau de MARSEILLE

Maître [I] [T] en sa qualité de mandataire judiciaire, demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Alioune MBENGUE, avocat au barreau de MARSEILLE

Syndicat des copropriétaires [Adresse 1], représenté par Monsieur [C] [Z], domicilié [Adresse 5], désigné en qualité d'administrateur provisoire par ordonnance de 10 septembre 2019, renouvelé à ces fonctions par ordonnance du 25 octobre 2021

représenté et assisté par Me Ollivier PARRACONE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

E.U.R.L. PHARMACIE CORNUEL

sise [Adresse 2]

représentée par Me Alioune MBENGUE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 21 Février 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fonction de Président de chambre a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fonction de Président de chambre

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Priscilla BOSIO.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Mai 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Mai 2023,

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Le fonds de commerce de boulangerie sis [Adresse 1] est exploité en location gérance par une société à responsabilité limitée unipersonnelle dont le nom commercial est BOULANGERIE FLORENE.

La société PHARMACIE CORNUEL exploite des locaux situés [Adresse 1].

Se plaignant d'une occupation illicite des parties communes par la BOULANGERIE FLORENE, d'installations électriques non conformes et de la prolifération de moisissures, la société PHARMACIE CORNUEL a obtenu, par ordonnance de référé du 07 août 2012, la désignation de M. [M] en qualité d'expert judiciaire. Celui-ci a déposé son rapport définitif le 1er juin 2013.

Par acte d'huissier en date des 24 et 31 mars 2015, la société PHARMACIE CORNUEL a fait assigner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] et la société BOULANGERIE FLORENCE devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence afin notamment d'obtenir:

- la condamnation de la boulangerie sous astreinte à cesser d'utiliser son four électrique jusqu'à la mise en conformité de l'électricité, à enlever ses sacs de farine sur les parties communes et à démanteler sa cave de fuel,

- la condamnation solidaire du syndicat des copropriétaires et de la boulangerie à procéder à la remise de l'installation électrique sur parties communes et du mur recouvert de moisissures ainsi qu'à lui payer une provision de 40.000 € à valoir sur ses préjudices.

Par jugement contradictoire en date du 12 septembre 2017, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a:

- rejeté les fins de non recevoir soulevées par la BOULANGERIE FLORENE,

- condamné le syndicat des copropriétaires à faire réaliser les travaux listés par l'expert judiciaire en page 13 de son rapport,

-dit qu'à défaut d'exécution passé le délai de 4 mois après signification de la présente décision, le syndicat des copropriétaires sera redevable envers la PHARMACIE CORNUEL d'une astreinte provisoire de 100 € par jour de retard pendant 6 mois,

- condamné la BOULANGERIE FLORENE à rembourser au syndicat des copropriétaires le montant intégral des travaux de reprise listés par l'expert judiciaire en page 13 de son rapport,

- condamné in solidum la BOULANGERIE FLORENE et le syndicat des copropriétaires à payer à la PHARMACIE CORNUEL la somme de 30.000 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi entre l'année 2012 et l'année 2017, soit pendant 5 ans,

- débouté la PHARMACIE CORNUEL de ses demandes tendant à condamner la BOULANGERIE FLORENE à:

* cesser d'utiliser son four électrique,

* de stocker de la farine dans le réduit sous l'escalier qui est une partie commune à jouissance privative,

- condamné la BOULANGERIE FLORENE à enlever tous les sacs de farine entreposés dans les parties communes à l'exception de ceux se trouvant dans le réduit sous l'escalier,

-dit qu'à défaut d'exécution passé le délai de 3 jours après signification de la présente décision, la BOULANGERIE FLORENE sera redevable envers la PHARMACIE CORNUEL d'une astreinte provisoire de 100 € par jour de retard pendant 2 mois,

- condamné la BOULANGERIE FLORENE à démanteler la cuve de fuel,

-dit qu'à défaut d'exécution passé le délai d'un mois après signification de la présente décision, la BOULANGERIE FLORENE sera redevable envers la PHARMACIE CORNUEL d'une astreinte provisoire de 100 € par jour de retard pendant 6 mois,

- dit le syndicat des copropriétaires et la BOULANGERIE FLORENE infondés en leurs prétentions au titre des frais irrépétibles,

- condamné in solidum la BOULANGERIE FLORENE et le syndicat des copropriétaires à payer à la PHARMACIE CORNUEL la somme de 3.000 € du chef de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la BOULANGERIE FLORENE et le syndicat des copropriétaires aux dépens comprenant les frais d'expertise,

- ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration en date du 11 janvier 2018, la société BOULANGERIE FLORENE a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 24 décembre 2019, la société BOULANGERIE FLORENE demande à la cour de:

- recevoir la BOULANGERIE FLORENE en son appel et la déclarer recevable et bien fondé,

- réformer le jugement déféré en ce qu'il a:

* rejeté les fins de non recevoir soulevées par la BOULANGERIE FLORENE,

* condamné la BOULANGERIE FLORENE à rembourser au syndicat des copropriétaires le montant intégral des travaux de reprise listés par l'expert judiciaire en page 13 de son rapport,

* condamné in solidum la BOULANGERIE FLORENE et le syndicat des copropriétaires à payer à la PHARMACIE CORNUEL la somme de 30.000 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi entre l'année 2012 et l'année 2017, soit pendant 5 ans,

* condamné la BOULANGERIE FLORENE à enlever tous les sacs de farine entreposés dans les parties communes à l'exception de ceux se trouvant dans le réduit sous l'escalier,

* dit qu'à défaut d'exécution passé le délai de 3 jours après signification de la présente décision, la BOULANGERIE FLORENE sera redevable envers la PHARMACIE CORNUEL d'une astreinte provisoire de 100 € par jour de retard pendant 2 mois,

* condamné la BOULANGERIE FLORENE à démanteler la cuve de fuel,

* dit qu'à défaut d'exécution passé le délai d'un mois après signification de la présente décision, la BOULANGERIE FLORENE sera redevable envers la PHARMACIE CORNUEL d'une astreinte provisoire de 100 € par jour de retard pendant 6 mois,

* dit le syndicat des copropriétaires et la BOULANGERIE FLORENE infondés en leurs prétentions au titre des frais irrépétibles,

* condamné in solidum la BOULANGERIE FLORENE et le syndicat des copropriétaires à payer à la PHARMACIE CORNUEL la somme de 3.000 € du chef de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a:

* condamné le syndicat des copropriétaires à faire réaliser les travaux listés par l'expert judiciaire en page 13 de son rapport,

*dit qu'à défaut d'exécution passé le délai de 4 mois après signification de la présente décision, le syndicat des copropriétaires sera redevable envers la PHARMACIE CORNUEL d'une astreinte provisoire de 100 € par jour de retard pendant 6 mois,

* débouté la PHARMACIE CORNUEL de ses demandes tendant à condamner la BOULANGERIE FLORENE à cesser d'utiliser son four électrique et de stocker de la farine dans le réduit sous l'escalier qui est une partie commune à jouissance privative,

Et statuant à nouveau,

- constater que la PHARMACIE CORNUEL n'a pas mis dans la cause Mme [L] veuve [F] et son fils, M. [R] [F], bailleurs de la BOULANGERIE FLORENE,

- constater, puis dire et juger, que s'agissant de travaux dans les parties communes, seul le syndicat des copropriétaires, représenté par M. [C] [Z], désigné en qualité d'administrateur provisoire de la copropriété, y sera tenu,

- constater que la PHARMACIE CORNUEL a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 16 avril 2015 qui a rejeté les demandes de la PHARMACIE CORNUEL qu'elle formule à l'identique et à nouveau, devant la présente juridiction,

- déclarer en conséquence la PHARMACIE CORNUEL irrecevable en toutes ses demandes et en conséquence, l'en débouter,

- déclarer, en conséquence, le syndicat des copropriétaires, représenté par M. [C] [Z], désigné en qualité d'administrateur provisoire de la copropriété, irrecevable en toutes ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la BOULANGERIE FLORENCE et l'en débouter,

A titre subsidiaire,

- dire et juger que la PHARMACIE CORNUEL est de mauvaise foi,

- écarter des débats le constat d'huissier établi le 21 novembre 2013 par Me [H], huissier de justice,

- donner acte à la BOULANGERIE FLORENE qu'elle n'entrepose plus les sacs de farine dans les parties communes depuis décembre 2012,

- débouter la PHARMACIE CORNUEL, Me [S] et Me [T] de toutes leurs demandes, fins et conclusions à l'encontre de la BOULANGERIE FLORENE ,

- débouter le syndicat des copropriétaires, représenté par M. [C] [Z], désigné en qualité d'administrateur provisoire de la copropriété de toutes ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la BOULANGERIE FLORENE comme mal fondées,

En tout état de cause,

- débouter la PHARMACIE CORNUEL, Me [S] et Me [T] et le syndicat des copropriétaires, représenté par M. [C] [Z], désigné en qualité d'administrateur provisoire de la copropriété, de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner la PHARMACIE CORNUEL à payer à la BOULANGERIE FLORENE les sommes de:

* 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et dilatoire,

* 4.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Elle conclut à titre principal à l'irrecevabilité des demandes formulées à son encontre en rappelant que la PHARMACIE CORNUEL sollicite qu'elle soit condamnée à procéder à différents travaux dans les parties communes alors que:

- son propre bailleur n'a pas été appelé en la cause alors qu'il est directement responsable, en sa qualité de copropriétaire, des agissements dommageables imputables à son locataire,

- il est surprenant que le syndicat des copropriétaires sollicite que les travaux soient mis à la seule charge du locataire, d'autant que s'agissant de travaux portant sur les parties communes, il convient au préalable de procéder à un vente en assemblée générale et qu'un locataire ne peut intervenir seul sur les parties communes,

- la PHARMACIE CORNUEL a formé un pouvoir en cassation à l'encontre de l'arrêt du 16 avril 2015 de cette cour, étant précisé que dans cette première procédure, elle formule exactement les mêmes demandes que dans le cadre du présent litige, lesquelles sont en conséquence nécessairement irrecevables.

A titre subsidiaire, sur le fond, elle considère que les demandes formulées à son encontre sont parfaitement infondées:

- sur les sacs de farine:

*depuis le dépôt du rapport d'expertise, plus aucun sac de farine n'est entreposé dans les parties communes, soit depuis plus de 5 ans, ce dont elle justifie par la production de plusieurs attestations,

* le constat d'huissier produit par la partie adverse doit être écarté des débats en ce qu'il met en évidence que la PHARMACIE CORNUEL s'est introduite, sans autorisation et par effraction dans ses propres locaux, ce qui constitue une violation de son droit de propriété,

- sur le four électrique: celui- est un élément indispensable pour le fonctionnement de son activité et ne fait courir aucun danger pour les personnes et les biens,

- sur la cuve à fioul: cette cuve, depuis l'installation du four électrique, est hors service et a été démantelée le 07 juin 2018,

- sur le mur recouvert de champignons:

* ce mur se trouve dans les parties communes et il ne lui appartient donc pas, en sa qualité de locataire, de procéder seule à la remise en état de ce mur,

* aucune faute ne peut lui être reprochée et le fait pour elle d'avoir posé un volet roulant est sans incidence en ce que les particules existait déjà,

* la PHARMACIE n'a jamais voulu participer aux travaux de nettoyage des parties communes, à l'époque où la copropriété était désorganisée alors que pour sa part, elle réalise un traitement pour maintenir l'hygiène deux fois par an,

- sur l'installation électrique:

* s'agissant d'une partie commune, seul le syndicat peut faire procéder aux travaux,

* elle a fait installer un four à pain électrique pour ne plus procéder au remplissage de la cave à fuel, le nouveau matériel étant en parfaite conformité avec les exigences des différentes directives européennes.

Elle s'oppose à la demande de dommages et intérêts présentée par la PHARMACIE qui est parfaitement fantaisiste, que devant l'expert, elle faisait un préjudice de 10.000 € pour finalement réclamer 40.000 € sans la moindre explication.

Elle insiste enfin sur sa demande reconventionnelle, la PHARMACIE CORNUEL ne cessant de multiplier les procédures à son encontre qu'elle perd pourtant les unes après les autres.

Le syndicat des copropriétaires [Adresse 1], représenté par M. [C] [Z], désigné en qualité d'administrateur provisoire, suivant ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 25 novembre 2021, demande à la cour de:

- recevoir le syndicat des copropriétaires en son appel incident,

- réformer le jugement rendu le 12 septembre 2017 par le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en ce qu'il a:

* condamné le syndicat des copropriétaires à faire réaliser les travaux listés par l'expert judiciaire en page 13 de son rapport,

* dit qu'à défaut d'exécution passé le délai de 4 mois après signification de la présente décision, le syndicat des copropriétaires sera redevable envers la PHARMACIE CORNUEL d'une astreinte provisoire de 100 € par jour de retard pendant 6 mois,

* condamné in solidum la BOULANGERIE FLORENE et le syndicat des copropriétaires à payer à la PHARMACIE CORNUEL la somme de 30.000 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi entre l'année 2012 et l'année 2017, soit pendant 5 ans,

- condamné in solidum la BOULANGERIE FLORENE et le syndicat des copropriétaires à payer à la PHARMACIE CORNUEL la somme de 3.000 € du chef de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens comprenant les frais d'expertise,

A titre principal,

- dire et juger que seule la BOULANGERIE FLORENE est à l'origine des désordres en parties communes et des préjudices allégués par la PHARMACIE CORNUEL

- mettre hors de cause le syndicat des copropriétaires [Adresse 1],

- dire et juger que la BOULANGERIE FLORENE doit seule payer la somme en réparation des préjudices réclamés par la PHARMACIE CORNUEL,

- réformer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum la BOULANGERIE FLORENE et le syndicat des copropriétaires à payer à la PHARMACIE CORNUEL la somme de 30.000 €,

- dire et juger dans le cas où le syndicat des copropriétaires [Adresse 1] serait condamné sur le principe, au vu de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965,n'y avoir lieu à le condamner à faire des travaux sous astreinte,

- condamner la BOULANGERIE FLORENE à faire les travaux en parties communes, sous astreinte, tels que préconisés et chiffrés par l'expert judiciaire,

- donner acte au syndicat des copropriétaires [Adresse 1] qu'il donne l'autorisation à la BOULANGERIE FLORENE et de toute personne sous la responsabilité de celle-ci à effectuer les travaux aux parties communes,

Et encore,

- dire et juger que la somme de 30.000 € allouée par le jugement à la PHARMACIE CORNUEL n'est justifiée ni en fait, ni en droit,

- réformer en conséquence le jugement en ce qu'il a alloué à la PHARMACIE CORNUEL une somme de 30.000 € en réparation des préjudices subis entre l'année 2012 et l'année 2017, soit sur 5 ans,

- réformer le jugement en ce qu'il a condamné le syndicat des copropriétaires [Adresse 1] à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, en ce compris les frais d'expertise,

- condamner solidairement la PHARMACIE CORNUEL, représentée par Me [W], mandataire judiciaire et assistée de Me [S] et la BOULANGERIE FLORENE à payer au syndicat des copropriétaires [Adresse 1] la somme de 8.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement la PHARMACIE CORNUEL , représentée par Me [W], mandataire judiciaire et assistée de Me [S] et la BOULANGERIE FLORENE aux dépens.

Il soutient que:

- la demande de la PHARMACIE CORNUEL à son encontre est irrecevable, en ce que le problème concerne exclusivement deux parties, ladite pharmacie et la BOULANGERIE FLORENCE, le syndicat n'ayant jamais été mis en cause au titre de l'entretien des parties communes postérieurement au dépôt du rapport d'expertise,

- le premier juge a commis une erreur de droit ayant conduit à sa condamnation:

* celle-ci s'est faite au visa de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, alors que la demanderesse n'a jamais fondé sa demande sur cet article,

* le fait pour le syndicat de laisser entreposer des sacs de farine appartenant à la boulangerie dans le couloir, partie commune, ne permet pas de caractériser une faute de sa part, en ce que nul ne peut être condamné que pour sa propre négligence et non celle d'autrui,

- l'expert judiciaire a relevé que les désordres étaient imputables à la boulangerie:

* le défaut de conformité de l'installation électrique puisqu'elle en est à l'origine,

* les moisissures sur les murs et plafonds des parties communes par l'effet conjoint des poussières des sacs de farine entreposés et de l'absence de ventilation du couloir en raison de l'installation d'un volet ainsi que de l'usage qu'elle fait des parties communes en laissant sa porte en permanence ouverte.

Il estime que seule la responsabilité de la BOULANGERIE FOLRENCE dans la survenance des dommages aux parties communes et dans la gêne alléguée par la PHARMACIE CORNUEL , est engagée, ainsi qu'il en ressort des investigations de l'expert judiciaire, que c'est à tort que le premier juge l'a condamné à payer à cette dernière des dommages et intérêts, d'autant que le préjudice qu'elle déplore n'est absolument pas justifié, ni dans son principe, ni dans son quantum.

Il ajoute que depuis la désignation de M. [Z] en qualité d'administrateur provisoire de la copropriété, celui-ci a entrepris un certain de diligences en faisant établir des devis pour la réalisation des travaux préconisés par l'expert et en faisant voter par l'assemblée générale lesdits travaux, la reprise de la peinture du couloir étant d'ores et déjà réalisée. Il observe que pour la mise en place du tableau électrique, l'entreprise mandatée s'est vue opposer un refus de la part de la pharmacie d'exécuter les travaux.

Par conclusions notifiées le 18 septembre 2019, l'EURL PHARMACIE CONSEIL demande à la cour de:

- confirmer le jugement du 12 septembre 2017,

- rejeter toutes les demandes formulées par les appelants,

- condamner les défendeurs à payer à l'EURL PHARMACIE CORNUEL la somme de 1.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle souligne qu'il ressort clairement du rapport d'expertise judiciaire que les éléments électriques des parties communes ne sont pas fonctionnels, que les moisissures présentes sont directement imputables à l'activité de la boulangerie, que la présence de tels micro-organisme est incompatible avec les normes d'hygiène et de santé publique que toute pharmacie doit respecter.

Elle souligne que contrairement aux affirmations adverses, le constat d'huissier est parfaitement régulier en ce qu'il a constaté la présence de sacs de farine entreposés dans les parties communes de l'immeuble accessibles et visibles par tous les copropriétaires et locataires.

Elle déplore l'absence de réalisation des travaux à l'origine d'une dégradation des parties communes et d'un risque sanitaire important pour la pharmacie objectivé par l'Agence Régionale de Santé et qu'elle a été contrainte de saisir à trois reprises le juge de l'exécution afin d'obtenir la liquidation des astreintes prononcées et la fixation de nouvelles astreintes.

Me [I] [T], mandataire judiciaire de l'EURL PHARMACIE CORNUEL et Me [U] [S], administrateur judiciaire de l'EURL PHARMACIE CORNUEL ont constitué avocat mais n'ont pas déposé de conclusions.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 30 novembre 2021.

MOTIFS

Sur la recevabilité des demandes formées à l'encontre de la SARL BOULANGERIE FLORENE

La SARL BOULANGERIE FLORENE considère en premier lieu que les demandes formées à son encontre par l'EURL PHARMACIE CORNUEL sont irrecevables en ce que celle-ci s'est abstenue d'attraire en la cause son bailleur.

Comme l'a relevé à juste titre le premier juge, si le copropriétaire bailleur peut être comptable des fautes commises par son locataire, celui qui se prétend victime peut parfaitement diligenter une action en justice directement contre le locataire qu'il estime responsable de son préjudice.

En l'occurrence, l'EURL PHARMACIE CORNUEL impute à la société appelante, qui exploite le fonds voisin, des fautes de nature quasi délictuelle, tenant notamment à une occupation illicite des parties de la copropriété.

Elle a donc intérêt et qualité à intenter la présente action, d'autant que les organes de la procédure collective ont été dûment appelés en la cause, étant relevé qu'elle a régulièrement assigné le syndicat des copropriétaires, s'agissant d'atteintes aux parties communes.

Ce moyen d'irrecevabilité sera également rejeté.

La BOULANGERIE FLORENE estime que les demandes présentées par le syndicat des copropriétaires à son encontre sont irrecevables en ce que seul ce dernier doit répondre des dommages affectant les parties communes, en application de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965.

Or, celle-ci opère manifestement une confusion entre recevabilité et bien fondée d'une action, en ce que le syndicat des copropriétaires, dont la responsabilité est certes engagée au visa de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, mais n'en a pas moins intérêt et qualité à former des demandes à l'encontre d'un locataire qui exploite un commerce dans l'immeuble et dont il considère que les agissements sont à l'origine des dommages affectant les parties communes.

L'appelante se prévaut enfin de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt rendu le 16 avril 2015 par cette cour, ayant infirmé l'ordonnance de référé du 7 janvier 2014.

Or, cet arrêt du 16 avril 2015 n'a pas au principal l'autorité de la chose jugée conformément à l'article 488 du code de procédure civile

La décision rendue en référé a, en effet, vocation à régir une situation provisoire, jusqu'à l'intervention éventuelle du juge du fond, de sorte que son exécution est toujours faites aux risques et périls du créancier.

Les juges, statuant au fond, ne sont donc pas liés par une décision en référé.

Le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les fins de non recevoir soulevées par la SARL BOULANGERIE FLORENE sera donc confirmé.

Sur la demande formées à l'encontre du syndicat des copropriétaires et de la SARL BOULANGERIE FLORENE

L'EURL PHARMACIE CORNUEL a introduit la présente procédure recherchant la responsabilité de la SARL BOULANGERIE FLORENE sur le fondement de l'article 1240 (1382 ancien du code civil) et du syndicat des copropriétaires, au visa de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965.

L'appelante demande, au préalable à la cour d'écarter des débats le constat d'huissier non contradictoire établi le 21 novembre 2013 par Me LE GALL. Des photographies sont jointes à ce procès-verbal d'un local aménagé sous l'escalier, partie commune à jouissance privative de l'appelante, en principe fermé à clef ainsi de l'intérieur d'un abri dans l'arrière cour qui est également fermé à clef , dans lequel se trouve la cuve à fioul et qui est un local privé. De telles investigations n'ayant pas été régulièrement autorisées, il y a lieu d'écarter des débats ce procès-verbal.

L'expert judiciaire, à l'issue des ses investigations, a confirmé la matérialité des faits dénoncés par la pharmacie ' l'installation électrique réalisés par la BOULANGERIE FLORENCE dans les parties communes n'est pas conforme et n'est pas fonctionnelle, les sacs de farine gênent par obstruction le passage vers l'arrière et la cave ( partie privative de la pharmacie) et les murs et plafonds sont très dégradés par des micro-organismes et moisissures. Cet état de fait génère une impropriété à destination pour les occupants de l'immeuble et en particulier pour la PHARMACIE CORNUEL qui doit en permanence circuler dans cette zone (...) Les dommages trouvent leur origine dans l'entreposage par la BOULANGERIE FLORENE des sacs de farine pour ce qui concerne la gêne occasionnée à la PHARMACIE CORNUEL. Pour ce qui concerne l'installation électrique dangereuse et déficiente, elle a été réalisée par la BOULANGERIE FLORENE mais c'est le syndicat des copropriétaires qui devrait en assurer la charge et l'entretien, ainsi que les consommations électriques. Enfin, les importantes dégradations sur les parois et l'atteinte à l'hygiène du bâtiment trouvent leur origine dans la proximité de la boulangerie et l'usage des parties communes qu'elle en fait, la porte restant ouverte et provoque une condensation importante chargée de poussières de farine qui viennent se décharger sur les murs froids de cette cage d'escalier.'

La SARL BOULANGERIE FARINE, qui conteste avoir commis une quelconque faute, n'apporte aucun élément technique de nature à remettre en question les conclusions particulièrement circonstanciées et étayées de l'expert judiciaire qui a répondu aux dires des parties et notamment du conseil de l'appelante, en précisant que:

- la défaut de conformité de l'installation électrique lui est imputable dès que c'est elle qui l'a réalisée et que les lesdits travaux ne sont ni complets, ni terminés, ni conformes,

- les venues de moisissures et champignons sur les murs et plafonds des parties communes relèvent également de sa responsabilité en ce qu'ils résultent de l'effet conjoint des poussières de farine, de l'absence de ventilation du couloir en réponse de la pose par elle d'un rideau électrique qui une fois fermé occulte le passage de l'air et sa circulation.

Les travaux de nature à permettre fin aux désordres sont listés par l'expert en page 13 de son rapport et sont évalués à la somme de 5.400 € HT, soit 5.778 € TTC et concernent exclusivement des parties communes.

En vertu de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable au présent litige, le syndicat des copropriétaires est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de consentement ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toute action récursoire.

Il y a lieu de rappeler que seul le syndicat des copropriétaires peut intervenir sur les parties communes notamment pour y réaliser des travaux. Dès lors celui-ci ne peut pas sollicite la condamnation de l'appelante à effectuer, sous astreinte, les travaux en parties communes tels que préconisés et chiffrés par l'expert judiciaire. Il dispose en revanche d'une action récursoire à son encontre, dont le comportement est à l'origine exclusive des désordres affectant les parties communes.

C'est donc à juste titre que le tribunal a condamné le syndicat des copropriétaires à effectuer les travaux préconisés par l'expert judiciaire sur les parties communes en page 13 de son rapport et a condamné l'appelante à lui rembourser l'intégralité du montant des travaux engagés.

S'agissant de son préjudice, l' EURL PHARMACIE CORNUEL sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné in solidum la SARL BOULANGERIE FLORENE et le syndicat des copropriétaires à lui payer une somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts.

L'expert [M] relève en page 16 de son rapport que la PHARMACIE CONRNUEL subit des troubles de jouissance:

- l'accès à la cave qu'elle occupe, partie privative utilisée pour stocker les médicament, est en permanence et partiellement obstruée par les sacs de farine entreposés par la BOULANGERIE FOLRENCE , située de l'autre côté du couloir au rez-de-chaussée de l'immeuble,

- les moisissures et champignons persistent dans cette zone et dégagent une odeur gênante pour les salariés et les clients de la pharmacie quand la porte est ouverte,

- le rideau électrique posée par l'appelante sur la cour gêne la circulation et empêche la ventilation,

- il existe un risque de sécurité et d'hygiène par l'inflammabilité des poussières de farine qui stagnent ainsi que des micro-organismes sur les murs.

L'expert précise avoir été rendu destinataire d'une demande d'indemnisation du préjudice subi par l' EURL PHARMACIE CORNUEL à hauteur de 10.000 €, avoir constaté la matérialité des désordres allégués et laissé à la juridiction la charge de se prononcer sur ce point.

Si effectivement celle-ci justifie incontestablement d'un préjudice de jouissance compte tenu des risques sanitaires induits par la présence de moisissures, les désagréments liés aux restrictions de l'espace de déplacement ainsi que l'atteinte à la réputation de la pharmacie, le montant réclamé à ce titre, à savoir 30.000 € ( 500 € par mois pendant 5 ans) , est manifestement excessif, n'est pas justifié par des éléments probants et ne correspond d'ailleurs à ce qui avait été soumis à l'expert judiciaire.

En conséquence, le préjudice de jouissance subi par l' EURL PHARMACIE CORNUEL sera arrêté à la somme de 10.000 €.

La société appelante, directement responsable des dommages subis par la pharmacie, doit être condamnée au paiement de cette somme.

En revanche, c'est à tort que le premier juge a également retenu que le syndicat des copropriétaires devait également condamné au paiement des dommages et intérêts réclamés par l' EURL PHARMACIE CORNUEL alors que les dommages subis aux parties communes ne lui sont aucunement imputables et sont exclusivement la conséquence des agissements de l'appelante.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur les demandes formées par l' EURL PHARMACIE CORNUEL à l'encontre de la SARL BOULANGERTIE FLORENE

Le tribunal a

- débouté la PHARMACIE CORNUEL de ses demandes tendant à condamner la BOULANGERIE FLORENE à:

* cesser d'utiliser son four électrique,

* de stocker de la farine dans le réduit sous l'escalier qui est une partie commune à jouissance privative,

- condamné la BOULANGERIE FLORENE à enlever tous les sacs de farine entreposés dans les parties communes à l'exception de ceux se trouvant dans le réduit sous l'escalier,

-dit qu'à défaut d'exécution passé le délai de 3 jours après signification de la présente décision, la BOULANGERIE FLORENE sera redevable envers la PHARMACIE CORNUEL d'une astreinte provisoire de 100 € par jour de retard pendant 2 mois,

- condamné la BOULANGERIE FLORENE à démanteler la cuve de fuel,

-dit qu'à défaut d'exécution passé le délai d'un mois après signification de la présente décision, la BOULANGERIE FLORENE sera redevable envers la PHARMACIE CORNUEL d'une astreinte provisoire de 100 € par jour de retard pendant 6 mois.

L' EURL PHARMACIE CORNUEL sollicitant, aux termes de ses écritures en cause d'appel, la confirmation pure simple du jugement querellé, il n'y a pas lieu d'examiner à nouveau ses demandes relatives à la cessation par l'appelante de son four électrique et de stocker la farine dans le réduit sous l'escalier.

La condamnation de la BOULANGERIE FLORENE à enlever, sous astreinte, les sacs de farine entreposés dans les parties communes est parfaitement justifiée au regard des constatations de l'expert judiciaire au contradictoire de toutes les parties, aucun élément probant n'étant versé aux débats pour démontrer que celle-ci avait cessé d'entreposer de tels sacs à compter de 2012, ce qui est au demeurant formellement par le rapport de M. [M].

C'est également de manière exacte que le tribunal a condamné l'appelante à démanteler la cuve de fioul, l'expert ayant noté que ladite cuve qui n'est plus utilisée, devait être détruite.

Au regard de la solution apportée au présent litige, la SARL BOULANGERIE FLORENCE doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Ecarte des débats le procès-verbal de constat d'huissier en date du 21 novembre 2013 produit par l'EURL PHARMACIE CORNUEL,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence déféré sauf en ce qu'il a condamné in solidum la SARL BOULANGERE FLORENE et le syndicat des copropriétaires [Adresse 1] à payer à l'EURL PHARMACIE CORNUEL la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau sur ce point,

Condamne la SARL BOULANGERE FLORENE à payer à l'EURL PHARMACIE CORNUEL la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts,

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Condamne la SARL BOULANGERE FLORENE aux dépens de la procédure d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 18/00626
Date de la décision : 04/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-04;18.00626 ?
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