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06/04/2023 | FRANCE | N°21/14290

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 06 avril 2023, 21/14290


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 06 AVRIL 2023



N°2023/325



Rôle N° RG 21/14290 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIGLH







[3]



C/



[V] [N]





Copie exécutoire délivrée

le :

à :





- [3]



- Me Emilie MILLION-ROUSSEAU















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du Tribunal Judiciaire de Marseille e

n date du 17 Septembre 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 20/01659.





APPELANTE



[3], demeurant [Adresse 2]



représenté par M. [G] [W] en vertu d'un pouvoir spécial





INTIMEE



Madame [V] [N], demeurant [Adresse 1]



représentée par Me Emilie MILLION-...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 06 AVRIL 2023

N°2023/325

Rôle N° RG 21/14290 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIGLH

[3]

C/

[V] [N]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- [3]

- Me Emilie MILLION-ROUSSEAU

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du Tribunal Judiciaire de Marseille en date du 17 Septembre 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 20/01659.

APPELANTE

[3], demeurant [Adresse 2]

représenté par M. [G] [W] en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMEE

Madame [V] [N], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Emilie MILLION-ROUSSEAU de la SELARL RACINE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Février 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Mme Isabelle PERRIN, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Séverine HOUSSARD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Avril 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Avril 2023

Signé par Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre et Mme Séverine HOUSSARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Mme [V] [N], médecin psychiatre libéral à la retraite depuis le 1er juillet 2018, a repris une activité de psychanalyste en auto-entrepreneur depuis le 3 septembre 2018.

Mme [N], demeurée inscrite au tableau de l'ordre des médecins en tant que médecin retraité, a alors été affiliée d'office à raison de cette nouvelle activité, à la [3] ([3]), à compter du 1er octobre 2018.

Par courrier en date du 27 février 2019, l'organisme de sécurité sociale l'a informée que l'activité de psychanalyste exercée par un médecin inscrit au tableau de l'ordre des médecins est assimilée à une activité médicale et entraîne l'obligation de cotiser à ce titre.

Par courrier en date du 17 février 2020, Mme [N] a saisi la commission de recours amiable de l'organisme de sécurité sociale en contestation de cette affiliation.

Par décision en date du 12 mai 2020, la commission de recours amiable a confirmé la position critiquée.

Par requête en date du 9 juin 2020, Mme [N] a porté son recours devant le tribunal judiciaire de Marseille.

Par jugement en date du 17 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Marseille a fait droit à la demande de Mme [V] [N] en annulation de la décision d'affiliation de la [3], à compter du 1er octobre 2018 au titre de son activité de psychanalyste, condamner l'organisme de sécurité sociale à lui verser la somme de 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au paiement des dépens.

Par déclaration au greffe de la cour expédiée le 8 octobre 2021, la [3] a interjeté appel.

A l'audience du 9 février 2023, la caisse appelante reprend les conclusions datées du 7 février 2022. Elle demande à la cour de réformer le jugement du tribunal judiciaire de Marseille du 17 septembre 2021 en toutes ses dispositions,et de confirmer l'affiliation du docteur [N] à la [3] à compter du 1er octobre 2018.

Au soutien de ses prétentions, elle distingue d'abord la [3] et la CIPAV en s'appuyant sur les dispositions de l'article R.641-1 du code de la sécurité sociale et remarque que la modification de l'article en 2019 a précisé que les activités de psychothérapeute et de psychologue relevaient de la CIPAV mais que celle de psychanalyste n'y a pas été intégrée.

Elle considère qu'un médecin restant inscrit à l'ordre des médecins et débutant une activité de psychanalyste, doit rester affilié à la [3] et ce n'est qu'en cas d'exercice d'une profession libérale non rattachée à une autre section prévue par l'article R. 641-1 du code de la sécurité sociale, que l'assuré doit être affilié à la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse,

Elle se fonde sur la notion d'activité médicale qui ne consiste pas seulement en une activité de soins mais peut aussi consister en une activité d'expertise ou de conseil dans le domaine médical sans prescription ou diagnostic. Elle fait également valoir la jurisprudence selon laquelle, deux critères d'assujetissement sont posés pour identifier la nature médicale d'une activité, celle de l'inscription à l'ordre des médecins et celle de la mise en oeuvre de compétences médicales.

Elle ajoute que le statut d'auto-entrepreneur est réservé aux seuls ressortissants de la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse et n'est pas applicable aux médecins libéraux.

La psychanalyste intimée reprend les conclusions notifiées par RPVA Le 22 juin 2022. Elle demande à la cour de confirmer le jugement et de condamner la [3] à lui payer 2.000 euros au titre des frais irrépétibles et au paiement des dépens.

Au soutien de ses prétentions, elle se fonde elle aussi sur les dispositions de l'article R.641-1 du code de la sécurité sociale pour démontrer qu'il n'existe pas une section professionnelle propre aux activités relevant de la psychanalyse et considère que son activité de formatrice de psychanalystes et d'autrice dans le domaine de la psychanalyse relève de la CIPAV et non de la [3].

Elle fait valoir que son activité de psychanalyse n'a pas de nature médicale puisqu'elle ne prescrit pas de traitements, ne décerne aucune feuille de soins, ne nécessite pas de formation médicale décernant un diplôme reconnu et n'est pas inscrite à la nomenclature générale des actes professionnels. Elle explique que son inscription à l'ordre des médecins est seulement liée à son statut de médecin retraité et donne lieu à une cotisation spécifique. Elle ajoute que l'affiliation à la [3] suppose une interdépendance entre ses anciennes activités de médecin psychiatre et son activité de psychanalyste qui n'est pas établie. Sur ce point, elle précise que par son activité de formatrice elle n'exerce la psychanalyse qu'à des fins didactiques et qu'elle n'exerce pas dans son ancien cabinet, ni n'a de contact avec son ancienne clientèle.

Elle considère que les développements de la caisse sur l'activité d'expert sont inopérants puisqu'elle n'exerce aucune activité d'expertise qu'elle soit judiciaire ou conventionnelle, que ce soit dans le domaine médical ou de la psychanalyse. Elle en conclut que les arrêts de la Cour de cassation dont se prévaut la caisse ont été pris dans des situations différentes de la sienne.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé du litige.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l'article L.640-1 du code de la sécurité sociale :

'Sont affiliées aux régimes d'assurance vieillesse et invalidité-décès des professions libérales les personnes exerçant l'une des professions suivantes :

1°) médecin, étudiant en médecine mentionné au 4° de l'article L. 646-1, chirurgien-dentiste, sage-femme, pharmacien, auxiliaire médical, psychothérapeute, psychologue, ergothérapeute, ostéopathe, chiropracteur, diététicien ;

(...)'

En outre, selon les dispositions de l'article R.641-1 du code de la sécurité sociale, la caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales comprend dix sections professionnelles

dont la section professionnelle des médecins et une section pour toute profession libérale non rattachée à une autre section.

Les personnes exerçant une activité relevant de la première section susvisée sont obligatoirement affiliées à la [3] et les personnes exerçant une activité nonrattachée à une section spécifique sont obligatoirement rattachées à la CIPAV.

L'affiliation à la [3] d'un assuré inscrit au tableau de l'ordre des médecins en qualité de médecin à la retraite, suppose qu'il exerce une activité non salariée dans le cadre de laquelle il met en oeuvre ses compétences et son expérience médicales.

En l'espèce, Mme [N] a exercé l'activité de psychiatre jusqu'au 1er juillet 2018 date à laquelle elle a pris sa retraite avant de débuter une activité de psychanalyse.

Il n'est ainsi pas discuté par les parties que l'intéressée n'exerce pas une activité libérale de conseil ou d'expertise en sa qualité d'ancien psychiatre.

En outre, comme l'ont pertinemment relevé les premiers juges, il n'est pas démontré par la caisse que l'exercice de son activité de psychanalyse par l'intéressée mobilise ses compétences et expérience d'ancien psychiatre.

En effet, non seulement il n'est pas démontré, ni même invoqué, que l'intéressée use de son titre d'ancien psychiatre, ou réalise des actes réservés aux docteurs en médecine, tels que l'établissement de diagnostics et la prescription de traitements de maladies psychiatriques, mais encore, il ressort de la description de son activité par l'assurée intimée, sans qu'elle soit discutée par la caisse, qu'elle exerce la psychanalyse en qualité de formatrice de sorte que son activité a une visée didactique, et non thérapeutique.

Elle indique, sans être contredite, que son activité comporte une première étape de psychanalyse de celui qui se forme, suivie d'une supervision de plusieurs séances de psychanalyse qu'il anime. La psychanalyse pratiquée par l'intéressée a donc pour but la formation à l'analyse et non la recherche du bien-être de l'analysé, même si celle-ci fait partie intégrante de la formation.

Il s'en suit que l'exercice de l'activité de psychanalyse en l'espèce, ne repose pas sur les compétences médicales de l'ancienne psychiatre mais sur les compétences que tout psychanalyste, quel que soit son expérience professionnelle passée, doit avoir acquises pour exercer la psychanalyse.

En conséquence, l'exercice de la psychanalyse, à des fins seulement didactiques ne répond pas, bien qu'il soit exercé par une personne inscrite au tableau de l'ordre des médecins, à la définition d'une activité médicale et ne justifie pas l'affiliation de l'intéressée à la [3].

En conséquence, la décision de la [3] d'affilier Mme [N] à compter du 1er octobre 2018 n'est pas bien-fondée.

Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions et la [3] déboutée de son appel.

La partie appelante succombant à l'instance, sera condamnée à payer les dépens de l'appel en vertu de l'article 696 du code de procédure civile.

En application de l'article 700 du code de procédure civile,la [3] sera condamnée à payer à Mme [N] la somme de 2.000 euros à titre de frais irrépétibles et sera déboutée de sa demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par décision contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Condamne la [3] à payer à Mme [N] la somme de 2.000 euros à titre de frais irrépétibles,

Déboute la [3] de l'ensmeble de ses prétentions,

Condamne la [3] au paiement des dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/14290
Date de la décision : 06/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-06;21.14290 ?
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