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06/04/2023 | FRANCE | N°19/19940

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 06 avril 2023, 19/19940


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 06 AVRIL 2023

lv

N° 2023/ 142













Rôle N° RG 19/19940 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFLVZ







[R] [C]





C/



Syndicat des copropriétaires LES JARDINS DE POMONE





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Emmanuelle CORNE



SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GU

EDJ









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 17 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 18/01087.





APPELANTE



Madame [R] [C]

née le 07 Novembre 1942 à [Localité 5]

de nationalité Française, demeurant [Ad...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 06 AVRIL 2023

lv

N° 2023/ 142

Rôle N° RG 19/19940 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFLVZ

[R] [C]

C/

Syndicat des copropriétaires LES JARDINS DE POMONE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Emmanuelle CORNE

SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 17 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 18/01087.

APPELANTE

Madame [R] [C]

née le 07 Novembre 1942 à [Localité 5]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Emmanuelle CORNE, avocat au barreau de GRASSE

INTIME

Syndicat des copropriétaires [Adresse 4], représenté par son syndic en exercice la SAS CABINET EUROPAZUR lui-même poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié, [Adresse 1]

représenté par la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Fabienne LATTY de la SCP BOURGOGNE - LATTY & ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 07 Février 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame [M] [K], a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fonction de président de chambre

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM, Vice Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Avril 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Avril 2023,

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fonction de président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Le syndicat des copropriétaires LES JARDINS DE POMONE administre un ensemble immobilier de 24 villas sur une parcelle cadastrée section BP n° [Cadastre 2] sis [Adresse 4].

Cette copropriété horizontale est régie par un règlement de copropriété publié au bureau des hypothèques d'[Localité 3] le 9 novembre 1970.

Mme [R] [C] est propriétaire de la villa n°20 dépendant de cet ensemble immobilier.

Lors de l'assemblée générale du 9 janvier 2018, les copropriétaires ont adopté notamment les résolutions suivantes:

- résolutions 5 et 6: approbation des comptes de l'exercice du 01/07/2016 au 30/09/2017 et quitus donné au syndic pour sa gestion au cours de l'exercice écoulé,

- résolution 7: désignation et renouvellement du mandat du syndic EUROPAZUR,

- résolutions 15 et 16: vote des travaux de rénovation des murs des bungalows de la piscine et des frais administratifs du syndic ( honoraires sur travaux).

Par acte d'huissier en date du 2 août 2018, Mme [R] [C] a fait assigner le syndicat des copropriétaires LES JARDINS DE POMONE devant le tribunal de grande instance de Grasse en annulation des résolutions susvisées et en paiement d'une somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire en date du 17 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Grasse a:

- prononcé l'annulation des résolutions 5 et 6 de l'assemblée générale de la copropriété [Adresse 4] du 9 janvier 2018,

- débouté Mme [R] [C] de sa demande d'annulation des résolutions 7, 15 et 16 de l'assemblée générale de la copropriété [Adresse 4] du 9 janvier 2018,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à l'égard de l'une ou l'autre des parties,

- laissé à chacune des parties la charge des dépens qu'elle a exposés,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration en date du 31 décembre 2019, Mme [R] [C] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 8 juin 2020, Mme [R] [C] demande à la cour de:

Sur le fondement des articles 10 alinéa 2, 14,18, 26 et 42 de la loi du 10 juillet 1965, des dispositions du règlement de copropriété et du cahier des charges, et de l'article 445 du code de procédure civile,

- réformer la décision déférée en ce qu'elle a:

* rejeté le moyen d'annulation des résolutions 5 et 6 adoptées lors de l'assemblée générale des copropriétaires du 9 janvier 2018 tenant à l'irrégularité des comptes,

* débouter la concluante de son recours à l'encontre des résolutions 7,16 et 16,

* dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à l'égard de l'une ou l'autre des parties et laissé à chacune des parties la charge des dépens qu'elle a exposés,

- dire et juger que l'annulation des résolutions 5 et 6 est également justifiée par l'irrégularité des comptes incluant une dépense étrangère à l'objet du syndicat des copropriétaires,

- constater que l'adoption de la résolution 7 procède d'un abus de majorité,

- dire et juger qu'en décidant à la majorité de l'article 24 de la loi du 10 juillet 1965 de travaux sur les bungalows qui constituent des parties privatives et de répartir cette dépense en charges générales, l'assemblée générale a outrepassé ses pouvoirs tels que fixés par le règlement de copropriété et le cahier des charges,

- prononcer l'annulation des résolutions 7, 15 et 16 adoptées lors de l'assemblée générale du 9 janvier 2018,

- condamner le syndicat des copropriétaires au paiement d'une indemnité de 6.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle sollicite la confirmation du jugement portant annulation des résolutions 5 et 6 pour violation de l'article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965, qu'elle a, en effet, sollicité par courriel du 4 janvier 2018 la possibilité de consulter les justificatifs des dépenses de la copropriété soumises à l'approbation de l'assemblée, que le syndic lui a opposé un refus au motif qu'elle avait déjà pu les consulter, l'assemblée devant se tenir initialement le 16 novembre 2017 et avait été reportée au 9 janvier 2018 alors que:

- chaque assemblée est autonome de sorte que, pour chacune, les droits d'informations préalables qui sont reconnus aux copropriétaires doivent être respectées, principe qui vaut pour la consultation des pièces comptables,

- elle a été en mesure de consulter les comptes en vue de l'assemblée générale prévue le 16 novembre 2017 et non pour l'assemblée du 9 janvier 2018,

- elle rapporte bien la preuve de s'être fait opposer un refus d'accès aux pièces comptables pour l'assemblée, objet du présent litige

Elle réclame en revanche la réformation du jugement entrepris en ce qu'il a écarté le moyen qu'elle soulevait, également au soutien de sa demande d'annulation des résolutions 5 et 6, tenant à l'irrégularité des comptes:

- la rédaction des statuts et du règlement intérieur d'une association, en l'espèce l'Association Club les Jardins de Pomone, ne relève pas de l'objet du syndicat des copropriétaires tel que défini à l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965,

- la dépense y afférente aurait dû être supportée par les membres fondateurs de cette association et n'avait pas à figurer dans les comptes du syndicat des copropriétaires,

- l'inscription de cette dépense lui cause un grief comme à tous les autres copropriétaires qui se voient imputer la charge d'une dépense qui ne leur incombe pas,

- dès lors, il ne s'agissait pas, contrairement à ce qui a été retenu par le tribunal, d'une simple erreur matérielle, d'autant que le syndicat n'a procédé à aucune rectification depuis de cette erreur.

Elle sollicite l'annulation des résolutions 7, 15 et 16, faisant valoir en substance que:

- sur la résolution 7 ( désignation du syndic):

* cette résolution a été adoptée en violation de l'article 21 alinéa 3 de la loi du 10 juillet 1965 qui impose une mise en concurrence,

* l'adoption de cette résolution est constitutive d'un abus de majorité en ce qu'elle renouvelait le contrat d'un syndic dont il avait été démontré les graves errements dans l'accomplissement de sa mission,

- sur les résolutions 15 et 16 qui doivent être traitées ensemble, la seconde n'étant que la suite de la première:

* leur objet est totalement étranger à l'objet du syndicat des copropriétaires et à la mission de son syndic qui se limitent à l'administration et l'entretien des parties communes, ce qui n'est pas le cas desdits bungalows qui constituent des parties privatives,

* elles ne pouvaient être adoptées qu'à l'unanimité dans la mesure où il est porté atteinte aux droits des copropriétaires sur leurs parties privatives, ainsi qu'aux modalités de jouissance de celles-ci telles que prévues par le règlement de copropriété,

* elles sont contraires aux dispositions du règlement de copropriété et du cahier des charges puisque les travaux projetés consistent à remplacer la peinture actuelle par des pierres de parement,

* l'article 55 du règlement de copropriété et le cahier des charges sont très clairs en ce qu'ils précisent expressément que l'intégralité des bungalows constitue des parties privatives et que les travaux de réfection et d'entretien extérieurs doivent être exécutés par chaque copropriétaire,

* la majorité requise ne pouvait être celle de l'article 24 s' agissant de travaux ne portant pas sur les parties communes mais les parties privatives et modifiant des matériaux de façade.

Le syndicat des copropriétaires LES JARDINS DE POMONE, représenté par son syndic en exercice la SAS CAINBET EUROPAZUR, suivant ses dernières conclusions déposées et notifiées le 14 avril 2020, demande à la cour de:

Vu les articles 9, 18-1, 21 alinéa 3 et 24 de la loi du 10 juillet 1965,

Vu le règlement de copropriété,

- confirmer partiellement le jugement en ce qu'il a débouté Mme [C] de ses demandes d'annulation des résolutions 7, 15 et 16,

Pour le surplus,

- réformer le jugement du 17 septembre 2019 en ce qu'il a annulé les résolutions 5 et 6,

- débouter Mme [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- débouter Mme [C] de ses demandes d'annulation des résolutions 5,6, 7, 15 et 16 de l'assemblée générale du 9janvier 2018,

- condamner Mme [C] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 6.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Il fait grief au premier juge d'avoir annulé les résolutions 5 et 6 de l'assemblée querellé, au visa de l'article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965, alors que Mme [C] a bien eu accès aux documents:

- une assemblée devait se tenir le 16 novembre 2017, à l'occasion de laquelle, Mme [C] a sollicité et obtenu du syndic l'autorisation d'étudier les comptes et documents pour vérification,

- l'assemblée générale du 16 novembre 2017 n'a pas pu se tenir et a été reportée au 9 janvier 2018,

- lorsque Mme [C] a souhaité accéder aux mêmes documents de la copropriété, le syndic lui a indiqué que les pièces étaient identiques et qu'il avait rempli l'obligation édictée à l'article 18-1 susvisé,

- l'appelante ne démontre pas la défaillance du syndic à tenir les pièces à la disposition des copropriétaires,

- la première assemblée a dû être reportée et rien dans la seconde date de l'assemblée n'a été modifié ou rajouté, de sorte qu'il s'agit bien de la même assemblée générale,

- seule l'omission de la mention dans la convocation des modalités de consultation, notamment des jours et horaires précis, rend annulable la décision de l'assemblée générale, alors qu'en l'espèce, cette mention a bien été portée sur la convocation à l'assemblée du 9 janvier 2018,

- Mme [C], qui conteste l'approbation des comptes du 1er juillet 2016 au 30 septembre 2017, a bien eu accès à ces comptes et le syndic n'est pas tenu de communiquer des documents comptables pour n'importe quelle période.

Il conteste toute irrégularité des comptes en observant que:

- Mme [C] ne rapporte pas la preuve d'une telle irrégularité mais est simplement en désaccord avec le vote lors de l'assemblée générale du 6 juin 2017 portant sur la création d'un club house ( rédaction de statut) doté d'un règlement intérieur,

- cette résolution a été adoptée par les copropriétaires en pleine connaissance de cause et il n'y a eu aucun détournement de son objet,

- Mme [C] conteste en réalité une simple erreur matérielle comme l'a retenu le premier juge, à savoir une inversion de factures, qui cependant n'a aucune incidence sur le volume des dépenses de la copropriété et sur les comptes du syndicat.

Sur la résolution n° 7, il rappelle qu'il n'existe aucune sanction de l'absence de mise en concurrence du contrat de syndic, obligation qui repose sur le conseil syndical et soutient que Mme [C] est défaillante à rapporter la preuve qui lui incombe d'un abus de majorité résultant du vote de cette résolution.

S'agissant des résolutions 15 et 16, il fait valoir que:

- contrairement aux affirmations adverses, les bungalows sont des parties communes à jouissance privative ainsi qu'il en résulte du règlement de copropriété,

- page 55 de ce règlement, il est prévu que toute modification extérieure, d'entretien et réfection des bungalows pourra être modifié par décision de l'assemblée générale,

- l'assemblée générale est parfaitement légitime à faire voter les travaux,

- les travaux effectués ne peuvent souvent être cantonnés aux seules structures privatives d'un lot dont l'imbrication dans les parties communes de l'immeuble, rend inévitable les répercussions sur les éléments du gros oeuvre ou l'aspect extérieur du bâtiment, d'où la nécessité d'une autorisation de l'assemblée générale pour s'assurer que les travaux projetés sont réalisables sans porter atteinte à la communauté,

- les travaux de rénovation des murs des bungalows étaient nécessaires à la conservation de l'immeuble et Mme [C] n'indique pas en quoi, ils porteraient atteinte à la jouissance des parties privatives ou à la destination de l'immeuble,

- que ces bungalows soient des parties privatives ou des parties communes à jouissance privative, le syndicat est en droit de faire voter les travaux de réfection selon la majorité de l'article 24

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 24 janvier 2023.

MOTIFS

Sur les résolutions 5 et 6 de l'assemblée générale des copropriétaires du 9 janvier 2018

La résolution 5 porte sur l'approbation des comptes du 1er juillet 2016 au 30 septembre 2017 et la résolution 6 concerne le quitus donné par l'assemblée générale au syndic de sa gestion pour la période écoulée.

Mme [R] [C] fait grief , en premier lieu, au syndic, de lui avoir refusé la possibilité de consulter les pièces justificatives comptables avant la tenue de l'assemblée générale.

En application de l'article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable au litige, pendant le délai s'écoulant entre la convocation de l'assemblée générale appelée à connaître des comptes et la tenue de celle-ci, les pièces justificatives des charges de copropriété, notamment, le cas échéant, une note d'information sur les modalités de calcul des charges de chauffage et de production d'eau chaude sanitaire collectifs, les factures, les contrats de fourniture et d'exploitation en cours et leurs avenants ainsi que la quantité consommée et le prix unitaire ou forfaitaire de chacune des catégories de charges, sont tenues à la disposition de tous les copropriétaires par le syndic selon des modalités précisées par décret en Conseil d'Etat.

Conformément à l'article 9-1 du décret du 17 mars 1967, pendant le délai s'écoulant entre la convocation de l'assemblée générale appelée à connaître des comptes et la tenue de celle-ci, le syndic tient les pièces justificatives des charges mentionnées à l'article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965 susvisée et classées par catégories à la disposition de tous les copropriétaires pendant une durée qui ne peut être inférieure à un jour ouvré et doit être, en tout cas, appropriée à la dimension de la copropriété. Le syndic fixe le lieu de la consultation des pièces justificatives des charges, soit à son siège, soit au lieu où il assure habituellement l'accueil des copropriétaires, le ou les jours et les heures auxquels elle s'effectue, qui doivent être indiqués dans la convocation mentionnée à l'article 9. Lorsqu'il s'agit d'un syndic professionnel, ces jours et heures doivent être fixés pendant les jours et heures d'accueil physique déterminés dans le contrat de syndic.

Les pièces mentionnées au premier alinéa sont des documents originaux ou des copies. Les copropriétaires peuvent obtenir une copie de ces pièces à leurs frais. Les copropriétaires peuvent se faire assister par un membre du conseil syndical.

Ce texte étant d'ordre public, le syndic doit impérativement mettre les pièces justificatives des charges à la disposition des copropriétaires dans les conditions définies par les conditions définies par l'article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965 et 9-1 du décret du 17 mars 1967.

Il y a lieu de rappeler que lorsque la nullité est encourue pour non respect de ces dispositions, elle ne frappe pas l'assemblée générale en son entier mais les résolutions ayant des incidences directes ou indirectes sur les charges, à savoir à la fois l'approbation des comptes et le quitus.

Il est constant, en l'espèce, que par mail du 2 janvier 2018, suite à la convocation à l'assemblée générale devant se tenir le 9 janvier 2018, Mme [C] a sollicité la possibilité de venir consulter les justificatifs des dépenses de copropriété le jeudi 4 janvier 2018 et que par courriel en réponse du même jour, le syndic lui a opposé un refus au motif qu'elle avait déjà pu consulter ces éléments pour l'assemblée générale devant se tenir initialement le 16 novembre 2017 et ayant fait l'objet d'un report au 9 janvier 2018.

Mme [C] a réitéré sa demande par lettre recommandée en date du 3 janvier 2018.

En raison du refus du syndic, il est établi que Mme [C] n'a pas pu consulter les pièces justificatives des charges avant la tenue de l'assemblée générale du 4 janvier 2018, au mépris des articles 18-1 de la loi du 10 juillet 1965 et 9-1 du décret du 17 mars 1967.

Le syndicat des copropriétaires ne peut utilement soutenir qu'elle avait eu accès à ces documents au préalable et que rien dans l'assemblée du 9 janvier 2018 n'avait été modifié par rapport à la précédente qui avait été reportée, ce qui au demeurant n'est pas établi, et alors que chaque assemblée générale étant autonome, les droits d'information préalable qui sont reconnus aux copropriétaires doivent être respectés pour chacune.

Ainsi Mme [C], en raison d'une nouvelle convocation, était légitime à solliciter une consultation des pièces justificatives prévues par l'article 18-1 de loi du 10 juillet 1965.

C'est donc à juste titre que le tribunal a annulé les résolutions 5 et 6 de l'assemblée générale du 9 janvier 2018 pour violation des dispositions de l'article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965.

Mme [C] invoque également, au soutien de sa demande d'annulation, une irrégularité des comptes.

Au regard de l'état des dépenses (pièce 18 de l'appelante), il apparaît que le syndic a inversé deux factures, en ce qu'il est mentionné dans les comptes:

- SCP Benhamou honoraires aff [C]: 3.000 €

- SCP Benhamou honoraires règlement intérieur AGS 19.12.2016: 1.680 €,

alors qu'au regard des factures, il faudrait lire:

- SCP Benhamou honoraires aff [C]: 1.680 €

- SCP Benhamou honoraires règlement intérieur AGS 19.12.2016: 3.000 €.

Il s'agit d'une simple erreur matérielle qui n'affecte nullement le volume des dépenses de la copropriété et est sans incidence sur la validité des comptes.

Enfin, l'appelante ne peut soutenir que la dépense 'SCP Benhamou honoraires règlement intérieur AGS 19.12.2016: 3.000 €' n'aurait pas dû être supportée par les copropriétaires comme n'entrant pas dans l'objet du syndicat, en ce que l'inscription de cette dépense n'est que la conséquence de l'adoption par les copropriétaires de résolutions lors de l'assemblée du 19 décembre 2016 et du 6 juin 2017 portant sur la création d'une association du Club privé les Jardins de Pomone, d'un règlement intérieur et des statuts de cette association ayant vocation à régir l'utilisation des espaces communs de sports et de loisirs de la copropriété, résolutions qui n'ont pas été contestées.

Sur la résolution 7 de l'assemblée générale du 9 janvier 2018

Par cette résolution, l'assemblée générale a désigné et renouvelé le mandat du syndic EUROPAZUR.

Mme [C] invoque en premier lieu une violation de l'article 21 alinéa 3 de la loi du 10 juillet 1965 qui impose une mise en concurrence.

Conformément à l'article 21 alinéa 3 de la loi du 10 juillet 1965, 'En vue de l'information de l'assemblée générale appelée à se prononcer sur la désignation d'un syndic professionnel et sans que cette formalité ne soit prévue à peine d'irrégularité de la désignation du syndic, le conseil syndical met en concurrence plusieurs projets de contrats de syndic (...) '.

D'une part, cette mise en concurrence n'est pas prescrite à peine de nullité de la désignation du syndic et, d'autre part, cette obligation pèse sur le conseil syndical et non le syndicat des copropriétaires.

Mme [C] se prévaut en outre d'un abus de majorité.

L'abus de majorité consiste soit à utiliser la majorité dans un intérêt autre que l'intérêt collectif ou dans un intérêt qui lui est contraire, soit dans un intérêt personnel, soit dans l'intérêt exclusif d'un groupe majoritaire au détriment du groupe minoritaire, soit avec l'intention de nuire, soit en rompant l'équilibre entre les copropriétaires.

La preuve du caractère fautif d'une décision d'assemblée générale repose sur le copropriétaire qui s'en prévaut.

Force est de constater que l'appelante ne démontre aucunement l'existence d'un quelconque abus de majorité résultant de l'adoption de cette résolution, l'examen du procès-verbal mettant en évidence que certains copropriétaires ont voté pour et d'autres contre, de sorte qu'une majorité s'est librement exprimée, étant rappelé qu'il n'appartient au juge d'apprécier l'opportunité des décisions prises par l'assemblée générale.

La demande d'annulation de la résolution 7 ne sera donc pas accueillie.

Sur les résolutions 15 et 16 de l'assemblée générale du 9 janvier 2018

La résolution 15 est ainsi libellée:

' Travaux de rénovation des murs des bungalows de la piscine- majorité article 24 (...)

L'assemblée générale, après pris connaissance des conditions essentielles des devis et des contrats présentés par le syndic et de l'avis du conseil syndical, et après en avoir délibéré décide de réaliser la rénovation des murs des bungalows de la piscine (...) '

La résolution 16 a trait aux honoraires du syndic au titre des travaux de rénovation des murs des bungalows et on été fixés à 2% du montant HT des travaux.

Le règlement de copropriété en page 48 définit ainsi les parties privatives:

' Les parties privatives dont chaque co-copropriétaire a la propriété et la jouissance exclusive se composant des locaux compris dans son lot avec tous leurs accessoires, notamment:

- la totalité de la construction de la villa individuelle et des installations intérieures et extérieures, y compris les clôtures non mitoyennes et les portillons,

- la totalité de la construction et des installations intérieures et extérieures du bungalow de piscine'

S'agissant de l'aspect extérieur des bungalows de piscine, le même règlement précise en page 55 que ' L'aspect extérieur des bungalows de piscine par l'adjonction, le retrait ou le remplacement d'un élément quelconque ainsi que les teintes des peintures extérieures, ne pourront être modifiés que par une délibération d'une assemblée générale spéciale des copropriétaires statuant dans les conditions fixées à l'article 49 ci-après'.

Enfin en pages 3 et 4 du cahier des charges, il est instauré un paragraphe ' Harmonie de l'ensemble immobilier' stipulant que ' Les travaux de réfection et d'entretien extérieurs seront exécutés à l'initiative de chaque copropriétaire. Cependant une assemblée générale spéciale pourra imposer la fréquence de ces travaux. Tout remplacement partiel ou total d'un élément contribuant à l'harmonie de l'ensemble devra être effectué avec un élément de même forme, de même dimension et constitué des mêmes matériaux que ceux d'origine.'

Il s'ensuit que si les bungalows de piscine constituent des parties privatives, l'assemblée générale peut décider de la modification de leur aspect extérieur et imposer la fréquence des travaux.

L'application de l'article 9 de la loi du 10 juillet 1965, chaque copropriétaire use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne pas porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires, ni à la destination de l'immeuble. Il n'en demeure pas moins que si les circonstances l'exigent et à condition, que l'affectation, la consistance ou la jouissance des parties privatives dans son lot ne soient pas altérés de manière durable, les copropriétaires ne peuvent pas faire obstacle à l'exécution, même à l'intérieur de ses parties privatives, des travaux régulièrement et expressément décidés par l'assemblée générale en vertu notamment du II a de l'article 24 de la loi du 10 juillet 1965.

En l'espèce, les travaux de rénovation des murs des bungalows étaient nécessaires à la conservation de l'immeuble et en ce qu'ils touchaient à l'aspect extérieur de cette construction ils ont été valablement adoptés à la majorité de l'article 24 susvisé et conformément au dispositions du règlement de copropriété.

Mme [C], qui considère que de tels travaux auraient dû être adoptés à l'unanimité, n'indique pas en quoi une telle décision a pour conséquence de lui imposer une modification de la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu'elles résultent du règlement de copropriété.

Elle sera donc débouté de sa demande d'annulation de la résolution 15 et par voie de conséquence de la résolution 16 qui n'est que la conséquence de la première.

Le jugement sera ainsi confirmé en toutes ses dispositions.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

La cour statuant, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Grasse déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne [R] [C] à payer au syndicat des copropriétaires LES JARDINS DE POMONE la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne [R] [C] aux dépens de la procédure d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/19940
Date de la décision : 06/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-06;19.19940 ?
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