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30/03/2023 | FRANCE | N°23/00051

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-11 ho, 30 mars 2023, 23/00051


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Hospitalisation sans consentement

1-11 HO





ORDONNANCE

DU 30 MARS 2023



N° 2023/0051







Rôle N° RG 23/00051 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLA3O







[Y] [H]





C/



LE PREFET - ARS (AGENCE NATIONALE DE LA SANTE

LA PROCUREURE GENERALE

LE DIRECTEUR DE L'HOPITAL DE [Localité 8]























Copie adressée :

par courriel le

:

30 Mars 2023

à :

-Le patient

-Le directeur

-L'avocat

-Le préfet

-Le MP

-JLD HO. Marseille















Décision déférée à la Cour :



Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 21 Mars 2023 enregistrée au répertoi...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Hospitalisation sans consentement

1-11 HO

ORDONNANCE

DU 30 MARS 2023

N° 2023/0051

Rôle N° RG 23/00051 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLA3O

[Y] [H]

C/

LE PREFET - ARS (AGENCE NATIONALE DE LA SANTE

LA PROCUREURE GENERALE

LE DIRECTEUR DE L'HOPITAL DE [Localité 8]

Copie adressée :

par courriel le :

30 Mars 2023

à :

-Le patient

-Le directeur

-L'avocat

-Le préfet

-Le MP

-JLD HO. Marseille

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 21 Mars 2023 enregistrée au répertoire général sous le n°2023/2855.

APPELANT

Monsieur [Y] [H]

né le 31 Janvier 1991

demeurant [Adresse 1] actuellement hospitalisé au centre hospitalier [2] à [Localité 5]

Comparant en personne, assisté de Me Pauline RHENTER, avocat au barreau de Marseille,

INTIME :

Monsieur LE PREFET - ARS (AGENCE NATIONALE DE LA SANTE,

demeurant [Adresse 4]

Non comparant

ETABLISSEMENT D'HOSPITALISATION :

Monsieur LE DIRECTEUR DE L'HOPITAL [2],

sis [Adresse 3]

Non comparant

PARTIE JOINTE :

Madame LA PROCUREURE GÉNÉRALE PRÈS LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Cour d'appel d'Aix-en-Provence. [Adresse 6]

Non comparante, ayant déposé des réquisitions écrites dont il a été donné connaissance aux parties présentes à l'audience

*-*-*-*-*

DÉBATS

L'affaire a été débattue le 30 mars 2023, en audience publique, devant Madame Catherine LEROI, Conseillère, déléguée par ordonnance du premier président, en application des dispositions de l'article L.3211-12-4 du code de la santé publique,

Greffier lors des débats : Madame Michèle LELONG, greffière,

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 mars 2023.

ORDONNANCE

Réputé contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 30 mars 2023.

Signée par Madame Catherine LEROI, Conseillère et Madame Michèle LELONG, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire,

****************

RAPPEL DE LA PROCÉDURE

M. [Y] [H] a fait l'objet le 10 mars 2023 d'une admission en soins psychiatriques et en hospitalisation complète au sein du centre hospitalier [2] à [Localité 5] dans le cadre des articles L3213-1 et suivants du code de la santé publique, au vu d'un certificat médical daté du même jour et sur décision du maire de [Localité 5], confirmée par arrêté préfectoral du 10 mars 2023 alors qu'il avait été interpellé, en état d'agitation, déambulant dans la rue avec une arme blanche à la main.

Par arrêté du 14 mars 2023, le préfet des Bouches du Rhône a maintenu la mesure d'hospitalisation complète.

Par ordonnance rendue le 21 mars 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Marseille , saisi dans le cadre du contrôle obligatoire prévu aux articles L3211-12-1 et suivants du même code, a rejeté les exceptions de nullité soulevées par le conseil de M. [Y] [H] et dit n'y avoir lieu à ordonner la mainlevée de l'hospitalisation complète de l'intéressé.

Par lettre reçue et enregistrée le 24 mars 2023 au greffe de la chambre de l'urgence, M. [Y] [H] a interjeté appel de la décision précitée.

Le ministère public a conclu par écrit en date du 28 mars 2023 à la confirmation de la décision querellée.

A l'audience du 30 mars 2023, M. [Y] [H] a comparu et déclaré : ' j'ai fait ce recours parce que ça été une leçon, j'ai ma maman, mon papa, j'ai trois enfants. Je vois souvent les enfants, je vis chez ma maman. Elle vient de temps en temps me voir à l'hôpital. J'ai compris que mon plus gros malaise, c'est le cannabis, je fumais beaucoup surtout depuis ma séparation. Je suis content de mon traitement : je le supporte bien. C'est Mme [F] qui me suivait au CMP avant d'être hospitalisé. Je ne vais pas arrêter quelque chose qui me fait du bien. Je suis allé voir le Dr [F] pour une obligation de soins suite à une altercation avec des agents SNCF. J'y allais régulièrement, tous les mois, au CMP.

A l'hôpital, au début j'étais bien, mais maintenant je me sens enfermé, je ne vois plus ma famille, ça commence à faire long, j'ai une formation, je dois nourrir ma famille. Le 16 mars 2023, je voulais déjà sortir. Oui, le Dr [F] m'a dit ce que je devais faire pour les recours. J'ai fait la promesse de ne plus fumer à mon père, je tiens mes promesses'.

Son avocat a été entendu. Il soutient que les décisions préfectorales d'admission et de maintien en hospitalisation complète de M. [Y] [H] lui ont été notifiées tardivement sans que cela soit justifié par l'état de santé de l'intéressé et que ces irrégularités lui ont causé grief.

Il ajoute que les conditions d'une hospitalisation complète ne sont plus réunies au regard du certificat médical du Dr [W] en date du 29 mars 2023.

Il sollicite en conséquence la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète sous contrainte, les soins continuant de manière libre ou à défaut, avec un programme de soins.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la forme

L'appel, interjeté dans le délai de 10 jours prévu par les articles R 3211-18 et R 3211-19 du code de la santé publique, apparaît recevable.

Le juge des libertés et de la détention a statué dans le délai prévu à l'article L 3211-12-1 1° du même code.

Sur le fond

M. [Y] [H] a fait l'objet d'une hospitalisation à temps complet sans son consentement dans les circonstances ci-dessus précisées, les conditions de l'hospitalisation complète étant énumérées à l'article L 3213-1 du code de la santé publique, selon lesquelles l'intéressé doit présenter des troubles mentaux qui nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public.

Le dossier comporte les certificats médicaux suivants, par la loi :

- le certificat médical initial établi le 10 mars 2023 par le Dr [B], psychiatre au service des urgences de l'hôpital de la [7], ayant examiné l'intéressé sur réquisition, dans le cadre d'une mesure de garde à vue et constatant un contact de mauvaise qualité, une méfiance, une hostilité et une réticence à l'entretien, la verbalisation d'un sentiment de persécution dans son quartier et de la nécessité de se protéger avec un couteau, une tension interne très importante, un contrôle pulsionnel altéré et une irritabilité, cet état nécessitant une observation en service d'hospitalisation à temps complet et le comportement de l'intéressé constituant un danger imminent pour la sûreté des personnes ;

- le certificat médical de 24 heures rédigé le 10 mars 2023 par le Dr [E] relevant la persistance d'un contact de mauvaise qualité, comme la nuit précédente, un refus de l'entretien, la négation des troubles du comportement, une rationalisation de l'altercation avec la police, une tension interne toujours très importante et une irritabilité rendant nécessaire la poursuite de l'hospitalisation à temps complet ;

- le certificat médical de 72 heures rédigé le 12 mars 2023 par le Dr [F] faisant état d'une compliance aux soins, d'un respect du cadre, apaisé par le traitement, d'un comportement calme et adapté, d'une reconnaissance partielle des idées de persécution avec un mécanisme interprétatif, d'une critique d'un comportement inadapté concernant le fait de se balader dans la rue avec une arme blanche et de la nécessité de poursuivre les soins afin de s'assurer de la bonne adhésion à la prise en charge avant de lever la mesure;

- le certificat médical établi le 15 mars 2023 par le Dr [F] pour transmission au juge des libertés la détention reprenant les mêmes observations mais faisant état d'une compliance partielle aux soins justifiant la poursuite de la mesure d'hospitalisation ;

- et enfin le certificat médical de situation délivré le 29 mars 2023 par le Dr [W] relevant la compliance et la reconnaissance de ses troubles par le patient, une rationalisation des idées persécutrices et de leur mécanisme interprétatif autour d'une intoxication cannabique dont les effets pathologiques semblent avoir été mesurés, une efficacité du traitement, l'absence de transgression du cadre et le maintien de la mesure jusqu'à avis du médecin traitant.

Il n'est pas contesté que la décision préfectorale d'admission en soins psychiatriques et en hospitalisation complète au sein du centre hospitalier [2] du 10 mars 2023 a été notifiée à l'intéressé le 14 mars 2023 et que la décision du préfet décidant de la forme de la prise en charge en hospitalisation complète du 14 mars 2023 a été notifiée le 16 mars 2023 au patient.

L'article L.3211-3 du code de la santé publique prévoit qu'avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état et qu'en outre, toute personne faisant l'objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale est informée :

a) Le plus rapidement possible et d'une manière appropriée à son état, de la décision d'admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;

b) Dès l'admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l'article L. 3211-12-1.

L'article L3216-1 du code de la santé publique dispose que le juge des libertés et de la détention connaît des contestations mentionnées au premier alinéa du présent article dans le cadre des instances introduites en application des articles L. 3211-12 et L. 3211-12-1 et que dans ce cas, l'irrégularité affectant une décision administrative mentionnée au premier alinéa du présent article n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet.

En l'occurrence, il résulte de la lecture des certificats médicaux susvisés et de l'amélioration de l'état du patient constatée à compter du 12 mars 2023 (mention d'un comportement calme et adapté et d'une compliance aux soins) qu'à cette date , M. [Y] [H] était en état de recevoir notification de la décision d'admission du 10 mars 2023 et que la décision de maintien en admission du 14 mars 2023 pouvait lui être notifiée le jour même au lieu du 16 mars 2023, aucune mention figurant dans les notifications ne faisant état de circonstances insurmontables ayant justifié qu'il y soit différé.

Néanmoins, il résulte des certificats médicaux de 24 et 72 heures établis respectivement les 10 et 12 mars 2023 que le médecin rédacteur a, à chaque fois, informé M. [Y] [H] de ses droits, voies de recours et garanties, ce que l'intéressé confirme à l'audience.

Dès lors, l'existence d'une atteinte aux droits de M. [Y] [H] résultant du caractère tardif des décisions préfectorales d'admission et de maintien en hospitalisation complète, justifiant la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète, n'est pas caractérisée.

La mainlevée de l'hospitalisation ne peut être prononcée sur ce fondement.

Toutefois, il ressort du certificat médical délivré le 29 mars 2023 par le Dr [W] relevant la compliance et la reconnaissance de ses troubles par le patient, une rationalisation des idées persécutrices et de leur mécanisme interprétatif autour d'une intoxication cannabique dont les effets pathologiques semblent avoir été mesurés, une efficacité du traitement, l'absence de transgression du cadre, une disparition, grâce au traitement médical, des troubles présentés, ne justifiant plus le maintien de la mesure d'hospitalisation complète. Ce certificat corrobore le constat déjà effectué le 15 mars 2023 par le Dr [F] médecin ayant suivi M. [H] au CMP, d'un comportement calme et adapté, d'une reconnaissance partielle des idées de persécution avec un mécanisme interprétatif, d'une critique d'un comportement inadapté concernant le fait de se balader dans la rue avec une arme blanche et de la nécessité de poursuivre les soins.

Il convient donc d'ordonner la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète.

Cette décision sera toutefois assortie d'un effet différé afin de permettre le cas échéant, l'établissement d'un programme de soins en application de l'article L.3122-2-1 du code de la santé publique, au regard de la gravité des troubles initialement présentés et la nécessité de poursuivre des soins en extérieur résultant des termes des certificats médicaux susvisés.

Les dépens seront laissés à la charge du Trésor Public en application de l'article R.93-2° du code de procédure pénale.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision réputée contradictoire.

Déclarons recevable l'appel formé par M. [Y] [H].

Infirmons la décision déférée et statuant à nouveau ;

Déclarons la procédure irrégulière ;

Disons qu'à défaut de justifier d'une atteinte aux droits de M. [Y] [H], les irrégularités affectant la procédure ne justifient pas la mainlevée de la mesure ;

Constatons toutefois qu'il n'est plus justifié de la persistance de troubles mentaux nécessitant des soins et compromettant la sûreté des personnes ou portant atteinte, de façon grave, à l'ordre public ;

Ordonnons en conséquence la mainlevée de la mesure d'hospitalisation sous contrainte ;

Différons cependant la prise d'effet de la mainlevée de 24 heures après notification de la présente décision afin qu'un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi en application du II de l'article L. 3211-2-1 du code de la santé publique ;

Laissons les dépens à la charge du Trésor public.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-11 ho
Numéro d'arrêt : 23/00051
Date de la décision : 30/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-30;23.00051 ?
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