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23/03/2023 | FRANCE | N°19/18747

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 23 mars 2023, 19/18747


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 23 MARS 2023

oa

N° 2023/ 124













Rôle N° RG 19/18747 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFIWK







[O] [I]





C/



COMMUNE DE [Localité 12]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SCP MAGNAN - ANTIQ



SELARL D'AVOCATS ARNAULT CHAPUIS













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES BAINS en date du 09 Octobre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00731.





APPELANT



Monsieur [O] [I]

né le 17 Février 1944 à [Localité 10] (13)

de nationalité Française, demeurant [Adresse 14]



re...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 23 MARS 2023

oa

N° 2023/ 124

Rôle N° RG 19/18747 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFIWK

[O] [I]

C/

COMMUNE DE [Localité 12]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP MAGNAN - ANTIQ

SELARL D'AVOCATS ARNAULT CHAPUIS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES BAINS en date du 09 Octobre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00731.

APPELANT

Monsieur [O] [I]

né le 17 Février 1944 à [Localité 10] (13)

de nationalité Française, demeurant [Adresse 14]

représenté par Me Pascal ANTIQ de la SCP MAGNAN - ANTIQ, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE, assisté de Me Frédéric VOLPATO de la SCP SCHREIBER-FABBIAN-VOLPATO, avocat au barreau de HAUTES-ALPES

INTIME

Commune de [Localité 12] dont le siège est sis en son Hôtel de Ville - [Adresse 11], à [Localité 12], prise en la personne de son Maire en exercice, domicilié en cette qualité audit Hôtel de Ville

représentée par Me Arnault CHAPUIS de la SELARL D'AVOCATS ARNAULT CHAPUIS, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 24 Janvier 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Olivier ABRAM,Vice Président placé , a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller , faisant fonction de Président de chambre,

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM,Vice Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Mars 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Mars 2023,

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre, et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE:

[O] [I] est propriétaire, seul ou en indivision, des parcelles cadastrées section C n°[Cadastre 9], [Cadastre 2], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7] sises Hameau de [Localité 15] sur la Commune de [Localité 12];

Compte tenu de travaux conduits par la Commune de [Localité 12] affectant une voie les traversant, une expertise était ordonnée le 7 septembre 2017, afin de déterminer si ces parcelles avaient été dégradées, et son rapport déposé le 30 mai 2018;

Par exploit d'huissier en date du 15 juin 2017, [O] [I] a fait assigner la Commune de [Localité 12] devant le Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES-BAINS afin d'obtenir de :

Déclarer [O] [I] recevable et bien fondé en ses prétentions ;

Dire et juger que [O] [I] a acquis par prescription trentenaire la propriété de l'ancien chemin rural qui reliait l'[Localité 13] au [Localité 15] sur la parcelle cadastrée à la section C n°[Cadastre 9] sise sur la Commune de [Localité 12] ;

Dire et juger que [O] [I] ainsi que [Z] [L], [T] [I], [F] [K], [W] [L] et [D] [L] ont acquis par prescription trentenaire la propriété de l'ancien chemin rural qui reliait l'[Localité 13] au [Localité 15] sur les parcelles cadastrées à la section C n°[Cadastre 1], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7], sises sur la Commune de [Localité 12] et dont ils sont indivisaires ;

Dire et juger légale et valide la délibération du Conseil Municipal de la Commune de [Localité 12] en date du 21 août 1981 qui a prononcé la désaffectation de l'ancien chemin rural qui reliait l'[Localité 13] au [Localité 15] ;

Dire et juger que la Commune de [Localité 12] a commis une voie de fait en annulant à tort pour inexistence la délibération du Conseil Municipal de la Commune de [Localité 12] en date du 21 août 1981, s'accaparant ainsi la propriété acquise par prescription trentenaire par [O] [I] ainsi que par [Z] [L], [T] [I], [F] [K], [W] [L] et [D] [L] sur l'ancien chemin rural qui reliait l'[Localité 13] au [Localité 15] sur les parcelles cadastrées à la section C n°[Cadastre 9], [Cadastre 2], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7], sises sur la Commune de [Localité 12] ;

Dire et juger que la Commune de [Localité 12] doit réparation à [O] [I] ainsi qu'à [Z] [L], [T] [I], [F] [K], [W] [L] et [D] [L] au titre des dommages et dégradations occasionnés sur les parcelles cadastrées à la section C n°[Cadastre 9], [Cadastre 2], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7], sises sur la Commune de [Localité 12] ;

Condamner en conséquence, la Commune de [Localité 12] à indemniser en totalité [O] [I] tant en sa qualité de propriétaire de la parcelle cadastrée à la section C n°[Cadastre 9] qu'en sa qualité de propriétaire indivis des parcelles cadastrées à la section C n°[Cadastre 2], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7], sises sur la Commune de [Localité 12] ;

Condamner la Commune de [Localité 12] à payer une indemnité de 5 000 euros à [O] [I] en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP MAGNAN ANTIQ sur son affirmation de droit;

Par jugement en date du 9 octobre 2019, le Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES-BAINS a, notamment:

Écarté la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité de [O] [I] à agir en qualité d'indivisaire des parcelles C [Cadastre 2], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7] ;

Débouté [O] [I] de sa revendication par prescription de la propriété du chemin rural dit de l'[Localité 13] au [Localité 15] sur sa parcelle cadastrée C [Cadastre 9] à [Localité 12] ;

Débouté [O] [I] de sa revendication par prescription de la propriété du chemin rural dit de l'[Localité 13] au [Localité 15] sur les parcelles indivises cadastrées C [Cadastre 2], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7] ;

Condamné [O] [I] à payer à la Commune de [Localité 12] la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Rejeté toutes autres demandes des parties à l'instance ;

Condamné [O] [I] aux dépens de l'instance et à ceux de l'instance en référé comprenant le coût de l'expertise judiciaire ;

Par déclaration en date du 9 octobre 2019, [O] [I] a relevé appel de cette décision;

Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 mai 2022, [O] [I] sollicite de:

Vu l'article 544 du Code civil,

Vu les articles L. 161-1 et suivants du Code rural,

DECLARER Monsieur [O] [I] recevable et bien fondé en son appel;

REFORMER le Jugement du Tribunal de Grande Instance de DIGNE LES BAINS du 9 octobre 2019 en ce qu'il a rejeté la demande de [O] [I] de voir reconnaître l'acquisition de celui-ci par usucapion de l'ancien chemin rural qui reliait l'[Localité 13] au [Localité 15] sur les parcelles cadastrées à la section C n°[Cadastre 9], [Cadastre 2], [Cadastre 4] , [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7] sises sur la Commune de [Localité 12] (05);

DIRE ET JUGER que [O] [I] a acquis par prescription trentenaire la propriété de l'ancien chemin rural qui reliait l'[Localité 13] au [Localité 15] sur la parcelle cadastrée à la section C n°[Cadastre 9] sise sur la Commune de [Localité 12] (05);

DIRE ET JUGER que [O] [I] ainsi que [Z] [L], [T] [I], [F] [K], [W] [L] et [D] [L] ont acquis par prescription trentenaire la propriété de l'ancien chemin rural qui reliait l'[Localité 13] au [Localité 15] sur les parcelles cadastrées à la section C n°[Cadastre 2], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7], sises sur la Commune de [Localité 12] (05) et dont ils sont indivisaires;

DIRE ET .JUGER que la Commune de [Localité 12] a commis une voie de fait en s'accaparant ainsi la propriété acquise par prescription trentenaire par [O] [I] ainsi que par [Z] [L], [T] [I], [F] [K], [W] [L] et [D] [L] sur l'ancien chemin rural qui reliait l'[Localité 13] au [Localité 15] sur les parcelles cadastrées à la section C n°[Cadastre 9], [Cadastre 2], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7], sises sur la Commune de [Localité 12] (05);

DIRE ET JUGER que la Commune de [Localité 12] doit réparation à [O] [I] ainsi qu'à [Z] [L], [T] [I], [F] [K], [W] [L] et [D] [L] au titre des dommages et dégradations occasionnés sur les parcelles cadastrées à la section C n°[Cadastre 9], [Cadastre 2], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7], sises sur la Commune de [Localité 12] (05);

CONDAMNER, en conséquence, la Commune de [Localité 12] à indemniser en totalité [O] [I] tant en sa qualité de propriétaire de la parcelle cadastrée à la section C n°[Cadastre 9] qu'en sa qualité de propriétaire indivis des parcelles cadastrées à la section C n°[Cadastre 2], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7], sises sur la Commune de [Localité 12] (05);

REJETER l'intégralité des prétentions de la Commune de [Localité 12];

CONDAMNER la Commune de [Localité 12] à payer une indemnité de 5 000 € à [O] [I] en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens comprenant les honoraires d'expertise judiciaire, dont distraction au profit de la SCP MAGNAN ANTIQ sur son affirmation de droit;

Il précise que le chemin en cause était délaissé depuis le milieu des années 70 par la Commune de [Localité 12], cette propriété communale n'étant plus du tout entretenue ni ouverte au public, mais exploitée par les propriétaires riverains qui en sont devenus propriétaires, et par [W] [I], son père, qui y avait édifié une rampe gravillonnée avec escalier ne pouvant supporter le passage des véhicules;

Il ajoute que lorsqu'il s'est agi de répertorier les chemins constituant la voirie communale, le chemin rural qui reliait l'[Localité 13] au [Localité 15] n'a pas été mentionné, preuve de sa désaffectation par la Commune de [Localité 12], également confirmée par l'expert, qui indique qu'il s'agit d'un sentier inaccessible à tout véhicule, et par la délibération non contestée du 21 août 1981, relative au tracé des itinéraires de randonnées des chemins communaux et ruraux, qui supprime le trajet de l'[Localité 13] au [Localité 15];

Il soutient que l'absence d'opposition de la Commune lorsque ont été portés à sa connaissance les obstacles mis sur cette voie confirme cet ensemble, et que la circulation limitée d'une seule catégorie de personnes n'est évidemment pas suffisante pour faire présumer l'affectation à l'usage du public ;

Par conclusions notifiées par voie électronique le 19 mai 2020, la Commune de [Localité 12] sollicite de :

Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de DIGNE LES BAINS ;

Dire et juger que le chemin en litige est affecté à l'usage public, entretenu par la Commune de [Localité 12] et surveillé par celle-ci ;

Dire et juger que la Commune de [Localité 12] est fondée à invoquer la présomption légale de l'article L 161-2 du Code Rural ;

Dire et juger que [O] [I] ne justifie pas d'une acquisition par prescription trentenaire au sens des dispositions de l'article 2261 du code civil ;

En conséquence, à titre principal, débouter [O] [I] de l'intégralité de ses demandes;

A titre subsidiaire,

Dire et juger que le chemin doit être qualifié de chemin d'exploitation et en conséquence débouter [O] [I] de ses demandes ;

A titre infiniment subsidiaire, si par impossible la Cour retient une propriété du chemin par prescription trentenaire au profit de [O] [I],

Dire et juger que la Commune de [Localité 12] bénéficiera d'un droit de passage sur le chemin pour accéder aux parcelles dont elle est propriétaire C [Cadastre 3] et [Cadastre 8] ;

En toutes hypothèses,

Condamner [O] [I] à verser à la Commune de [Localité 12] une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel, comprenant notamment les frais de l'expertise judiciaire et dont distraction au profit de Me Arnault CHAPUIS Avocat sur son affirmation de droit;

Elle expose que le chemin en cause constitue un chemin rural qui dessert des parcelles en amont, dont certaines lui appartiennent, figurant comme tel sur les plans cadastraux, et utilisé par des chasseurs, promeneurs et autres;

Elle ajoute que le 26 août 1981 le conseil municipal n'a pas décidé la désaffection du chemin rural allant de l'[Localité 13] au [Localité 15], contrairement à ce que mentionne un document daté du même jour et signé seulement par [W] [I], maire de l'époque et auteur de l'appelant, et ajoute que cet acte a été contesté à l'occasion d'une procédure pénale et qu'elle a décidé, dans sa délibération en date du 29 mai 2017 validée le 28 mars 2019 par le Tribunal Administratif de MARSEILLE, qu'il s'agissait d'un acte inexistant ;

Elle en conclut qu'en l'état de l'affectation du chemin à l'usage du public (utilisation du chemin par les chasseurs et promeneurs), de l'entretien du chemin par la Commune en juillet 2016, et de sa surveillance du chemin, il y a lieu de retenir qu'il s'agit bien d'un chemin rural affecté à l'usage du public, des sorte que la présomption légale instituée par l'article L161-3 du Code rural trouve à s'appliquer ;

Elle soutient en outre que la preuve d'une prescription acquisitive n'est pas rapportée, compte tenu notamment de ce que l'appelant n'est propriétaire des parcelles adjacentes que depuis décembre 2001, et de ce qu'il n'est pas rapporté qu'il ait entretenu ce chemin;

Elle demande le cas échéant de retenir qu'il s'agit d'un chemin d'exploitation, ou, à tout le moins, de lui accorder un droit de passage, et indique que les travaux qu'elle a réalisés n'ont aucunement dégradé les parcelles de l'appelant;

L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 janvier 2023;

SUR CE:

Il ressort du rapport d'expertise déposé le 30 mai 2018 que le chemin en cause prend naissance dans le hameau de l'[Localité 13], où il débute par quelques marches, puis monte rapidement à travers bois, cette partie de quelques centaines de mètres étant inaccessible à tout véhicule et encombrée de végétation et de troncs d'arbres couchés, puis permet d'accéder à une partie où sa largeur est de 3 à 4 mètres, objet des travaux à l'origine de la demande d'expertise;

[O] [I] soutient avoir acquis par prescription la propriété de ce chemin, à titre personnel, pour la partie située sur la parcelle cadastrée section C n°[Cadastre 9], et en tant qu'indivisaire pour les parties situées sur les parcelles section C n°[Cadastre 2], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7];

Il se prévaut à cette fin que son auteur a fait édifier à la naissance du chemin un escalier gravillonné empêchant le passage de véhicules, qu'il y a coupé des arbres, et qu'il en a empêché l'accès;

Quant au premier acte, il résulte effectivement des constatations de l'expert que cet aménagement est réel, sur la surface contiguë à la maison propriété de [O] [I] (C n°[Cadastre 9]), et qu'il indique habiter;

Pour autant, rien ne vient étayer la datation de celui-ci, l'attestation produite par l'appelant indiquant qu'en 1976/1977 la rampe était gravillonnée et que le père de [O] [I] lui avait demandé de ne pas la monter en voiture;

Cela n'établit pas que cet aménagement ait été fait par les auteurs de [O] [I], ni que des marches étaient présentes à cette date, puisque dans cette hypothèse, son père n'aurait pas eu à préciser qu'il ne fallait pas les gravir en voiture;

Par ailleurs, cela est contredit par le constat d'huissier établi par la commune le 7 avril 2015 suite à la coupe des arbres, où la photographie du haut de la rampe gravillonée figurant en page 9 ne montre aucune marche ;

Quant à la coupe des arbres et au fait de s'être opposé au passage d'utilisateurs de ce chemin, cela ne caractérise nullement une possession paisible, mais une volonté de s'approprier par la force l'usage exclusif d'un chemin en s'opposant à son utilisation publique;

Cela est confirmé par le constat d'huissier suscité, qui constate que l'objet de cette coupe n'était pas d'entretenir le passage mais de l'empêcher, les arbres et les branches sectionnés ayant été placés en travers du chemin afin de l'obstruer,;

Les témoignages versés confirment cette volonté de [O] [I] d'interdire le passage à compter de l'hiver 2014, [J] [M] précisant que celui-ci lui a été interdit par l'appelant, [B] [P] précisant qu'en passant sur le chemin à hauteur de la maison de [O] [I], celui-ci et son épouse lui ont interdit de le faire « manu militari », et [Z] [L] soulignant qu'après que lui ait été interdit le passage, une « violente altercation » s'en est suivie;

Il en ressort également qu'avant cette période, il était possible de passer sur le chemin certes à pied, mais également en moto, en quad et en voiture;

Quoiqu'il en soit, aucun de ces actes ne manifeste une possession continue, publique et non équivoque, et surtout pas paisible;

Au contraire, il ressort des pièces versées par l'appelant lui-même qu'il n'a jamais entretenu ce chemin, sa fille comme son fils indiquant dans leurs attestations respectives en date des 22 et 13 août 2020 qu'ils n'ont jamais assisté à un entretien de ce sentier que ce soit par les services municipaux ou par ses grands-parents ou leur père;

Or, ils sont nés en 1966 et en 1977;

Par voie de conséquence, les conditions nécessaires pour que [O] [I] puisse se prévaloir d'une prescription acquisitive sur ce chemin ne sont pas réunies;

Au surplus, le défaut d'entretien de ce chemin par l'intimée jusqu'à la réalisation des travaux à l'origine de l'instauration de la mesure d'expertise n'est pas de nature à compenser l'absence d'actes de possession conformes aux prescriptions légales, et à entrainer de ce simple fait le transfert de la propriété de ce chemin à ses riverains, et, singulièrement, à l'appelant ;

En effet, le fait d'avoir laissé se construire la rampe d'accès, dont la date demeure incertaine, ou de ne pas avoir engagé des poursuites du fait des agissements de l'appelant, ne s'analysent pas comme une reconnaissance ou une acceptation de ses droits, mais, au mieux, comme une tolérance, alors en outre que dès que la coupe des arbres a été réalisée, la commune a diligenté un huissier pour la faire constater, signe qu'elle continuait de surveiller ce chemin;

Il apparaît d'autre part que le chemin dont s'agit n'a pas cessé d'être utilisé par le public, qu'il s'agisse de chasseurs ou de promeneurs, jusqu'à ce que ceux-ci ne puissent plus le faire, du fait des obstacles posés par l'appelant, ou de sa véhémence;

Il est sur ce point sans incidence que des voitures ne puissent y circuler aujourd'hui sur tout ou partie, à supposer cette circonstance acquise, comme il est indifférent que ce chemin fasse doublon avec un autre ou que la commune ait décidé de le supprimer de la liste des chemins de randonnée par une délibération en date du 21 août 1981, ces états de fait ou cette décision n'empêchant pas que le chemin demeure utilisé par le public et affecté à son usage;

Cette dernière décision doit par ailleurs être remise dans son contexte, puisqu'elle a été prise le même jour que la prétendue délibération par laquelle avait été votée la désaffection du chemin en débat lorsque [W] [I] était maire, désormais réputée inexistante par l'effet d'une nouvelle délibération de la commune en date du 29 mai 2017 dont la légalité a été reconnue par le jugement du Tribunal Administratif de MARSEILLE en date du 28 mars 2019, et qui souligne l'intérêt de l'élu à cette désaffection, compte tenu de la position de sa propriété par rapport audit chemin;

Enfin, la seule circonstance que ce chemin ne soit pas classé en voie communale est consubstantielle à son statut de chemin rural, suffisamment caractérisé par son affectation au public, sa surveillance et son entretien par la commune;

Ainsi, les demandes de [O] [I] ne peuvent qu'être rejetées;

Ce rejet comprend celui des demandes principales de l'appelant relatives à sa revendication de la propriété du chemin, comme celui de ses demandes tendant à obtenir qu'il soit dit que la commune lui doit réparation pour les voies de fait commises sur ce chemin, celui-ci ne lui appartenant pas;

Le jugement entrepris sera donc confirmé, par adoption de motifs;

[O] [I], qui succombe, supportera les dépens d'appel;

L'équité et la situation économique des parties justifient qu'il soit condamné à payer à la Commune de [Localité 12] la somme de 4 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS:

La Cour, statuant contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe;

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions soumises à la Cour;

Y AJOUTANT:

CONDAMNE [O] [I] à payer à la Commune de [Localité 12] représentée par son maire en exercice la somme de 4 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE [O] [I] aux dépens d'appel, distraits au profit de Me Arnault CHAPUIS ;

Le greffier Le conseiller pour le président empêché


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/18747
Date de la décision : 23/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-23;19.18747 ?
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