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23/03/2023 | FRANCE | N°19/15617

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 23 mars 2023, 19/15617


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 23 MARS 2023

oa

N° 2023/ 121













N° RG 19/15617 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BE7WL







[E] [F]





C/



[L] [O]

[N] [D] [Z] [B] épouse [O]



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SCP BUVAT-TEBIEL



SELAS LLC ET ASSOCIES
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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 26 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/07548.



APPELANT



Monsieur [E] [F]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/012411 du 26/11/2021 accordée par le...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 23 MARS 2023

oa

N° 2023/ 121

N° RG 19/15617 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BE7WL

[E] [F]

C/

[L] [O]

[N] [D] [Z] [B] épouse [O]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP BUVAT-TEBIEL

SELAS LLC ET ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 26 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/07548.

APPELANT

Monsieur [E] [F]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/012411 du 26/11/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

né le 21 Avril 1967 à [Localité 5], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Layla TEBIEL de la SCP BUVAT-TEBIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Grégory KERKERIAN de la SELARL SELARL GREGORY KERKERIAN ET ASSOCIE, avocat au barreau de DRAGUIGNAN , plaidant

INTIMES

Monsieur [L] [O]

né le 12 Septembre 1947 à WASTERKINGN - SUISSE, demeurant [Adresse 7]

représenté par Me Philippe CAMPOLO de la SELAS LLC ET ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

Madame [N] [D] [Z] [B] épouse [O]

née le 20 Octobre 1948 à [Localité 4], demeurant [Adresse 7]

représentée par Me Philippe CAMPOLO de la SELAS LLC ET ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Olivier ABRAM, Vice Président placé chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de président de chambre

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM, Vice Président placé

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Mars 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Mars 2023

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE:

[E] [F] et [K] [M] étaient propriétaires ensemble d'une maison à usage d'habitation située sur un fonds sis [Adresse 1] à [Localité 6], détenu désormais par [E] [F] seul, contigu à l'Est à un fonds dont [L] [O] et [N] [B] épouse [O] sont propriétaires sis [Adresse 3] et qui le surplombe;

Afin de déterminer d'éventuels désordres, défauts et non-conformité affectant le mur de soutènement séparant le fonds [F] du fonds [O], une expertise était ordonnée le 7 octobre 2015, et son rapport déposé le 7 décembre 2016;

Par exploit d'huissier du 11 octobre 2017, [E] [F] a fait assigner [L] [O] et [N] [B] épouse [O] devant le Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN afin d'obtenir :

L'homologation du rapport d'expertise rendu le 7 décembre 2016;

Constater l'existence d'une servitude au profit du fonds des consorts [O];

Constater la nécessité d'entreprendre des ouvrages de canalisation d'eaux usées et pluviales provenant du fonds des consorts [O] et se déversant sur le fonds de Monsieur [F];

Constater l'aggravation de la servitude par les consorts [O];

Dire et juger que les consorts [O] devront réaliser à leurs frais tout ouvrage nécessaire à la captation et à la collecte des eaux pluviales provenant à leurs fonds et s'écoulant sur le fonds de Monsieur [F];

Condamner les consorts [O] à verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens;

Par jugement en date du 26 septembre 2019, le Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN, notamment, rejetait toutes les demandes de [E] [F];

Par déclaration en date du 9 octobre 2019, [E] [F] a relevé appel de cette décision;

Par conclusions notifiées par voie électronique le 2 janvier 2023, [E] [F] sollicite de:

Vu les articles 640 et 697 et suivants du code civil,

Vu le Procès-Verbal de constat en date du 4 novembre 2014

Vu le rapport d'expertise judiciaire,

Vu le courrier des époux [O] en date du 1er mars 2015,

Vu que si le fond de Monsieur [F] est bien destiné à recevoir les eaux pluviales du fonds supérieur cela n'autorisait en aucun cas les époux [O] à l'aggraver,

Vu que le mur de soutènement construit par les époux [O] et comportant des barbacanes est de nature à aggraver la servitude d'écoulement des eaux,

Vu le retrait des gouttières par les époux [O] suite à la procédure,

REFORMER le jugement rendu par le Tribunal de grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 26 septembre 2019;

Et statuant à nouveau,

DIRE ET JUGER que la présence de barbacanes dans le mur de soutènement construit par les époux [O] sont de natures à accélérer le débit d'eau et donc à aggraver l'écoulement naturel des eaux pluviales;

DIRE ET JUGER que les époux [O] ont aggravé la servitude naturelle d'écoulement des eaux due par Monsieur [E] [F];

Par conséquent,

CONDAMNER Madame [N] [O] et Monsieur [L] [O] à canaliser les eaux pluviales et de ruissellement en amont sur leur propriété sous astreinte de 100€ par jour de retard;

Subsidiairement,

CONDAMNER Madame [N] [O] et Monsieur [L] [O] à payer à Monsieur [E] [F] la somme de 8000€ correspondant aux travaux préconisés par l'expert judiciaire pour mettre fin au préjudice subi par le fond appartenant à Monsieur [E] [F];

En tout état de cause,

CONDAMNER Madame [N] [O] et Monsieur [L] [O] à payer à Monsieur [E] [F] la somme de 4000€ à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi;

CONDAMNER Madame [N] [O] et Monsieur [L] [O] à payer à Monsieur [E] [F] la somme de 4000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNER Madame [N] [O] et Monsieur [L] [O] aux entiers dépens;

Par conclusions notifiées par voie électronique le 20 janvier 2020, [L] [O] et [N] [B] épouse [O] sollicitent de :

Vu les articles 640 et 641 du Code Civil,

Vu l'article 9 du Code de Procédure Civile,

CONFIRMER la décision rendue 26 septembre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de Draguignan en ce qu'il a :

- Rejeter l'intégralité des demandes de Monsieur [F]

- Condamner Monsieur [F] au paiement de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

Y ajoutant :

CONDAMNER Monsieur [F] au paiement de 3 500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel, qui seront distraits au profit de la SELAS LLC ET ASSOCIES conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile ;

L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 janvier 2023;

SUR CE:

Au préalable, il y a lieu de constater que si les consorts [O] soutiennent que la demande de [E] [F] tendant à obtenir leur condamnation à lui payer des dommages et intérêts serait nouvelle, ils ne demandent pas son irrecevabilité à ce titre dans le dispositif de leurs écritures, mais son rejet;

De cette sorte, il n'y a pas lieu de statuer sur sa recevabilité, et il sera nécessaire de procéder à son examen;

Il résulte de l'article 640 du Code civil que les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l'homme y ait contribué; le propriétaire inférieur ne peut point élever de digue qui empêche cet écoulement; le propriétaire supérieur ne peut rien faire qui aggrave la servitude du fonds inférieur;

Il appartient à celui qui se prévaut de l'aggravation de la servitude d'en établir l'existence;

Il est acquis que le fonds [O] surplombe le fonds [F];

Il ressort en effet de l'expertise judiciaire qu'avant même l'édification du mur en cause le fonds [O] était d'une altitude supérieure au fonds [F], et qu'il existait à cette limite un talus d'une hauteur de 1,57 mètres;

Le mur aujourd'hui édifié est d'une hauteur moyenne de 1,80 mètres, et est percé de barbacanes;

Leur objet est de permettre l'écoulement des eaux afin de les évacuer, et, ainsi, de limiter la pression qu'elles exercent sur le mur;

Du fait même de cette fonction, il ne peut être déduit de la seule présence de ces évacuations une aggravation de l'écoulement, s'agissant au contraire d'une simple canalisation du cours de l'eau ainsi guidée, non de la création d'une quantité d'eau supplémentaire par rapport à la quantité d'eau antérieurement déversée;

L'expert n'a d'ailleurs pas inféré de ces barbacanes l'aggravation de l'écoulement, mais l'aggravation de la vitesse de l'écoulement du fait de la concentration du flux d'eau à travers elles;

Il apparaît surtout qu'en réponse à un dire, l'expert a précisé que les eaux de vidange de la piscine et et les eaux pluviales de la maison sont évacuées sur le réseau communal, de sorte que ces deux constructions ne peuvent en aucun cas être en cause dans l'aggravation alléguée, pas plus que les aménagements de surface, constitués de pavés autobloquants qui laissent les eaux de ruissellement s'infiltrer;

Par ailleurs, il a été relevé à l'expertise que les fonds en cause se trouvaient topographiquement dans un talweg, c'est à dire une ligne joignant les points les plus bas d'une vallée, et étaient en conséquence nécessairement impactés par l'écoulement des eaux du fond du talweg, dont la présence dans la partie basse du fonds [F] d'un caniveau témoignait;

Compte tenu de cet ensemble, il n'apparait pas que soit établie la preuve d'une aggravation de la servitude d'écoulement des eaux pluviales lorsque se sont déroulées les opérations d'expertise, seules contradictoires et opposables aux parties ;

En outre, les éléments repris ci-dessus ne sont pas remis en cause par les éléments de fait produits par l'appelant au soutien de ses allégations;

En effet, non seulement ceux-ci n'ont pas la même autorité ni ne présentent les mêmes garanties que les constatations faites lors de l'expertise judiciaire, mais, surtout, ils font état d'écoulements importants d'eau antérieurs à l'expertise, le premier constat d'huissier étant en date du 4 novembre 2014, et le second, certes en date du 28 novembre 2022, évoquant des fichiers vidéos relatifs à des précipitations survenues le 19 janvier 2014;

D'autre part, il n'apparait pas que le courrier de [L] [O] en date du 1er mars 2015 contienne une reconnaissance de cette aggravation, l'absence de production des documents qui y étaient joints ne permettant pas de le déduire, ni même de comprendre le sens de ce qu'il y est indiqué;

Enfin, le seul fait que l'expert fasse une proposition de travaux à réaliser ne permet pas de rapporter la preuve de l'aggravation, s'agissant d'une proposition visant à traiter l'écoulement naturel des eaux;

Ainsi, la preuve d'une aggravation de la servitude d'écoulement n'étant pas rapportée, la demande d'[E] [F] tendant à obtenir la condamnation des intimés à canaliser les eaux pluviales et de ruissellement sous astreinte ne peut qu'être rejetée, et le jugement entrepris confirmé sur ce point, par adoption de motifs;

Il y aura lieu également de rejeter pour les mêmes raisons la demande de l'appelant tendant à obtenir la condamnation des consorts [O] à lui payer la somme de 8 000 € correspondant aux travaux préconisés par l'expert;

[E] [F] sollicite également la condamnation des consorts [O] à lui payer la somme de 4 000 € compte tenu, d'une part, d'une nuisance de voisinage résultant de la surélévation du mur de soutènement et, d'autre part, de l'écoulement des eaux sortant des barbacanes consécutif à « un empiétement d'environ 50 cm sur la propriété [F] »;

Il ne peut être retenu que la surélévation du mur soit constitutive d'un trouble anormal de voisinage, dès lors que l'expert relève dans le corps de son rapport que le talus auparavant présent était d'une hauteur de 1,57 cm, et que le mur actuel présente une hauteur moyenne de 1,80 cm, cette seule différence de 33 cm étant insuffisante pour caractériser l'anormalité requise, en présence de deux fonds dont l'un était déjà inférieur à l'autre ;

Par ailleurs, l'écoulement des barbacanes n'est pas un empiétement mais l'expression d'une servitude, qui, comme il a été dit, n'a pas été aggravée ;

Les demandes à ce titre seront donc rejetées ;

[E] [F], qui succombe, supportera les dépens d'appel ;

L'équité et la situation économique des parties justifient qu'il soit condamné à payer à [L] [O] et [N] [B] épouse [O] la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS:

La Cour, statuant contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe;

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions;

Y AJOUTANT:

REJETTE les demandes d'[E] [F] tendant à obtenir la condamnation de [L] [O] et [N] [B] épouse [O] à lui payer la somme de 8 000€ au titre des travaux nécessaires à la collectes des eaux de ruissellement, et la somme de 4 000€ à titre de dommages et intérêts ;

CONDAMNE [E] [F] à payer à [L] [O] et [N] [B] épouse [O] la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE [E] [F] aux dépens d'appel, distraits au profit de la SELAS LLC et Associés ;

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/15617
Date de la décision : 23/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-23;19.15617 ?
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