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23/03/2023 | FRANCE | N°18/16032

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-4, 23 mars 2023, 18/16032


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4



ARRÊT AU FOND

DU 23 MARS 2023



N° 2023/

FB/FP-D











Rôle N° RG 18/16032 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDFFM







[R] [V]





C/



SAS STATS ANALYTICS FRANCE





















Copie exécutoire délivrée

le :

23 MARS 2023

à :

Me Alain BADUEL, avocat au barreau D'AIX-EN-

PROVENCE



r>
Me Nathalie KOULMANN, avocat au barreau de NICE









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 06 Septembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01319.





APPELANT



Monsieur [R] [V], demeurant [Adresse 2]


...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 23 MARS 2023

N° 2023/

FB/FP-D

Rôle N° RG 18/16032 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDFFM

[R] [V]

C/

SAS STATS ANALYTICS FRANCE

Copie exécutoire délivrée

le :

23 MARS 2023

à :

Me Alain BADUEL, avocat au barreau D'AIX-EN-

PROVENCE

Me Nathalie KOULMANN, avocat au barreau de NICE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 06 Septembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01319.

APPELANT

Monsieur [R] [V], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Alain BADUEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SAS STATS ANALYTICS FRANCE anciennement dénommée SPORT UNIVERSAL PROCESS ( SUP), demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Nathalie KOULMANN, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 18 Janvier 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Mars 2023.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Mars 2023,

Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

La SAS Stats Analytics France (la société), anciennement dénommée SAS Sport Universal Process (SUP), exerçant sous l'enseigne Prozone, rachetée en 2015 par la société américaine STATS faisant partie du groupe Amisco, exerce une activité de production et d'analyses de statistiques et performances sportives, notamment dans le domaine du football.

M. [V] (le salarié) a été engagé par la société par contrat à durée déterminée du 20 décembre 2013 au 31 juillet 2014, renouvelé jusqu'au 31 décembre 2014, en qualité d'ingénieur commercial, statut cadre, position 2.2, coefficient 130, moyennant une rémunération brute mensuelle fixe de 2 750 euros outre une partie variable constituées de commissions, avec le versement d'une avance mensuelle 900 euros et une régularisation chaque semestre, pour 39 heures.

La relation de travail s'est poursuivie en contrat à durée indéterminée.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseil, sociétés de conseil (Syntec).

La société employait habituellement au moins 11 salariés au moment du licenciement.

Le 27 juin 2016 le salarié a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 11 juillet 2016.

Par lettre du 15 juillet 2016 la société lui a notifié son licenciement pour faute en ces termes :

'Vous avez été engagé à compter du 20 décembre 2013 en qualité de commercial.

Dans cadre vous avez en charge le pilotage commercial de la France, la Belgique et le Maghreb sur le marché professionnel.

Segment de marché :

Pro: clubs, académies, fédérations, agents, joueurs, ligues

Médias : TV, Web, Presse

Vos missions sont ainsi les suivantes =

- Démarchage, prospection commerciale et closing des contrats (négociation formalisation et signature).

- Animation et coordination du réseau d'analystes de la zone concernée

- Définition et formalisation des offres commerciales.

- Participation à la définition des nouveaux produits.

Votre contrat prévoit par ailleurs expressément =

- Un reporting d'interventions et d'avancement chaque fin de semaine.

- Un point de synthèse commerciale chaque fin de mois.

Dans le cadre de vos fonctions vous avez suivi une formation concernant tant la compréhension des produits, l'engagement et le suivi d'une affaire, le développement commercial que la négociation commerciale.

Or, cela fait plusieurs mois que nous constatons de nombreux manquements à vos obligations essentielles =

- Absence totale de reporting et de synthèse commercial (reporting d'activité, compte rendu de visite, compte rendu de réunion, suivi des plans d'action) alors que c'est une exigence contractuelle que nous passons notre temps à vous rappeler et que vous ne daignez la plupart du temps même pas répondre à nos relances !

- Absence de suivi au niveau de l'animation /coordination et planification (pas de  planification, absence de suivi des plans d'action, ... ) alors qu'il s'agit là encore d'une obligation contractuelle clairement stipulée.

- Absence de suivi des nouveaux process de pilotage commercial interne (SF, suivi budgétaire, Deal desk ...)

- Absence de mise en place d'actions commerciales efficace et suivie dans le temps, pas de planification.

- Absence d'action sur la partie media

- Absence de support au marketing (veille concurrence, séminaire)

- Absence de gestion et de négociation de finalisation des contrats, obligeant vos collègues à gérer certains de vos dossiers à votre place.

- Mauvaise formalisation (propositions commerciales, des contrats)

- Mauvaise volonté manifeste quant à la connaissance des produits de la société qui ne

sont donc pas maîtrisés et pas présentés au client, obligeant vos collègues à pallier à vos carences et à perdre du temps.

Ces manquements ont évidemment eu des répercussions sur vos résultats puisque vos objectifs n'ont été atteints ni en 2014/2015, ni en 2015/2016.

Vous avez refusé de nous fournir la moindre explication au sujet de ces manquements lors de notre entretien, nous sommes donc contraints de vous licencier pour faute, votre préavis de trois mois commençant à courir à la première présentation de ce courrier'

Le salarié a saisi le 29 novembre 2016 le conseil de Prud'hommes de Nice d'une demande en licenciement sans cause réelle et sérieuse, de demandes de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages et intérêts pour rupture abusive et vexatoire, de rappel de commission, de remise sous astreinte des documents de fin de contrat rectifiés, d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 6 septembre 2018 le conseil de prud'hommes de Nice a:

- déclaré le licenciement de Monsieur [R] [V] dépourvu de cause réelle et sérieuse.

- condamné la SAS S.U.P. prise en la personne de son représentant légal en exercice, à payer à Monsieur [R] [V] les sommes suivantes:

- 30.000€ (Trente mille euros) au titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

- 1.500 (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du Code de procédure Civile;

- débouté Monsieur [R] [V] du surplus de ses demandes;

- débouté la SAS S.U.P. de ses demandes reconventionnelles au titre du remboursement d'un trop perçu et au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

- dit n'y avoir lieu ni à astreinte, ni à exécution provisoire.

- condamné la SAS S.U.P. aux dépens;

Le salarié a interjeté appel du jugement par acte du 1er octobre 2018 énonçant :

'Appel du jugement n° 18/00127 rendu le 6 septembre 2018 par la section encadrement du Conseil de prud'hommes de Nice en ce qu'il a :

- Fait partiellement droit à sa demande de condamnation de la société S.U.P. à lui payer la somme de 67.235,40 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

- Débouté de ses demandes de condamnation de la société S.U.P. à lui payer 10.000 € à titre de dommages et intérêt pour rupture abusive et vexatoire et 45.613 € à titre de rappel sur commission.

- Débouté de sa demande tendant à la fixation des intérêts légaux et moratoires à compter de la saisine du 28 novembre 2016.

Tels sont les chefs de jugement critiqués qui font corps à la déclaration d'appel, conformément à l'article 901 4° du code de procédure civile'.

Par ordonnance d'incident du 16 janvier 2020 le magistrat de la mise en état a rejeté la demande de caducité de l'appel.

Par arrêt du 17 décembre 2020 la cour a déclaré le déféré recevable et a confirmé l'ordonnance du magistrat de la mise en état du 16 janvier 2020.

Par ordonnance d'incident du 9 juin 2022 le magistrat de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions remises au greffe le 4 juin 2021 par la société Sports Universal devenue Stats Analytics France en ce qu'elles n'ont pas été remises au greffe dans le délai imparti de l'article 909 du code de procédure civile.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 9 avril 2019 M. [V] demande de :

CONSTATER le caractère définitif des dispositions du jugement en ce qu'il:

- déclaré le licenciement de Monsieur [R] [V] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamné la SAS S.U.P. à 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- débouté la SAS S.UP de ses demandes reconventionnelles au titre du remboursement d'un trop perçu et au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

DECLARER Monsieur [V] recevable et bien fondé en son appel,

Y faisant droit,

REFORMER le jugement dont appel en ce qu'il a fait partiellement droit à sa demande de condamnation de la société S.U.P. à lui payer la somme de 67.235,40 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle. et sérieuse;

INFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il l'a débouté de ses demandes de condamnation de la société S.U.P. à lui payer 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive et vexatoire et 45.613 € à titre de rappel sur commissions,

INFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il l'a débouté de sa demande tendant à la fixation des intérêts légaux et moratoires à compter de la saisine du 28 novembre 2016,

En conséquence,

CONDAMNER la société Stats Analystic France, anciennement S.U.P. à payer à Monsieur [R] [V] :

- 67.235,40 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

- 10.000 € à titre de dommages et intérêt pour rupture abusive et vexatoire,

- 45.613 € à titre de rappel sur commission,

DIRE ET JUGER que ces sommes seront assorties des intérêts légaux à compter du 28 novembre 2016, date de saisine de la juridiction prud'homale.

CONDAMNER la société Stats Analystics France, anciennement S.U.P. aux entiers dépens d'instance et d'appel, ainsi qu'à 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 janvier 2023.

SUR CE

Liminairement, la cour constate que les conclusions de la société intimée ayant été déclarées irrecevables, elle n'est saisie d'aucun appel incident et les dispositions du jugement ayant déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamné la société aux dépens, à verser au salarié une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance et rejeté la demande de remboursement de la société au titre d'un trop perçu de commissions, sont définitives.

Sur le rappel de commissions

En application de l'article 1315, devenu 1353, du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Il appartient à l'employeur de communiquer les éléments nécessaires au calcul de la part de rémunération variable d'un salarié et, lorsqu'il se prétend libéré du paiement de cette part variable, de rapporter la preuve du fait qui a éteint son obligation.

En l'espèce le contrat de travail prévoyait :

- en son article 2 que le salarié était chargé du pilotage commercial de la France, la Belgique et le Maghreb sur le marché professionnel :

'Segments de marché:

' Pro: clubs, académies, fédérations, agents, joueurs, ligues

' Médias: TV, WEB, Presse

Missions:

' Démarchage, prospection commerciale et closing des contrats (négociation formalisation et

signature).

' Animation et coordination du réseau d'analystes de la zone concernée ([Y] [I] dans un 1er temps).

' Définition et formalisation des offres commerciales.

' Participation à la définition des nouveaux produits.'

- en son article 8 une rémunération brute mensuelle de 2 750 euros ainsi qu'une partie variable déterminée comme suit :

'Une avance sur commissions garantie de 900 euros sera versée tous les mois à Monsieur [R] [V]. La régularisation du salaire de Monsieur [R] [V] interviendra tous les semestres à partir des éléments du semestre écoulé, selon la formule suivante:

Commissions dues - avances perçues = solde dû à Monsieur [R] [V]

Zone d'attribution de la partie variable:

La rémunération variable sera liée:

' A la reconduction et au suivi des contrats existants,

' Au développement et à la commercialisation des nouveaux produits et services aux clients existants (Ll, L2 ...)

' Au développement et à la commercialisation des nouveaux produits et services aux nouveaux clients (clubs, médias, fédérations ...)

' Au développement et à la commercialisation de nouveaux marchés

Calcul:

Le calcul de la rémunération variable (RV) fera l'objet d'un avenant au contrat de travail'.

Cet avenant n'est pas produit.

Dans ses écritures le salarié s'appuie sur la fiche de poste produite en pièce 5 adverse pour affirmer un taux de commissionnement de 1% et 2% selon que le chiffre d'affaires est généré par un renouvellement de contrat ou un nouveau contrat, taux qui aux termes des énonciations du jugement déféré, ne sont pas remis en cause.

Le salarié sollicite la somme de 45 613 euros à titre de rappel de commissions dues au titre de la part variable de sa rémunération pour l'exercice de juin 2015 à juin 2016, sur la base de 1% du montant des contrats renouvelés et 2% des nouveaux contrats.

Il revendique ainsi :

- un solde de commissions restant dû pour la saison 2015 - 2016 en intégrant dans ses écritures sous forme de tableau une liste de clubs de football, le type de contrat renouvellement/ nouveau contrat, le montant du chiffre d'affaires correspondant, le taux de commission à partir desquels il détermine le montant des commissions et le différentiel restant dû (2413 euros) au regard du montant des commissions déjà versées par les avances mensuelles;

- une commission au titre du contrat conclu entre la société et la Ligue française de football, marché remporté en avril / mai 2016 par un travail d'équipe, auquel il a contribué par un travail de lobbying et qui constituait d'ailleurs son objectif commercial prioritaire pour l'exercice 2015/2016, représentant un montant de 2 160 000 euros, déclenchant dès lors sur la base de 2% une commission de 43 200 euros.

Il verse aux débats les éléments suivants :

- en pièce 21 un tableau intitulé 'récap des contrats (commissions)' mentionnant pour chaque club de football (OM, Bordeaux, Monaco, Guinguamp, AS Saint-Etienne, Toulouse, Bruges, Standard de Liège, Losc, FFF, Nantes, Olympic Lyonnais, Maroc Fédération, PSG, Anderlecht), la durée et le montant du contrat (prestation principale + au titre de la formation);

- en pièce 22 des pièces relatives aux contrats :

* bon de commande de 2016 Fédération Royale Marocaine de Football : 12 500 euros

* facture Fédération Française de Football du 22/09/2015 : 5000 euros HT -$gt; 6000 euros (13/11/2014) + 1400 euros HT -$gt; 1680 euros TTC

* bon de commande Olympic Lyonnais du 10/12/2015: 52 875 euros HT -$gt; 63 450 euros TTC

* facture Evian TG FC du 30 juin 2014 : 12 000 euros HT -$gt; 14 400 euros pour des prestations sur saisons 2012/2013 et 2013/2014

* FC Lorient : 7700 euros (analyses match) et 4500 euros (formation technique)

* un compte rendu de rendez-vous client du 6/11/2014 avec le FC Girondins de Bordeaux + contrat du 13/01/2015 pour les saisons 2014/2015 (9600 euros HT + 12 000 euros formation) , 2015/2016 (19 200 euros HT + 12000 euros formation) et 2016/2017 (19 200 euros HT + 12 000 euros formation)

* bon de commande Football Club de Nantes du 30/07/2015 (16 000 euros HT + 1600 euros HT) du 04/01/2016 (16 000 HT et 19 200 euros TTC)

* bon de commande Olympic de Marseille 5/05/2015 (6400 euros HT -$gt; 10 080 euros TTC) + contrat du 19 janvier 2015 pour les saisons 2014/2015 et 2015/2016 pour 32 105 euros HT chacune

* bon de commande Stade Rennais Football Club du 12/11/2014 (9 775 euros HT-$gt; 11 730 euros TTC)

* contrat Club de Brugge NV du 17 janvier 2013 ( 46 700 euros saison 2013/2014, 48 300 euros saisons 2014/2015 et 2015/2016

* contrat Royal Standard de Liège du 7 juillet 2014 pour les saisons 2014/2015 et 2015/2016 pour un montant de 50 000 HT chacune + un ordre de commande à l'intention du salarié du 12/05/2016 d'un montant de 6000 euros pour du matériel;

- en pièce 23 le Business Plan 2015/2016 pour France/Belgium/ Africa professional football clubs pour M. [I] et le salarié, rédigé en anglais dont le salarié ne produit pas de traduction;

- un article du 10 août 2016 annonçant que la ligue française de football a choisi la société STATS comme fournisseur des statistiques officielles des compétitions 2016-2020;

- des mails dont il ressort que ce le salarié est dans la boucle des échanges des acteurs recueillant les informations sur les besoins et retours de contacts dans les clubs pro aux fins de lobbying auprès de la ligue française de football, soit:

* en pièce 30 deux mails de M. [J] du 23 mars 2016 pour l'un demandant au salarié de valider deux commentaires du préparateur physique du FC Nantes et de l'entraîneur de [N] et indiquant pour l'autre 'Comme discuté, ci-dessous, le planning idéal des retours clubs pro vers la ligue. J'en ai discuté avec (le salarié) qui valide également et va voir pour obtenir les différents soutiens' suivi d'une liste de dates et de clubs mentionnant le salarié pour l'AS Monaco, PSG, OM, Stade Rennais, Toulouse FC

* en pièce 31 un mail du salarié du 25 mars 2016 à sa hiérarchie pour lui rapporter les actions menées : 'Rennes. Je lui est envoyé la trame et les mails de la ligue. Il a besoin de l'accord de [Y] [B]. Il pense l'avoir mardi. [N]. Idem pour jocelyn. Il me rappelle ce week-end. Nantes. Pas de retour pour le moment'

* en pièce 32 un mail du salarié du 29 mars 2016 au préparateur physique FC Nantes pour lui adresser l'exemple de commentaire/ témoignage suivant à adresser à trois interlocuteurs de la ligue, le directeur du Développement Economique, le responsable marketing, le responsable média, avec communication des adresses mail 'Je me permets de vous écrire suite à une réunion avec Prozone il y a ....

Comme vous le savez certainement nous sommes utilisateurs de leur solutions de tracking depuis la saison dernière mais nos contraintes budgétaires ne nous ont seulement permis de bénéficier de leur services sur 20 matchs cette saison.

Nous avons discuté d'une opportunité d'un projet « mutualisé» au niveau de la ligue incluant leur méthode de certification des données et ca nous semble évidemment intéressant car ça nous permettrait de travailler avec ces données sur l'intégralité de nos matchs tout en économisant du budget sur ce poste, à réinvestir sur d'autres services potentiellement intéressants .... Je reste à votre disposition pour en discuter de vive voix'

* en pièce 33 un mail du 30 mars 2016 du monteur et analyste vidéo du Stade Rennais adressant au salarié la copie du mail qu'il a adressé à la ligue française de football pour appuyer l'éventualité d'un partenariat entre la société et la ligue concernant la fourniture de données tracking au vu des avantages que procureraient l'accès à ces prestations, mail ensuite retransmis par le salarié à sa hiérarchie;

- un mail du 23 août 2016 de M. [W], société américaine STATS ayant racheté la société, adressant en langue anglaise, non traduite, un listing des contrats dont ceux concernant la ligue française de football pour des montants de 1 520 0000 euros et de 640 000 euros.

Il résulte des pièces du dossier et des énonciations du jugement déféré, qu'en première instance, d'une part la société a conclu au rejet de la prétention au titre du solde des commissions pour la saison 2015-2016, en contestant le chiffre d'affaires allégué par le salarié mais aussi le principe même du droit à commission pour certains contrats inexistants, affirmant même l'existence d'un trop-perçu dont elle demandait le remboursement sur la base de son propre relevé des contrats relevant de la zone géographique d'attribution du salarié.

D'autre part la société déniait le principe même du droit à commission du salarié sur le contrat conclu avec la ligue française de football en faisant valoir que le salarié n'avait pas participé aux étapes de la négociation de ce contrat, menées par son supérieur M. [U], ni joué un quelconque rôle dans l'obtention du contrat, la seule référence à quelques interventions auprès de certaines relations professionnelles dans des clubs français comme l'ont également fait d'autres collègues, ne lui ouvrant pas droit à commission.

Mais à l'analyse des pièces du dossier, force est de constater qu'ensuite de la déclaration d'irrecevabilité des conclusions de la société intimée, celle-ci ne communique pas les éléments nécessaires à la détermination et au calcul de la rémunération variable du salarié de nature à établir qu'elle a effectivement payé au salarié l'intégralité des commissions afférents aux contrats conclus par son intermédiaire sur sa zone géographique au titre de l'exercice 2015-2016 et ainsi éteint son obligation au titre de sa rémunération variable.

S'agissant de la commission portant sur le contrat conclu avec la ligue française de football, le salarié limite lui-même son action à une participation au lobbying auprès de ses prospects, contributive à la conclusion du contrat avec la ligue française de football effectivement négocié et formalisé à un niveau supérieur.

Toutefois la cour relève que si au titre de la définition générale de ses fonctions, le contrat de travail stipule que l'action du salarié porte notamment sur le démarchage, la prospection commerciale et closing des contrats (négociation, formalisation et signature), au titre de la rémunération variable, le contrat stipule que celle-ci est liée notamment au développement et à la commercialisation des nouveaux produits et services aux nouveaux clients ainsi qu'au développement et à la commercialisation de nouveaux marchés.

Par cet énoncé qui ne conditionne pas directement le droit à commission à la conclusion et la signature de contrats par son industrie propre et exclusive et en l'absence de l'avenant de calcul de rémunération visé au contrat de travail ou de tout autre élément venant définir précisément le fait générateur du déclenchement des commissions, la cour qui a constaté d'une part la contribution du salarié à ce contrat par des actions qui relèvent indéniablement du lobbying, d'autre part que la société ne produit pas les éléments nécessaires à la détermination et au calcul de sa rémunération variable ni rapporté la preuve du fait qui a éteint son obligation, dit que le salarié est fondé en sa demande, sur la base de 2% s'agissant d'un nouveau contrat, du montant résultant du propre mail de la direction américaine .

En conséquence et en infirmant le jugement déféré la cour condamne la société à verser au salarié la somme de 45 613 euros à titre de rappel de commissions.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Le salarié qui présente plus de deux ancienneté au service d'une entreprise employant plus de onze salariés et dont le licenciement a été déclaré sans cause réelle et sérieuse, peut prétendre, en application de l'article L.1235-3 du code du travail dans sa rédaction applicable, antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, à une indemnité qui ne peut être inférieure aux six derniers mois de salaire.

En l'espèce le salarié sollicite la somme de 67 235,40 euros en réparation du préjudice résultant de la perte de l'emploi, correspondant selon lui à dix-huit mois de rémunération, en faisant valoir le préjudice économique subi alors qu'il était âgé de 51 ans, exerçait dans un secteur d'activité très spécialisé et concurrentiel et qu'il n'a pas retrouvé d'emploi stable. Il produit un justificatif de son admission au bénéfice de l'allocation de retour à l'emploi du 21 octobre 2016 jusqu'au 31 octobre 2018, des pièces relatives à un redressement fiscal notifié en octobre 2017, qui bien que pesant sur sa situation financière est sans lien avec la rupture du contrat de travail, son bail pour un studio meublé et un échéancier de prêt à la consommation souscrit en octobre 2016 dont il n'explicite ni ne justifie du lien avec la rupture.

Au vu du montant de la rémunération brute mensuelle devant être retenue sur les six derniers mois précédant la rupture, composée de tous les éléments de salaire en ce compris le rappel de commissions au prorata (4 767,38 euros), de son ancienneté, de son âge, de sa capacité à retrouver un emploi, des pièces et explications fournies sur son préjudice, il apparaît que c'est par une exacte appréciation que les premiers juges ont fixé à 30 000 euros le montant des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la perte de l'emploi.

En conséquence la cour confirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société à verser au salarié la somme de 30 000 euros de dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les dommages et intérêts pour préjudice distinct

La réparation d'un préjudice résultant d'un manquement de l'employeur suppose que le salarié qui s'en prétend victime produise en justice les éléments de nature à établir d'une part la réalité du manquement et d'autre part l'existence et l'étendue du préjudice en résultant.

En application de l'article 1147 du code civil, lorsque l'employeur commet une faute dans les circonstances entourant le licenciement occasionnant au salarié un préjudice distinct de celui indemnisé au titre de la perte de l'emploi, ce dernier peut prétendre à des dommages et intérêts.

En l'espèce le salarié sollicite la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts au titre d'un préjudice distinct ressortant du caractère vexatoire d'un licenciement injustifié pour insuffisance professionnelle alors qu'il a démontré l'excellence de ses résultats, ce qui a nuit à son évolution professionnelle, s'étant ensuite trouvé sans emploi à cinquante et un an après avoir effectué toute sa carrière dans le secteur du football professionnel.

La cour constate que le salarié invoque le caractère injustifié d'un licenciement notifié pour insuffisance professionnelle qui à lui seul ne caractérise pas une faute dans la conduite du licenciement et que sous la qualification de préjudice distinct, en réalité le salarié ne demande pas la réparation d'un préjudice résultant de circonstances fautives et préjudiciables de la rupture mais vise à réparer celui de la perte de l'emploi, ci-dessus déjà indemnisé, sans qu'il ne produise aucun élément de nature à démontrer l'existence et l'étendue d'un préjudice distinct.

En conséquence, la cour dit que la demande n'est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu'il l'a rejetée.

Sur les intérêts

En infirmant le jugement déféré la cour dit que la créance salariale produit intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation et la créance indemnitaire à compter du jugement déféré qui a été confirmé.

Sur le remboursement des indemnités chômage

En application de l'article L.1235-4 du code du travail dans sa rédaction applicable, il convient en ajoutant au jugement déféré, d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de trois mois d'indemnisation.

Sur les dispositions accessoires

La société succombant au principal est condamnée au dépens d'appel.

En application de l'article 700 du code de procédure civile il est équitable que l'employeur contribue aux frais irrépétibles que le salarié a exposés en cause d'appel. La société est en conséquence condamnée à lui verser la somme de 1 500 euros pour les frais d'appel et elle est déboutée de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- rejeté la demande de rappel de commissions de M. [V],

- rejeté toute demande sur les intérêts,

Statuant à nouveau sur le chefs infirmés,

Condamne la SAS STATS Analytics France à verser à M. [V] la somme de 45 613 euros à titre de rappel de commissions,

Dit que les sommes allouées sont exprimées en brut,

Dit que la créance salariale produit intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation et la créance indemnitaire à compter du jugement déféré qui a été confirmé,

Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions dans la limite de l'appel,

Y ajoutant,

Ordonne le remboursement par la SAS STATS Analytics France aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées à M. [V] du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de trois mois d'indemnisation,

Condamne la SAS STATS Analytics France à verser à M. [V] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais d'appel,

Condamne la SAS STATS Analytics France aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-4
Numéro d'arrêt : 18/16032
Date de la décision : 23/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-23;18.16032 ?
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