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16/03/2023 | FRANCE | N°19/17409

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 16 mars 2023, 19/17409


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 16 MARS 2023

lv

N° 2023/ 102













Rôle N° RG 19/17409 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFE3W







Syndicat des copropriétaires [Adresse 3]





C/



[A] [P]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :





SELAS CABINET POTHET



SELAS CABINET [X]











Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 27 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 15/05677.





APPELANT



Syndicat des copropriétaires [Adresse 3], représenté par son syndic en exercice la SARL FRATELLIMMO BR, dont le siè...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 16 MARS 2023

lv

N° 2023/ 102

Rôle N° RG 19/17409 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFE3W

Syndicat des copropriétaires [Adresse 3]

C/

[A] [P]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SELAS CABINET POTHET

SELAS CABINET [X]

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 27 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 15/05677.

APPELANT

Syndicat des copropriétaires [Adresse 3], représenté par son syndic en exercice la SARL FRATELLIMMO BR, dont le siège social est [Adresse 1], agissant poursuites et diligences de son gérant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

représenté par Me Alain-David POTHET de la SELAS CABINET POTHET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant

INTIMEE

Madame [A] [P]

née le 26 Novembre 1964 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Serge DREVET de la SELAS CABINET DREVET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 17 Janvier 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Laetitia VIGNON, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fonction de président de chambre

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM, Vice Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Mars 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Mars 2023,

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte authentique du 9 avril 2010, Mme [A] [P] a acquis de M. [O] [H] et de Mme [E] [R], au sein de la copropriété [Adresse 3] sise à [Localité 7], le lot [Cadastre 6] composé d'un appartement situé au rez-de-chaussée de la maison [Cadastre 5], comprenant hall, cuisine, séjour, dégagement, deux chambres, salle de bains, salle d'eau, rangement, cellier, outre les jouissances privatives d'une terrasse de 41 m² environ et d'un jardin de 290 m² environ.

Son époux, M. [W] [P], est également propriétaire du lot n° 98 au sein de cette copropriété depuis le 27 septembre 2006.

Exposant que M. et Mme [P] auraient réalisé des travaux modificatifs de leurs lots respectifs sans autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires, le syndicat des copropriétaires [Adresse 3] a saisi le juge des référés, par exploit du 5 juin 2012, aux fins d'obtenir la désignation d'un expert judiciaire.

Par ordonnance de référé du 12 septembre 2012, M. [J] [K] a été désigné en qualité d'expert.

Par ordonnance du 8 juillet 2013, la mission confiée à M. [K] a été étendue au lot n° 87 consistant en la transformation d'une terrasse couverte en chambre fermée.

M. [K] a déposé son rapport définitif le 3 octobre 2014.

Par acte d'huissier en date du 22 juillet 2015, le syndicat des copropriétaires [Adresse 3] a fait assigner Mme [A] [V] épouse [P] devant le tribunal de grande instance de Draguignan aux fins notamment d'obtenir sa condamnation, sous astreinte, à remettre en, état la loggia du rez-de-chaussée transformée en chambre à coucher ainsi qu'à lui verser une somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts.

Par jugement contradictoire en date du 27 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Draguignan a:

- déclaré recevables les demandes du syndicat des copropriétaires [Adresse 3],

- rejeté les demandes du syndicat des copropriétaires [Adresse 3],

- rejeté la demande reconventionnelle de dommages et intérêts présentée par Mme [A] [P],

- rejeté la demande tendant au bénéfice de l'exécution provisoire,

- condamné le syndicat des copropriétaires [Adresse 3] aux dépens de l'instance et accordé le droit de recouvrement direct de l'article 699 du code de procédure civile à la SELAS CABINET [X], prise en la personne de M. le Bâtonnier [Y] [X], qui en a fait la demande,

- condamné le syndicat des copropriétaires [Adresse 3] à verser à Mme [A] [P] la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 14 novembre 2019, le syndicat des copropriétaires [Adresse 3] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 16 décembre 2022, le syndicat des copropriétaires [Adresse 3], pris en la personne de son syndic en exercice la SARL FRATELLIMO BR, demande à la cour de:

Vu le jugement rendu le 27 septembre 2019 par le tribunal de grande instance de Draguignan le 27 septembre 2019,

- le confirmer en ce qu'il a rejeté les fins de non recevoir,

- l'infirmer en ce qu'il a déclaré recevable la fin de non recevoir relative au défaut de mandat d'ester en justice du syndic, qui doit s'analyser comme une exception de nullité de l'assignation qui n'a pas été régulièrement visée,

De ce chef, juger qu'en tout état de cause, Mme [A] [P] était irrecevable à développer ce moyen faute d'avoir saisi la juridiction compétente et tirer les conséquences de la prétendue absence d'autorisation du syndic pour ester en justice,

- l'infirmer sur les demandes principales,

Et statuant à nouveau,

- juger que l'autorisation donnée par le résolution n° 12 de l'assemblée générale du 27 juillet 2002 constitue une autorisation pour la pose d'une baie vitrée sur une terrasse partie commune à jouissance privative, n'emportant nullement autorisation de transformation en partie habitable,

- juger que l'assemblée générale du 30 juillet 2005 ne concerne nullement M. [O] [H], auteur de Mme [A] [P],

- constater qu'il n'existence aucune assemblée générale statuant à la double majorité emportant le changement d'affectation de la loggia et de la pose des voltes,

- condamner Mme [A] [P], sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, à remettre en état la loggia du rez-de-chaussée du lot n° 87 de la copropriété [Adresse 3], transformer en chambre à coucher et à supprimer les volets ainsi que les installations électriques, carrelage et pose d'enduit subséquents et tous travaux rendus subséquemment nécessaires par le changement d'affectation dont il s'agit,

- condamner Mme [A] [P] au paiement de la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts,

- constater que la résolution n° 11 votée à l'assemblée générale du 30 juillet 2001 a habilité le syndicat des copropriétaires pour les remises en état présentement sollicitées,

- juger que l'autorisation donnée par le résolution n° 12 de l'assemblée générale du 27 juillet 2002, pas plus la modification des tantièmes votée par la résolution n° 10 de l'assemblée générale du 26 juillet 2008 ne sauraient valoir autorisation des transformations opérées sur le lot n° 87,

- constater que la prescription concernant les travaux objets du litige est trentenaire,

- débouter Mme [A] [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions et notamment de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner Mme [A] [P] au paiement de la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [A] [P] aux entiers dépens de première instance et d'appel qui comprendront la contribution à hauteur de 225 €, et dire que la SELAS CABINET POTHET, pourra recouvrer ceux dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Sur l'exception de procédure et les fins de non recevoir, il fait valoir que:

-le mandat d'ester en justice donné au syndic:

* l'assemblée générale du n30 juillet 2011 a adopté une résolution n° 11 autorisant le syndic à ester en justice à l'encontre de Mme [P],

* le défaut du syndic d'ester en justice est une nullité de l'assignation qui auraient dû être évoquée devant le juge de la mise en état, exclusivement compétent pour en connaître,

- sur le principe de l'estoppel:

* il s'agit d'un mécanisme qui permet de sanctionner des prétentions contradictoires qui ont été défendues par un plaideur au cours d'une même instance,

* ce n'est pas ce qu'allègue Mme [P] qui prétend appliquer ce principe au regard du comportement du syndicat lors d'une assemblée générale des copropriétaires en lecture de sa position dans le cadre de l'instance,

- sur la prescription:

* la terrasse de Mme [P] n'est pas une partie privative mais une partie commune à jouissance privative,

* le copropriétaire qui veut effectuer des travaux sur des parties communes dont il a la jouissance privative doit nécessairement solliciter l'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires,

* en l'espèce, Mme [P] s'est accaparée une partie commune, de sorte que l'action en démolition d'une construction d'une construction sur une partie commune à jouissance privative est donc réelle et se prescrit par 30 ans,

* c'est à tort que le tribunal a appliqué à son action un délai décennal,

* en tout état de cause, son action n'est pas prescrite, en ce que les volets ont été installés courant 2006 et qu'il n'est pas établi que les travaux d'aménagement de la loggia en chambre à coucher aient été effectués par l'auteur de Mme [P], avant son achat.

Sur le fond, il soutient que:

- M. [H] a uniquement reçu l'autorisation en 2002 de fermer sa véranda mais nullement de la transformer en chambre à coucher,

- l'assemblée générale de 2005 ne concerne pas les travaux de M. [H], de sorte que les modifications des tantièmes ne touchent pas lesdits travaux,

- il ressort des constatations de l'expert que l'autorisation donnée en 2002 à M. [H] ne correspond pas à la situation de la loggia, certes fermée mais sans que l'autorisation initiale ne prévoit la pose de volets et le changement de destination de ce local, qui auraient dû être approuvés par l'assemblée générale des copropriétaires,

- l'état descriptif de division n'emporte nullement reconnaissance que la partie litigieuse ait une destination de chambre à coucher,

- le règlement de copropriété interdit aux copropriétaires de modifier le revêtement des façades de leurs lots, alors que tel est le cas de la pose de volets qui entraîne nécessairement une modification de la façade de l'immeuble,

- la terrasse du lot [Cadastre 6] ne peut être considérée comme une partie privative, s'agissant d'une partie commune à jouissance privative et le fait que cette terrasse ait été transformée en loggia, n'emporte pas un changement de destination, en l'absence de modification de l'état descriptif de division.

Mme [A] [P], suivant ses dernières conclusions signifiées par RPVA le 21 décembre 2022, demande à la cour de:

Vu les dispositions des articles 9, 31, 32, 122 et suivants et 564 du code de procédure civile,

Vu les dispositions des articles 2,8 ,9 et 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut

de la copropriété des immeubles bâtis,

Vu les dispositions des articles 1382 ancien et 2224 du code civil,

Vu le rapport d'expertise et ses annexes de M. [K] en date du 03.10.2014,

Vu les pièces versées au débat,

- débouter le syndicat des copropriétaires [Adresse 3] de l'ensemble de ses demandes, moyens, fins et conclusions.

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Draguignan le 27 septembre 2019 en ce qu'il a statué comme suit :

* rejette les demandes du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3]

DES PECHEURS,

* condamne le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3]

PECHEURS aux dépens de l'instance, et accorde le droit de recouvrement direct prévu par l'article 699 du code de procédure civile à la SELAS CABINET [X], prise en la personne de M. le Bâtonnier [Y] [X], qui en a fait la demande,

* condamne le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3]

PECHEURS à verser à Mme [A] [P] la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur l'appel incident de Mme [P],

- réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Draguignan le 27 septembre 2019 en ce qu'il a statué comme suit :

* déclare recevables les demandes du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3],

* rejeté la demande reconventionnelle de dommages et intérêts présentée par Mme [A] [P],

Statuant à nouveau,

Mme [A] [P] demande à la cour de:

- déclarer irrecevable l'action du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3] en raison de la prescription.

- déclarer les demandes formulées par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3] à l'encontre de Mme [A] [P] irrecevables pour défaut de qualité et d'intérêt à agir en raison de l'autorisation donnée à M. [H], auteur de Mme [P], de fermer la loggia par une baie vitrée au terme de l'assemblée générale du 27 Juillet 2002 et en raison de la modification des tantièmes par accroissement des tantièmes privatifs intervenue suite à la fermeture de la loggia suivant assemblée générale du 26 Juillet 2008,

- déclarer les demandes formulées par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3] à l'encontre de Mme [A] [P] irrecevables pour défaut de qualité et d'intérêt à agir en raison du caractère privatif du revêtement du sol, des murs et de l'installation électrique de la loggia.

- débouter le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3] de l'ensemble de ses demandes, moyens, fins et conclusions, comme totalement infondées.

A titre subsidiaire,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Draguignan le 27 septembre 2019 en ce qu'il a statué comme suit :

* rejette les demandes du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3],

* condamne le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3]

PÊCHEURS aux dépens de l'instance, et accordée le droit prévu de recouvrement direct par l'article 699 du code de procédure civile à la SELAS CABINET [X], prise en la personne de M. le Bâtonnier [Y] [X], qui en a fait la demande,

* condamne le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3]

PÊCHEURS à verser à Mme [A] [P] la somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

En tout état de cause et à titre reconventionnel,

- déclarer que l'action du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3]

PÊCHEURS est manifestement abusive et dolosive.

- condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3]

PÊCHEURS à payer à Mme [A] [V] épouse [P] la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3]

PÊCHEURS à payer à Mme [A] [V] épouse [P] la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure devant la cour,

- condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3]

PÊCHEURS aux entiers dépens de l'instance qui seront distraits au profit de la SELAS CABINET [X], société d'Avocats, sur ses offres et affirmations de droit, en application des dispositions des articles 696 et 699 du code de procédure civile.

Elle conclut à l'irrecevabilité des demandes du syndicat, comme étant nouvelles en cause d'appel, tendant à:

- juger que l'assemblée générale du 30 juillet 2005 ne concerne nullement M. [O] [H], auteur de Mme [A] [P],

- condamner Mme [A] [P], sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, à la pose d'enduit subséquents et tous travaux rendus subséquemment nécessaires par le changement d'affectation dont il s'agit,

- constater que la prescription concernant les travaux réalisés, objets du litige, est trentenaire.

Elle oppose par ailleurs au syndicat appelant l'irrecevabilité de ses demandes aux motifs que:

- sur l'application du principe de l'estoppel:

* à partir moment où la copropriété a autorisé les auteurs de Mme [P] à fermer la loggia ( assemblée générale de 2002) et a adopté la nouvelle répartition des tantièmes ( assemblée générale du 26 juillet 2008) dont une expertise a été votée à l'unanimité lors de l'assemblée générale du 30 juillet 2005 en considération des aménagements entreprise notamment sur le lot n° 87, la surface habitable ainsi créée par la suite de la modification des tantièmes, est devenue une partie privative dans laquelle elle et ses auteurs sont libres, d'y faire ce que bon leur semble,

* le syndicat des copropriétaires n'a donc ni qualité, ni intérêt à agir sur des parties privatives qui respectent le règlement intérieur,

- sur la prescription de l'action du syndicat des copropriétaires:

* l'action est soumise au délai décennal prévu à l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965,

* les travaux litigieux ont été engagés par ses auteurs bien avant le mois de juillet 2002,

* l'assemblée générale du 27 juillet 2002 a voté la conservation de la réalisation par M. [H] du lot n° 87, consistant en l'installation d'une baie vitrée sur sa terrasse, de sorte cette transformation était connue du syndicat bien avant cette date,

* si la demande en restitution d'une partie commune indûment appropriée par un copropriétaire est une action réelle soumise à la prescription trentenaire, telle n'est pas le cas en l'espèce, s'agissant d'une demande de rétablissement d'une situation prétendument irrégulière, qui est soumise à la prescription décennale, ladite transformation étant intervenue plus de 10 ans avant la délivrance de l'assignation introductive d'instance.

Elle estime qu'en tout état de cause, les demandes du syndicat sont parfaitement infondées et ne peuvent qu'être rejetées:

- lorsqu'elle a fait l'acquisition du lot n° 87, la transformation litigieuse existait déjà mais avait été en outre autorisée par l'assemblée générale, la fermeture de la terrasse n'était assortie d'aucune condition sur l'utilité éventuelle de la surface fermée,

- son auteur, M. [H], se servait d'ailleurs de cette loggia comme chambre à coucher,

- la pose de volets a bien été autorisée par l'assemblée générale du 30 juillet 2005, qui concerne également le lot n° 87,

- le conseil syndicat a en effet demandé à plusieurs copropriétaires, dont M. [H], de fermer leurs baies vitrées avec des volets,

- les volets sont des parties privatives qui n'occasionnent aucun dommage à la copropriété car ils sont identiques à ceux qui équipent déjà les autres lots,

- le cabinet [L], géomètre-expert, a bien été mandaté afin de calculer les nouveaux tantièmes de certains lots ( dont le lot n° 87) afin que ceux-ci tiennent compte des agrandissements réalisés,

- l'assemblée générale du 26 juillet 2008 a adopté la modification des tantièmes suite à la fermeture de loggias, modification qui a concerné le lot n° 87, démontrant que le syndicat a autorisé la fermeture de la terrasse et par voie de conséquence a tenu compte de l'augmentation de la superficie habitable en augmentant le nombre de tantièmes du lot n° 87,

- depuis 2008, la loggia est une partie privative du lot n° 87 la révision des tantièmes ayant bien pour objet de tenir compte des surfaces habitables créées par certains copropriétaires lots d'aménagements récents, dont les vérandas,

- les travaux modificatifs ( baies et volets) du lot 87 ne l'ont pas été sans autorisation de l'assemblée générale, qui les a au contraire régulièrement approuvés.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 3 janvier 2023.

MOTIFS

Mme [P] conclut à l'irrecevabilité des demandes du syndicat appelant comme étant nouvelles en cause d'appel et tendant à:

- juger que l'assemblée générale du 30 juillet 2005 ne concerne nullement M. [O] [H], auteur de Mme [A] [P],

- condamner Mme [A] [P], sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, à la pose d'enduit subséquents et tous travaux rendus subséquemment nécessaires par le changement d'affectation dont il s'agit,

- constater que la prescription concernant les travaux réalisés, objets du litige, est trentenaire.

L'intimée ne reprend pas cette prétention dans le dispositif de ses conclusions, qui seul lie la cour conformément à l'article 954 du code de procédure civile, qui n'en est donc pas saisie.

Par ailleurs, en cause d'appel, Mme [P] ne se prévaut plus de l'absence de mandat d'ester en justice donnée au syndic.

Elle oppose cependant au syndicat des copropriétaires deux fins de non recevoir, tirée d'une part, du principe de l'estoppel et d'autre part, de la prescription de son action.

Sur le premier point, la circonstance que le syndicat des copropriétaires ait approuvé la fermeture des loggias par des baies vitrées lors de l'assemblée générale du 27 juillet 2002 puis ait modifié, suite à cette décision les tantièmes, ne le rend pas irrecevable à agir contre la transformation de la loggia en cause en chambre à coucher, ni à contester la pose de volets sur la façade modifiée par la fermeture de la loggia. Le syndicat des copropriétaires a bien intérêt et qualité à agir, son action étant dès lors recevable.

Sur le second point, le syndicat des copropriétaire soutient que la terrasse litigieuse est une partie commune à jouissance privative et que dès lors que son action tend à la restitution d'une partie commune indûment appropriée, il s'agit d'une action réelle soumise à la prescription trentenaire de droit commun.

Il ressort des pièces que le lot n° 87 appartenant à Mme [P] a été créé par l'état descriptif du 6 décembre 1988 qui a supprimé le lot n° 68 et créé les lots n° 69 à 101.

La description du lot n° 87 comprend la jouissance privative de terrasses de 41 m² et la jouissance privative d'un jardin de 290 m².

Ce document définit les parties privatives comme ' celles qui sont à l'usage exclusif et particulier de chaque copropriétaire, à charge pour lui d'en assurer l'entretien et le fonctionnement suivant les règles et conditions fixées dans le règlement de copropriété. Ces parties comprenant notamment (...):

- les jardins en jouissance privative s'il y a lieu,

- les revêtements des sols ( dallages, moquettes, revêtements plastiques etc...), les cloisons intérieures, les portes, les fenêtres, les portes fenêtres, les gardes-corps, les voltes battants, les volets roulants (...),

- les plafonds, les planchers,

- les revêtements au-dessus de la dalle des loggias, balcons ou terrasses dont la jouissance est affectée à l'suage exclusif du copropriétaire (....)'.

Les parties communes de la copropriété sont ' celles qui sont à l'usage de tous les copropriétaires ( parties communes générales) ou plusieurs copropriétaires ( parties communes spéciales) à savoir:

- les jardins communs s'il y a lieu,

- les fondations, gros murs des façades et de refend, mur pignons mitoyens ou non, en générale tous les éléments porteurs concourant à la stabilité et solidité du bâtiment,

- le gros oeuvre des planchers et l'isolation thermique et acoustique,

- la couverture du bâtiment (...) Et généralement tous les éléments constituant l'ossature extérieure et intérieure de la construction,

- les ornementations et décorations intérieures et extérieures du bâtiment et des façades,

- les canalisations et conduits d'alimentation (...)

- les conduits d'aération,

- les halls d'entrée, paliers communs (...) '

Il s'ensuit que la terrasse en jouissance privative du lot n° 87, dont il n'est pas contesté qu'elle est à l'usage exclusif et particulier de Mme [P], est une partie privative. C'est donc à juste titre que le tribunal a retenu que l'action du syndicat des copropriétaires est une action personnelle entre un copropriétaire et le syndicat, soumise à la prescription décennale de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable au présent litige.

Le syndicat appelant fait grief à Mme [P] d'avoir changé la destination de la loggia en la transformant en chambre à coucher et d'avoir posé des volets roulants sans autorisation de l'assemblée générale. Or, si la fermeture de la véranda par une baie est effectivement intervenue en 2002, Mme [P] n'apporte pas d'éléments établissant que les travaux d'aménagement de la loggia ont été effectués par son auteur 10 ans avant l'ordonnance de référé du 8 juillet 2013 étendant la mission confiée à l'expert judiciaire au lot n° 87 et qui constitue le premier acte interruptif de prescription effectué par l'appelant.

Plus particulièrement, si incontestablement ces travaux étaient réalisés lors de l'état des lieux réalisé en 2007 par le cabinet [D], géomètre-expert mandaté afin par le syndic suite à l'adoption de la résolution n° 11 de l'assemblée générale du 30 juillet 2005, aucune pièce n'est produite permettant de démontrer que l'aménagement de la loggia soit intervenue avant le 8 juillet 2003.

Quant à la pose des volets par l'auteur de Mme [P], il est produit un courrier de M. [H] du 17 janvier 2006 indiquant qu'il faisait ' le nécessaire pour que la baie vitrée de l'appartement 87 soit fermée par des volets roulants' ainsi que le compte-rendu du conseil syndical du 31 octobre de la même année qui confirme qu'à cette date, M. [H] a procédé à l'installation de ces volets.

La fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action du syndicat des copropriétaires doit donc être rejetée.

Sur le fond, le syndicat appelant reproche en premier lieu à Mme [P] d'avoir modifié la destination de sa loggia en la transformant en chambre à coucher sans autorisation de l'assemblée générale.

Contrairement à ce que prétend le syndicat des copropriétaires, l'assemblée générale a parfaitement accepté la transformation de la véranda en surface habitable:

- le procès-verbal de l'assemblée du 27 juillet 2002 autorise M. [H] à installer une baie vitrée sur sa terrasse sans imposer aucune condition sur l'utilité éventuelle de la surface fermée, l'expert judiciaire ayant d'ailleurs relevé que ' en accordant à M. [H] l'autorisation de fermer sa loggia, l'assemblée générale a donné l'autorisation de transformer une surface utile en surface habitable, sans se préoccuper de l'affectation que M. [H] pourrait donner à cette surface habitable',

- l'assemblée générale du 30 juillet 2005 a adopté une résolution visant à modifier les tantièmes par ' la prise en compte des surface habitables créées par certains copropriétaires lors d'aménagements récents: vérandas etc ....', mandatant à un cabinet de géomètre-expert à cet effet,

- l'assemblée générale du 26 juillet 2008 a approuvé la nouvelle répartition des tantièmes suite au fermeture des loggias, dont le lot n° 87, lequel a vu le nombre de ses tantièmes augmenter pour tenir compte de cette nouvelle surface habitable résultant de la fermeture de la loggia.

Dans ces conditions, le syndicat ne peut sérieusement soutenir que la transformation de la loggia en chambre à coucher et par là en surface habitable n'a pas autorisée par l'assemblée générale des copropriétaires.

S'agissant de l'installation des volets roulants, l'article 25 b de la loi du 10 juillet1965 impose au copropriétaire qui souhaite réaliser des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble de recueillir préalablement l'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires.

Il ressort de la convocation à l'assemblée générale du 30 juillet 2005 qu'était mis à l'ordre du jour, le projet de résolution suivant '9.6: Fermeture des terrasses - Pour tous les copropriétaires ayant fermées leur terrasse, prévoir la pose de volets identiques à ceux de la copropriété, comme nous l'avions exigé à M. et Mme [G] à l'époque de leurs travaux'.

Le procès-verbal de l'assemblée générale met en évidence que cette résolution a a été adoptée, de sorte que comme le souligne Mme [P] la fermeture des terrasses par des volets a bien été non seulement autorisée mais surtout exigée par la copropriété.

L'expert judiciaire, dans son rapport, conclut que cet ouvrage, à savoir la pose d'une baie vitrée équipée de volets de types persiennes ' ne diffère pas du traitement architectural général de cette copropriété dans la mesure où les menuiseries mises en oeuvre ( porte fenêtre en bois à grands carreaux et volets en bois type persiennes, l'ensemble revêtu d'une peinture blanc mat) sont identiques aux menuiseries constatables dans cet ensemble(...) Il n'y a donc pas d'atteinte à l'esthétique générale du bâti'.

En conséquence, la pose des volets litigieux ne modifie pas l'aspect extérieur de l'immeuble.

Les demandes du syndicat des copropriétaires ne peuvent, en conséquence qu'entrer en voie de rejet.

L'intimée ne justifiant pas de la part de l'appelant d'une erreur grossière équipollente au dol, ni de l'existence d'une volonté de nuire, elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

En définitive, le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Draguignan déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute Mme [A] [P] de son appel incident,

Condamne le syndicat des copropriétaires [Adresse 3] à payer à Mme [A] [P] la somme de 3.500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne le syndicat des copropriétaires [Adresse 3] aux dépens de la procédure d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/17409
Date de la décision : 16/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-16;19.17409 ?
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