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10/03/2023 | FRANCE | N°22/03837

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-6, 10 mars 2023, 22/03837


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6



ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION



ARRÊT

DU 10 MARS 2023



N°2023/ 071















Rôle N° RG 22/03837 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJBNX







[D] [S]





C/



S.E.L.A.F.A. MJA

S.E.L.A.R.L. MJO

Association UNEDIC-AGS CGEA ILE DE FRANCE OUEST



























Copie exécutoire délivré

e

le : 10/03/2023

à :



Me François MAIRIN, avocat au barreau de TARASCON



Me Jean-christophe SCHWACH, avocat au barreau de STRASBOURG



Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE





Arrêt en date du 10 Mars 2023 prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6

ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT

DU 10 MARS 2023

N°2023/ 071

Rôle N° RG 22/03837 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJBNX

[D] [S]

C/

S.E.L.A.F.A. MJA

S.E.L.A.R.L. MJO

Association UNEDIC-AGS CGEA ILE DE FRANCE OUEST

Copie exécutoire délivrée

le : 10/03/2023

à :

Me François MAIRIN, avocat au barreau de TARASCON

Me Jean-christophe SCHWACH, avocat au barreau de STRASBOURG

Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Arrêt en date du 10 Mars 2023 prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 15 Mars 2022, qui a cassé et annulé l'arrêt rendu le 17 Juin 2020 par la Chambre 4.3 de la Cour d'Appel d'Aix En Provence sur appel du jugement du Conseil de Prud'hommes d'ARLES en date du 2 Février 2015.

DEMANDERESSES SUR RENVOI DE CASSATION

Monsieur [D] [S], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me François MAIRIN, avocat au barreau de TARASCON

DEFENDERESSES SUR RENVOI DE CASSATION

S.E.L.A.F.A. MJA prise en la personne de Me [G] [R], ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation de la SAS GLI, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Jean-christophe SCHWACH, avocat au barreau de STRASBOURG

S.E.L.A.R.L. MJO prise en la personne de Maître [Y] [L], ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation de la SAS GLI, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Jean-christophe SCHWACH, avocat au barreau de STRASBOURG

Association UNEDIC-AGS CGEA ILE DE FRANCE OUEST, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 03 Janvier 2023 en audience publique devant la Cour composée de :

M. Philippe SILVAN, Président de chambre,

Mme Estelle De REVEL, conseiller

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoires dans le délibéré de la Cour composé de :

M. Philippe SILVAN, Président de chambre,

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Estelle DE REVEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Mars 2023.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Mars 2023

Signé par M. Philippe SILVAN, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Selon contrat à durée indéterminée du 11 juillet 1994, M. [S] a été recruté par la société Sotragaz, aux droits de laquelle vient la société Gaz Liquéfiés Industries, en qualité de technicien service atelier, échelon 3, niveau II, coefficient 190.

Courant 2013, il a été sanctionné d'un avertissement puis d'une mise à pied disciplinaire.

Le 20 décembre 2013, il a saisi le conseil de prud'hommes d'Arles d'une contestation de ces sanctions disciplinaires. En cours de procédure, il a sollicité la condamnation de la société Gaz Liquéfiés Industries à lui payer diverses sommes à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires et congés payés afférents, rappel de salaire en application du principe «'à travail égal, salaire égal'» et la résiliation judiciaire du contrat de travail.

Par jugement du 2 février 2015, le conseil de prud'hommes d'Arles a':

- condamné la société Gaz Liquéfiés Industries à payer à M. [S] les sommes suivantes':

- 2402.50'€ à titre de rappel de salaires sur la période de janvier 2013 à septembre 2013';

- 204.25'€ au titre des congés payés afférents';

- 242.72'€ à titre de rappel d'heures supplémentaires';

- 24.27'€ au titre des congés payés afférents';

- prononcé l'annulation de l'avertissement du 15 avril 2013';

- condamné la S.A.S GLI à payer à M. [D] [S] la somme de 200'€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi';

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires, principales ou reconventionnelle,';

- ordonné l'exécution provisoire';

- condamné la société Gaz Liquéfiés Industries à payer la somme de 500'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par arrêt du 17 juin 2020, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a':

- confirmé la décision déférée en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne les sommes alloués à M.[S] au titre des rappels de salaires et les dommages et intérêts alloués au titre de l'annulation de l'avertissement du 15 avril 2013';

Statuant à nouveau, y ajoutant';

- débouté de sa demande de dommages et intérêts au titre de l'annulation de l'avertissement du 15 avril 2013';

- déclaré irrecevables comme étant prescrites ses demandes au titre des heures supplémentaires et de repos compensateur au titre des années 2009 à 2012';

- fixé la créance de M. [S] à la liquidation judiciaire de la SAS GLI aux sommes suivantes':

- 6.516,30'€ à titre de rappel de salaire de janvier 2013 à juin 2016, outre la somme de 651,63'€ à titre d'incidence congé payé';

- 1.962,69'€ à titre de rappel d'heures supplémentaires contractualisées';

- 196,27'€ à titre d'incidence congé payé sur la même période';

- 1500'€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

- Déclaré sa décision opposable au CGEA';

- Dit que le CGEA devra sa garantie selon les règles et plafonds en vigueur.

- Mis les dépens à la charge de la liquidation judiciaire de la société GLI.

Par arrêt du 9 mars 2022, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 17 juin 2020 mais seulement en ce qu'il déclarait irrecevables comme étant prescrites les demandes de M. [S] au titre des heures supplémentaires et repos compensateurs pour les années 2009 à 2012, le déboutait de sa demandes en résiliation judiciaire de son contrat de travail et de ses demandes consécutives en fixation de sa créance de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, d'indemnité compensatrice de préavis et d'indemnité de licenciement, outre les congés payés afférents à ces sommes et a renvoyé les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée.

Parallélement, la société Gaz Liquéfiés Industries a été placée en redressement judiciaire le 25 juillet 2019. Sa liquidation judiciaire a été prononcée le 10 janvier 2020.

Le 15 mars 2022, M. [S] a saisi la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

A l'issue de ses dernières conclusions déposées à l'audience de plaidoiries du 3 janvier 2023, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, M. [S] demande de':

- Recevoir l'appel comme étant régulier en la forme et juste au fond';

- Réformer la décision entreprise en toutes ses dispositions';

- Fixer sa créance à la liquidation judiciaire de la SAS GLI aux sommes suivantes':

- 5'904,72 euros, à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre congés payés afférents à hauteur de 590,47'€';

- 3.031,82'€ à titre de repos compensateur pour les heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent autorisé, outre incidence congés payés à hauteur de 303,18'€,

- Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la SAS GLI';

- En conséquence, fixer sa créance à la liquidation judiciaire de la SAS GLI aux sommes suivantes':

- 40.000'€ à titre de dommages intérêts pour rupture abusive du contrat de travail au visa de l'ancien article L1235-3 du code du travail';

- 3.661,32'€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis';

- 366,13'€ à titre d'incidence congés payés sur préavis';

- 14.043,18'€ à titre d'indemnité de licenciement';

- 1.037,37'€ à titre d'indemnités compensatrice de congés payés';

- Ordonner la remise d'une attestation Pôle Emploi et d'un certificat de travail conformes aux dispositions de la décision à intervenir, sous astreinte de 100'€ par jour de retard à compter de sa notification';

- Fixer sa créance à la liquidation judiciaire de la SAS GLI à la somme 2.500'€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

- Déclarer la décision intervenir opposable au CGEA';

- Dire et juger que le CGEA devra sa garantie selon les règles et plafonds en vigueur.

M. [S] soutient que le délai de prescription de son action en rappel sur heures supplémentaires a été interrompu par la saisine du conseil de prud'hommes le 20 décembre 2013 et que, compte tenu des dispositions transitoires de la loi du 14 juin 2013 ayant réduit de cinq ans à trois ans la prescription applicable à l'action en paiement des salaires, il pouvait solliciter un rappel sur heures supplémentaires à compter du 20 décembre 2008.

Il affirme, sur le fond, que les feuilles de travail qu'il émargeait démontrent que l'intégralité des heures supplémentaires qui lui étaient dues n'était pas rémunérées.

Il affirme en outre que les heures supplémentaires accomplies en 2011 et 2012 ont excédé le plafond de 220 heures annuel ouvrant droit à une contrepartie obligatoire en repos

Il soutient enfin que les manquements commis par la société Gaz Liquéfiés Industries en matière de rémunération sont nombreux, graves et répétés et justifient en conséquence la résiliation judiciaire du contrat de travail dont la date devra être fixée au 10 janvier 2020, date de la liquidation judiciaire de la SAS GLI.

Selon ses dernières conclusions déposées à l'audience de plaidoiries du 3 janvier 2023, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, la société Gaz Liquéfiés Industries, prise en la personne de ses co-liquidateurs, demande de':

- dire et juger qu'elle n'a commis aucun manquement et rejeter la demande de résiliation judiciaire';

- dire et juger que M. [S] a été rempli de l'intégralité de ses droits';

en conséquence';

- declarer irrecevable et à tout le moins mal fondée la demande de M. [S] en rappel d'heures supplémentaires et de repos compensateurs';

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Arles qui a écarté la demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail';

- condamner M. [S] à la somme de 2'500'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

La société Gaz Liquéfiés Industries s'oppose à la demande de M. [S] en rappel sur heures supplémentaires et repos compensateur aux motifs qu'il appartient au salarié, qui réclame des heures supplémentaires, de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande, lesquels doivent être suffisamment précis et sérieux quant aux horaires effectivement réalisés et indiquer obligatoirement pour chaque journée de travail les horaires qu'il prétend avoir réalisés.

Elle soutient que la demande de M. [S] au titre du repos compensateur est irrecevable car nouvelle en cause d'appel et qu'elle ne bénéficie pas des exceptions prévues par les articles 564 et 566 du code de procédure civile puisque sa demande en rappel sur heures supplémentaires devant le conseil de prud'hommes ne concernait qu'une régularisation des heures supplémentaires contractualisées par rapport à une diminution du taux horaire.

Elle fait valoir que M. [S] avait les mêmes horaires depuis plusieurs années, qu'ils étaient validés par son relevé hebdomadaire, que les heures supplémentaires accomplies étaient payées, que M. [S] n'a jamais revendiqué d'heures supplémentaires pendant la relation de travail, que seules peuvent donner lieu à rémunération les heures supplémentaires accomplies à la demande de l'employeur ou avec son accord, qu'il n'est pas justifié que les heures supplémentaires invoquées ont été accomplies avec l'accord de l'employeur ou qu'elles avaient été rendues nécessaires par les tâches à accomplir par le salarié et que les relevés de M. [S] n'ont pas été validés par sa hiérarchie et comprennent des incohérences, à savoir la prise en compte de périodes de suspension du contrat de travail.

Elle estime par ailleurs que les calculs opérés par M. [S] concernant le repos compensateur sont erronés.

Elle s'oppose par ailleurs à la résiliation judiciaire du contrat de travail réclamée par M. [S] aux motifs qu'aucun manquement ne peut lui être reproché, que dans son arrêt du 17 juin 2020, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a écarté le grief tiré d'une violation du principe à travail égal-salaire égal, que cette question n'a pas été remise en cause par la Cour de cassation, que les demandes de M. [S] à titre de rappel sur heures supplémentaires et repos compensateur sont irrecevables et, à tout le moins, mal fondées, que M. [S] a poursuivi sa collaboration avec elle pendant des années sans jamais évoquer les manquements qu'il a invoqué pour la première fois en 2012, que le non-paiement des heures supplémentaires et du repos compensateur est évoqué pour la première fois en 2019 et que l'absence de réaction de M. [S] pendant des années permet de constater que les prétendus manquements n'étaient pas suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

A l'issue de ses dernières conclusions déposées à l'audience de plaidoiries du 3 janvier 2023, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, l'AGS-CGEA demande de':

- Débouter M. [S] des fins de son appel et de ses demandes après arrêt de renvoi de la Cour de cassation du 02/03/2022';

- Confirmer le jugement du conseil des prud'hommes d'Arles du 02/02/2015';

Subsidiairement,

- Constater et fixer les créances de M. [S] en fonction des justificatifs produits';

- à défaut débouter M. [S] de ses demandes';

- Fixer en tant que de besoin l'indemnité compensatrice de préavis (L. 1234-1 et L.1234-5 du code du travail), l'indemnité compensatrice de congés payés (L. 3143-24 et suivants du code du travail) et l'indemnité de licenciement (L. 1234-9 du code du travail)';

- Débouter l'appelant de sa demande 40.000'€ à titre de dommages intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, dès lors qu'il ne rapporte pas la preuve d'un préjudice d'un pareil montant';

- Débouter toute partie de toute demande de garantie sur la totalité de ses créances, dès lors qu'en application de l'article L. 3253-17 du code du travail, la garantie AGS est limitée, toutes sommes et créances avancées confondues, à un ou des montants déterminés par décret (art. l'article D.3253-5 du code du travail), en référence au plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions du régime d'assurance chômage, et inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale, ou d'origine conventionnelle imposées par la loi';

- Débouter toute partie de toute demande de paiement directement formulée contre l'AGS dès lors que l'obligation de l'UNEDIC-AGS CGEA IDF Ouest de faire l'avance de montant total des créances définies aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail, compte tenu du plafond applicable (articles L. 3253-17 et D. 3253-5), ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé de créances par le mandataire judiciaire conformément aux articles L. 3253-19 et suivants du code du travail';

- Débouter toute partie de toutes demandes au titre des frais irrépétibles visés à l'article 700 du code de procédure civile, des dépens, de l'astreinte, des cotisations patronales ou résultant d'une action en responsabilité, dès lors qu'elles n'entrent pas dans le cadre de la garantie de l'UNEDIC-AGS CGEA IDF Ouest';

- Débouter toute partie de toute demande accessoire au titre des intérêts dès lors que le jugement d'ouverture de la procédure collective opère arrêt des intérêts légaux et conventionnels (art. L. 622-28 du code de commerce)';

- Condamner M. [S] aux entiers dépens.

Pour s'opposer aux demandes de M. [S], l'AGS-CGEA fait valoir que les feuilles d'émargement qu'il verse aux débats ne sont pas contresignées par l'employeur, que, concernant les repos compensateurs, la jurisprudence retient que si l'employeur a tenu son salarié dans l'ignorance de ce droit ou ne lui a pas permis de l'exercer, ce dernier peut solliciter des dommages et intérêts, que, cependant, les repos doivent être pris dans les deux mois de l'ouverture du droit et au plus tard dans l'année, qu'il convient donc de débouter M. [S] des fins de son appel sur ce point et, en tout état de cause, que M. [S] ne justifie pas des sommes réclamées à titre de dommages-intérêts.

L'AGS-CGEA s'oppose en outre à la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail aux motifs que le montant des ajustements de rappel de salaires et accessoires n'a pas empêché la poursuite du contrat.

Elle conclut au débouté de M. [S] de sa demande en paiement de la somme de 40'000'euros pour rupture abusive du contrat de travail, dès lors qu'il ne rapporte pas la preuve d'un préjudice d'un pareil montant.

Elle fait enfin valoir qu'en l'absence de conversion du jugement de redressement judiciaire en liquidation judiciaire, les créances de salaires postérieures au jugement d'ouverture de la procédure collective de l'employeur sont hors garantie, que lorsque le tribunal prononce la liquidation judiciaire, l'AGS prend en charge, dans la limite d'un montant maximal correspondant à un mois et demi de travail, les sommes dues visées à l'article L.3253-68, 5° du code du travail, que la garantie AGS s'applique aux indemnités de rupture lorsque celle-ci a été notifiée soit par le mandataire judiciaire, soit par l'administrateur judiciaire, soit par le commissaire à l'exécution du plan soit par le liquidateur dans l'une des périodes définies à l'article L. 3253-8, 2°, 3°, 4° du code du travail, que son obligation de faire l'avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail, compte tenu du plafond applicable (articles L. 3253-17 et D. 3253-5), ne peut s'exécuter que sur présentation d'un relevé de créances par le mandataire judiciaire conformément aux articles L.3253-19 et suivants du code du travail, qu'en application de l'article L. 3253-17 du code du travail, la garantie AGS est limitée, toutes sommes et créances avancées confondues, à un ou des montants déterminés par décret (D 3253-5du code du travail), en référence au plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions du régime d'assurance chômage, et inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale, ou d'origine conventionnelle imposées par la loi et que ne sont pas garanties les demandes au titre des frais irrépétibles visés à l'article 700 du code de procédure civile, des dépens, de l'astreinte, des cotisations patronales ou résultant d'une action en responsabilité ne rentrent pas dans le champ d'application de l'article L. 3253-6 du code du travail.

SUR CE':

les heures supplémentaires

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre'd'heures'de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des'heures'de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre'd'heures'de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux'heures'non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des'heures'de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence'd'heures'supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, M.[S] produit aux débats un tableau récapitulant, semaine par semaine, les heures supplémentaires impayées dont il réclame le paiement pour la période 2009-2014.

Ce faisant, M.[S] présente des éléments suffisamment précis quant aux'heures'non rémunérées dont le paiement est réclamé permettant à son ex-employeur, chargé d'assurer le contrôle des'heures'de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Ce tableau est étayé par des relevés d'heures, réalisées chaque semaine pour la période 2009-2014, sur un formulaire établi à l'entête de la société Gaz Liquéfiés Industries et détaillant, pour chaque jour de la semaine, les heures de prise et de fin de service du salarié le matin et l'après-midi et la durée de la pause déjeuner. M.[S] produit en outre aux débats ses bulletins de salaire pour la période visée par sa demande en rappel de salaire.

De son côté, la société Gaz Liquéfiés Industries verse aux débats la liste de certains de ses salariés, dont M.[S], bénéficiant d'heures supplémentaires contractualisées, la copie de trois relevés hebdomadaires d'activité de M.[S], signé par le supérieur hiérarchique de ce dernier (semaines 10 et 23 de l'année 2012 et semaine 3 de l'année 2013) et un tableau récapitulant les heures supplémentaires payées à M.[S] en 2013.

Il est exact que les relevés hebdomadaires versés à l'instance par M.[S] ne sont signés que par ce dernier et ne comprennent pas la signature, pour validation, de son supérieur hiérarchique. Cependant, il convient de relever que les trois relevés produits par la société Gaz Liquéfiés Industries et validés par celle-ci sont similaires aux relevés de M.[S]. Par ailleurs, la société Gaz Liquéfiés Industries, chargée d'établir les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective pour M.[S] ne produit pas à l'instance l'intégralité des relevés hebdomadaires pour la période 2009-2014 qu'elle a validé et sur la base desquelles elle a payé à M.[S] les heures supplémentaires accomplies excédant le nombre d'heures contractualisées.

Il est de principe que le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l'accord au moins implicite de l'employeur, soit s'il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.

En l'état des décomptes hebdomadaires et bulletins de salaire invoqués par M.[S], il apparaît que ce dernier a réalisé pour le compte de la société Gaz Liquéfiés Industries des heures supplémentaires rendues nécessaires par les tâches qui lui avaient été confiées et qui n'ont pas été réglées.

Il est en conséquence fondé à solliciter la fixation de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Gaz Liquéfiés Industries à la somme de 5'904,72 euros, à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 590,47'euros au titre des congés payés afférents.

Sur la contrepartie obligatoire en repos':

L'article R.'1452-7 du code du travail, qui permettait, par dérogation au droit commun de l'appel, de présenter des demandes nouvelles en appel en matière prud'homale, a été abrogé, pour les instances introduites devant les conseils de prud'hommes à compter du 1er août 2016, par le décret 2016-660 du 20 mai 2016.

M.[S], qui a saisi le conseil de prud'hommes d'Arles le 20 décembre 2013, est donc recevable, en cause d'appel, à former pour la première fois une demande au titre de la contrepartie obligatoire en repos.

Il ressort du tableau précité, des relevés hebdomadaires et des bulletins de salaire de M.[S] qu'il a réalisé 331 heures supplémentaires en 2011 et 318 heures supplémentaires en 2012.

Il n'est pas établi que M.[S] a bénéficié, pour les heures supplémentaires excédant le contingent annuel de 220 heures, de la contrepartie obligatoire en repos régie par les articles L.'3121-11 et D.3121-14-1 du code du travail dans leur rédaction en vigueur en 2011 et 2012.

Il est de principe que l'accomplissement d'heures supplémentaires au delà du contingent, ouvre droit au profit du salarié au paiement d'une indemnité au titre de la la perte des contreparties obligatoires en repos auxquelles ouvraient droit les heures supplémentaires accomplies. Les sommes allouées de ce chef à M.[S], par leur nature indemnitaire, ne peuvent être génératrices de congés payés. Il sera alloué à M.[S] la somme de 1'200'euros pour l'année 2011 et celle de 1'100'euros pour l'année 2012.

Sur la résiliation':

Il est de jurisprudence constante que le salarié peut obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail en cas de manquement grave de l'employeur à ses obligations de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

Il ressort du jugement du conseil de prud'hommes du 2 février 2015, des dispositions non-cassées de l'arrêt du 17 juin 2020 et des termes du présent arrêt qu'il est établi que':

- M.[S] a fait l'objet d'un avertissement injustifié prononcé le 15 avril 2013,

- la société Gaz Liquéfiés Industries a modifié unilatéralement le taux horaire de M.[S], le réduisant de 11,09'euros à 10,07'euros, justifiant ainsi sa condamnation à lui payer un rappel de salaire de 6.516,30'€ de janvier 2013 à juin 2016 et de 1.962,69'€ à titre de rappel d'heures supplémentaires contractualisées, outre les congés payés afférents à ces deux condamnations,

- M.[S] n'a pas été réglé des heures supplémentaires accomplies entre 2009 et 2014 pour un montant de 5'904,72 euros, outre les congés payés afférents,

- M.[S] n'a pas bénéficié, en 2011 et 2012, de la contrepartie obligatoire en repos due pour les heures supplémentaires excédant le contingent annuel de 220 heures.

M.[S] a sollicité la résiliation judiciaire de son contrat de travail en 2019. Les faits précités ont été commis entre 2009 et 2014. Le délai écoulé et le montant des sommes en jeu ne permettent pas de caractériser un manquement grave de l'employeur de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail. M.[S] sera en conséquence débouté de sa demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail et de ses demandes indemnitaires connexes.

sur les mesures accessoires':

Il a été partiellement fait droit aux demandes de M.[S], la société Gaz Liquéfiés Industries sera en conséquence déboutée de sa demande au titre de ses frais irrépétibles.

Enfin, il sera alloué à M.[S] la somme de 2'000'euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement,

FIXE la créance de M.[S] au passif de la liquidation judiciaire de la société Gaz Liquéfiés Industries aux sommes suivantes':

- 5'904,72 euros, à titre de rappel d'heures supplémentaires pour la période 2009-2014';

- 590,47'euros au titre des congés payés afférents';

- 1'200'euros à titre de dommages-intérêts pour la contrepartie obligatoire en repos due au titre des heures supplémentaires accomplies en 2011';

- 1'100'euros à titre de dommages-intérêts pour la contrepartie obligatoire en repos due au titre des heures supplémentaires accomplies en 2012';

- 2'000'euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

EXCLUT de la garantie de l'AGS-CGEA les sommes allouées à M.[S] à titre au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

FIXE les créances en quittance ou deniers';

DIT que l'AGS-CGEA ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L.'3253-6 à 8 du code du travail que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L.'3253-15 et L.'3253-17 du code du travail';

DIT que la garantie de l'AGS-CGEA est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l'article D.'3253-5 du code du travail';

DIT que l'obligation de l'AGS-CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement';

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes';

DIT que les dépens seront employés en frais de la procédure de liquidation judiciaire de la société Gaz Liquéfiés Industries.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-6
Numéro d'arrêt : 22/03837
Date de la décision : 10/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-10;22.03837 ?
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